University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'homme, Mexico, U.N. Doc. CCPR/C/79/Add.109 (1999).


 


Convention Abbreviation: CCPR
COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME
Soixante-sixième session


EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 40 DU PACTE


Observations du Comité des droits de l'homme


MEXIQUE

1. Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique du Mexique (CCPR/C/123/Add.1) à ses 1762ème et 1763ème séances (CCPR/C/SR.1762 et 1763) tenues le 16 juillet 1999 et a adopté les observations suivantes de sa 1771ème à sa 1773ème séance, les 22 et 23 juillet 1999.


A. Introduction

2. Le Comité se félicite que le quatrième rapport périodique du Mexique ait été présenté en temps voulu et qu'un rapport supplémentaire et des informations complémentaires lui aient été soumis faisant le point sur la situation des droits de l'homme dans l'État partie et l'exposant en détail. Il constate que l'État partie a tenu compte, lors de l'élaboration du nouveau rapport, des observations faites lors de l'examen du troisième rapport périodique de ce pays. Il relève que l'État partie a été représenté par une délégation composée de nombreux membres qui ont pu répondre à nombre des préoccupations exprimées par les membres du Comité lors de l'examen du rapport.


B. Aspects positifs

3. Le Comité prend note avec satisfaction des améliorations apportées à la situation au Mexique depuis la présentation du précédent rapport, entre autres la décision du 8 juin 1999, approuvée par le Congrès, de faire de la Commission nationale des droits de l'homme un organe indépendant, le lancement de divers programmes proposés par celle-ci pour améliorer la situation de la femme, de l'enfant et de la famille, la création du programme sur les disparitions présumées et la libération des autochtones détenus. Le Comité prend note de la mise en place de programmes nationaux pour la promotion des droits de l'homme, le développement (1995-2000) et la sécurité publique, programmes qui constituent un progrès.

4. La promulgation de la loi sur le Service du défenseur public fédéral (ley de Defensoría Pública Federal) et de la loi portant sur la prévention et la répression de la torture constitue un progrès important pour enquêter sur les violations des droits de l'homme et éviter que leurs auteurs demeurent impunis.

5. Le Comité prend note avec satisfaction que des réformes électorales sont en cours en vue d'instaurer la pluralité et la transparence des élections.


C. Sujets de préoccupation et recommandations du Comité

6. Le Comité juge très préoccupant que les diverses formes de torture ne tombent pas toutes nécessairement sous le coup de la loi dans tous les États du Mexique et qu'il n'y ait pas d'organe indépendant chargé d'enquêter sur le nombre élevé de plaintes pour actes de torture et traitements cruels, inhumains et dégradants. Il est également préoccupant que les actes de torture, les disparitions forcées et les exécutions extrajudiciaires n'aient fait l'objet d'aucune enquête, que leurs auteurs n'aient pas été traduits en justice et que les victimes ou leurs familles n'aient pas été indemnisées.

7. Le Comité est préoccupé par le fait qu'il est possible d'exiger de l'accusé la preuve que des aveux lui ont été extorqués sous la contrainte et que lesdits aveux peuvent être utilisés contre lui.

8. Le Comité est également préoccupé par l'intervention croissante des militaires dans la société, en particulier dans les États du Chiapas, de Guerrero et d'Oaxaca où l'armée mène des opérations qui sont du ressort des forces de police.

9. Le Comité est profondément préoccupé par l'absence de procédure d'enquête institutionnalisée sur les allégations de violations des droits de l'homme qui seraient le fait des militaires et des forces de sécurité et qui, pour cette raison, souvent, ne donnent lieu à aucune enquête.

10. Le Comité a pris note de l'effet conjugué qui résulte de l'application de la loi de 1995 instituant la coordination des systèmes nationaux de sécurité publique et de la loi de 1996 contre le crime organisé, ainsi que de l'élargissement du concept de "flagrance" permettant dans un nombre plus grand de cas de procéder à une arrestation sans qu'un mandat ait été délivré par un officier de justice compétent. Cela fait peser une menace sérieuse sur la sécurité des personnes. Le Comité a également pris note du fait que, dans les cas d'arrestation pour "flagrant délit" et lorsqu'il y a urgence, la personne arrêtée est mise à la disposition du ministère public qui peut la placer en garde à vue pendant 48 heures et même, en raison de circonstances particulières, jusqu'à 96 heures, avant de la mettre à la disposition de la justice. Le Comité déplore que la personne placée en garde à vue n'ait pas accès à un avocat avant le moment où elle doit faire la déclaration formelle devant le ministère public, et que la question de l'accès des membres de la famille n'ait pas été clarifiée pendant l'examen du rapport du Mexique.

11. La procédure pénale en vigueur au Mexique ne permet pas de donner pleinement effet à l'article 14 du Pacte aux termes duquel le procès doit se dérouler devant un juge, en présence de l'accusé et être public.

12. Le Comité note que, bien que l'état d'urgence n'ait pas été proclamé dans les zones de conflit, les droits de leurs habitants font l'objet des mêmes restrictions, par exemple du fait de la mise en place de points de contrôle qui entravent la liberté de circulation.

13. Le Comité s'inquiète des obstacles qui entravent la libre circulation des étrangers, principalement des membres des organisations non gouvernementales qui enquêtent sur les violations des droits de l'homme au Mexique et est préoccupé, en particulier, par le fait que des permis de séjour ont été annulés et des visas refusés pour les mêmes motifs.

14. Le Comité déplore les graves atteintes à la liberté d'expression que sont les assassinats fréquents de journalistes ainsi que les mesures d'intimidation qui empêchent les représentants de la presse d'exercer librement leur profession au Mexique. Il déplore également l'existence du délit de "diffamation contre l'État".

15. Le Comité est également préoccupé par la situation des enfants des rues qui ne cesse de s'aggraver. Ces enfants sont les plus exposés à la violence sexuelle et au commerce à des fins sexuelles.

16. Le Comité est préoccupé par l'ampleur de la violence contre les femmes, en particulier par les nombreux cas d'enlèvement et d'assassinat qui n'ont donné lieu à aucune arrestation ou poursuite et les nombreuses allégations faisant état de viol ou de torture que les forces de sécurité auraient fait subir à des femmes en détention et qu'elles ont peur de dénoncer.

17. Le Comité est préoccupé par des informations indiquant que les Mexicaines à la recherche d'un emploi dans les entreprises étrangères à la frontière du Mexique ("maquiladoras") sont soumises à des tests de grossesse et doivent répondre à des questions personnelles indiscrètes et que des produits contraceptifs sont administrés à certaines employées. Il est également préoccupé par le fait que ces allégations n'ont fait l'objet d'aucune enquête sérieuse.

18. Il faudrait que l'État partie prenne des mesures pour assurer l'égalité de chances aux femmes pour leur permettre de participer pleinement, sur un pied d'égalité, à la vie publique et pour supprimer toutes les dispositions législatives discriminatoires qui subsistent en ce qui concerne le mariage, le divorce et le remariage.

19. Bien que la Constitution reconnaisse, à l'article 4, la composition pluriculturelle de la nation mexicaine qui trouve son origine dans ses populations autochtones et en dépit de la volonté de l'État partie de régler la question de l'autodétermination des communautés autochtones, l'article 27 de la Constitution paraît protéger uniquement certaines catégories de droits concernant les terres autochtones et continue de laisser les populations autochtones exposées à d'importantes violations des droits de l'homme.

20. Le Comité prend note que la loi ne reconnaît pas le statut d'objecteur de conscience au service militaire.

21. L'État partie doit assurer une vaste diffusion à son quatrième rapport périodique et aux présentes observations finales. Il doit en outre fournir dans son cinquième rapport périodique, attendu en juillet 2002, des renseignements sur lesdites observations.

 



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