University of Minnesota



Hendrika S. Vos c. Pays-Bas, Communication No. 218/1986, U.N. Doc. CCPR/C/35/D/218/1986 (1989).



Comité des droits de l'homme
Trente-cinquième session


Décision du Comité des droits de l'homme au titre du Protocole
facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux
droits civils et politiques - trente-cinquième session

concernant la

Communication No 218/1986



Présentée par : Hendrika S. Vos (représentée par M. E. Diepstraten)

Au nom de : L'auteur

Etat partie concerné : Pays-Bas

Date de la communication :
23 décembre 1986 (première lettre)

Date de la décision sur la recevabilité
: 24 mars 1988

Le Comité des droits de l'homme institué en vertu de l'article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 29 mars 1989,

Ayant achevé l'examen de la communication No 218/1986, présentée au Comité par Hendrika S. Vos en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été soumises par l'auteur de la communication et par 1'Etat partie intéressé,

Adopte ce qui suit :


CONSTATATIONS AU TITRE DU PARAGRAPHE 4 DE L'ARTICLE 5 DU PROTOCOLE FACULTATIF

1. L'auteur de la communication (première lettre du 23 décembre 1986, puis lettres des 5 et 26 mars 1987 et du 3 janvier 1989) est Hendrika S. Vos, citoyenne des Pays-Bas résidant dans ce pays, qui affirme être victime, de la part du Gouvernement néerlandais, d'une violation des droits visés à l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Hendrika S. Vos est représentée par un conseil.

2.1 L'auteur de la communication déclare qu'elle percevait depuis le ler octobre 1976 une pension d'invalidité que la Nouvelle Association générale des travailleurs d'entreprise lui versait en vertu de la loi générale sur l'invalidité (AAW), mais qu'en mai 1979, après le décès de son ex-mari (dont elle avait divorcé en 1957), et
conformément à l'article 32, paragraphe 1 b), de cette loi, sa pension d'invalidité a cessé de lui être versée, vu qu'elle remplissait alors les conditions requises pour bénéficier d'une allocation en vertu de la loi générale relative aux veuves et aux orphelins (AWW). En vertu de cette dernière loi, elle perçoit chaque mois 90 florins de moins qu'en vertu de la loi générale sur l'invalidité.

2.2 L'auteur indique qu'elle a d'abord attaqué la décision de la Nouvelle Association générale des travailleurs d'entreprises devant la cour d'appel d'Arnhem, mais que sa plainte pour discrimination a été rejetée le 10 mars 1980. Elle a alors présenté un recours devant la même cour d'appel, qui, par décision du 23 juin 1981, l'a rejeté comme non fondé. Un nouveau recours, dans lequel la requérante demandait l'application directe de l'article 26 du Pacte, a été formé auprès de la cour d'appel centrale, qui l'a rejeté le ler novembre 1983. En conséquence, tous les recours internes sont considérés comme épuisés.

2.3 L'auteur a fait valoir devant les tribunaux néerlandais que, puisqu'un handicapé de sexe masculin dont l '(ex-)épouse décède conserve son droit à une pension d'invalidité, l'article 32 de la loi générale relative aux veuves et aux orphelins établit une distinction indue fondée sur le sexe en prévoyant qu'une handicapée de sexe féminin dont l'(ex-)époux décède ne conserve pas le droit à une pension d'invalidité. Le paragraphe 1 b)de cet article stipule :

"1. La prestation d'invalidité cesse d'être versée lorsque :

b) Une femme à qui elle a été consentie est admise au bénéfice d'une pension de veuve ou d'une allocation temporaire de veuve au titre de la loi générale relative aux veuves et aux orphelins."

Dans son cas précis, elle soutient que l'application de la loi est particulièrement injuste, vu qu'elle était divorcée depuis 22 ans et qu'elle subvenait elle-même à ses besoins lorsqu'elle a été frappée d'invalidité. Elle soutient qu'elle doit être traitée comme une personne handicapée avant d'être traitée comme une veuve.

2.4 En rejetant le recours pour discrimination au sens de l'article 26 du Pacte, la cour d'appel centrale a, dans son arrêt du ler novembre 1983, jugé comme suit :

"Il ressort du texte de ces deux articles (art. 26 et 2, 1) du Pacte), pris conjointement, que l'article 26 ne s'applique pas seulement aux droits civils et politiques qui sont reconnus par le Pacte. Pour ce qui est de savoir si cet article peut être invoqué également, en l'espèce, en ce qui concerne un droit à la sécurité sociale, la cour exprime l'avis ci-après : Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ont été adoptés tous deux à la même date et au même endroit. La cour estime que le texte et la portée de ces deux instruments ne peuvent être dissociés des intentions des Etats parties : en effet, la genèse de ces deux textes montre que le projet initial d'élaborer un pacte unique avait été abandonné parce que les droits économiques, sociaux et culturels - à la différence des droits civils et politiques - ne peuvent de façon générale être mis en oeuvre que progressivement, par des mesures législatives et d'autres mesures d'application. Que les Etats qui ont élaboré ces pactes aient fait cette distinction, c'est ce que montre le fait que le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels prévoit simplement un système de rapports concernant la mise en oeuvre des droits qui y sont reconnus , alors que le Pacte relatif aux droits civils et politiques prévoit également un système d'examen de plaintes d'un Etat partie contre un autre Etat partie (régi par les articles 41 et suivants du Pacte)et un système d'examen de plaintes de particuliers contre un Etat partie (régi par le Protocole facultatif se rapportant au Pacte). Les critères de distinction liés aux structures sociales existantes qui se retrouvent dans les règlements en matière de sécurité sociale et qui peuvent être considérés comme discriminatoires (par exemple, la distinction homme/femme, célibataire/marié)ne peuvent être supprimés que progressivement par voie législative... Sur la base de ce qui précède, il faut conclure que l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ne peut être invoqué, en l'espèce, en ce qui concerne un droit à la sécurité sociale."

2.5 L'auteur, soutenant que la cour d'appel centrale a donné une interprétation inexacte de la portée de l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, demande au Comité de reconnaître que la cessation du paiement de la pension qu'elle touchait en vertu de la loi générale sur les pensions d'invalidité constitue une forme de discrimination fondée sur le sexe et la situation matrimoniale, en violation de l'article 26 du Pacte.

3. Par décision du 18 mars 1987, le Groupe de travail du Comité des droits de l'homme a transmis, en vertu de l'article 91 du règlement intérieur provisoire, la communication à 1'Etat partie intéressé, en le priant de soumettre tous renseignements et observations sur la question de la recevabilité de la communication.

4. Dans sa réponse, datée du 25 juin 1987, 1'Etat partie, se réservant le droit de présenter des observations sur le fond qui pourraient avoir certains rapports avec la question de la recevabilité, a suggéré au comité de lier la question de la recevabilité à l'examen du fond.

5. Le délai fixé à l'auteur pour qu'elle fît connaître ses vues sur la réponse de 1'Etat partie a expiré le 4 septembre 1987. Il n'a pas été reçu d'observation de la part de l'auteur.

6.1 Avant d'examiner les allégations contenues dans une communication, le Comité des droits de l'homme doit, selon l'article 87 de son règlement intérieur provisoire, décider si la communication est recevable conformément au Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

6.2 Aux termes du paragraphe 2, alinéa a), de l'article 5 du Protocole facultatif, le Comité ne peut examiner une communication si la même question est déjà en cours d'examen devant une autre instance internationale d'enquête ou de règlement : le Comité a donc vérifié que la présente affaire n'était pas en cours d'examen devant une autre instance internationale de ce type.

6.3 Aux termes du paragraphe 2, alinéa b), de l'article 5 du Protocole facultatif, le Comité ne peut examiner une communication si tous les recours internes n'ont pas été épuisés : le Comité a constaté que l'affirmation de l'auteur de la communication selon laquelle les recours internes avaient été épuisés n'avait pas été contestée.

7. En conséquence, le Comité des droits de l'homme a décidé le 24 mars 1988 que la communication était recevable et il a demandé à 1'Etat partie, conformément au paragraphe 2 de l'article 4 du Protocole facultatif, de lui soumettre par écrit, dans les six mois suivant la transmission de cette décision, des explications ou des déclarations éclaircissant la question et indiquant, le cas échéant, les mesures qu'il pourrait avoir prises.


8.1 Dans les observations qu'il a communiquées à ce titre au Comité ie 28 octobre 1988, 1'Etat partie, avant d'aborder le fond de la question, dit avoir pris note des vues antérieurement exprimées par le Comité au sujet de l'applicabilité de l'article 26 du Pacte aux droits en matière de sécurité sociale (communications CCPR/C/29/D/l72/1984, CCPR/C/29/D/180/1984 et CCPR/C/29/D/l82/1984)et se contente de réserver sa position sur ce point.

8.2 S'agissant du fond, 1'Etat partie explique comme suit la législation néerlandaise applicable en la matière
:

8.3 "La législation néerlandaise en matière de sécurité sociale prévoit des systèmes d'assurance pour les salariés et des systèmes d'assurance nationaux. Comme les systèmes d'assurance pour les salariés sont dénués de pertinence en l'espèce, il n'en sera pas question ici. Les systèmes nationaux d'assurance ont pour but d'assurer tous les résidents des Pays-Bas contre les conséquences financières de certains risques et garantissent aux survivants, aux personnes âgées et aux personnes frappées d'invalidité prolongée le versement d'une indemnité qui est calculée sur la base du salaire minimum fixé par la loi. Ces indemnités sont des prestations brutes, fixées à un niveau tel qu'après déduction de l'impôt et des primes d'assurance sociale, le montant net suffit pour assurer la subsistance du bénéficiaire."

8.4 "La loi générale sur l'invalidité (AAW), datée du 11 décembre 1975, a créé un système national d'assurance concernant l'invalidité prolongée, en vertu duquel quiconque est invalide depuis plus d'un an a droit à une pension de base. Si le bénéficiaire était employé à plein temps avant de devenir inapte au travail, il touche une pension complète (équivalente au minimum vital). S'il ne souffre que d'une invalidité partielle, la pension est réduite en conséquence; le montant de la pension versée est également calculé sur la base du nombre d'heures de travail effectué chaque semaine par le bénéficiaire avant son invalidité. Si le montant de la pension prévue par ,a 1'AAW est inférieur au minimum vital (c'est souvent le cas lorsque le
demandeur ne souffre que d'une invalidité partielle ou lorsqu'il travaillait à temps partiel avant son invalidité), une allocation complémentaire peut lui être versée en vertu de la loi nationale sur l'assistance (ABW)ou de la loi sur les allocations complémentaires (TW)."

8.5 "La loi générale du 9 avril 1956 relative aux veuves et aux orphelins (AWW)a créé un système national d'assurance qui habilite les veuves et les orphelins à recevoir des prestations basées sur le salaire minimum en cas de décès du mari ou du père. La raison d'être de la loi est qu'au décès d'un homme marié, sa veuve puisse disposer de moyens suffisants de subsistance. Lorsque la loi a été adoptée, on a estimé que si de bonnes raisons empêchaient la veuve de gagner sa vie (si, par exemple, elle devait encore s'occuper de ses enfants ou si elle était déjà trop âgée), il était souhaitable de lui verser une prestation. Dans certains cas, les femmes peuvent être admises au bénéfice de la loi en question même si elles sont divorcées du défunt."

8.6 "A l'époque où la loi générale relative aux veuves et aux orphelins (AWW) a été adoptée, c'était l'époux qui était habituellement le soutien de famille, et il était donc souhaitable de prendre des dispositions financières en faveur des personnes à charge en cas de mort prématurée du soutien de famille. Depuis quelques années, cependant, les femmes mariées sont de plus en plus nombreuses à travailler et les ménages composés de personnes non mariées se voient de plus en plus reconnaître le même statut que les familles
traditionnelles. Aussi le Gouvernement étudie-t-il depuis le début des années 80 la manière de modifier l'AWW, une des questions qui se posent étant de savoir si la position privilégiée dont jouissent les femmes en vertu de la loi est encore justifiée aujourd'hui."

8.7 "Il est trop tôt pour dire quelles dispositions contiendra la future loi sur les personnes à charge survivantes. Comme les Pays-Bas sont membres de la Communauté européenne, ils se conformeront de toute façon aux obligations qui découleront d'une directive de la Communauté actuellement à l'étude, visant l'égalité des sexes dans le cas des survivants; on pense que de nombreuses années s'écouleront avant que cette directive n'entre en vigueur. Mais il est possible aussi que le Gouvernement néerlandais dépose des projets de lois sur les survivants avant que la directive de la Communauté ne soit achevée."

8.8 "Dans tout système de sécurité sociale, il importe de veiller à ce que les particuliers ne soient pas habilités à bénéficier simultanément de plusieurs allocations en vertu de différentes lois sur la sécurité sociale, lorsque chacune de ces prestations a pour but d'assurer un revenu complet correspondant au minimum vital. C'est pourquoi les différentes lois en la matière contiennent des dispositions qui précisent à quelle prestation une personne a droit dans le cas où elle pourrait prétendre à en percevoir plusieurs à la fois. La disposition dont se plaint Mme Vos - à savoir le paragraphe 1 b)de l'article 32 de 1'AAW - relève de cette catégorie. Le Parlement a dû décider si les requérants remplissant les conditions nécessaires pour recevoir une pension en vertu de 1'AAW et de 1'AWW toucheraient la pension prévue par 1'AAW ou celle prévue par 1'AWW; et il a décidé que dans les cas de ce genre, c'était la pension prévue par 1'AWW qui serait versée. La décision d'adopter une règle sur la concurrence de droits, telle que le paragraphe 1 b) de l'article 32 de l'AAW, est fondée, notamment, sur des considérations d'ordre pratique relatives à l'application de la législation. 11 convient, par exemple, d'éviter d'avoir à enregistrer la personne considérée sur les registres de deux organes différents chargés du versement des pensions et d'avoir à percevoir l'impôt sur deux sources de revenu distinctes."

8.9 "Du point de vue des veuves, il est en général plus avantageux de recevoir la pension de 1'AWW que celle de 1'AAW. Si le Parlement s'était prononcé en sens contraire, de nombreuses veuves se seraient trouvées dans une situation moins favorable, vu que, dans la plupart des cas, la pension versée au titre de 1'AWW est supérieure à celle versée aux femmes mariées au titre de 1'AAW. Cela s'explique par le fait que la plupart des femmes mariées ont travaillé à temps partiel et, de ce fait, ne reçoivent qu'une pension partielle au titre de 1'AAW en cas d'invalidité prolongée. Cela ne veut pas dire que la règle de concurrence de droits, qui accorde la priorité à l'AWW, soit toujours avantageuse pour toutes les veuves : elle est simplement avantageuse pour la majorité d'entre elles. On peut concevoir des cas dans lesquels toucher la pension AWW au lieu de la pension AAW se traduit par une légère diminution de revenu. Cela est apparemment le cas de Mme Vos."

8.10 "Toutefois le fait que, dans un cas particulier, l'application du paragraphe 1 b)de l'article 32 de 1'AAW ait un résultat désavantageux pour un individu donné est sans rapport avec la question de l'existence - ou de la non-existence - d'une forme de discrimination interdite par l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. A cet égard, on voudra bien se rapporter à la décision du Comité dans le cas No 212/
1986 (P. P. C. c. Pays-Bas), où le Comité a, entre autres, conclu que la portée de l'article 26 ne s'étend pas aux différences de résultats que peut donner l'application de règles communes régissant l'attribution d'allocations ."

8.11 Enfin, le Gouvernement néerlandais fait observer que, dans le cadre du réexamen de 1'AWW évoqué aux paragraphes 8.6 et 8.7 ci-dessus, il a été dûment tenu compte du problème de la concurrence de droits dans le cas de 1'AAW et de 1'AWW.

9.1 S'agissant de la plainte même de l'auteur relative à l'article 26 du Pacte, 1'Etat partie conteste "que le paragraphe 1 b) de l'article 32 de 1'AAW puisse constituer une discrimination injustifiable entre les sexes au motif qu'un handicapé dont l'épouse (divorcée ou non) décède conserverait son droit à une pension d'invalidité alors qu'une handicapée dont l'époux (divorcé ou non) décède ne conserve pas le sien. La différence de situation entre la veuve handicapée et le veuf handicapé peut s'expliquer comme suit : les hommes ne peuvent se prévaloir de la disposition en faveur des survivants et le problème de la concurrence de droits ne se pose donc pas à leur sujet. C'est précisément parce qu'un homme handicapé ne peut bénéficier de la pension prévue par 1'AWW et que le décès de son épouse n'a donc pas d'effet sur sa pension au titre de l'AAW, qu'il est impossible de comparer les règles relatives à la concurrence de droits."

9.2 "Afin d'illustrer la discrimination relative en faveur des femmes, qui est inhérente aux règles de l'AWW, le Gouvernement néerlandais rappelle que le traitement favorable dont les femmes bénéficient aux Pays-Bas en vertu de cette loi a amené certaines personnes à prétendre que cette loi constitue une discrimination à l'encontre des hommes. C'est une des raisons pour lesquelles le réexamen de 1'AW est actuellement en cours. Quoi qu'il en soit, il y a lieu de conclure que les cas auxquels se réfère l'auteur de la communication n'appellent pas un traitement égal sur la base de l'article 26 du Pacte."

10.1 Dans ses observations, datées du 3 janvier 1989, l'auteur réaffirme que l'application du paragraphe 1 b)de l'article 32 de la loi générale sur l'invalidité (AAW) viole l'article 26 du Pacte. Elle soutient aussi que, l'applicabilité de l'article 26 du Pacte étant admise, il faut admettre que ses dispositions sont d'application immédiate à partir de l'entrée en vigueur du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Tout en reconnaissant que toutes les inégalités possibles ne constituent pas des actes de discrimination illégitime, elle soutient que depuis 1979 toute inégalité constatable dans le domaine de la sécurité sociale peut être appréciée sur la base de l'article 26 du Pacte.

10.2 Contestant l'interprétation de l'article 26 du Pacte. donnée par la cour d'appel centrale, l'auteur affirme qu'il serait incompatible avec les termes de cet article de donner au Gouvernement davantage de temps pour éliminer progressivement toute discrimination illégitime et que la question soulevée dans sa communication est de savoir si, en l'espèce, la distinction entre les sexes est acceptable ou non, que le Gouvernement ait eu besoin ou non d'un certain temps à partir de 1979 pour faire disparaître cette distinction.

11.1 Le Comité des droits de l'homme a examiné la présente communication à la lumière de toutes les informations qui lui ont été fournies par les parties, comme le stipule le paragraphe 1 de l'article 5 du Protocole facultatif.

11.2 Le Comité note que 1'Etat partie, dans les observations qu'il a présentées en vertu de l'article 4, paragraphe 2, du Protocole facultatif, a réservé sa position sur la question de l'applicabilité de l'article 26 du Pacte aux droits en matière de sécurité sociale (voir ci-dessus par. 8.1). Sur ce sujet, le Comité a déjà eu l'occasion de déclarer dans sa jurisprudence que, selon lui, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques s'appliquait même si telle ou telle question visée dans cet instrument était mentionnée ou prévue dans d'autres instruments internationaux, tels par exemple que la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ou1 comme en l'espèce, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Quels que puissent être les liens entre les deux Pactes que fait apparaître l'étude de leurs travaux préparatoires, il incombe au Comité de veiller à la pleine application des termes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le Comité note d'ailleurs que les dispositions de l'article 2 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ne nuisent en rien à la pleine application de l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

11.3 Le Comité note en outre qu'en l'occurrence, la question n'est pas de savoir si 1'Etat partie en cause est tenu d'adopter des lois telles que la loi générale sur l'invalidité ou la loi générale relative aux veuves et aux orphelins, mais si ces lois violent les droits de l'auteur de la communication, formulés à l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le droit à l'égalité devant la loi et à une égale protection par la loi, sans discrimination aucune, n'entraîne pas que toute différence de traitement soit discriminatoire. Une différenciation fondée sur des critères raisonnables et objectifs n'équivaut pas à un acte de discrimination tombant sous le coup de l'interdiction formulée à l'article 26. En outre, des différences dans le résultat de l'application uniforme des lois ne constituent pas, en elles-mêmes, une discrimination interdite.

12. Il reste au Comité à déterminer si le traitement défavorable dont se plaint Mme Vos résultait de l'application d'une réglementation discriminatoire et, de ce fait, constituait une violation de cette dernière en vertu de l'article 26 du Pacte. Compte tenu des explications données par 1'Etat partie concernant l'historique, le but et l'application de la loi générale sur l'invalidité et de la loi générale relative aux veuves et aux orphelins (voir supra, par. 8.3 à 8.10), le Comité est d'avis que les résultats désavantageux dont se plaint Mime Vos résultent de l'application d'une règle générale destinée à éviter le cumul des prestations de sécurité sociale. Cette règle est fondée sur des critères objectifs et raisonnables, surtout si l'on considère que chacune des deux réglementations dont Mme Vos pouvait se prévaloir vise à assurer la subsistance de toutes les personnes qu'elle couvre. Le Comité ne peut donc conclure que Mme Vos ait été victime de discrimination au sens de l'article 26 du Pacte.

13. Le Comité des droits de l'homme, se prononçant en vertu du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, estime que les faits à lui soumis ne font pas apparaître de violation des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.



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