University of Minnesota



Ibrahima Gueye et diverses autres personnes c. Franc
e, Communication No. 196/1985, U.N. Doc. CCPR/C/35/D/196/1985 (1989).



Comité des droits de l'homme
Trente-cinquième session

Décision du Comité des droits de l'homme au titre du paragraphe 4 de l'article 5
du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux
droits çivils et politiques -trente-cinquième session

concernant la

Communication No 196/1985



Présentée par: Ibrahima Gueye et diverses autres personnes

Au nom : Des auteurs

Etat partie concerné : France

Date de la communication : 12 octobre 1985 (date de la première lettre)

Date de la décision sur la recevabilité : 5 novembre 1987

Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article 28 au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 3 avril 1989,

Ayant achevé l'examen de la communication No 196/1985 présentée au Comité par Ibrahima Gueye et 742 autres retraités sénégalais de l'armée française, en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Compte tenu de toutes les informations écrites qui lui ont été soumises par l'auteur de la communication et par 1'Etat partie,

Adopte ce qui suit :



Constatations au titre du paragraphe 4 de l'article 5 au Protocole facultatif


1.1 Les auteurs de la communication (première lettre du 12 octobre 1985 et lettres ultérieures des 22 décembre 1986, 6 juin 1987 et 21 juillet 1988)sont Ibrahima Gueye et 742 autres anciens militaires de carrière retraités de l'armée française, qui résident au Sénégal. Ils sont représentés par un conseil.

1. 2 Les auteurs prétendent être victimes d'une violation par la France de l'article 26 du Pacte, en raison d'une discrimination raciale qui serait faite par la législation française: cette législation prévoit un mode de calcul des pensions ,différent pour les militaires de carrière retraités de nationalité sénégalaise, qui ont servi dans l'armée française avant l'indépendance du Sénégal en 1960 et qui
reçoivent des pensions inférieures à celles dont bénéficient les militaires de carrière retraités français de nationalité française.

1.3 Ils font valoir qu'en vertu de la loi No 51-561 du 18 mai 1951 et du décret No 51-590 du 23 mai 1951, les militaires de carrière retraités de l'armée française, qu'ils fussent français ou sénégalais, étaient traités sur un pied d'égalité. Après l'indépendance, en 1960, les droits acquis des militaires de carrière sénégalais retraités ont été respectés jusqu'à ce que la loi de finances (No 74.1129)
de décembre 1974 prévoie un traitement différent pour les Sénégalais. L'article 63 de cette loi dispose que les pensions des militaires sénégalais ne relèveraient plus des dispositions générales du Code des pensions militaires de 1951. La législation française ultérieure a gelé le montant des pensions des Sénégalais à partir du ler janvier 1975.

1.4 Les auteurs affirment que les lois en
question ont été contestées devant le tribunal administratif de Poitiers (France), qui s'est prononcé le 22 décembre 1980 en faveur de Dia Abdourahmane, militaire de carrière sénégalais à la retraite, ordonnant le renvoi de l'affaire devant le Ministre des finances de la France aux fins d'une indemnisation totale à compter du 2 janvier 1975. Les auteurs joignent à la communication le texte d'une décision semblable rendue le 22 juin 1982 par le Conseil d'Etat dans l'affaire d'un autre militaire sénégalais. Cependant, ces décisions n'auraient pas été exécutées, du fait de l'adoption le 31 décembre 1981 d'une nouvelle loi de finances (No 81-1179) avec effet rétroactif au ler janvier 1975, qui vouerait à l'échec tout nouveau recours devant les tribunaux judiciaires ou administratifs français.

1.5 Quant au fond même de l'affaire, les auteurs rejettent les arguments avancés par les autorités françaises pour justifier l'application d'un régime différent aux militaires de carrière africains (et non pas seulement sénégalais) retraités, à savoir a) le fait qu'ils ont perdu la nationalité française, b) les difficultés rencontrées par les autorités françaises pour s'assurer de l'identité et de la situation de famille des militaires de carrière retraités dans les pays africains, et c) les différences existant entre la France et ses anciennes colonies, sur les plans économique, financier et social.

1.6 Les auteurs déclarent n'avoir soumis cette affaire à aucune autre instance internationale d'enquête ou de règlement.

2. Par sa décision du 26 mars 1986, le Comité des droits de l'homme a transmis la communication a 1'Etat partie concerné, en vertu de l'article 91 du règlement intérieur provisoire du Comité, et l'a prié de soumettre des renseignements et observations se rapportant à la question de la recevabilité de la communication.

3.1 Dans ses observations initiales qu'il a soumises le 5 novembre 1986 en vertu de l'article 91, 1'Etat partie décrit les faits en détail et fait valoir que la communication est "irrecevable comme incompatible avec les dispositions du Pacte (art. 3 du Protocole facultatif) et, "à titre subsidiaire, mal fondée", parce qu'elle concerne essentiellement des droits qui ne sont pas énoncés dans le Pacte (c'est-à-dire les droits à pension) et, de toute façon, parce que la législation contestée ne contient aucune disposition discriminatoire au sens de l'article 26 du Pacte.

3.2 Dans les observations complémentaires présentées en vertu de l'article 91, le 8 avril 1987, 1'Etat partie invoque la déclaration faite par le Gouvernement français lors de la ratification du Protocole facultatif, le 17 février 1984, et prétend que la communication est irrecevable ratione temporis : "La France interprète l'article premier (du Protocole facultatif) comme donnant compétence au Comité pour recevoir des communications alléguant une violation
. d'un . droit énoncé dans le Pacte, résultant soit d'actes omissions, faits ou événements postérieurs à la date d1 entree . en vigueur à son égard du présent Protocole, soit d'une décision portant sur des actes, omissions, faits ou événements nostérieurs à cette même date. Il résulte clairement de cette déclaration interprétative que seules sont recevables les communications dirigées contre la France, qui sont fondées sur des violations alléguées dont l'origine réside dans des actes ou dans des événements postérieurs au 17 mai 1984, date à laquelle, en application de l'article 9, alinéa 2, du Protocole, celui-ci est entré en vigueur a l'égard de la France. Or ainsi que cela résulte de l'exposé des faits contenus tant dans la communication elle-même que dans les observations initiales du Gouvernement français, l'origine de la prétendue violation dont se plaignent les auteurs de la communication réside dans la loi No 79-1102 du 21 décembre 1979, qui a étendu aux ressortissants de quatre Etats ayant appartenu à l'Union française, dont le Sénégal, le régime dit de 'cristallisation'des pensions militaires, qui s'appliquait déjà depuis le ler janvier 1961 aux ressortissants des autres Etats concernés. Cet acte étant antérieur à la ratification par la France du Protocole facultatif, il ne saurait par suite donner lieu à une communication fondée sur sa prétendue contrariété avec le Pacte, sans qu'une telle communication méconnaisse la portée ratione temporis que la France a conférée à sa reconnaissance du droit de communication individuelle."

4.1 Dans leurs observations du 22 décembre 1986, les auteurs soutiennent que la communication ne devrait pas être déclarée irrecevable en vertu de l'article 3 du Protocole facultatif comme incompatible avec les dispositions du Pacte, faisant valoir qu'une interprétation large de l'article 26 du Pacte permettrait au Comité d'examiner les questions des droits à pension, s'il y a, comme c'est le cas, discrimination.


4.2 Dans leurs observations suivantes, en date du 6 juin 1987, les auteurs reconnaissent que la législation française applicable est antérieure a l'entrée en vigueur du Protocole facultatif à l'égard de la France, mais font valoir qu'ils
ont poursuivi les négociations au-delà du 17 mai 1984 et que le Ministre de l'économie, des finances et du budget leur a fait connaître sa décision dans une lettre datée du 12 novembre 1984.

5.1 Avant d'examiner une allégation contenue dans une communication, le Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement intérieur Provisoire, décider si celle-ci est ou non recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

5.2 En ce qui concerne l'affirmation de 1'Etat partie, selon laquelle la . communication est irrecevable en vertu de l'article 3 du Protocole facultatif comme incompatible avec le Pacte, le Comité rappelle qu'il a déjà décidé à propos de communications antérieures (Nos 172/1984, 180/1984, 182/1984) que le champ d'application de l'article 26 du Pacte lui permettait d'examiner les allégations de discrimination, même en ce qui concerne les droits à pension.

5.3 Le Comité a pris note de l'argument de 1'Etat partie selon lequel l'origine des violations alléguées résidant dans une loi adoptée en 1979, la communication devrait être déclarée irrecevable au motif que, selon la déclaration interprétative faite par la France lors de la ratification du Protocole facultatif, le Comité ne pouvait examiner des allégations de violations dont l'origine résidait dans des
actes ou des événements antérieurs au 17 mai 1984, date à laquelle le Protocole facultatif était entré en
vigueur à l'égard de la France. Le Comité a fait observer à ce propos que dans un certain nombre d'autres affaires (Nos. 6/1977, 24/1977), il avait déclaré ne pas pouvoir examiner une communication alléguant une violation de droits de l'homme, qui se serait produite avant que le Protocole
facultatif n'entre en vigueur à l'égard de 1'Etat partie concerné, a moins que cette violation ne se poursuive après cette date ou
ne produise des effets qui constituent eux-mêmes une violation du Pacte après cette date. Enfin, la déclaration interprétative de la France prétendait limiter la compétence ratione temporis du Comité aux violations des droits énoncés dans le Pacte, résultant
"d'actes, omissions, faits ou événements postérieurs à la date d'entrée en vigueur du Protocole à l'égard de la France". Le Comité a estimé ne pas avoir compétence pour examiner la question de savoir si les auteurs avaient été victimes d'une discrimination à un moment quelconque avant le 17 mai 1984. Mais restait à savoir si, après cette date, il n'y avait pas eu violation du Pacte, du fait d'actes ou d'omissions liés au maintien en vigueur de lois et décisions relatives aux droits des auteurs de la communication.

6. En conséquence, le Comité a décidé le 5 novembre 1987 que la conmmication était recevable.

7.1 Dans les observations datées du 4 juin 1988 qu'il a présentées conformément au paragraphe 2 de l'article 4 du Protocole facultatif, 1'Etat partie rappelle les observations qu'il a déjà adressées en vertu de l'article 91: il ajoute que les Sénégalais d'origine qui ont acquis la nationalité française et l'ont conservée après l'indépendance du Sénégal bénéficient du même régime de pension que les
autres anciens combattants français. Les articles 97, paragraphe 2) à 97, paragraphe 6) du Code de la nationalité offrent à tout étranger ayant possédé la, nationalité française la possibilité de s'y faire réintégrer. L'Etat partie fait valoir que cette possibilité n'est pas seulement théorique puisque le nombre des réintégrations est d'environ 2 000 par an.


7.2 L'Etat partie précise en outre qu'un ancien combattant sénégalais qui aurait perdu la nationalité française à la suite de l'indépendance du Sénégal et qui obtiendrait sa réintégration dans la nationalité française retrouverait ipso facto les droits réservés aux ressortissants français par le Code des pensions puisque, selon l'article L 58 de ce code, "le droit à l'obtention ou à la jouissance de la pension et de la rente viagère d'invalidité est suspendu . . . par les circonstances qui font perdre la qualité de Français durant la privation de cette qualité". A contrario dès lors que cette privation a pris fin, le droit à pension est rétabli. L'Etat partie conclut que le critère de la nationalité. est bien le seul qui fonde la différence de traitement évoquée par les auteurs.

8.1 Dans les commentaires qu'ils ont soumis par lettre datée du 21 juillet 1988 sur les observations de 1'Etat partie, les auteurs font valoir que celui-ci a dépassé de 12 jours le délai qui lui est imparti pour présenter ses observations en vertu du paragraphe 2 de l'article 4 du Protocole facultatif et que, pour cette raison, lesdites observations devraient être déclarées irrecevables. A ce propos, les auteurs soupçonnent "qu'en faisant du dilatoire et en utilisant au maximum et même au-delà des délais impartis par les textes tous les méandres de la procédure pour retarder la décision définitive, 1'Etat partie espère voir les communicants décéder les uns après les autres et voir en même temps les éventuelles sommes à payer diminuer substantiellement". Ils font également valoir que le Comité ne devrait pas examiner plus avant les observations de 1'Etat partie étant donné qu'elles ne font que reprendre des observations précédentes qui ont été longuement débattues et devraient donc être considérées comme étant de nature dilatoire.

8.2 Quant au fond de l'affaire, les auteurs font observer que l'argument de la nationalité invoqué par 1'Etat partie est un argument fallacieux. L'Etat partie l'utilise uniquement comme prétexte pour priver les Sénégalais de leurs droits acquis. Ils se réfèrent en outre à l'article 71 du Code des pensions militaires de 1951, qui dispose ce qui suit : "Les militaires servant ou ayant servi à titre d'étrangers ont les mêmes droits, que les militaires servant ou ayant servi à titre français, sauf dans le cas où ils participeraient à un acte d'hostilité contre la France." Les auteurs estiment donc bénéficier de droits à pension "irréversibles et incompressibles" en vertu de cette législation. Puisqu'il n'est reproché à aucun " d'entre eux d'avoir participé à un acte d'hostilité contre la France, l'argument de la nationalité doit être "complètement et définitivement écarté".

8.3 Les auteurs affirment qu'ils sont victimes de discrimination raciale en raison de la couleur de leur peau, discrimination qui tiendrait aux motifs suivants :

1) Au Sénégal, l'état civil est mal tenu et la fraude est monnaie courante;

2) Les créanciers de la pension, c'est-à-dire les auteurs, sont des Noirs qui vivent dans un pays sous-développé et n'ont donc pas besoin d'autant d'argent pour vivre que les créanciers de la pension vivant dans un pays développé comme la France.


Les auteurs se disent consternés que 1'Etat partie puisse faire valoir que le créancier n'étant pas riche et vivant dans un pays pauvre, le débiteur peut diminuer sa dette en fonction du degré de besoin et de pauvreté et son créancier, argument qui, à leur avis, heurte non seulement les principes de droit les plus élémentaires, mais aussi la morale et l'équité.

9.1 Le Comité des droits de l'homme, ayant examiné la présente communication à la lumière de tous les renseignements qui ont été fournis par les parties, comme prévu
au paragraphe 1 de l'article 5 du Protocole facultatif, fonde ses constatations sur les faits ci-après, qui ne semblent pas contestés.

9.2 Les auteurs sont des militaires retraités de nationalité sénégalaise qui ont servi dans l'armée française avant l'indépendance du Sénégal en 1960. En vertu du Code des pensions militaires de 1951, les militaires retraités de l'armée française, qu'ils fussent Français ou Sénégalais, étaient traités sur un pied d'égalité. Les droits à pension des soldats sénégalais étaient les mêmes
que ceux des soldats français jusqu'à ce qu'une nouvelle loi, promulguée en décembre 1974, prévoie un traitement différent pour les Sénégalais. En outre, la loi No 79.1102 du 21 décembre 1979 a étendu aux ressortissants de quatre Etats ayant appartenu a l'Union française, dont le Sénégal, le régime dit de "cristallisation" des pensions militaires, qui s'appliquait déjà depuis le ler janvier 1961 aux ressortissants des autres Etats concernés. D'autres militaires retraités sénégalais ont tenté de contester les lois en question, mais la loi de finances française (No 81.1179)du 31 décembre 1981, avec effet rétroactif au ler janvier 1975, a voué à l'échec tout autre recours devant les tribunaux français.

9.3 La principale question soumise au Comité est de savoir si les auteurs sont victimes d'une discrimination au sens de l'article 26 du Pacte ou si la différence de traitement en matière de pensions, fondée sur la nationalité française, entre les anciens membres étrangers et français de l'armée française devrait être considérée comme compatible avec le Pacte. Pour trancher cette question, le Comité a tenu compte des considérations qui suivent.

9.4 Le Comité a noté l'affirmation des auteurs selon laquelle ils ont fait l'objet d'une discrimination fondée sur des motifs raciaux, c'est-à-dire sur l'un des motifs expressément énumérés à l'article 26. Il constate qu'il n'y a pas de preuve à l'appui de l'affirmation selon laquelle 1'Etat partie s'est livré a des pratiques discriminatoires sur le plan racial à l'égard des auteurs. Il reste toutefois à déterminer si la situation rencontrée par les auteurs relève du champ d'application de l'article 26. Le Comité rappelle que les auteurs ne relèvent pas, d'une manière générale, de la juridiction française, sauf pour ce qui concerne le montant de leurs droits à pension. Il note que la nationalité ne figure pas en tant que telle parmi les motifs de discrimination interdits, qui sont énumérés à l'article 26, et que le Pacte ne protège pas le droit a pension en tant que tel. L'article 26 interdit, en ce
qui concerne la protection égale de la loi, toute discrimination, notamment de race, de couleur, de sexe et de langue, de religion, d'opinion politique et de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. De l'avis du Comité, le cas des auteurs relève des mots "de toute autre situation" dans la deuxième phrase de l'article 26. Le Comité tient compte, comme il l'a fait dans la ommunication No 182/1984, du fait que "le droit à l'égalité devant la loi et à une protection égale de la loi sans discrimination ne rend pas toutes les différences de traitement discriminatoires. Une différence fondée sur des critères raisonnables et objectifs n'équivaut pas à une discrimination interdite au sens de l'article 26".

9.5 Pour établir si le traitement des auteurs est fondé sur des critères raisonnables et objectifs, le Comité note que ce n'était pas la question de la nationalité qui avait déterminé l'octroi de pensions aux auteurs, mais les services rendus dans le passé par les intéressés. Ils avaient servi dans les forces armées françaises dans les mêmes conditions que les citoyens français; pendant les 14 ans qui ont suivi l'indépendance du Sénégal, ils ont bénéficié du même traitement que leurs homologues français aux fins des droits à pension, malgré leur nationalité sénégalaise et non française. Un changement ultérieur de nationalité ne peut en soi être considéré comme une raison suffisante pour justifier une différence de traitement, vu que la base retenue pour l'octroi de la pension était les services identiques qu'avaient rendus les auteurs et les militaires qui étaient demeurés français. Les différences de situation économique, financière et sociale entre la France et le Sénégal ne peuvent pas non plus être invoquées comme justification légitime. Si l'on comparait le cas des militaires de nationalité sénégalaise à la retraite, vivant au Sénégal, et celui des militaires de nationalité française à la retraite vivant au Sénégal, il apparaîtrait qu'ils jouissent des mêmes
conditions économiques et sociales. Toutefois, un régime différent leur serait appliqué aux fins des droits à pension. Enfin, le fait que 1'Etat partie prétend qu'il ne peut plus effectuer les contrôles d'identité et de la situation de famille, requis pour prévenir les abus dans l'administration du régime des pensions, ne peut justifier une différence de traitement. De l'avis du Comité, de simples difficultés administratives ou la possibilité de certains abus en matière de droits à pension ne sauraient être invoquées pour justifier une inégalité de traitement. Le Comité parvient à la conclusion que la différence de traitement dont les auteurs font l'objet n'est pas fondée sur des critères raisonnables et objectifs et constitue une discrimination interdite par le Pacte.

10. Le Comité des droits de l'homme, agissant en application du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est d'avis que les faits de la cause, dans la mesure où ils ont eu des effets après le 17 mai 1984 (date d'entrée en vigueur du Protocole facultatif à l'égard de la France), font apparaître une violation de l'article 26 du Pacte.

11. En conséquence, le Comité est d'avis qu'en vertu des dispositions de l'article 2 du Pacte, 1'Etat partie est tenu de prendre des mesures effectives pour remédier aux violations dont les intéressés ont été victimes.



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