University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'homme, Monaco, U.N. Doc. CCPR/CO/72/MCO (2001).


 


Convention Abbreviation: CCPR
COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME
Soixante-douzième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN VERTU DE L'ARTICLE 40 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits de l'homme

Principauté de Monaco


1. Le Comité a examiné le rapport initial de la Principauté de Monaco (CCPR/C/MCO/99/1) à ses 1935e et 1936e séances le 13 juillet 2001, et a adopté à sa 1949e séance le 24 juillet 2001 les observations suivantes.


A. Introduction
2. Le Comité se félicite de la présentation par l'État partie de son rapport dans les temps impartis et qui contient des renseignements essentiels sur la législation interne en relation avec la mise en œuvre du Pacte. Il regrette néanmoins la brièveté du rapport et en particulier le manque d'informations sur la jurisprudence et les aspects pratiques de la mise en application du Pacte, ainsi que sur les facteurs et les difficultés qui entravent ou limitent cette mise en œuvre. Il note néanmoins les éclaircissements utiles fournis oralement par la délégation lors de l'examen du rapport.
B. Aspects positifs
3. Tout en notant l'abolition de la peine de mort dans l'État partie depuis de nombreuses années, le Comité se félicite de la ratification, en l'an 2000, du deuxième Protocole facultatif au Pacte.
C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations
4. Le Comité se déclare préoccupé par l'existence de six déclarations interprétatives et d'une réserve émises par l'État partie lors de la ratification du Pacte.

L'État partie devrait réduire le nombre de ces déclarations interprétatives. Le Comité l'encourage à engager leur réexamen, tout particulièrement à l'égard de celles devenues ou devenant désuètes et inutiles compte tenu des évolutions intervenues dans l'État partie, notamment relatives aux articles 13, 14, 19, et 25 alinéa c du Pacte.

5. Le Comité note l'absence de clarté relative à la place accordée au Pacte dans l'ordonnancement juridique de l'État partie.

Il demande à l'État partie de préciser, dans son prochain rapport, le statut du Pacte en droit interne, afin de déterminer la question de son invocabilité directe devant les tribunaux, ainsi que la position prévalant en cas de conflit avec le droit interne, y compris la Constitution.

6. Le Comité note l'absence d'une commission nationale des droits de l'homme et de projet en ce sens.

L'État partie devrait envisager de mettre en place une telle institution indépendante pour la protection des droits de l'homme.

7. Le Comité est préoccupé par le fait que de très nombreuses dispositions législatives, devenues obsolètes et en contradiction avec le Pacte, restent en vigueur (art. 2 du Pacte).

Il estime que l'État partie doit s'assurer de la conformité de l'ensemble de sa législation avec les dispositions du Pacte.

8. Le Comité regrette l'insuffisance, dans le rapport initial, d'informations relatives à la représentation des femmes dans les domaines public et privé (art. 3 et 26 du Pacte).

L'État partie devrait intégrer, dans son prochain rapport, des donnés détaillées permettant une meilleure évaluation de la situation des femmes au regard du Pacte, et en particulier du principe de non-discrimination fondée sur le sexe.

9. Le Comité se déclare préoccupé par le caractère discriminatoire de certaines dispositions du Code civil, dont l'article 182 consacrant la notion du mari en tant que chef de famille; l'article 196 octroyant au mari le choix du lieu de résidence du couple; et l'article 301 confiant au père le droit de puissance paternelle sur les enfants (art. 3, 23 et 26 du Pacte).

L'État partie devrait abroger toutes dispositions discriminatoires du Code civil et adopter les dispositions législatives appropriées, en vue d'assurer l'égalité effective entre femmes et hommes.

10. Le Comité se déclare préoccupé par la condition juridique discriminatoire à l'égard des femmes en matière de transmission de la nationalité monégasque aux enfants (art. 3 et 26 du Pacte).

L'État partie devrait adopter une législation consacrant l'égalité du droit à la transmission de la nationalité aux enfants pour les hommes et les femmes.

11. Le Comité se déclare préoccupé par le statut juridique des enfants adultérins (art. 24 du Pacte).

L'État partie devrait adopter une législation appropriée afin que les enfants adultérins bénéficient des mêmes droits que les autres enfants.

12. Le Comité est préoccupé que la législation monégasque consacre une discrimination entre les garçons et les filles dans la mesure où l'âge légal du mariage est fixé à 15 ans pour les filles et à 18 ans pour les garçons (art. 23 et 26 du Pacte).

L'État partie devrait amender sa législation afin d'assurer un traitement égal entre filles et garçons, de sorte que l'âge légal du mariage, quel que soit le sexe, soit identique.

13. Le Comité regrette l'absence d'une sanction spécifique de la discrimination raciale dans la législation de l'État partie (art. 26 du Pacte).

L'État partie devrait instituer par voie législative une sanction spécifique de la discrimination raciale.

14. Le Comité note l'absence d'une mention spécifique de la présomption d'innocence dans la législation de l'État partie (art. 14 du Pacte).

L'État partie devrait inscrire explicitement ce principe dans sa législation, et en tirer toutes les conséquences, notamment au niveau de la détention provisoire.

15. Le Comité se déclare préoccupé par l'insuffisance des garanties lors de la garde à vue, dont notamment le droit de se faire assister par un avocat dès l'arrestation (art. 9 du Pacte).

L'État partie devrait prendre les mesures appropriées, par voie législative, afin que les droits des personnes mises en garde à vue soient protégés et que celles-ci puissent notamment se faire assister par un avocat dès l'arrestation.

16. Le Comité se déclare préoccupé par la non-motivation des mesures administratives d'expulsion des étrangers (art. 13 du Pacte).

L'État partie devrait adopter l'obligation de motiver les décisions de l'administration, et notamment celles ayant trait aux expulsions.

17. Tout en constatant la condition particulière des Monégasques représentant numériquement une minorité dans la Principauté de Monaco, le Comité souligne la différence de traitement faite en droit entre les Monégasques et les non-Monégasques, notamment dans le domaine de l'emploi ainsi que pour l'exercice des libertés d'association et de réunion (art. 21, 22 et 26 du Pacte).

L'État partie devrait s'assurer que ces distinctions, pouvant justifier dans certains cas et situations des différences de traitement fondées sur des critères objectifs et raisonnables, ne se traduisent pas par des discriminations. Le Comité recommande également que la naturalisation intervienne sur la base de critères objectifs et dans des délais raisonnables, notamment pour les personnes résidant à Monaco depuis de nombreuses années.

18. Le Comité se déclare préoccupé par le maintien de dispositions pénales consacrant le bannissement (art. 12 du Pacte).

L'État partie doit abroger ces dispositions en totale contradiction avec le paragraphe 4 de l'article 12 du Pacte.

19. Le Comité relève les exceptions à la liberté d'expression prévues par la loi de l'État partie et justifiées par la protection des droits individuels ou la sauvegarde des intérêts généraux (art. 19 du Pacte).

L'État partie devrait veiller à ce que les limitations à la liberté d'expression soient conformes à celles consacrées au paragraphe 3 de l'article 19 du Pacte, en particulier que celles-ci soient strictement nécessaires au regard de leur finalité.

20. Le Comité constate l'absence d'informations détaillées relatives à la liberté de religion ou de conviction et à ses manifestations (art. 18 du Pacte).

L'État partie devrait intégrer, dans son prochain rapport, des données permettant au Comité d'évaluer la situation des communautés de religion ou de conviction (par exemple dans le domaine de l'éducation), ceci en particulier au regard du principe de non-discrimination.

21. Le Comité note que l'État partie a prévu la diffusion du rapport initial auprès de la population monégasque après son examen par le Comité (art. 2 du Pacte).

L'État partie devrait s'assurer de la diffusion de son prochain rapport préalablement à son examen par le Comité afin de recueillir en amont les commentaires de la population et des organisations non gouvernementales.

22. Tout en notant l'existence de programmes sur les droits de l'homme à l'attention de la police, le Comité regrette l'absence d'informations précises relatives à la formation en ce domaine des membres du corps judiciaire et autres fonctionnaires (art. 2 du Pacte).

L'État partie devrait intégrer, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur la sensibilisation de l'ensemble des fonctionnaires à l'application des droits consacrés par le Pacte.

23. L'État partie devrait adresser dans un délai d'un an, conformément au paragraphe 5 de l'article 70 du règlement intérieur du Comité, les informations pertinentes sur la mise en œuvre des recommandations du Comité quant à la non-motivation des mesures administratives d'expulsion des étrangers (par. 16) et le bannissement (par. 18). Le Comité demande à l'État partie de communiquer dans son prochain rapport, qu'il doit présenter d'ici au 1er août 2006, des informations sur les autres recommandations qu'il a faites et sur le Pacte dans son ensemble.



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