University of Minnesota



M. F. (nom supprimé) c. Jamaïqu
e, Communication No. 335/1988, U.N. Doc. CCPR/C/45/D/335/1988 (1992).



Comité des droits de l'homme
Quarante-cinquième session

DECISION PRISE PAR LE COMITE DES DROITS DE L'HOMME EN VERTU DU PROTOCOLE
FACULTATIF SE RAPPORTANT AU PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX
DROITS CIVILS ET POLITIQUES A SA QUARANTE-CINQUIEME SESSION

concernant la

Communication No 335/1988



Présentée par : M. F. (nom supprimé)

Au nom de : L'auteur

Etat partie : Jamaïque

Date de la communication : 28 juin 1988 (date de la communication initiale)

Le Comité des droits de l'homme, créé en vertu de l'article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 17 juillet 1992,

Adopte ce qui suit :

Décision concernant la recevabilité

1. L'auteur de la communication (communication initiale datée du 28 juin 1988, et communications ultérieures)est M. F., un citoyen jamaïquain détenu à la prison du district de St. Catherine (Jamaïque), où il attend d'être exécuté. Il soutient être victime de violations de ses droits de l'homme par la Jamaïque.

Faits tels que presentés par l'auteur

2.1 L'auteur, un ouvrier de la construction, a été arrêté le ler septembre 1985 à la suite d'un incident survenu dans une salle de cinéma locale, au cours duquel une femme a été tuée par balle; il a été inculpé de meurtre plus tard dans le mois. Lors du procès, qui a eu lieu en 1986 devant le tribunal de première instance (Home Circuit Court), les jurés n'ont pas réussi à se mettre d'accord. Un nouveau procès a été demandé, et l'auteur a été reconnu coupable du meurtre et condamné à mort le 19 janvier 1987.

2.2 L'auteur affirme qu'il est innocent: il soutient qu'au moment du meurtre, il se trouvait avec des amis sur un chantier de construction situé a quelque 8 kilomètres du lieu où les faits se sont produits. Il affirme qu'il a été condamné pour des raisons politiques, un différend d'ordre politique l'opposant depuis longtemps à l'inspecteur chargé de l'enquête. Il soupçonne également que la rivalité politique entre deux bandes de jeunes, l'une partisane du Parti national populaire (PNP)et l'autre du Parti travailliste jamaïquain (JLP) est a l'origine du meurtre. Il déclare qu'il est lui-même partisan du JLP.

2.3 L'auteur soutient que lors du deuxième procès, l'avocat commis d'office a refusé de lui faire subir un contre-interrogatoire, et n'a pas cité de témoins à décharge. Les témoins à charge auraient fait de fausses dépositions. L'auteur affirme que ces derniers lui avaient confié en prison qu'ils ne savaient pas qui avait tiré mais qu'ils avaient décidé de témoigner contre lui pour des raisons politiques. Les témoins, qui étaient en instance de jugement car ils avaient été inculpés d'autres délits apparemment sans lien avec le meurtre en question, auraient été libérés sous caution à condition de témoigner contre l'auteur. Celui-ci affirme également que les membres du jury étaient de parti pris à son égard et que le juge les avait mal instruits au sujet des témoins.

2.4 Le recours formé au nom de l'auteur a été rejeté le 4 décembre 1987. L'auteur affirme que son avocat ne l'a pas consulté à propos des motifs du recours. Bien que l'auteur ait informé son avocat des propos que lui avaient tenus les témoins, ce dernier ne les avait pas interrogés.

2.5 L'auteur soutient que l'un des principaux témoins à charge, A. R., a fait ultérieurement une déclaration au Procureur général, exprimant le regret d'avoir impliqué l'auteur. Cette déclaration a été transmise au Gouverneur général, qui devait réexaminer l'affaire aux fins de rouvrir le dossier.

2.6 L'auteur déclare avoir autorisé, le 27 janvier 1989, un avocat à former un recours devant la section judiciaire du Conseil privé. Or aucune demande d'autorisation de recours n'aurait été déposée.

Nature de la Plainte

3, L'auteur n'invoque aucun article du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, mais il ressort de sa communication qu'il affirme être victime d'une violation, par la Jamaïque, des droits visés à l'article 14 du Pacte.

Observations de 1'Etat partie et replicrue de l'auteur

4.1 Dans une communication datée du 4 juillet 1989, 1'Etat partie soutient que la communication est irrecevable, les recours internes n'étant pas épuisés puisque l'auteur peut encore demander à la section judiciaire du Conseil privé l'autorisation de former un recours.

4.2 Dans une autre communication, datée du 21 juillet 1989, 1'Etat partie informe le Comité qu'une enquête a été ouverte pour vérifier le bien-fondé des allégations de l'auteur selon lesquelles l'un des principaux témoins a fait des aveux écrits au Procureur et qu'il serait demandé au Gouverneur général de la Jamaïque de revoir le dossier, conformément au paragraphe 1 de l'article 29 de la loi intitulée Judicature Act (Appellate Division). L'Etat partie . communique au Comité le texte dudit article, dont il ressort que le pouvoir du Gouverneur général de renvoyer l'affaire à la cour d'appel est discrétionnaire.

5. Dans sa réplique, l'auteur déclare qu'il a été informé que le Conseil privé examinerait sa demande au début de 1990 et réitère une fois de plus qu'il est innocent du meurtre pour lequel il a été condamné.

Délibérations du Comité

6.1 Avant d'examiner toute requête faisant l'objet d'une communication, le Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement intérieur, décider si elle est ou non recevable au sens du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

6.2 Le paragraphe 2 b)de l'article 5 du Protocole facultatif n'autorise pas le Comité à examiner une communication, si l'auteur n'a pas épuisé tous les recours internes disponibles. Le Comité constate qu'en dépit de la déclaration de l'auteur selon laquelle il croit que son affaire sera examinée par la section judiciaire en 1990, aucune demande d'autorisation de former un recours auprès de la section judiciaire du Conseil privé ne semble avoir été déposée. Le Comité en conclut que les conditions fixées au paragraphe 2 b)de l'article 5 du Protocole facultatif ne sont pas remplies.

7. Le Comité des droits de l'homme décide en conséquence :

a) Que la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 2 b)de l'article 5 du Protocole facultatif:

b) Que dans la mesure où cette décision peut être reconsidérée, conformément au paragraphe 2 de l'article 92 du règlement intérieur du Comité, à la réception d'une demande écrite par l'auteur ou en son nom contenant des informations indiquant que les motifs d'irrecevabilité ne sont plus valables, il sera demandé à 1'Etat partie, conformément à l'article 86 du règlement intérieur du Comité, de surseoir à l'exécution de l'auteur pour lui laisser le temps, une fois épuisés les recours internes utiles qui lui sont disponibles, de demander au Comité de réexaminer la présente décision:

c) Que le texte de la présente décision sera communiqué à 1'Etat partie et à l'auteur de la communication.



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