University of Minnesota



Beresford Whyte c. Jamaïque, Communication No. 732/1997, U.N. Doc. CCPR/C/63/D/732/1997 (1998).



Communication No 732/1997**
(Signé) Cecilia Medina Quiroga

Opinion individuelle de M. Martin Scheinin (dissidente)

Tout en approuvant les constatations du Comité pour ce qui est des violations et du recours demandé, je considère que les allégations visées aux paragraphes 7.4 et 7.5, ainsi que l'allégation relative à l'article 17, mentionnée au paragraphe 7.7, n'auraient pas dû être déclarées irrecevables. À mon avis, ces trois allégations sont recevables et révèlent toutes des violations du Pacte.

Sur le paragraphe 7.4. Pour ce qui est de l'allégation de l'auteur de violation de l'article 14 (droit à un procès équitable) du fait qu'il n'a pas obtenu le droit de consulter un avocat pendant la première année de sa détention, je souhaite, premièrement, renvoyer à la jurisprudence du Comité concernant la nécessité évidente d'une représentation légale appropriée à toutes les étapes de la procédure dans les affaires de délits entraînant la peine capitale (voir, par exemple, Frank Robinson c. Jamaïque, communication No 223/1987, Carlton Reid c. Jamaïque, communication No 250/1987, Aston Little c. Jamaïque, communication No 283/1988, Leroy Simmonds c. Jamaïque, communication No 338/1988, et Trevor Collins c. Jamaïque, communication No 356/1989). Deuxièmement, je souligne que la plainte soumise par l'auteur concerne une période de détention illégale au regard de l'article 9 du Pacte, comme il est indiqué au paragraphe 9.1 des constatations du Comité. Lorsqu'une personne est accusée de meurtre, son maintien en détention pendant une année avant le début de la procédure judiciaire, en violation de l'article 9, ne justifie pas qu'elle n'ait pas droit à l'assistance d'un avocat. Étant donné qu'il n'existait pas d'autres raisons légitimes justifiant le maintien de l'auteur en détention pendant cette période, outre la préparation du procès contre lui, ce dernier aurait dû bénéficier de l'assistance d'un avocat afin de préparer sa défense.

Sur le paragraphe 7.5. Étant donné qu'il est reconnu que l'auteur a soulevé, lors de l'audience préliminaire, le fait qu'il avait été battu par des policiers après son arrestation et considérant que l'État partie n'a pas fourni d'information sur les enquêtes qui auraient pu être menées à ce sujet, cette partie de la plainte aurait dû être déclarée recevable en vertu de l'article 7. L'auteur n'ayant jamais signé d'aveux, la question de savoir s'il a été battu afin de le contraindre à signer de tels aveux n'avait pas d'importance concrète pour le procès lui-même. En conséquence, le fait que l'incident n'ait pas été évoqué lors du procès ne doit pas être retenu à la charge de l'auteur. En l'absence d'explication de la part de l'État partie, il aurait dû être établi qu'il y avait eu violation de l'article 7.

Sur le paragraphe 7.7. Il se peut effectivement que le conseil de l'auteur ait cherché à prolonger l'examen de l'affaire devant le Comité en soumettant des allégations supplémentaires à un stade relativement avancé de la procédure. Du point de vue de la procédure, toutefois, la décision du Comité de traiter conjointement de la question de la recevabilité et de l'affaire quant au fond doit justifier que de nouvelles allégations soient présentées après la première communication de l'État partie car aucune décision concernant la recevabilité ne peut définir les limites de l'affaire. Dans les faits, les nouvelles allégations au titre de l'article 17, présentées dans la communication du conseil du 23 décembre 1997, soulèvent des questions extrêmement graves. Il s'agit du fait que les gardiens de la prison ont brûlé les affaires personnelles et les papiers de l'auteur, y compris les pièces du procès et la correspondance de l'auteur avec son conseil et le Comité, ainsi que du fait que les autorités carcérales n'ont pas remis à l'auteur le nouveau jeu de documents que le conseil lui avait envoyé. Si le Comité souhaite légitimement traiter des affaires de condamnation à mort de façon rapide, rien ne justifie qu'il donne l'impression de prendre à la légère des actes aussi barbares que ceux qui sont décrits dans ces allégations. Si le Comité estimait que le fait que l'État partie n'ait même pas formulé d'observations concernant la nouvelle déclaration du conseil constituait un obstacle l'empêchant de passer à l'examen de cette nouvelle allégation quant au fond, cette partie de la déclaration aurait dû être considérée comme une nouvelle communication au lieu d'être déclarée irrecevable.


(Signé) Martin Scheinin



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