University of Minnesota



Willard Collins c. Jamaïque, Communication No. 240/1987, U.N. Doc. CCPR/C/43/D/240/1987 (1991).



Comité des droits de l'homme
Quarante-troisième session

Constatations du Comité des droits de l'homme au titre du paragraphe 4 de l'article 5
du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits
civils et politiques -quarante-troisième session

concernant la

Communication No 240/1987


Présentée par : Willard Collins (représenté par un avocat)

Au nom de : L'auteur

Etat partie : Jamaïque

Date de la communication : 25 août 1987 (date de la première lettre)

Date de la décision concernant la recevabilité : 2 novembre 1988

Le Comité des droits de l'homme, institué conformément à l'article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le ler novembre 1991,

Avant examiné la communication No 240/1987, présentée au Comité par Willard Collins, en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Avant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été fournies par l'auteur de la communication et par 1'Etat partie intéressé,

Adopte ses constatations au titre du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif

Les faits tels qu'ils ont été présentés par l'auteur

1. L'auteur de la communication, datée du 25 août 1987, est Willard Collins, citoyen jamaïquain actuellement détenu à la prison du district de Ste Catherine (Jamaïque), où il attend d'être exécuté. Il affirme être victime d'une violation, par le Gouvernement jamaïquain, des articles 7, 10 et 14, paragraphes 1, 2 et 3 e) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il est représenté par un avocat.

2.1 L'auteur est un ancien brigadier des forces de police jamaïquaines. Il a été arrêté le 16 juin 1981 pour le meurtre, le 23 novembre 1980, d'un certain Rudolph Johnson dans le district de Ste Catherine (Jamaïque). L'accusation a soutenu que l'auteur avait abattu la victime avec son arme de service parce qu'elle lui devait une importante somme d'argent et qu'il avait demandé à un chauffeur de taxi, un certain C. E., de le conduire avec la victime jusqu'au lieu du crime et de l'aider à se débarrasser du cadavre.

2.2 C. E. avait été initialement arrêté le 28 novembre 1980 et placé en détention pour la même affaire. Quelques mois plus tard, il était remis en liberté sur ordre du policier enquêteur, un certain inspecteur R. G., qui s'était chargé de l'enquête de police de sa propre initiative, selon l'auteur, parce qu'il était le beau-frère de C. E. et le père d'une petite fille dont la mère était la soeur de C. E. C. E. était devenu par la suite le principal témoin à charge et n'était censé être qu'un témoin oculaire du crime.

2.3 L'auteur a d'abord été amené devant le Manistrates Court (tribunal de première instance)de Portland qui devait examiner sa demande de mise en liberté sous caution et indiquer où l'audition préliminaire devait avoir lieu. Le juge a fait droit à la demande de l'auteur qui souhaitait que l'audition préliminaire ait lieu ailleurs qu'à Portland étant donné qu'il était bien connu dans la région de Portland et qu'il n'était pas sûr d'y être jugé équitablement. Plus particulièrement, l'auteur était bien connu des associés en affaires du juge lui-même avec lesquels on savait qu'il entretenait de mauvaises relations. Lors de la procédure d'examen de la requête, le juge
avait déclaré, apparemment en aparté seulement, que s'il devait juger l'auteur, il veillerait à ce qu'il soit condamné à la peine capitale.

2.4 L'audition préliminaire a eu lieu à Spanish Town, dans le district de Ste Catherine, le 15 octobre 1981; le juge a ordonné que M. Collins soit jugé pour meurtre. L'inspecteur G., qui était alors en poste dans un autre district (Kingston), a néanmoins conservé la responsabilité de l'enquête de police.

2.5 Le procès de l'auteur a débuté devant le Circuit Court (tribunal de circuit)de Ste Catherine à Spanish Town, le 7 janvier 1982. L'auteur était représenté par Me F. P., avocat de la Couronne, assisté d'un avocat stagiaire A. W. Bien que l'accusation ait affirmé que l'auteur avait abattu M. Johnson sans qu'il y ait eu provocation, aucun motif plausible n'a pu être donné pour expliquer pourquoi il l'avait tué. Il ressortait des arguments avancés par l'accusation que M. Collins avait voulu acheter une voiture à un tiers par l'intermédiaire de la victime et qu'il avait abattu M. Johnson pour ne pas payer le solde de la somme due pour l'achat de la voiture. Tout au long du procès, l'auteur a soutenu que c'était C. E. lui-même qui avait commis le crime et qu'il avait utilisé son arme de service qu'il lui avait subtilisée dans son appartement. M. Collins affirme en outre qu'il n'a jamais envisagé de ne pas régler sa dette à la victime et soutient que le solde a été versé conformément à un accord qu'il avait demandé au directeur de sa banque d'établir. Le directeur de la banque, D. A., a confirmé cette version des faits lors du premier procès.

2.6 Au cours du procès, en janvier 1982, plusieurs temoins,
y compris des membres de la famille de l'auteur, ont déposé en sa faveur, confirmant qu'il était chez lui au moment où la victime était censée avoir été abattue. Cinq des 12 jours pendant lesquels a duré le procès ont été consacrés aux dépositions des témoins de la défense. A l'issue du procès, le jury n'est pas parvenu à rendre un verdict. Un nouveau procès a été ordonné et l'auteur placé en détention provisoire.

2.7 Le nouveau procès a débuté devant le Home Circuit Court de Kingston, le 24 octobre 1983. M. Collins était représenté par Me H. C., avocat de la Couronne. L'auteur fait valoir que l'inspecteur G. a continué à orienter les débats et à manipuler les jurés. Le juge G., qui avait eu à connaître d'affaires antérieures contre l'auteur devant le Magistrates Court de Portland a été chargé de présider le tribunal devant lequel a eu lieu le nouveau procès: l'auteur s'est plaint immédiatement auprès de son avocat que le juge était de parti pris, compte tenu de ce qui est dit au paragraphe 2.3 ci-dessus. Me H. C., lui a dit qu'on n'y pouvait rien.

2.8 L'auteur note que, le 26 octobre 1983, deux témoins qui étaient présents au tribunal et prêts à témoigner en sa faveur, Mme B. H. et Mme Bl. H., avaient vu trois membres du jury monter dans une voiture de police conduite par l'inspecteur G. Bl. H. avait suivi la voiture jusqu'à une rue tranquille où elle avait entendu G. et son adjoint parler aux membres du jury, leur dire qu'il comptait sur eux et leur demander de l'appuyer. B1. H. avait assisté à une scène analogue le lendemain et avait alors informé l'avocat, en présence de l'auteur, de la tentative de subomation des jurés dont elle avait été témoin. Me H. C. avait promis d'en informer le juge, mais ne l'avait pas fait. L'auteur le lui avait rappelé le 28 octobre 1983, dernier jour du procès, mais il se serait entendu répondre qu'il était trop tard pour agir.

2.9 Enfin, l'auteur indique qu'un autre témoin qui aurait pu valablement témoigner que C. E. était le meurtrier et avait en fait utilisé l'arme de service de l'auteur pour tuer la victime, était prêt à déposer en sa faveur au cours du deuxième procès. Ce témoin déclare lui-même qu'il était disposé à témoigner lors du premier procès mais qu'il en avait été empêché par l'inspecteur G. et par C. E. qui menaçaient de le tuer, ainsi que sa famille, si jamais il déposait devant le tribunal. Ce témoin avait donc dû partir dans
une province éloignée. Lorsqu'il était revenu à Spanish Town, il avait été attaqué par un groupe d'individus parmi lesquels se trouvait C. E..En conséquence, le témoin n'avait pas assisté au nouveau procès.

2.10 Le 28 octobre 1983, l'auteur a été reconnu coupable et condamné a mort. Il déclare que son deuxième procès n'a duré que cinq jours parce qu'aucun des témoins appelés à déposer en sa faveur lors du premier procès n'a ete cite à comparaître lors du deuxième procès. Il en rend son avocat, Me H. C., responsable, ainsi que l'inspecteur G. Il fait observer à cet égard que son avocat lui avait fait savoir qu'il souhaitait que le procès ne se poursuive pas au-delà du vendredi 28 octobre, parce qu'il avait d'autres obligations professionnelles qui l'appelaient dans une autre partie du pays au début de la semaine suivante. L'auteur fait observer en outre que le jury a été invité à délibérer pour rendre son verdict tard dans l'après-midi du vendredi, de sorte qu'il avait été contraint par le temps de prendre rapidement une décision.

2.11 L'auteur a interjeté appel devant la Cour d'appel de la Jamaïque qui l'a débouté le 11 février 1986. Il indique qu'il a eu beaucoup de difficultés à obtenir une copie de l'arrêt de la Cour d'appel. En ce qui concerne la possibilité d'adresser une demande d'autorisation spéciale de recours devant la Section judiciaire du Conseil privé, il fait observer que l'avocat ! principal, à Londres, ayant estimé qu'une telle demande n'était pas fondée, cette voie de recours ne lui est pas ouverte.

2.12 Pour ce qui est des conditions de sa détention, l'auteur indique qu'à plusieurs occasions il a fait l'objet de mauvais traitements dans les cellules réservées aux condamnés à mort où il 6e trouve. Le 28 mai 1990, il faisait partie d'un certain nombre de prisonniers soumis à une fouille corporelle par une soixantaine de gardiens de prison qui non seulement ont blessé l'auteur, mais l'ont aussi obligé à se déshabiller devant d'autres détenus, des gardiens, des soldats et des policiers , ce qui est contraire aux dispositions
du paragraphe 3 de l'article 192 de la Jamaïcan Prisons Act (loi sur les prisons jamaïquaines) de 1947. Lorsque l'auteur a voulu invoquer ses droits en vertu de cette disposition, il a été roué de coups par trois gardiens dont l'un d'eux l'a frappé plusieurs fois avec une lourde matraque. Son avocat s'est plaint de ce traitement aux autorités et à 1'Ombudsman parlementaire; aucune suite n'a été donnée à cette plainte, à la connaissance de l'auteur ou de son avocat, bien que l'auteur ait demandé officiellement que les gardiens soient punis. A plusieurs occasions ultérieures, en particulier le 10 septembre 1990, lorsqu'il s'est plaint à un gardien qui avait intercepté son courrier et parfois ne le lui avait pas remis, l'auteur a été physiquement agressé. Blessé à la main, il a dû recevoir des soins médicaux et on lui a fait plusieurs points de suture.

Teneur de la plainte

3.1 L'auteur affirme que iors de son second procès en octobre 1983, il a été victime de violations des droits énoncés aux paragraphes 1, 2 et 3 e) de l'article 14 du Pacte. Il déclare en particulier que le juge était de parti pris contre lui, comme le prouve la déclaration faite précédemment par celui-ci au Tribunal de première instance de Portland. De l'avis de l'auteur, la désignation du juge revient à une violation des droits qui devraient lui garantir l'égalité devant les tribunaux, que sa cause soit entendue équitablement par un tribunal impartial et qu'il soit présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. L'auteur précise à cet égard que la règle générale suivie dans les affaires pénales en Jamaïque veut que le juge du fond n'ait pas été précédemment impliqué dans l'affaire et qu'il n'ait eu auparavant aucun contact avec l'accusé, à moins que ces faits aient été portés à la connaissance de toutes les parties et qu'aucune objection n'ait été formulée. Il ajoute que cette règle générale a été instituée en raison du fait que les règles applicables à la présentation de preuves lors d'audiences préliminaires dans les affaires pénale6 ne Sont pas aussi Strictes que celles qui sont appliquées lors des procès eux-mêmes et qu'en conséquence il faut éviter que le juge du fond ne recueille des preuves de cette manière au cours des premières étapes de la procédure. Dans le cas de l'auteur, cette règle n'a pas été respectée.

3.2 Quant à l'affirmation selon laquelle l'inspecteur G. aurait suborné le jury, l'auteur indique que si de telles allégations sont rares dans les affaires où la peine capitale peut être prononcée, le cas s'est néanmoins déjà produit en Jamaïque. En l'occurrence, l'inspecteur G. s'est chargé d'une enquête de police dans une affaire le touchant personnellement en raison de ses liens de parenté avec C. E., que l'auteur soupçonne d'être le meurtrier de M. Johnson. L'auteur affirme que le fait que G., au cours du second procès,
ait suborné des membres du jury, y compris son président, et qu'il ait exercé des pressions sur un principal témoin à décharge qui aurait pu autrement déposer en sa faveur, constitue une grave violation de ses droits en vertu des paragraphes 1 et 2 de l'article 14.

3.3 L'auteur affirme que la façon dont H. C. a assuré sa défense au cours du second procès l'a en réalité privé d'un jugement équitable et constitue une violation de son droit, consacré au paragraphe 3 e) de l'article 14, à faire entendre les témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. En effet, l'avocat a négligé de citer plusieurs témoins qui étaient présents au tribunal pendant toute la durée du second procès et qui étaient prêts à déposer en sa faveur, dont B. H. et Bl. H.; il n'a pas non plus fait en sorte que le directeur de la banque de l'auteur témoigne au second procès alors qu'il avait été entendu au premier procès.

3.4 L'auteur déclare en outre que le fait qu'il ait été dans l'impossibilité de présenter son alibi au cours du second procès est particulièrement grave, compte tenu du manque de poids des arguments de l'accusation, qui étaient fondés sur la déposition d'un témoin initialement mis en détention pour la même affaire et qui, au moment de sa comparution, venait de purger une peine de 18 mois d'emprircnnement pp11r le vol de trois véhicules. A son avis, ces faits confirment qu'il y a eu violation des paragraphes 1 et 3 e) de l'article 14 : l'absence de témoins de la défense constitue une violation du principe fondamental selon lequel tout jugement doit être équitable et, en ayant négligé de veiller à la comparution des témoins à décharge devant le tribunal, H. C. a contribué à la violation flagrante des droits de l'auteur.

3.5 L'auteur déclare que les violences physiques dont il a été victime dans le quartier des condamnés à mort en mai et septembre 1990, ainsi que l'interception de son courrier, constituent des violations de ses droits en vertu de l'article 7 et du paragraphe 1 de l'article 10 du Pacte. Il ajoute que l'inspecteur G. est désormais responsable de la prévention de la délinquance dans le district de Ste Catherine, où se trouve la prison, et qu'il craint que ce dernier ne fasse usage de son autorité pour l'agresser à nouveau.

3.6 Enfin, il affirme que sa détention dans le quartier de6 condamnés a mort de la prison du district de Ste Catherine depuis le 28 octobre 1983 constitue une violation distincte de l'article 7 car les graves pressions psychologiques auxquelles le soumet le fait qu'il est toujours incertain de son sort ne sont pas liées à l'application de la loi , mais résultent d'une volonté essentiellement politique.

3.7 Quant à la question de l'épuisement des recours internes, l'avocat a fait observer que conformément à la jurisprudence du Comité, les recours doivent être à la fois disponibles et utiles et que 1'Etat partie a l'obligation de prouver qu'il y a des raisons de croire que les recours internes seront utiles. Il affirme que ni une demande d'autorisation spéciale de saisir la Section judiciaire du Conseil privé, ni une motion constitutionnelle auprès de la Cour suprême de la Jamaïque ne seraient un recours utile.

3.8 A ce sujet, l'auteur affirme que l'affaire ne peut pas relever des paragraphes 1 et 2 de l'article 110 de la Constitution jamaïquaine énonçant les cas dans lesquels la Cour d'appel peut donner l'autorisation de former un recours devant la Section judiciaire du Conseil privé. Tout d'abord, la question de l'interprétation de la Constitution jamaïquaine ne s'est posée à aucune étape de la procédure judiciaire, ce qui signifie que le paragraphe 1 c) de l'article 110 ne s'applique pas. Deuxièmement, les conditions générales énoncées au paragraphe 2 a)de l'article 110 (" la question qui fait l'objet du recours est de celles qui, pour des raisons majeures d'intérêt général, public ou autre, doivent être soumises au Conseil privé") ne sont pas remplies en l'espèce.

3.9 A propos du pouvoir conféré à la Section judiciaire en vertu du paragraphe 3 de l'article 110 de la Constitution d'accorder une autorisation spéciale de former un recours contre une décision de la Cour d'appel, l'avocat indique que toute demande d'autorisation spéciale suppose que l'avocat principal a rendu une opinion affirmant qu'une telle démarche est utile. Dans le cas de l'auteur, l'avocat principal, qui est le président du Conseil des avocats du Royaume-Uni, a déclaré que les questions de fond intervenant dans l'affaire ne relevaient pas de la compétence limitée de la Section judiciaire. Il estime que même si les accusations portées contre l'auteur au cours du second procès ont manqué de substance et si la défense n'a pas été convenablement assurée, il reste peu probable que la Section judiciaire accorde l'autorisation spéciale de former un recours sur ces points.

3.10 Si, dans ces conditions, l'auteur présentait une demande à la Section judiciaire, il irait à l'encontre d'un avis juridique émanant d'une personnalité hautement qualifiée, selon lequel la démarche serait inutile; l'avocat estime que l'auteur, qui a dûment examiné la possibilité de saisir la Section judiciaire, ne doit pas ensuite être pénalisé pour s'être conformé à l'opinion de l'avocat principal. Enfin, il lui semble que le fait d'en appeler à la Section judiciaire dans des cas où la demande a peu de chance d'aboutir, ne ferait que grossir le nombre des requêtes non fondées qui lui sont présentées, ce qui ne pourrait que nuire à la procédure judiciaire suivie devant cette instance. Tel ne peut pas avoir été le but des dispositions de l'article 5 du Procotole facultatif.

3.11 L'avocat affirme en outre que la présentation d'une motion constitutionnelle à la Cour suprême ne constitue pas pour l'auteur un recours interne utile. Il avance trois arguments dans ce sens : tout d'abord, le recours à l'article 25 de la Constitution jamaïquaine, qui prévoit la "protection" des droits individuels garantis au Titre III de la Constitution, y compris le droit à un procès équitable, ne constituerait pas un recours utile en l'espèce, car la "protection" au sens de l'article 25 supposerait la réouverture du second procès, ce qui, plus de 10 ans après le meurtre de M. Johnson, ne serait guère réalisable. Deuxièmement, la condition énoncée au paragraphe 2 de l'article 25, selon laquelle la Cour suprême n'exercera pas ses pouvoirs si elle estime que la personne intéressée a disposé ou dispose de voies de recours appropriées en ce qui concerne la contravention alléguée
s'applique dans le cas de l'auteur. Enfin, l'auteur ne dispose pas de recours constitutionnel car 1'Etat partie n'accorde pas d'aide judiciaire en vue de la présentation de motions constitutionnelles à la Cour suprême et les avocats en Jamaïque ne sont généralement pas disposés à défendre ce type de cause à titre gratuit.

Observations de 1'Etat partie

4. Dans sa réponse en date du 20 juillet 1988, 1'Etat partie soutient que la communication est irrecevable au motif du non-épuisement des recours internes, étant donné que l'auteur conserve le droit , en vertu de l'artice 110 de la Constitution jamaïquaine, de demander à la Section judiciaire du Conseil privé l'autorisation spéciale de former recours. Il ajoute que l'arrêt de la Cour d'appel de la Jamaïque a été publié le 17 mars 1986 et qu'il était à la disposition de l'auteur et de son avocat; l'auteur pourra bénéficier d'une aide judiciaire en vertu du paragraphe 1 de l'article 3 du Poor Prisoners' Defence Act (loi relative à la défense des détenus nécessiteux) pour former
un recours devant la Section judiciaire.

Considérations et décision du Comité sur la recevabilité

5.1 A sa trente-quatrième session, le Comité a examiné la recevabilité de la communication. S'agissant de l'épuisement des recours internes, il a conclu qu'en l'occurrence, la possibilité de demander une autorisation spéciale de saisir la Section judiciaire du Conseil privé ne constituait pas un recours disponible et utile au sens du Protocole facultatif. En outre, il a estimé qu'un retard anormalement long était intervenu jusqu'à la remise des copies de l'arrêt de la Cour d'appel de la Jamaïque, dont la présentation à la Section judiciaire est une condition préalable et nécessaire à l'examen d'une demande d'autorisation de former recours, Ainsi, dans le cas de
M. Collins, il n'a pas été contesté que près de deux ans après avoir été débouté de son appel, il n'avait toujours pas reçu de copie de l'arrêt de la Cour d'appel.

5.2 En conséquence, le 2 novembre 1988, le Comité des droits de l'homme a décidé que la communication était recevable.

Objections de 1'Etat partie à la décision de recevabilité et demande de précisions formulées par le Comité

6.1 Dans deux réponses datées du 25 mai 1989 et du 22 février 1990, 1'Etat partie rejette les conclusions du Comité sur la recevabilité et conteste le raisonnement exposé au paragraphe 5.1 ci-dessus. Il affirme en particulier que le fait que le paragraphe 3 de l'article 110 de la Constitution prévoit que l'octroi de l'autorisation spéciale est laissé à la libre discrétion de la Section judiciaire du Conseil privé, ne libère pas M. Collins de son obligation de former ce recours. Il affirme que "un recours n'en reste pas moins un recours, même s'il comporte, dans sa structure même, une étape préliminaire par laquelle l'auteur doit nécessairement passer avant que le recours lui-même soit véritablement applicable. En 1 'occurrence, la demande adressée au Conseil privé pour obtenir une autorisation spéciale de faire appel des décisions de la Cour d'appel est examinée par une instance judiciaire et la décision est prise dans le plein respect de la procédure et pour des motifs raisonnables. Le Conseil privé refuse cette autorisation s'il estime que le recours n'a pas de chance d'aboutir. En conséquence, même lorsque l'autorisation spéciale est refusée, l'auteur ne peut pas prétendre qu'il a été privé de
moyens de recours . . . ".

6.2 De l'avis de 1'Etat partie, l'interprétation donnée par le Comité du paragraphe 2 b)de l'article 5 du Protocole facultatif, selon laquelle un recours interne doit être à la foi6 disponible et utile, ne sert qu'à masquer le véritable sens des dispositions du Protocole facultatif. En l'espèce, l'utilité du recours doit en tout état de cause être prouvée par le fait que la Section judiciaire est habilitée à recevoir l'appel.

6.3 L'Etat partie affirme que même si la Section judiciaire rejetait la demande d'autorisation spéciale de former recours de l'auteur, la
communication resterait irrecevable au motif du non-épuisement des recours internes, car M. Collins conserverait le droit de former un recours en constitutionnalité auprès de la Cour suprême (constitutionnelle), en alléguant une violation de son droit à un jugement équitable garanti à l'article 20 de la Constitution.

6.4 Considérant qu'un complément d'information sur le recours constitutionnel qui, selon 1'Etat partie, reste ouvert à M. Collins l'aiderait dans l'examen de la communication, le Comité a adopté une décision interlocutoire le 2 novembre 1989, au cours de sa trente-septième session. Dans cette décision, 1'Etat partie était prié de préciser si la Cour suprême (constitutionnelle) avait déjà eu l'opportunité de statuer sur la question de savoir si, conformément au paragraphe 2 de l'article 25 de la Constitution jamaïquaine,
un appel à la Cour d'appel et à la Section judiciaire du Conseil privé constituait un "moyen adéquat de réparation" pour un individu qui prétend que son droit à un procès équitable, tel qu'il est garanti au paragraphe 1 de l'article 20 de la Constitution, a été violé. Dan6 l'affirmative, 1'Etat partie était également prié de préciser si la Cour suprême (constitutionnelle) avait, dans le passé, refusé d'exercer les pouvoirs qui lui incombaient en vertu du paragraphe 2 de l'article 25, à l'égard de tels recours, au motif que des moyens adéquats de réparation étaient déjà disponibles. Dans sa réponse datée du 22 février 1990, 1'Etat partie a fait savoir que la Cour suprême (constitutionnelle) n'avait pas encore eu l'opportunité d'examiner la question. Il a rappelé sa demande du 25 mai 1989 tendant à ce que le Comité, conformément au paragraphe 4 de l'article 93 de son règlement intérieur, revoie sa décision sur la recevabilité.

6.5 En juin 1991, l'avocat de l'auteur a informé le Comité que la Cour suprême (constitutionnelle)avait rendu un jugement dans le cas d'Ear1 Pratt et dans celui d'Ivan Morgan, pour le compte desquels des motions constitutionnelles avaient été présentées plus tôt dans l'année. Le 6 avril 1989, le Comité des droits de l'homme avait adopté ses constatations concernant ces cas, aux termes du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif : voir documents CCPR/C/35/D/210/1986 et 225/1987. Compte tenu de ce jugement et afin de mieux se rendre compte si une action auprès de la Cour suprême (constitutionnelle)était un recours que l'auteur devait épuiser au sens du Protocole facultatif, le Comité a adopté une deuxième décision interlocutoire le 24 juillet 1991, au cours de sa quarante-deuxième session. Dans cette décision, 1'Etat partie était prié de fournir de6 information6 détaillées 6ur les possibilités d'assistance judiciaire ou de représentation judiciaire gratuite pour les recours en vertu de la Constitution ainsi que de6 exemples de cas dan6 lesquels une assistance judiciaire aurait été accordée ou bien dans lesquels le demandeur aurait pu s'assurer une représentation judiciaire gratuite. L'Etat partie n'a pas communiqué ces informations dans les délais fixés par le Comité soit avant le
26 septembre 1991. Dans une réponse du 10 octobre 1991 concernant une autre affaire, 1'Etat'partie a fait observer qu'il n'existait en droit jamaïquain aucune disposition prévoyant qu'une assistance judiciaire serait accordée pour la présentation de motions constitutionnelles et que le Pacte ne faisait pas obligation à 1'Etat partie de fournir une assistance judiciaire à cette fin.

6.6 Dans les deux décisions interlocutoires susmentionnées, ainsi que dans une note verbale datée du 18 avril 1990 qui lui a été adressée par le secrétariat du Comité, 1'Etat partie a en outre été prié de communiquer des informations et des observations sur le fond des allégations de l'auteur. Dans sa décision interlocutoire du 24 juillet 1991, le Comité a ajouté que si aucune observation n'était formulée par 1'Etat partie sur les allégations de 1 'auteur quant au fond, il pourrait décider d'examiner celles-ci en bonne et
due forme.

6.7 En dépit des demandes et rappels répétés que lui a adressés le Comité, 1'Etat partie n'a pas communiqué d'informations détaillées ni d'observations sur les allégations de l'auteur quant au fond. A cet égard, il s'est contenté de faire observer, dans une réponse datée du 4 septembre 1990, que dans sa présentation des faits, M. Collins soulevait de6 questions ayant trait aux faits de la cause et aux preuves, qu'il n'appartenait pas au Comité d'apprécier, invoquant à l'appui de son affirmation une dkcisioi: adoptée par le Comité des droits de l'homme en novembre 1989.

Examen après la décision de recevabilité et examen de la communication autant au fond

7.1 Compte tenu de ce qui précède, le Comité décide de poursuivre l'examen de la communication. Il a pris note de la position de 1'Etat partie formulée après la décision sur la recevabilité et expose plus en détail ci-après ses conclusions concernant sa décision.

7.2 Le Comité a pris note de l'affirmation de 1'Etat partie selon laquelle le fait que le paragraphe 3 de l'article 110 de la Constitution jamaïquaine prévoit que la Section judiciaire du Conseil privé n'a qu'un pouvoir limité d'accorder une autorisation spéciale de former recours ne signifie pas que l'auteur est dispensé de former ce recours.

7.3 Le Comité reconnaît que si le pouvoir de la Section judiciaire d'accorder une autorisation spéciale de former recours en vertu du paragraphe 3 de l'article 110 de la Constitution est effectivement discrétionnaire, l'auteur d'une communication soumise en vertu du Protocole facultatif n'est pas pour autant dispense de 6on obligation d'exercer ce recours. Toutefois, pour les raisons indiquées ci-desSous, le Comité estime que le cas examiné ne relève pas de la compétence de la Section judiciaire , ainsi que l'a déclaré aussi l'avocat principal en l'espèce.

7.4 Pour déterminer si l'autorisation de saisir la Section judiciaire peut être accordée, la Cour d'appel de la Jamaïque doit normalement vérifier, conformément aux paragraphes 1 c)et 2 a)de l'article 110 de la Constitution jamaïquaine, si, la procédure fait intervenir une question d'interprétation de ladite Constitution ou une question qui pour des raisons majeures d'intérêt général, public ou autre doit être soumise au Conseil privé. En vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par le parapraphe 3 de l'article 110, la Section judiciaire tient compte des mêmes considérations. Pour accorder l'autorisation spéciale de former recours, la Section judiciaire se préoccupe
des raisons d'intérêt public découlant de l'interprétation des questions de droit en cause, telles que les règles qui régissent les procédures d'identification. Il n'existe pas de précédent qui justifierait de conclure que la Section judiciaire examinerait des allégations d'irrégularités dans l'administration de la justice ou se considérerait elle-même compétente pour enquêter sur la conduite d'une affaire criminelle. Ces questions sont, toutefois, essentielles dans la plainte de l'auteur, laquelle ne soulève par ailleurs aucune question de droit présentant un intérêt général ou public. En 1'occurrence, le Comité note que l'appréciation des éléments de preuve et la récapitulation faite par le juge des questions de droit en cause n'avaient pas un caractère tendancieux et n'équivalaient pas non plus à un déni de justice et que l'arrêt de la Cour d'appel portait à l'évidence 6ur les motifs de l'appel.

7.5 En l'espèce, le Comité estime qu'une demande d'autorisation spéciale de former recours devant la Section judiciaire du Conseil priyé n'aurait aucune chance d'aboutir; en conséquence, pareille demande ne constitue pas un recours utile au sens du Protocole facultatif.

7.6 Il en va de même pour ce qui est de la possibilité pour l'auteur d'obtenir gain de cause en formant un recours en constitutionnalité auprès de la Cour suprême (constitutionnelle). Un recours n'est pas "disponible" au sens du Protocole facultatif si, comme dans l'affaire considérée, aucune aide judiciaire n'est accordée pour déposer une motion constitutionnelle et aucun avocat n'est disposé à représenter gratuitement l'auteur à cette fin. Le Comité rappelle que dan6 les cas où la peine capitale risque d'être prononcée, l'aide judiciaire doit non seulement être disponible, mais également permettre à l'avocat de préparer la défense de son client dans des conditions propres à assurer que justice soit faite.

7.7 Pour les raisons exposées ci-dessus,
le Comité estime qu'une demande d'autorisation spéciale de former un recours devant la Section judiciaire du Conseil privé et une motion constitutionnelle auprès de la Cour suprême (constitutionnelle) ne sont pas des recours que l'auteur aurait dû épuiser au sens du Protocole facultatif. Il conclut en conséquence qu'il n'a pas de raison de revoir sa décision sur la recevabilité du 2 novembre 1988.

8.1 S'agissant des violations présumées du Pacte, quatre questions principales se posent au Comité : a) Le fait que le second procès de l'auteur ait été présidé par un juge ayant été précédemment impliqué dans l'affaire constitue-t-il une violation des droits de l'auteur en vertu des paragraphes 1 et 2 de l'article 14 du Pacte ? b) Le fait que le policier enquêteur ait apparemment suborné des membres du jury et intimidé des témoins constitue-t-il une violation des dispositions susmentionnées ? c) Le fait que l'avocat de l'auteur ait négligé d'entendre des témoins à décharge lors du second procès constitue-t-il une violation du paragraphe 3 e)de l'article 14 ? d) Les mauvais traitements qui auraient été infligés à l'auteur dans le quartier des condamnés à mort constituent-ils des violations des articles 7 et 10 ?

8.2 En ce qui concerne les allégations de M. Collins quant au fond, le Comité déplore que bien qu'il ait été prié à plusieurs reprises de fournir des éclaircissements (demande réitérée dans deux décisions interlocutoires adoptées après la décision sur la recevabilité prise le 2 novembre 1988), 1'Etat partie se soit contenté de déclarer que les faits invoqués par l'auteur tendaient à soulever des questions ayant trait aux faits de la cause et aux preuves, qu'il n'appartenait pas au Comité d'apprécier. Le Comité ne peut qu'interpréter cette déclaration comme le refus de 1'Etat partie de coopérer conformément au paragraphe 2 de l'article 4 du Protocole facultatif, selon lequel 1 'Etat partie est tenu d'enquêter de bonne foi sur toutes les allégations de violation du Pacte formulées contre lui et ses autorités judiciaires et de transmettre au Comité tous les renseignements dont il dispose. En rejetant sommairement les allégation6 de l'auteur, comme il le fait dans le cas présent, 1'Etat partie ne respecte pas les conditions énoncées au paragraphe 2 de l'article 4. En l'espèce, toute l'importance voulue doit être accordée aux allégations de l'auteur, dans la mesure où elles sont étayées par des informations crédibles.

8.3 Le Comité n'accepte pas l'argument de 1'Etat partie selon lequel la communication tend simplement à soulever des questions ayant trait aux faits de la cause et aux preuves, qu'il n'appartient pas au Comité d'apprécier. Il a toujours maintenu dans sa jurisprudence qu'il appartenait en principe aux cours d'appel des Etats parties au Pacte d'apprécier le6 faits de la cau6e et les preuves dans une affaire particulière ou de vérifier les instructions spécifiques données au jury par le juge, sauf s'il pouvait être établi que lesdites instructions étaient incontestablement tendancieuses ou équivalaient à un déni de justice, ou encore que le juge avait manifestement violé son obligation d'impartialité (voir les constatations relatives à la communication No 253/1987 -Paul Kelly c. Jamaïque, décision du 8 avril 1991, par. 5.13). En l'occurrence, le Comité a été invité à examiner des faits qui relèvent de ce cas de figure. Après avoir examiné avec soin les informations dont il était saisi, le Comité ne peut conclure que les observations attribuées au juge G. au cours de la procédure de mise en accusation devant le tribunal de première instance de Portland se sont traduites par un déni de justice pendant le second procès de M. Collins devant le Home Circuit Court de Kingston. L'auteur n'a pas même démontré en quoi les instructions données au jury par le juge étaient tendancieuse6 ou empreintes de partialité. Le Comité observe en outre que le verdict du jury obligeait le juge à prononcer une condamnation à mort. Le Comité note également que, bien que l'auteur affirme qu'il a informé son avocat que le juge était de parti pris contre lui, l'avocat a estimé préférable de ne pas intervenir. Ce fait n'a pas non plus été évoqué en appel, bien que l'affaire ait été constamment suivie par un conseiller qualifié. Par ailleurs, même si ces observations ne sont pas fictives, en l'absence de preuves flagrantes établissant qu'il y a eu négligence professionnelle de la
part de l'avocat, il n'appartient pas au Comité de s'interroger sur le jugement de ce dernier. En conséquence, le Comité ne constate aucune violation des paragraphes 1 et 2 de l'article 14.

8.4 Les mêmes considérations s'appliquent aux tentatives de subornation des membres. du jury dont le policier chargé de l'enquête se serait rendu coupable. Lors d'un procès, l'obligation d'apprécier les faits de la cause et les preuves de façon indépendante et impartiale vaut également pour le jury; il est important que tous les jurés soient en mesure d'évaluer les faits et les preuves de façon objective , afin de pouvoir rendre un verdict équitable. Le Comité tient cependant à faire observer que si l'une des parties vient à prendre connaissance de prétendues irrégularités dans le comportement des jurés ou tentatives de subomation des membres du jury, elle doit en saisir le tribunal. Dans le cas présent, l'auteur affirme que son avocat a été informé, le 27 octobre 1983, que l'inspecteur G., le policier enquêteur, avait cherché à influencer les membres du jury. Or, l'avocat n'a pas communiqué cette information au juge et n'a pas tenté de récuser les jurés qui auraient été influencés par l'inspecteur G.; de l'avis du Comité, si l'avocat avait jugé que cette plainte était fondée, il en aurait saisi le tribunal. Aussi le Comité ne peut-il conclure en l'espèce que ies droits reconnus à M. Collins aux termes des paragraphes 1 et 2 de l'article 14 ont été violés par 1'Etat partie.

8.5 Pour ce qui est de l'affirmation de l'auteur selon laquelle il y a eu violation du paragraphe 3 e) de l'article 14, le Comité note qu'au moins deux témoins qui auraient été disposés a déposer en faveur de l'accusé étaient présents dan6 la salle d'audience au cours du second procès. Ces témoins n'ont pas été
cités à comparaître, en dépit des demandes répétées de l'auteur. L'avocat de l'auteur ayant été engagé à titre privé, la décision de ne pas entendre ces témoins ne peut pas en elle-même être imputée à 1'Etat partie. De l'avis du Comité, le fait que l'avocat n'a pas fait citer des témoins de la défense ne constitue pas une violation du droit reconnu à l'auteur aux termes du paragraphe 3 e)de l'article 14.

8.6 Quant à l'allégation de l'auteur selon laquelle. il aurait été victime de mauvais traitements dans le quartier des condamnés à mort, le Comité constate que 1'Etat partie n'y a pas répondu, bien qu'il en ait été prié. Il constate en outre que l'auteur s'est plaint auprès des autorités pénitentiaires, notamment du Directeur de la prison du district de Ste Catherine et de 1'Ombudsman parlementaire et a fait des déclarations sous serment à ce sujet. Si ce n'est que certains gardiens de prison qui avaient participé aux mauvais traitements infligés à l'auteur le 28 mai 1990 ont été déplacés, le Comité ignore si, 18 mois après les faits en question, les enquêtes menées sur
les allégations de l'auteur ont abouti ou si elles se poursuivent. En l'occurrence, l'auteur est censé avoir épuisé les recours internes
conformément au paragraphe 2 b)de l'article 5 du Protocole facultatif. Pour ce qui est des allégations quant au fond et en l'absence de toute information contraire de 1'Etat partie, le Comité juge les affirmations de l'auteur fondées et estime que le traitement subi par M. Collins le 28 mai 1990 et le 10 septembre 1990 constitue une violation du paragraphe 1 de l'article 10.

8.7 En ce qui concerne la plainte déposée par l'auteur au titre de l'article 7, le Comité constate qu'elle n'a pas non plus été réfutée par
1'Etat partie. Le bien-fondé de la plainte ayant été suffisamment étayé, le Comité conclut que les violences physiques dont M. Collins a été victime de la part de trois gardiens de la prison le 28 mai 1990 ainsi que les blessures dont il a été victime après avoir été à nouveau agressé le 10 septembre 1990, constituent un traitement cruel, inhumain et dégradant au sens de l'article 7 du Pacte.

9. Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif se r; tpportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est d'avis que les faits tels qu'ils lui ont été présentés font apparaître une violation de l'article 7 et du paragraphe 1 de l'article 10 du Pacte.

10. Des conclusions du Comité selon lesquelles il y a eu violation du Pacte découlent deux conséquences. Premièrement, la violation de l'article 7 du Pacte devrait cesser et l'auteur devrait être traité conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l'article 10. A ce propos, 1'Etat partie devrait informer rapidement le Comité des mesures prises pour mettre un terme aux mauvais traitements et pour protéger l'intégrité physique de l'auteur. L'Etat partie devrait également prendre des dispositions pour veiller à ce que de telles violations ne se reproduisent plus. Deuxièmement, une réparation adéquate devrait être accordée à l'auteur pour les violations qu'il a subies.

11. Le Comité souhaiterait que 1'Etat partie lui présente des informations dans les trois mois à compter de la date à laquelle la présente décision lui sera communiquée sur toutes mesures pertinentes qu'il aura prises en rapport avec ses constatations.



Page Principale || Traités || Recherche || Liens