University of Minnesota


Principes pour la protection des personnes atteintes de maladie mentale et pour l'amélioration des soins de santé, A.G. res. 46/119, 46 GAORSupp. (No. 49) à 189, U.N. Doc. A/46/49 (1991).


Application

Les présents Principes seront appliqués sans discrimination d'aucune sorte fondée sur l'invalidité, la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l'origine nationale, ethnique ou sociale, la situation juridique ou sociale, l'âge, la fortune ou la naissance.

Définitions

Dans les présents Principes :

L'expression "autorité indépendante" désigne une autorité compétente et indépendante prévue par la législation nationale;

Le terme "conseil" désigne un représentant qualifié, légal ou autre;

L'expression "organe de révision" désigne l'organe créé en application du Principe 17 pour examiner le placement ou le maintien d'office d'un patient dans un service de santé mentale;

Le terme "patient" désigne une personne qui reçoit des soins de santé mentale et s'entend de toutes les personnes qui sont admises dans un service de santé mentale;

L'expression "praticien de santé mentale" désigne un médecin, un psychologue clinicien, un infirmier (une infirmière), un(e) travailleur(euse) social(e) ou toute autre personne dûment formée et qualifiée, ayant des compétences particulières en matière de soins de santé mentale;

L'expression "représentant personnel" désigne une personne à qui incombe en droit le devoir de représenter les intérêts d'un patient dans tout domaine déterminé ou d'exercer des droits déterminés en son nom, et s'entend notamment du parent ou du représentant légal d'un mineur, à moins que la législation nationale n'en dispose autrement;

L'expression "service de santé mentale" désigne tout établissement ou toute unité d'un établissement qui se consacre principalement aux soins de santé mentale;

L'expression "soins de santé mentale" s'entend notamment de l'analyse de l'état mental d'une personne et du diagnostic porté en l'espèce, ainsi que du traitement, des soins et de la réadaptation dispensés en cas de maladie mentale ou de soupçon de maladie mentale.

Clause générale de réserve

L'exercice des droits énoncés dans les présents Principes ne peut être soumis qu'aux limitations qui sont prévues par la loi et qui sont nécessaires pour protéger la santé ou la sécurité de l'intéressé ou d'autrui, ou pour protéger la sécurité, l'ordre, la santé ou la moralité publics ou les libertés et droits fondamentaux d'autrui.

 

Principe 1

Libertés fondamentales et droits de base

1. Toute personne a droit aux meilleurs soins de santé mentale disponibles, dans le cadre du système de santé et de protection sociale.

2. Toute personne atteinte de maladie mentale ou soignée comme telle doit être traitée avec humanité et dans le respect de la dignité inhérente à la personne humaine.

3. Toute personne atteinte de maladie mentale ou soignée comme telle a le droit d'être protégée contre toute forme d'exploitation économique, sexuelle ou autre, contre les mauvais traitements physiques ou autres et contre les traitements dégradants.

4. Aucune discrimination fondée sur la maladie mentale n'est admise. Le mot "discrimination" s'entend de tout traitement différent, exclusif ou préférentiel ayant pour effet de supprimer l'égalité de droits ou d'y faire obstacle. Les mesures spéciales visant uniquement à protéger les droits des personnes atteintes de maladie mentale ou à améliorer leur état ne doivent pas être considérées comme ayant un caractère discriminatoire. Il n'y a pas discrimination en cas de traitement différent, exclusif ou préférentiel conforme aux dispositions des présents Principes et nécessaire pour protéger les droits de l'homme d'une personne atteinte de maladie mentale ou de toute autre personne.

5. Toute personne atteinte de maladie mentale a le droit d'exercer tous les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels reconnus dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et d'autres instruments pertinents tels que la Déclaration des droits des personnes handicapées et l'Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d'emprisonnement.

6. Toute décision selon laquelle, en raison de sa maladie mentale, une personne n'a pas la capacité juridique et toute décision selon laquelle, en conséquence de cette incapacité, un représentant personnel sera nommé, ne sera prise qu'après que la cause aura été entendue équitablement par un tribunal indépendant et impartial institué par la législation nationale. La personne dont la capacité est en cause a le droit d'être représentée par un conseil. Si la personne dont la capacité est en cause ne s'assure pas elle-même les services d'un tel représentant, ce représentant sera mis à sa disposition sans frais dans la mesure où elle n'a pas les moyens suffisants pour rétribuer ses services. Le conseil ne doit pas représenter dans la même procédure un service de santé mentale ou son personnel et ne doit pas non plus représenter un membre de la famille de la personne dont la capacité est en cause, à moins que le tribunal n'ait la conviction qu'il n'y a pas de conflit d'intérêts. Les décisions concernant la capacité et la nécessité d'un représentant personnel doivent être réexaminées à des intervalles raisonnables prescrits par la législation nationale. La personne dont la capacité est en cause, son représentant personnel, le cas échéant, et toute autre personne intéressée auront le droit de faire appel des décisions en question devant un tribunal supérieur.

7. Quand un tribunal ou un autre organe judiciaire compétent constate qu'une personne atteinte d'une maladie mentale est incapable de gérer ses propres affaires, des mesures sont prises pour protéger ses intérêts pour autant qu'il soit jugé nécessaire et approprié compte tenu de l'état de cette personne.

 

Principe 2

Protection des mineurs

Aux fins des présents Principes et dans le cadre des dispositions de droit interne relatives à la protection des mineurs, il y a lieu de veiller à protéger les droits des mineurs et de désigner notamment, si nécessaire, un représentant légal autre qu'un membre de la famille.

 

Principe 3

Vie au sein de la société

Toute personne atteinte de maladie mentale a, dans la mesure du possible, le droit de vivre et de travailler au sein de la société.

 

Principe 4

Décision de maladie mentale

1. Il ne peut être décidé qu'une personne est atteinte de maladie mentale que conformément aux normes médicales acceptées sur le plan international.

2. La décision de maladie mentale ne doit jamais se fonder sur des considérations politiques, économiques ou de situation sociale, ni d'appartenance à un groupe culturel, racial ou religieux, ni sur aucune autre considération n'ayant pas de rapport direct avec l'état de santé mentale.

3. Les conflits familiaux ou professionnels, ou la non-conformité aux valeurs morales, sociales, culturelles ou politiques ou aux convictions religieuses prévalant dans la société à laquelle une personne appartient ne doivent jamais être des facteurs déterminants dans le diagnostic de maladie mentale.

4. Le fait qu'une personne ait été soignée ou hospitalisée dans le passé ne peut en lui-même justifier un diagnostic présent ou futur de maladie mentale.

5. Nul individu ou autorité ne peut classer une personne comme atteinte de maladie mentale, ni autrement indiquer que cette personne est atteinte d'une telle maladie, si ce n'est à des fins directement liées à la maladie mentale ou à ses conséquences.

Principe 5

Examen médical

Nul ne sera astreint à subir un examen médical pour déterminer s'il est ou non atteint de maladie mentale, si ce n'est en application d'une procédure autorisée par la législation nationale.

Principe 6

Confidentialité

Le droit à la confidentialité des renseignements concernant toutes les personnes auxquelles s'appliquent les présents Principes doit être respecté.

Principe 7

Rôle de la société et de la culture

1. Tout patient a, dans la mesure du possible, le droit d'être traité et soigné dans le milieu où il vit.

2. Lorsque le traitement est dispensé dans un service de santé mentale, tout patient a le droit, chaque fois que cela est possible, de le suivre à proximité de son domicile ou du domicile de membres de sa famille ou d'amis, et de retourner dès que possible dans son milieu de vie.

3. Tout patient a droit à un traitement adapté à son milieu culturel.

Principe 8

Normes de soins

1. Tout patient a droit à des soins et à une protection sociale appropriés aux besoins de sa santé, et à des soins et des traitements conformes aux mêmes normes que les autres malades.

2. Tout patient doit être protégé des atteintes que pourraient lui causer notamment les médicaments injustifiés, les mauvais traitements provenant d'autres patients, du personnel du service ou d'autres personnes, ou les autres actes de nature à entraîner une souffrance mentale ou physique.

Principe 9

Traitement

1. Tout patient a le droit d'être traité dans l'environnement le moins restrictif possible et selon le traitement le moins restrictif ou portant atteinte à l'intégrité du patient répondant à ses besoins de santé et à la nécessité d'assurer la sécurité physique d'autrui.

2. Le traitement et les soins dispensés au patient doivent se fonder sur un programme individuel discuté avec lui, régulièrement revu, modifié le cas échéant, et appliqué par un personnel spécialisé qualifié.

3. Les soins de santé mentale doivent, toujours, être dispensés conformément aux normes d'éthique applicables aux praticiens de santé mentale, y compris aux normes acceptées sur le plan international, telles que les principes d'éthique médicale adoptés par l'Assemblée générale des Nations Unies. Il ne doit jamais être abusé des connaissances et des méthodes de soins de santé mentale.

4. Le traitement de tout patient doit tendre à préserver et à renforcer son autonomie personnelle.

Principe 10

Médicaments

1. Les médicaments doivent répondre au mieux aux besoins de santé du patient, être dispensés uniquement à des fins thérapeutiques et de diagnostic, et jamais à titre de châtiment ou pour la commodité d'autrui. Sous réserve des dispositions du paragraphe 15 du Principe 11, les praticiens de santé mentale doivent prescrire uniquement des médicaments dont l'efficacité est connue ou démontrée.

2. Tous les médicaments doivent être prescrits par un praticien de santé mentale, légalement habilité, et inscrits au dossier du patient.

Principe 11

Consentement au traitement

1. Aucun traitement ne doit être administré à un patient sans qu'il y ait donné son consentement en connaissance de cause, sous réserve des cas prévus aux paragraphes 6, 7, 8, 13 et 15.

2. Par consentement en connaissance de cause, on entend le consentement librement donné, en l'absence de toute menace ou manoeuvre, et après des explications suffisantes et compréhensibles données au patient, sous une forme et dans un langage qui lui sont accessibles, sur :

a) Le processus de diagnostic;

b) Le but, les méthodes, la durée probable et les bénéfices escomptés du traitement proposé;

c) Les autres modes de traitement possibles, y compris les modes de traitement portant moins atteinte à l'intégrité du patient;

d) Les douleurs et désagréments pouvant résulter du traitement, ses risques éventuels et ses effets secondaires.

3. Le patient peut demander la présence d'une personne ou de plusieurs personnes de son choix au cours de la procédure requise pour l'octroi du consentement.

4. Le patient a le droit de refuser le traitement ou d'y mettre fin, excepté dans les cas prévus aux paragraphes 6, 7, 8, 13 et 15 ci-dessous. Les conséquences de ce refus ou de cet arrêt doivent lui être expliquées.

5. Le patient ne doit jamais être invité ou encouragé à renoncer au droit de donner son consentement en connaissance de cause. Si le patient manifeste l'intention de renoncer à ce droit, il lui sera expliqué que le traitement ne peut pas être dispensé sans son consentement donné en connaissance de cause.

6. Excepté dans les cas prévus aux paragraphes 7, 8, 12, 13, 14 et 15 ci-dessous, le traitement proposé peut être dispensé au patient sans son consentement donné en connaissance de cause, si les conditions ci-après sont remplies :

a) Que le patient ne soit pas un patient volontaire au moment considéré;

b) Qu'une autorité indépendante, ayant en sa possession tous les éléments d'information nécessaires, y compris les éléments indiqués au paragraphe 2 ci-dessus, soit convaincue que le patient n'a pas, au moment considéré, la capacité de donner ou de refuser son consentement en connaissance de cause au traitement proposé, ou si la législation nationale le prévoit, que, eu égard à la sécurité du patient ou à celle d'autrui, le patient refuse déraisonnablement son consentement; et

c) Que l'autorité indépendante soit convaincue que le traitement proposé répond au mieux aux besoins de la santé du patient.

7. Le paragraphe 6 ci-dessus ne s'applique pas à un patient ayant un représentant personnel habilité par la loi à consentir au traitement en son nom, étant entendu toutefois que, dans les cas prévus aux paragraphes 12, 13, 14 et 15 ci-dessous, le traitement peut être administré audit patient sans son consentement donné en connaissance de cause si son représentant personnel, après avoir eu connaissance des éléments d'information indiqués au paragraphe 2 ci-dessus, y consent en son nom.

8. Excepté dans les cas prévus aux paragraphes 12, 13, 14 et 15 ci-dessous, le traitement peut également être dispensé à un patient sans son consentement donné en connaissance de cause si un praticien de santé mentale qualifié, habilité par la loi, conclut que ce traitement est urgent et nécessaire pour prévenir un dommage immédiat ou imminent au patient ou à autrui. Ce traitement ne doit durer que le temps strictement nécessaire à cet effet.

9. Lorsqu'un traitement est autorisé sans le consentement du patient donné en connaissance de cause, tout est fait néanmoins pour tenter d'informer le patient de la nature du traitement et de tout autre mode de traitement possible, et pour faire participer le patient dans la mesure du possible à l'application du traitement.

10. Tout traitement est immédiatement inscrit dans le dossier du patient, avec mention de son caractère volontaire ou non volontaire.

11. La contrainte physique ou l'isolement d'office du patient ne doivent être utilisés que conformément aux méthodes officiellement approuvées du service de santé mentale, et uniquement si ce sont les seuls moyens de prévenir un dommage immédiat ou imminent au patient ou à autrui. Le recours à ces mesures ne doit durer que le temps strictement nécessaire à cet effet. Toutes les mesures de contrainte physique ou d'isolement d'office, les raisons qui les motivent, leur nature et leur étendue, doivent être inscrites dans le dossier du patient. Tout patient soumis à la contrainte physique ou à l'isolement d'office doit bénéficier de conditions humaines et être soigné et régulièrement et étroitement surveillé par un personnel qualifié. Dans le cas d'un patient ayant un représentant personnel, celui-ci est avisé sans retard, le cas échéant, de toute mesure de contrainte physique ou d'isolement d'office.

12. La stérilisation ne doit jamais être appliquée en tant que traitement des maladies mentales.

13. Une personne atteinte de maladie mentale ne peut subir d'intervention médicale ou chirurgicale importante que si la législation nationale le permet, si l'on considère qu'elle répond à l'intérêt supérieur du patient et si celui-ci y donne son consentement en connaissance de cause; lorsque le patient n'est pas en mesure de donner son consentement en connaissance de cause, l'intervention ne doit être autorisée qu'après un examen indépendant.

14. La psychochirurgie et les autres traitements portant atteinte à l'intégralité du patient et irréversibles applicables en cas de maladie mentale ne doivent jamais être appliqués à un patient non volontaire d'un service de santé mentale et dans la mesure où la législation nationale les autorise, ils ne peuvent être appliqués à tout autre patient que si celui-ci y a donné son consentement en connaissance de cause et si un organisme extérieur et indépendant se déclare convaincu que le consentement du patient a été réellement donné en connaissance de cause et que ce traitement répond à l'intérêt supérieur du patient.

15. Les essais cliniques et les traitements expérimentaux ne doivent jamais être menés sur un patient sans son consentement donné en connaissance de cause, étant entendu cependant qu'un patient qui n'est pas capable de donner un tel consentement peut faire l'objet d'un essai clinique ou d'un traitement expérimental particulier mais uniquement après examen et approbation d'un organisme indépendant et compétent spécialement constitué à cette fin.

16. Dans les cas visés aux paragraphes 6, 7, 8, 13, 14 et 15 ci-dessus, le patient ou son représentant personnel ou toute personne intéressée ont, à l'égard de tout traitement auquel le patient est soumis, le droit de présenter un recours auprès d'un organe judiciaire ou d'une autre autorité indépendante.

 

Principe 12

Notification des droits

1. Dès son admission dans un service de santé mentale, tout patient doit être informé dès que possible, sous une forme et dans un langage qu'il peut comprendre, de tous ses droits conformément aux présents Principes et en vertu de la législation nationale, et cette information sera assortie d'une explication de ces droits et des moyens de les exercer.

2. Si le patient n'est pas capable de comprendre ces informations, et tant que cette incapacité durera, ses droits seront portés à la connaissance de son représentant personnel le cas échéant, et de la personne ou des personnes qui sont les mieux à même de représenter ses intérêts et qui sont disposées à le faire.

3. Un patient qui en a la capacité a le droit de désigner la personne qui sera informée en son nom, ainsi que la personne chargée de représenter ses intérêts auprès des autorités du service.

 

Principe 13

Droits et conditions de vie dans les services de santé mentale

1. Tout patient admis dans un service de santé mentale a droit, en particulier, au plein respect de :

a) La reconnaissance en droit en tant que personne en toutes circonstances;

b) La vie privée;

c) La liberté de communication, notamment avec d'autres personnes dans le service; la liberté d'envoyer et de recevoir des communications privées sans aucune censure; la liberté de recevoir des visites privées d'un conseil ou d'un représentant personnel et, chaque fois que cela est raisonnable, d'autres visiteurs; et la liberté d'accès aux services postaux et téléphoniques ainsi qu'aux journaux, à la radio et à la télévision;

d) La liberté de religion ou de conviction.

2. L'environnement et les conditions de vie dans les services de santé mentale doivent être aussi proches que possible de la vie normale des personnes d'un âge correspondant, et notamment comprendre :

a) Des installations pour les loisirs;

b) Des moyens d'éducation;

c) Des possibilités d'acheter ou de recevoir les articles nécessaires à la vie quotidienne, aux loisirs et à la communication;

d) Des moyens permettant au patient de se livrer à des occupations actives adaptées à son milieu social et culturel, des encouragements à user de ces moyens, et des mesures de réadaptation professionnelle de nature à faciliter sa réinsertion dans la société. Il devrait être prévu à ce titre des services d'orientation et de formation professionnelle ainsi que de placement pour permettre aux patients de trouver ou de conserver un emploi dans la société.

3. En aucun cas le patient ne peut être soumis à un travail forcé. Dans la mesure où les besoins du patient et les exigences de l'administration des établissements le permettent, un patient peut choisir le type de travail auquel il souhaite se livrer.

4. Le travail effectué par un patient dans un service de santé mentale ne doit pas donner lieu à exploitation. Tout patient a droit, pour tout travail effectué par lui, à la même rémunération que celle qu'une personne extérieure recevrait pour un travail identique selon les lois ou les coutumes du pays. Le patient a en toutes circonstances le droit de recevoir une part équitable de toute rémunération versée au service de santé mentale pour son travail.

Principe 14

Ressources des services de santé mentale

1. Les services de santé mentale doivent disposer du même niveau de ressources que tout autre établissement de santé, notamment :

a) Un personnel médical et un personnel spécialisé qualifié et en nombre suffisant, et un espace suffisant pour respecter la vie privée des patients et leur offrir des thérapies appropriées et actives;

b) Un matériel de diagnostic et de soins aux patients;

c) Des soins spécialisés appropriés; et

d) Des moyens de traitement adéquats, réguliers et complets, y compris en fournitures de médicaments.

2. Tout service de santé mentale doit être inspecté par les autorités compétentes avec une fréquence suffisante pour veiller à ce que les conditions de vie et de traitement des patients et les soins qui leur sont dispensés soient conformes aux présents Principes.

 

Principes 15

Principes de placement

1. Si un patient a besoin d'être soigné dans un service de santé mentale, tout doit être fait pour éviter qu'il n'y soit placé d'office.

2. L'admission dans un service de santé mentale est administrée de la même manière que l'admission dans tout autre service pour toute autre maladie.

3. Tout patient qui n'est pas placé d'office dans un service de santé mentale a le droit de le quitter à tout moment, à moins que ne soient réunies les conditions justifiant son maintien d'office, telles que prévues au Principe 16, et il doit être informé de ce droit.

 

Principe 16

Placement d'office

1. Une personne a) ne peut être placée d'office dans un service de santé mentale; b) ou, ayant déjà été admise volontairement dans un service de santé mentale, ne peut y être gardée d'office, qu'à la seule et unique condition qu'un praticien de santé mentale qualifié et habilité à cette fin par la loi décide, conformément au Principe 4, que cette personne souffre d'une maladie mentale et considère :

a) Que, en raison de cette maladie mentale, il y a un risque sérieux de dommage immédiat ou imminent pour cette personne ou pour autrui;

b) Ou que, dans le cas d'une personne souffrant d'une grave maladie mentale et dont le jugement est atteint, le fait de ne pas placer ou garder d'office cette personne serait de nature à entraîner une grave détérioration de son état ou empêcherait de lui dispenser un traitement adéquat qui ne peut être administré que par placement dans un service de santé mentale conformément au principe de la solution la moins contraignante.

Dans le cas visé à l'alinéa b), un deuxième praticien de santé mentale répondant aux mêmes conditions que le premier et indépendant de celui-ci est consulté si cela est possible. Si cette consultation a lieu, le placement ou le maintien d'office du patient ne peut se faire qu'avec l'assentiment de ce deuxième praticien.

2. La mesure de placement ou de maintien d'office est prise initialement pour une brève période prévue par la législation nationale aux fins d'observation et de traitement préliminaire, en attendant que la décision de placement ou de maintien d'office du patient soit examinée par l'organe de révision. Les raisons du placement sont communiquées sans retard au patient, de même que le placement et les raisons qui le motivent sont aussi communiqués sans délai à l'organe de révision, au représentant personnel du patient, s'il en a un, et, sauf objection du patient, à la famille de celui-ci.

3. Un service de santé mentale ne peut recevoir de patients placés d'office que s'il a été désigné à cet effet par une autorité compétente prévue par la législation nationale.

 

Principe 17

Organe de révision

1. L'organe de révision est un organe judiciaire ou un autre organe indépendant et impartial établi et agissant selon les procédures fixées par la législation nationale. Il prend ses décisions avec le concours d'un ou plusieurs praticiens de santé mentale qualifiés et indépendants et tient compte de leur avis.

2. Comme prescrit au paragraphe 2 du Principe 16, l'organe de révision procède à l'examen initial d'une décision de placer ou de garder d'office un patient dès que possible après l'adoption de cette décision et selon des procédures simples et rapides fixées par la législation nationale.

3. L'organe de révision examine périodiquement les cas des patients placés d'office à des intervalles raisonnables fixés par la législation nationale.

4. Tout patient placé d'office peut présenter à l'organe de révision une demande de sortie ou de placement volontaire, à des intervalles raisonnables fixés par la législation nationale.

5. A chaque réexamen, l'organe de révision examine si les conditions du placement d'office énoncées au paragraphe 1 du Principe 16 sont toujours réunies, sinon, il est mis fin au placement d'office du patient.

6. Si, à tout moment, le praticien de santé mentale chargé du cas estime que les conditions pour maintenir une personne en placement d'office ne sont plus réunies, il prescrit qu'il soit mis fin au placement d'office de cette personne.

7. Un patient ou son représentant personnel ou toute autre personne intéressée a le droit de faire appel devant une instance supérieure d'une décision de placement ou de maintien d'office d'un patient dans un service de santé mentale.

 

Principe 18

Garanties de procédure

1. Le patient a le droit de choisir et de désigner un conseil pour le représenter en tant que tel, y compris pour le représenter dans toute procédure de plainte ou d'appel. Si le patient ne s'assure pas de tels services, un conseil sera mis à la disposition du patient sans frais pour lui dans la mesure où il n'a pas de moyens suffisants pour le rémunérer.

2. Le patient a aussi le droit à l'assistance, si nécessaire, des services d'un interprète. S'il a besoin de tels services et ne se les assure pas, ils seront mis à sa disposition sans frais pour lui dans la mesure où il n'a pas de moyens suffisants pour les rétribuer.

3. Le patient et son conseil peuvent demander et présenter à toute audience un rapport établi par un spécialiste indépendant de la santé mentale et tous autres rapports et éléments de preuve verbaux, écrits et autres qui sont pertinents et recevables.

4. Des copies du dossier du patient et de tous les rapports et documents devant être présentés doivent être données au patient et au conseil du patient, sauf dans les cas spéciaux où il est jugé que la révélation d'un élément déterminé au patient nuirait gravement à la santé du patient ou compromettrait la sécurité d'autrui. Au cas où la législation nationale le permet et si la discrétion peut être garantie, tout document qui n'est pas donné au patient devrait être donné au représentant et au conseil du patient. Quand une partie quelconque d'un document n'est pas communiquée à un patient, le patient ou le conseil du patient, le cas échéant, doit être avisé de la non-communication et des raisons qui la motivent, et la décision de non-communication pourra être réexaminée par le tribunal.

5. Le patient, le représentant personnel et le conseil du patient ont le droit d'assister, de participer à toute audience et d'être entendus personnellement.

6. Si le patient, le représentant personnel ou le conseil du patient demandent que telle ou telle personne soit présente à l'audience, cette personne y sera admise, à moins qu'il ne soit jugé que la présence de la personne risque d'être gravement préjudiciable à l'état de santé du patient, ou de compromettre la sécurité d'autrui.

7. Lors de toute décision sur le point de savoir si l'audience ou une partie de l'audience doit se dérouler en public ou en privé et s'il peut en être rendu compte publiquement, il convient de tenir dûment compte des voeux du patient lui-même, de la nécessité de respecter la vie privée du patient et d'autres personnes et de la nécessité d'empêcher qu'un préjudice grave ne soit causé à l'état de santé du patient ou d'éviter de compromettre la sécurité d'autrui.

8. La décision qui sera prise à l'issue de l'audience et les raisons qui la motivent seront indiquées par écrit. Des copies en seront données au patient, à son représentant personnel et à son conseil. Pour décider si la décision doit ou non être publiée intégralement ou en partie, il sera pleinement tenu compte des voeux du patient lui-même, de la nécessité de respecter sa vie privée et celle d'autres personnes, de l'intérêt public concernant la transparence dans l'administration de la justice et de la nécessité d'empêcher qu'un préjudice grave ne soit causé à la santé du patient ou d'éviter de compromettre la sécurité d'autrui.

 

Principe 19

Accès à l'information

1. Un patient (terme qui s'entend également d'un ancien patient dans le présent Principe) doit avoir accès aux informations le concernant se trouvant dans ses dossiers médical et personnel que le service de santé mentale détient. Ce droit peut faire l'objet de restrictions afin d'empêcher qu'un préjudice grave ne soit causé à la santé du patient et d'éviter de compromettre la sécurité d'autrui. Au cas où la législation nationale le permet et si la discrétion peut être garantie, les renseignements qui ne sont pas donnés au patient peuvent être donnés au représentant personnel et au conseil du patient. Quand une partie des informations n'est pas communiquée à un patient, le patient ou le conseil du patient, le cas échéant, doit être avisé de la non-communication et des raisons qui la motivent et la décision peut faire l'objet d'un réexamen par le tribunal.

2. Toutes observations écrites du patient, du représentant personnel ou du conseil du patient doivent, à la demande de l'un d'eux, être versées au dossier du patient.

 

Principe 20

Délinquants de droit commun

1. Le présent Principe s'applique aux personnes qui exécutent des peines de prison pour avoir commis des infractions pénales, ou qui sont détenues dans le cadre de poursuites ou d'une enquête engagées contre elles au pénal, et dont il a été établi qu'elles étaient atteintes de maladie mentale ou dont il est jugé qu'elles sont peut-être atteintes d'une telle maladie.

2. Toutes ces personnes doivent recevoir les meilleurs soins de santé mentale disponibles comme prévu au Principe 1. Les présents Principes leur sont applicables dans toute la mesure du possible, sous réserve des quelques modifications et exceptions qui s'imposent en l'occurrence. Aucune de ces modifications et exceptions ne doit porter atteinte aux droits reconnus à ces personnes par les instruments visés au paragraphe 5 du Principe 1.

3. La législation nationale peut autoriser un tribunal ou une autre autorité compétente, en se fondant sur des avis médicaux compétents et indépendants, à ordonner le placement de telles personnes dans un service de santé mentale.

4. Le traitement de personnes dont il a été établi qu'elles étaient atteintes de maladie mentale doit être en toutes circonstances conforme au Principe 11.

 

Principe 21

Plaintes

Tout patient et ancien patient ont le droit de porter plainte conformément aux procédures prévues par la législation nationale.

 

Principe 22

Contrôle et recours

Les Etats veillent à mettre en place les mécanismes voulus pour favoriser le respect des présents Principes, pour l'inspection des services de santé mentale, pour le dépôt, l'instruction et le règlement des plaintes et pour l'institution des procédures disciplinaires et judiciaires appropriées en cas de faute professionnelle ou de violation des droits d'un patient.

 

Principe 23

Mise en oeuvre

1. Les Etats doivent donner effet aux présents Principes par l'adoption de mesures législatives, judiciaires, administratives, éducatives et autres appropriées, qu'ils devront réexaminer périodiquement.

2. Les Etats accorderont une large diffusion à ces principes par des moyens actifs et appropriés.

 

Principe 24

Portée des principes en ce qui concerne les services de santé mentale

Les présents Principes s'appliquent à toutes les personnes qui sont placées dans un service de santé mentale.

 

Principe 25

Clause de sauvegarde des droits en vigueur

Les présents Principes ne portent nullement atteinte à aucun des droits existants des patients, notamment aux droits reconnus dans la législation nationale ou internationale applicable, même si lesdits principes ne reconnaissent pas ces droits ou ne les reconnaissent que dans une moindre mesure.


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