University of Minnesota


De'claration et Programme d'action de Beijing, La quatrie`me Confe'rence mondiale sur les femmes, 15 septembre 1995, A/CONF.177/20 (1995) et A/CONF.177/20/Add.1 (1995): Chapitre II (Le pre'sent document est une version pre'liminaire du rapport de la quatrie`me Confe'rence mondiale sur les femmes.)


Chapitre II

CONTEXTE MONDIAL

6. La quatrie`me Confe'rence mondiale sur les femmes a lieu a` l'aube d'un nouveau mille'naire.

7. Le Programme d'action confirme les principes e'nonce's dans la Convention sur l'e'limination de toutes les formes de discrimination a` l'e'gard des femmes 3/ et s'inspire des Strate'gies prospectives d'action de Nairobi pour la promotion de la femme, ainsi que des re'solutions pertinentes adopte'es par le Conseil e'conomique et social et l'Assemble'e ge'ne'rale. Il vise a` de'finir un ensemble de mesures a` prendre en priorite' au cours des cinq anne'es a` venir.

8. Le Programme d'action reconnai^t l'importance des de'cisions adopte'es d'un commun accord a` l'issue du Sommet mondial pour les enfants, de la Confe'rence des Nations Unies sur l'environnement et le de'veloppement, de la Confe'rence mondiale sur les droits de l'homme, de la Confe'rence internationale sur la population et le de'veloppement et du Sommet mondial pour le de'veloppement social, qui ont de'fini des perspectives et des engagements propres a` favoriser le de'veloppement durable et la coope'ration internationale et a` renforcer le ro^le de l'Organisation des Nations Unies a` cette fin. La Confe'rence mondiale sur le de'veloppement durable des petits E'tats insulaires en de'veloppement, la Confe'rence internationale sur la nutrition, la Confe'rence internationale sur les soins de sante' primaires et la Confe'rence mondiale sur l'e'ducation pour tous, de me^me, ont aborde' les divers aspects du de'veloppement et des droits de l'homme, chacune dans sa perspective propre, en accordant une grande attention au ro^le des femmes et des filles. L'Anne'e internationale des populations autochtones 4/, l'Anne'e internationale de la famille 5/, l'Anne'e des Nations Unies pour la tole'rance 6/, la De'claration de Gene`ve pour les femmes rurales 7/ et la De'claration sur l'e'limination de la discrimination a` l'e'gard des femmes 8/ ont aussi e'te' l'occasion de mettre l'accent sur la question du renforcement du pouvoir d'action des femmes et sur celle de leur e'galite'.

9. Le Programme d'action, qui est pleinement conforme aux buts et principes de la Charte des Nations Unies et du droit international, a pour objectif le renforcement du pouvoir d'action de toutes les femmes. Il est essentiel, pour atteindre cet objectif, que toute les femmes jouissent pleinement de tous les droits de l'homme et de toutes les liberte's fondamentales. S'il convient de ne pas perdre de vue l'importance des particularismes nationaux et re'gionaux et la diversite' historique, culturelle et religieuse, il est du devoir des E'tats, quel qu'en soit le syste`me politique, e'conomique et culturel, de promouvoir et de prote'ger tous les droits de l'homme et toutes les liberte's fondamentale 9/. La mise en oeuvre du pre'sent Programme d'action, y compris dans le cadre de la le'gislation des diffe'rents E'tats et gra^ce a` l'e'laboration de strate'gies, politiques, programmes et priorite's de de'veloppement, rele`ve de la responsabilite' souveraine de chaque E'tat, agissant dans le respect de tous les droits de l'homme et liberte's fondamentales, et la prise en compte et le strict respect des diverses valeurs religieuses et e'thiques, du patrimoine culturel et des convictions philosophiques des individus et de leurs communaute's devraient aider les femmes a` jouir pleinement de leurs droits fondamentaux afin de parvenir a` l'e'galite', au de'veloppement et a` la paix.

10. Depuis la tenue, en 1985, a` Nairobi, de la Confe'rence mondiale charge'e d'examiner et d'e'valuer les re'sultats de la De'cennie des Nations Unies pour les femmes : e'galite', de'veloppement et paix, et l'adoption des Strate'gies prospectives d'action de Nairobi pour la femme, le monde a connu de profondes mutations politiques, e'conomiques, sociales et culturelles, qui ont eu des effets tant be'ne'fiques que ne'fastes sur les femmes. La Confe'rence mondiale sur les droits de l'homme a reconnu que les droits fondamentaux des femmes et des fillettes font inalie'nablement, inte'gralement et indissociablement partie des droits universels de la personne. La pleine et e'gale participation des femmes a` la vie politique, civile, e'conomique, sociale et culturelle aux e'chelons national, re'gional et international, de me^me que l'e'limination de toutes les formes de discrimination fonde'es sur le sexe constituent des objectifs prioritaires de la communaute' internationale. La Confe'rence mondiale sur les droits de l'homme a re'affirme' l'engagement solennel pris par tous les E'tats de s'acquitter de leurs obligations s'agissant de promouvoir le respect universel, l'observation et la protection de l'ensemble des droits de l'homme et des liberte's fondamentales pour tous, conforme'ment a` la Charte des Nations Unies, aux autres instruments relatifs aux droits de l'homme et au droit international. Le caracte`re universel de ces droits et liberte's est irre'cusable.

11. La fin de la guerre froide a bouleverse' le panorama international et atte'nue' la rivalite' entre les superpuissances. La menace de conflit arme' a` l'e'chelon plane'taire a diminue', tandis que les relations internationales s'ame'lioraient et que s'ouvraient de nouvelles perspectives de paix entre les nations. Bien que la menace de conflit mondial ait e'te' re'duite, les guerres d'agression, les conflits arme's, le colonialisme ou d'autres formes de domination et d'occupation e'trange`res, les guerres civiles et le terrorisme continuent a` se'vir dans de nombreuses re'gions du monde. Les femmes sont victimes, notamment en pe'riode de conflit arme', de graves violations de leurs droits fondamentaux meurtre, torture, viol syste'matique, grossesse force'e et avortement force', en particulier dans le cadre des politiques de "nettoyage ethnique"

12. Le maintien de la paix et de la se'curite' aux e'chelons mondial, re'gional et local, de me^me que la pre'vention des politiques d'agression et de nettoyage ethnique et le re`glement des conflits arme's, reve^tent une importance de'cisive pour la protection des droits fondamentaux des femmes et des fillettes, de me^me que pour l'e'limination de toutes les formes de violence dirige'es contre elles et de la pratique consistant a` les utiliser comme arme de guerre.

13. Le montant excessif des de'penses militaires, s'agissant notamment des sommes consacre'es de par le monde aux arme'es et au commerce ou au trafic d'armes ainsi que des sommes investies dans la fabrication ou l'achat d'armes, a re'duit le volume des ressources disponibles pour le de'veloppement social. Les difficulte's e'conomiques, notamment le fardeau de la dette, ont contraint nombre de pays en de'veloppement a` adopter des politiques d'ajustement structurel. Qui plus est, certains programmes d'ajustement structurel mal conc'us et mal exe'cute's ont eu des conse'quences ne'fastes sur le de'veloppement social. Le nombre de ceux qui vivent dans la pauvrete' a augmente' de fac'on disproportionne'e dans la plupart des pays en de'veloppement, en particulier dans les pays lourdement endette's, au cours des 10 dernie`res anne'es.

14. Dans ce contexte, il convient de mettre l'accent sur la dimension sociale du de'veloppement. Encore que ne'cessaire au de'veloppement social, une croissance e'conomique acce'le're'e n'a pas a` elle seule pour effet d'ame'liorer la qualite' de la vie de la population. Dans certains cas, des situations peuvent surgir, qui risquent d'aggraver les ine'galite's sociales et la marginalisation. Il est donc indispensable, si l'on veut que tous les membres de la socie'te' be'ne'ficient de la croissance e'conomique, de trouver de nouvelles solutions fonde'es sur une appre'hension holistique de tous les aspects du de'veloppement : croissance, e'galite' entre les sexes, justice sociale, pre'servation et protection de l'environnement, durabilite', solidarite', participation, paix et respect des droits de l'homme.

15. Une tendance mondiale a` la de'mocratisation a e'largi la participation au processus politique dans bien des pays, mais la participation des femmes, sur un pied de pleine e'galite' avec les hommes, a` la prise des de'cisions clefs, n'est pas encore assure'e, en particulier dans le domaine politique. En Afrique du Sud, la politique de racisme institutionnalise' qu'e'tait l'apartheid a e'te' abolie et un transfert pacifique et de'mocratique du pouvoir est intervenu. En Europe centrale et orientale, la transition vers la de'mocratie parlementaire a e'te' rapide et a pris diffe'rentes formes selon la situation particulie`re de chaque pays. Quoique ge'ne'ralement pacifique, ce processus a e'te' freine' dans certains pays par des conflits arme's qui ont entrai^ne' de graves violations des droits de l'homme.

16. La re'cession e'conomique ge'ne'rale ainsi que l'instabilite' politique dont souffrent certaines re'gions ont eu pour effet de freiner la re'alisation des objectifs de de'veloppement dans de nombreux pays, ce qui a entrai^ne' une paupe'risation. Plus d'un milliard de personnes, qui sont en grande majorite' des femmes vivent dans une extre^me pauvrete'. Le processus de changement et d'ajustement rapides dans tous les secteurs a e'galement eu pour effet d'aggraver le cho^mage et le sous-emploi, en particulier chez les femmes. Dans bien des cas, les programmes d'ajustement structurel n'ont pas e'te' conc'us de fac'on a` nuire le moins possible aux groupes vulne'rables et de'savantage's ou aux femmes; ils n'ont pas e'te' conc'us non plus de fac'on a` avoir des effets favorables sur ces groupes en pre'venant leur marginalisation sur les plans e'conomique et social. L'Acte final des ne'gociations commerciales multilate'rales d'Uruguay 10/ mettait l'accent sur l'interde'pendance croissante des e'conomies nationales, ainsi que sur l'importance de la libe'ralisation du commerce et de l'acce`s a` des marche's dynamiques et ouverts. Il y a e'galement eu de grosses de'penses militaires dans certaines re'gions. En de'pit des augmentations enregistre'es pour certains pays, le volume global de l'aide publique au de'veloppement (APD) a re'cemment diminue'.

17. La pauvrete' absolue et la fe'minisation de la pauvrete', le cho^mage, la fragilite' croissante de l'environnement, la violence qui continue de s'exercer contre les femmes et le fait que la moitie' de l'humanite' soit exclue des institutions ou` s'exercent l'autorite' et le pouvoir te'moignent avec force de la ne'cessite' de continuer a` oeuvrer en faveur du de'veloppement, de la paix, de la se'curite' et pour trouver des moyens d'assurer un de'veloppement durable axe' sur l'e^tre humain. Il est essentiel, si l'on veut que cette que^te aboutisse, que les femmes, qui repre'sentent la moitie' de l'humanite', participent a` la prise des de'cisions. C'est pourquoi seule une nouvelle e`re de coope'ration internationale entre les gouvernements et les peuples fonde'e sur un esprit de partenariat, un environnement social et e'conomique international e'quitable et la transformation radicale des relations entre les sexes en une association fonde'e sur une ve'ritable e'galite' permettra de relever les de'fis du XXIe sie`cle.

18. L'e'volution re'cente de la situation e'conomique internationale a eu dans bien des cas un impact particulie`rement grand sur les femmes et les enfants, dont la majorite' vit dans les pays en de'veloppement. Pour les E'tats fortement endette's, les programmes et mesures d'ajustement structurel, tout en e'tant be'ne'fiques a` long terme, ont entrai^ne' une re'duction des de'penses sociales au de'triment des femmes, en particulier en Afrique et dans les pays les moins avance's. Cette situation est particulie`rement grave lorsque la responsabilite' des services sociaux essentiels, qui revenait aux gouvernements, repose de'sormais sur les femmes.

19. La re'cession e'conomique dans de nombreux pays de'veloppe's et en de'veloppement et la restructuration en cours dans les pays en transition ont eu des effets particulie`rement graves sur l'emploi des femmes. Celles-ci sont souvent force'es d'accepter un emploi dont la se'curite' n'est pas assure'e a` long terme ou qui comporte des conditions de travail dangereuses, de travailler a` domicile sans protection, ou d'e^tre au cho^mage. Pour ame'liorer les revenus de leur me'nage, bien des femmes entrent sur le marche' du travail dans des emplois sous-re'mune're's et sous-e'value's; d'autres de'cident d'e'migrer pour la me^me raison. Les femmes doivent ainsi supporter une charge globale de travail accrue sans que leurs autres responsabilite's diminuent pour autant.

20. Les politiques et programmes macro-e'conomiques et micro-e'conomiques, y compris les ajustements structurels, n'ont pas toujours e'te' conc'us de manie`re a` tenir compte de leurs effets sur les femmes et les fillettes, en particulier celles qui vivent dans la pauvrete'. La pauvrete' a augmente' en termes absolus comme en termes relatifs et le nombre de femmes vivant dans la pauvrete' s'est accru dans la plupart des re'gions. De nombreuses femmes urbaines vivent dans la pauvrete'; mais le sort des femmes vivant dans les zones rurales et e'loigne'es me'rite une attention particulie`re e'tant donne' la stagnation du de'veloppement dans ces zones. Dans les pays en de'veloppement, me^me lorsque les indicateurs nationaux se sont ame'liore's, la majorite' des femmes rurales continuent de vivre dans des conditions de sous-de'veloppement e'conomique et de marginalisation sociale.

21. Les femmes apportent une contribution essentielle a` l'e'conomie et a` la lutte contre la pauvrete' en travaillant, avec ou sans re'mune'ration, chez elles, au sein de la communaute' et a` l'exte'rieur. Un nombre croissant de femmes sont parvenues a` l'inde'pendance e'conomique gra^ce a` un emploi re'mune'rateur.

22. Un quart des me'nages du monde entier sont dirige's par des femmes et de nombreux autres me'nages de'pendent du revenu de la femme me^me lorsqu'ils comptent des hommes. Les me'nages dont les femmes assurent la subsistance figurent tre`s souvent parmi les plus pauvres en raison de la discrimination en matie`re de salaire, de la se'gre'gation en matie`re d'emploi sur le marche' du travail et d'autres obstacles fonde's sur le sexe. La de'sinte'gration des familles, les mouvements de population entre zones urbaines et zones rurales a` l'inte'rieur des pays, les migrations internationales, les guerres et les de'placements internes de population constituent des facteurs qui contribuent a` multiplier le nombre des me'nages dirige's par des femmes.

23. Conscientes du fait que l'e'tablissement et le maintien de la paix et de la se'curite' sont une condition pre'alable ne'cessaire au progre`s e'conomique et social, les femmes, a` des titres divers, occupent de plus en plus le devant de la sce`ne dans le mouvement de l'humanite' en faveur de la paix. Leur pleine participation a` la prise des de'cisions, a` la pre'vention et au re`glement des conflits ainsi qu'a` toutes les autres initiatives de paix est essentielle pour parvenir a` une paix durable.

24. La religion, la spiritualite' et les convictions jouent un ro^le central dans la vie de millions de femmes et d'hommes, dans la manie`re dont ils vivent et dans leurs aspirations. Le droit a` la liberte' de pense'e, de conscience et de religion est inalie'nable et tout individu doit pouvoir l'exercer. Ce droit implique la liberte' d'avoir ou d'adopter la religion ou la conviction de son choix, ainsi que la liberte' de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu'en prive', par le culte, l'accomplissement des rites, les pratiques et l'enseignement. Si l'on veut parvenir a` l'e'galite', au de'veloppement et a` la paix, il est ne'cessaire de respecter pleinement ces droits et liberte's. La religion, la pense'e, la conscience et la conviction peuvent effectivement contribuer a` la satisfaction des besoins moraux, e'thiques et spirituels des femmes et des hommes et a` l'accomplissement de leur plein potentiel dans la socie'te'. Il faut toutefois reconnai^tre que toute forme d'extre'misme peut exercer un effet ne'gatif sur les femmes et conduire a` la violence et a` la discrimination.

25. La quatrie`me Confe'rence mondiale sur les femmes devrait acce'le'rer le processus qui a de'bute' officiellement en 1975, anne'e que l'Assemble'e ge'ne'rale des Nations Unies a proclame'e Anne'e internationale des femmes. Cette anne'e a marque' un tournant en mettant les proble`mes des femmes a` l'ordre du jour.

Dans le cadre de la De'cennie des Nations Unies pour la femme (1976-1985), un effort a e'te' fait sur le plan mondial pour examiner la condition et les droits des femmes et leur permettre de participer a` la prise des de'cisions a` tous les niveaux.

En 1979, l'Assemble'e ge'ne'rale a adopte' la Convention sur l'e'limination de toutes les formes de discrimination a` l'e'gard des femmes, qui est entre'e en vigueur en 1981 et constitue une norme internationale pour la de'finition de l'e'galite' entre les femmes et les hommes. En 1985, la Confe'rence mondiale charge'e d'examiner et d'e'valuer les re'sultats de la De'cennie des Nations Unies pour la femme : e'galite', de'veloppement et paix a adopte' les Strate'gies prospectives d'action de Nairobi pour la promotion de la femme, dont la mise en oeuvre s'e'chelonnera jusqu'a` l'an 2000. D'importants progre`s ont e'te' re'alise's dans la voie de l'e'galite' entre les femmes et les hommes. De nombreux gouvernements ont promulgue' des lois visant a` promouvoir l'e'galite' entre les femmes et les hommes et ont cre'e' des me'canismes nationaux charge's de veiller a` ce que les besoins des femmes soient pris en conside'ration dans tous les secteurs de la socie'te'. Les organismes internationaux se sont inte'resse's davantage a` la condition et au ro^le des femmes.

26. Gra^ce a` son importance croissante, le secteur non gouvernemental, en particulier les organisations de femmes et les groupes fe'ministes, est devenu un moteur de changement. Les organisations non gouvernementales ont joue' un ro^le important en se faisant l'avocat de mesures le'gislatives ou de me'canismes permettant d'assurer la promotion des femmes. Elles sont e'galement devenues le catalyseur de nouvelles conceptions du de'veloppement. De nombreux gouvernements reconnaissent de plus en plus le ro^le de premier plan des organisations non gouvernementales et l'inte're^t qu'il y a a` travailler avec elles en faveur du progre`s. Cependant, dans certains pays, les gouvernements continuent de limiter la liberte' d'action des organisations non gouvernementales. Par l'interme'diaire des organisations non gouvernementales, les femmes ont participe' a` des instances communautaires, nationales, re'gionales et mondiales ainsi qu'a` des de'bats internationaux, et les ont fortement influence's.

27. Depuis 1975, la condition de la femme et celle de l'homme sont mieux connues, ce qui contribue a` renforcer les mesures visant a` promouvoir l'e'galite' entre les deux sexes. Dans plusieurs pays, d'importants changements ont marque' les rapports entre femmes et hommes, en particulier la` ou` l'e'ducation des femmes a beaucoup progresse' et ou` leur participation aux activite's re'mune're'es s'est sensiblement accrue. Dans la division du travail, les frontie`res entre ro^le producteur et ro^le reproducteur s'estompent progressivement : les femmes ont commence' a` pe'ne'trer dans des domaines auparavant domine's par les hommes, et ces derniers ont commence' a` accepter de plus grandes responsabilite's au foyer, y compris pour les soins a` donner aux enfants. Toutefois, il y a eu un changement plus grand et beaucoup plus rapide dans le ro^le des femmes que dans celui des hommes. Dans bien des pays, les diffe'rences entre les re'alisations et les activite's des femmes et des hommes sont toujours perc'ues comme e'tant les conse'quences de diffe'rences biologiques immuables et non comme de'coulant du ro^le de'volu aux homme et aux femmes par la socie'te'.

28. De plus, 10 ans apre`s la Confe'rence de Nairobi, l'e'galite' entre les femmes et les hommes n'a toujours pas e'te' re'alise'e. A` l'e'chelle mondiale, les femmes ne repre'sentent en moyenne que 10 % a` peine de tous les le'gislateurs e'lus, et dans la plupart des structures administratives nationales et internationales, tant publiques que prive'es, elles restent sous-repre'sente'es. L'Organisation des Nations Unies ne fait pas exception. Cinquante ans apre`s sa cre'ation, elle continue de se priver des be'ne'fices que pourrait lui apporter la contribution des femmes aux niveaux les plus e'leve's de prise de de'cisions de son Secre'tariat et des institutions spe'cialise'es, ou` elles sont toujours sous-repre'sente'es.

29. Les femmes jouent un ro^le critique dans la famille. La famille est l'unite' fondamentale de la socie'te' et doit en tant que telle e^tre renforce'e. Elle est en droit de recevoir une protection et un appui dans tous les domaines. La famille prend diverses formes selon les syste`mes culturels, politiques et sociaux. Les droits, capacite's et responsabilite's des membres de la famille doivent e^tre respecte's. On ne mesure pas encore toute l'importance de la contribution que les femmes apportent au bien-e^tre de la famille et au de'veloppement de la socie'te'. Il convient de reconnai^tre l'importance sociale de la maternite' et le ro^le des parents au sein de la famille et dans l'e'ducation des enfants. E'lever des enfants exige un partage des responsabilite's entre les parents, femmes et hommes, et la socie'te' dans son ensemble. La maternite', la ta^che des parents et le ro^le des femmes en matie`re de procre'ation ne doivent pas e^tre une source de discrimination ni limiter la pleine participation des femmes dans la socie'te'. Il convient aussi de reconnai^tre le ro^le important que les femmes jouent souvent dans de nombreux pays en s'occupant d'autres membres de leur famille.

30. Bien que le taux de croissance de'mographique diminue, la population mondiale atteint actuellement un niveau record en chiffres absolus, avec une augmentation de pre`s de 86 millions de personnes par an. Deux autres grandes tendances de'mographiques ont eu de profondes re'percussions sur la proportion de personnes a` charge au sein des familles. Dans de nombreux pays en de'veloppement, 45 a` 50 % de la population a moins de 15 ans alors que, dans les pays industrialise's, le nombre et la proportion des personnes a^ge'es augmentent. Selon des estimations de l'ONU, d'ici a` 2025, 72 % de la population a^ge'e de plus de 60 ans vivront dans des pays en de'veloppement et plus de la moitie' de cette population sera constitue'e par des femmes. Le soin de s'occuper des enfants, des malades et des personnes a^ge'es incombe surtout aux femmes, en raison de l'ine'galite' avec les hommes et d'un de'se'quilibre dans la re'partition du travail, re'mune're' et non re'mune're', entre les sexes.

31. De nombreuses femmes se heurtent a` des obstacles particuliers en raison de facteurs divers qui viennent s'ajouter aux proble`mes propres a` leur sexe et qui les isolent ou les marginalisent souvent. Elles ne peuvent exercer leurs droits fondamentaux, n'ont pas le droit ou la possibilite' d'acce'der a` l'e'ducation, a` la formation professionnelle, a` l'emploi, au logement et a` l'inde'pendance e'conomique, et ne peuvent participer aux processus de prise de de'cisions. Ces femmes se voient souvent refuser la possibilite' de contribuer a` part entie`re a` la vie ge'ne'rale de leur communaute'.

32. Au cours des 10 dernie`res anne'es, on a e'galement assiste' a` une prise de conscience de plus en plus nette des pre'occupations et des inte're^ts spe'cifiques des femmes autochtones, dont l'identite', les traditions culturelles et les formes d'organisation sociale enrichissent et renforcent les communaute's dans lesquelles elles vivent. Les femmes autochtones se heurtent souvent a` des obstacles a` la fois en tant que femmes et en tant que membres de communaute's autochtones.

33. Au cours des 20 dernie`res anne'es, le monde a e'te' te'moin d'un de'veloppement spectaculaire dans le domaine des communications. Par suite des progre`s de l'informatique et de la te'le'vision par satellite et par ca^ble, l'acce`s a` l'information a` l'e'chelle mondiale continue de s'e'largir et ouvre de nouvelles possibilite's pour la participation des femmes aux communications et aux me'dias, ainsi que pour la diffusion d'informations sur les femmes. Mais les re'seaux de communication mondiaux ont e'te' aussi utilise's pour propager des images ste're'otype'es et avilissantes de la femme a` des fins strictement commerciales de consommation. Tant que les femmes ne participeront pas sur un pied d'e'galite' a` toutes les activite's techniques et a` la prise de de'cisions dans le domaine des communications et des me'dias, y compris dans le domaine artistique, on continuera a` donner d'elles une image fausse et a` me'connai^tre la re'alite' de leur vie. Les me'dias ont la possibilite' de jouer un grand ro^le dans la promotion de la femme et la lutte pour l'e'galite' entre les sexes, en donnant des femmes et des hommes une image non ste're'otype'e, diversifie'e et e'quilibre'e, et en respectant la dignite' et la valeur de la personne humaine.

34. La de'gradation persistante de l'environnement, qui touche toutes les vies humaines, a souvent une influence plus directe sur les femmes. La sante' et les moyens d'existence de celles-ci sont menace's par la pollution et les de'chets toxiques, ainsi que par le de'boisement a` grande e'chelle, la de'sertification, la se'cheresse et l'e'puisement des sols et des ressources co^tie`res et marines, qui s'accompagnent d'une augmentation des proble`mes de sante' et me^me des de'ce`s lie's a` la de'gradation de l'environnement chez les femmes et les fillettes. Les plus touche'es sont les femmes rurales et les femmes autochtones, dont les moyens d'existence et la subsistance quotidienne de'pendent directement d'e'cosyste`mes durables.

35. La pauvrete' et la de'gradation de l'environnement sont e'troitement lie'es. Si la pauvrete' entrai^ne certains types de contraintes qui pe`sent sur l'environnement, la de'te'rioration persistante de l'environnement mondial est principalement due a` la non-viabilite' des modes de consommation et de production, en particulier dans les pays industrialise's, facteur qui aggrave la pauvrete' et les de'se'quilibres et qui est un sujet de grave pre'occupation.

36. Les tendances mondiales ont entrai^ne' de profonds changements dans les strate'gies de survie et la structure des familles. L'exode rural est partout en nette augmentation.

Selon les projections, la population urbaine devrait atteindre 47 % de l'ensemble de la population mondiale d'ici a` l'an 2000. On estime a` 125 millions le nombre des migrants, re'fugie's et personnes de'place'es, dont la moitie' vivent dans des pays en de'veloppement. Ces mouvements massifs de population ont de profondes re'percussions sur la structure et le bien-e^tre des familles et ont des conse'quences plus graves pour les femmes que pour les hommes, une de ces conse'quences e'tant, dans bien des cas, l'exploitation sexuelle des femmes.

37. Selon les estimations de l'Organisation mondiale de la sante' (OMS), on comptait, au de'but de 1995, 4,5 millions de cas de syndrome d'immunode'ficience acquise (sida). On estime que 19,5 millions d'hommes, de femmes et d'enfants ont e'te' infecte's par le virus de l'immunode'ficience humaine (VIH) depuis qu'il a e'te' identifie' et, selon les projections, 20 millions de plus le seront d'ici la fin de la de'cennie. Il est probable que, parmi les nouveaux cas, il y aura deux fois plus de femmes que d'hommes. S'il n'y avait pas beaucoup de femmes se'ropositives au de'but de la pande'mie du sida, il y en a maintenant 8 millions environ. Les jeunes femmes et les adolescentes sont particulie`rement vulne'rables. On estime que d'ici a` l'an 2000, plus de 13 millions de femmes seront se'ropositives et 4 millions seront mortes des conse'quences du sida. De plus, on estime a` 250 millions environ par an le nombre de nouveaux cas de maladies ve'ne'riennes. La transmission des maladies ve'ne'riennes et du VIH/sida s'acce'le`re a` un rythme alarmant chez les femmes et les fillettes, surtout dans les pays en de'veloppement.

38. Depuis 1975, on a re'uni une somme conside'rable de connaissances et d'informations sur la situation des femmes et leurs conditions de vie. Dans la plupart des pays, les femmes se heurtent, tout au long de leur existence, dans leur vie quotidienne et dans leurs aspirations a` long terme, a` des attitudes discriminatoires, des structures e'conomiques et sociales iniques et un manque de ressources qui les empe^chent de participer pleinement a` la vie publique dans des conditions d'e'galite'. Dans nombre de pays, la pratique de la se'lection pre'natale en fonction du sexe, les taux de mortalite' plus e'leve's et les taux de scolarisation moins e'leve's chez les fillettes que chez les garc'ons semblent indiquer que la pre'fe'rence donne'e aux fils dans la famille empe^che les fillettes d'avoir pleinement acce`s a` l'alimentation, a` l'enseignement et aux soins de sante', et porte me^me atteinte a` leur droit a` la vie. La discrimination a` l'e'gard des femmes commence de`s leur plus jeune a^ge et c'est donc de`s la naissance qu'il faut y faire face.

39. La fillette d'aujourd'hui est la femme de demain. Ses talents, ses ide'es et son e'nergie sont essentiels pour la re'alisation des objectifs que sont l'e'galite', le de'veloppement et la paix. Pour qu'elle re'alise pleinement son potentiel, il faut qu'elle se de'veloppe dans un milieu favorable qui lui permette de satisfaire ses besoins spirituels, intellectuels et mate'riels en matie`re de survie, de protection et de de'veloppement, et lui garantisse les me^mes droits que les garc'ons. Si l'on veut que les femmes participent sur un pied d'e'galite' avec les hommes a` tous les aspects de la vie et du de'veloppement, il est grand temps de reconnai^tre la dignite' humaine et la valeur de la fillette et de lui assurer la jouissance inte'grale de ses droits et liberte's fondamentales, y compris les droits garantis par la Convention relative aux droits de l'enfant 11/, que tous les E'tats sont instamment prie's de ratifier. Mais on constate partout dans le monde que les fillettes sont en butte a` la discrimination et a` la violence de`s leur plus jeune a^ge et continuent de l'e^tre tout au long de leur vie. Elles sont souvent moins bien nourries que les garc'ons, on veille moins a` leur sante' physique et mentale et a` leur instruction, elles jouissent dans une moindre mesure des droits, des possibilite's et des avantages de l'enfance et de l'adolescence. Elles souffrent souvent de diverses formes d'exploitation sexuelle et e'conomique pe'dophilie, prostitution force'e et parfois vente de leurs organes et leurs tissus, violences et pratiques nuisibles comme l'infanticide et la se'lection pre'natale selon le sexe, l'inceste, la mutilation ge'nitale et le mariage pre'coce, y compris le mariage d'enfants.

40. La moitie' de la population mondiale est a^ge'e de moins de 25 ans et la plupart des jeunes dans le monde plus de 85 % vivent dans les pays en de'veloppement. Les de'cideurs doivent prendre conscience des incidences de ces donne'es de'mographiques. Il faut prendre des mesures spe'ciales pour que les jeunes femmes acquie`rent les compe'tences ne'cessaires pour participer activement et efficacement a` la direction des affaires sociales, culturelles, politiques et e'conomiques a` tous les niveaux. Il faut absolument que la communaute' internationale prouve sa nouvelle volonte' de pre'parer l'avenir sa volonte' d'inciter une nouvelle ge'ne'ration de femmes et d'hommes a` travailler ensemble a` l'instauration d'une socie'te' plus e'quitable. Cette nouvelle ge'ne'ration de cadres devra accepter et promouvoir l'existence d'un monde ou` chaque enfant soit a` l'abri de l'injustice, de l'oppression et de l'ine'galite', un monde ou` il puisse s'e'panouir librement. Le principe de l'e'galite' des hommes et des femmes doit donc faire partie inte'grante du processus de socialisation.


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