University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'homme, Republic of Korea, U.N. Doc. A/47/40, paras. 470-518 (1992).


 


Convention Abbreviation: CCPR
COMITE DES DROITS DE L'HOMME


EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 40 DU PACTE

Observations du Comité des droits de l'homme


REPUBLIQUE DE COREE


470. Le Comité a examiné le rapport initial de la République de Corée (CCPR/C/68/Add.1) à ses 1150e, 1151e et 1154e séances, les 13, 14 et 15 juillet 1992 (CCPR/C/SR.1150, SR.1151 et SR.1154). (Pour la composition de la délégation, voir annexe VIII.)

471. Le rapport a été présenté par le représentant de l'Etat partie qui a précisé qu'après la révision de la Constitution, le 29 octobre 1987, des mesures d'ordre institutionnel avaient été prises pour consacrer des principes véritablement démocratiques et renforcer la protection des droits de l'homme. La Constitution, qui s'inspirait de la Déclaration pour la démocratie du 29 juin 1987, représentait un tournant dans la lutte pour la démocratie en République de Corée et prévoyait l'élection du Président de la République au suffrage universel direct. Elle avait renforcé le pouvoir de l'Assemblée nationale face à l'administration et amélioré la procédure de nomination des juges. Une cour constitutionnelle avait été créée pour contrôler la constitutionnalité des lois et statuer sur les recours des particuliers qui demandaient réparation d'atteintes aux droits de l'homme. Des améliorations avaient également été apportées au système pénal par la mise en oeuvre de programmes d'assistance judiciaire et l'abolition de la peine de mort pour 15 types de crimes. En outre, on était en train de mettre définitivement au point des amendements au code pénal et au code de procédure pénale, destinés à renforcer le principe nullum crimen sine lege.

472. L'adhésion au Pacte avait joué un rôle important dans le renforcement général des droits de l'homme et des libertés fondamentales en République de Corée. Les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme avaient été traduits et publiés en coréen et des mesures avaient été prises pour faire connaître le Pacte aux responsables de l'application des lois. Des dispositions du Pacte avaient déjà été appliquées par la Cour constitutionnelle, et le Gouvernement avait entrepris de réexaminer sa position quant aux réserves qu'il avait formulées en adhérant au Pacte. L'admission de la République de Corée en qualité de Membre de l'Organisation des Nations Unies, en septembre 1991, avait donné une impulsion supplémentaire aux efforts du Gouvernement pour promouvoir les droits de l'homme conformément à la Charte des Nations Unies. De plus, devenue membre à part entière de l'OIT, en décembre 1991, la République de Corée avait fermement appuyé les efforts internationaux pour assurer la protection des droits syndicaux fondamentaux, et elle envisageait actuellement d'adhérer à diverses conventions de l'OIT.

473. Le représentant de l'Etat partie a souligné en outre que l'un des facteurs

les plus importants qui entravaient l'application du Pacte en République de Corée était la situation tendue, imputable au partage de la péninsule coréenne. Ce n'est qu'en 1991, après la fin de la guerre froide, que les deux parties avaient réussi à engager un dialogue sérieux et entrepris de rechercher

un moyen de réunifier pacifiquement la nation. Puis, en février 1992, l'accord sur la réconciliation et la non-agression, les échanges et la coopération avait été conclu et avait abouti à une série de consultations périodiques censées réduire, dans tous les domaines, l'écart entre les deux Corée. Cependant, il n'était que naturel qu'un pays, qui avait failli sombrer devant l'invasion, se sente incapable de relâcher sa vigilance à l'égard de toute nouvelle agression ou tentative de subversion dirigée contre son système démocratique libéral. Aussi la loi sur la sécurité nationale avait-elle été adoptée et continuait-elle d'être appliquée pour assurer la sécurité et l'intégrité du système. Bien que son abolition fût réclamée dans certains milieux, il existait au sein de la nation un consensus en faveur de son maintien jusqu'à la signature d'un accord de paix entre les deux Corée. Dans l'intervalle, le Gouvernement demeurait toutefois résolu à éliminer toute violation des droits de l'homme résultant d'une application de ladite loi qui outrepasserait les limites prévues par la Constitution et le Pacte.

474. Se référant à l'article premier du Pacte, des membres du Comité ont demandé des précisions sur la position de la République de Corée - eu égard au mouvement en faveur de la réunification - touchant le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ainsi que de leur droit à la démocratie et au choix de leur système économique, social, politique et culturel propre.

475. En ce qui concerne le cadre constitutionnel et juridique dans lequel le Pacte était appliqué, les membres du Comité ont tenu à avoir des renseignements complémentaires sur le statut du Pacte dans le droit interne. Constatant que le Pacte avait force de loi au même titre que toute loi interne ordinaire, les membres se sont demandé comment serait résolu un conflit entre les dispositions du Pacte et une loi interne adoptée ultérieurement. Il a été demandé si les dispositions du Pacte avaient jamais été invoquées devant les tribunaux et si une institution nationale avait été créée pour connaître des questions touchant les droits de l'homme. Plus généralement, à propos des recours dont disposaient les particuliers, il a été demandé quels étaient les effets des pétitions déposées par les particuliers, s'il pouvait être fait appel d'une décision rendue à la suite d'un dépôt de pétition, selon quelle procédure on pouvait s'adresser à la Cour suprême, et s'il existait des tribunaux administratifs. Des éclaircissements ont été demandés sur le sens de l'article 37 de la Constitution en vertu duquel les libertés et droits des citoyens ne seraient pas méconnus au motif qu'ils n'étaient pas énumérés dans la Constitution. Enfin, il a été demandé de quelle manière la population coréenne allait être informée du dialogue engagé par les autorités coréennes avec le Comité, et par quels moyens le Gouvernement allait, dans l'avenir, donner suite aux décisions éventuelles le concernant prises par le Comité en application du Protocole facultatif.

476. Des renseignements supplémentaires indispensables ont été demandés au sujet de la loi sur la sécurité nationale, notamment en ce qui concernait les restrictions ou limitations apportées aux articles 15, 18 et 19 du Pacte. On s'est inquiété du fait que cette loi rendait possible l'arrestation de quiconque aurait été trouvé en conversation avec des ressortissants de la République populaire démocratique de Corée, que des prisonniers politiques libérés de prison après avoir purgé leur peine devaient continuer à se présenter tous les trois mois à la police, et que cette même loi permettait d'interdire des manifestations même pacifiques. Il a aussi été demandé quels étaient plus précisément le sens du terme "espionnage" et l'étendue du pouvoir qu'avait la Cour suprême de décider de la légalité des dispositions de la loi sur la sécurité nationale.

477. Quant à l'interdiction de la discrimination pour divers motifs, il a été demandé pourquoi l'article 11 de la Constitution omettait de faire mention de certains motifs de discrimination énumérés au paragraphe 1 de l'article 2 du Pacte, notamment la race, la religion et l'opinion politique. Des renseignements ont également été demandés sur toute discrimination de fait qui pourrait continuer d'être exercée contre les femmes en République de Corée, notamment en ce qui concernait les droits de propriété, et sur les mesures prises pour l'éliminer, ainsi que sur le sens de l'expression "discrimination culturelle raisonnable" employée dans le rapport. Il a été demandé si le proxénétisme constituait une infraction pénale en République de Corée. Des éclaircissements ont en outre été demandés sur les dispositions de la législation interne interdisant aux étrangers d'exercer des fonctions publiques.

478. En ce qui concerne l'article 4 du Pacte, les membres du Comité ont souhaité avoir des précisions sur les dispositions législatives qui s'appliquaient en cas de danger public exceptionnel, et notamment sur celles relatives aux pouvoirs du Président dans ces circonstances, ainsi que sur la mesure dans laquelle ces dispositions étaient conformes au Pacte. Des renseignements complémentaires ont aussi été demandés sur les dispositions de la Constitution ou de la loi qui permettaient d'assurer le respect des dispositions du paragraphe 2 de l'article 4 du Pacte.

479. A propos de l'article 6 du Pacte, on s'est félicité de la limitation récente des catégories de crimes passibles de la peine de mort. Il a été demandé quels étaient précisément les délits qui restaient punissables de cette peine, notamment en vertu de la loi sur la sécurité nationale, et, en particulier, si une sentence de mort pouvait continuer d'être prononcée pour le vol qualifié. Notant que la législation nationale prévoyait des peines extrêmement variables, pouvant aller de cinq ans d'emprisonnement à la peine capitale, pour des délits pratiquement analogues, il a été précisé que le Comité avait toujours clairement indiqué, sur la base du Pacte, que la peine capitale ne pouvait être imposée que pour les crimes les plus odieux et les plus graves. Des renseignements ont été demandés au sujet des instructions données aux membres de la police à propos de l'usage de la force lors de manifestations publiques, au sujet de la manière dont la peine de mort était exécutée et au sujet des dispositions légales relatives à l'avortement. Des éclaircissements ont aussi été demandés sur la déclaration faite dans le rapport, selon laquelle les droits des personnes atteintes de certaines catégories de maladies transmissibles pouvaient être limités.

480. Se référant aux articles 7, 8, 9 et 10 du Pacte, les membres du Comité ont voulu savoir si une déclaration ou un aveu obtenus par la torture pouvaient servir de preuve en justice et si des plaintes avaient été déposées en raison de tortures infligées à des prisonniers ou des détenus et, le cas échéant, si des condamnations avaient été prononcées à la suite de telles accusations. A cet égard, des précisions ont été souhaitées au sujet de certains cas particuliers; il a notamment été demandé combien de fonctionnaires avaient été reconnus coupables de telles violations, quelles peines leur avaient été infligées et si des personnes qui auraient pu être condamnées par le passé sur la base d'aveux obtenus d'une telle manière pourraient bénéficier de l'évolution positive de la situation en République de Corée. Il a également été demandé dans quel délai, après l'arrestation d'une personne, la famille de celle-ci était informée de son arrestation; quelle réglementation régissait l'emprisonnement cellulaire; quel était le rôle de l'agence pour la sécurité nationale au regard de l'article 9 du Pacte; et quelle était la majorité pénale. Des précisions ont aussi été demandées sur la mesure dans laquelle la très longue période de détention préventive prévue, notamment par la loi sur la sécurité nationale, était compatible avec le Pacte.

481. Des éclaircissements ont été demandés au sujet des dispositions législatives relatives au recours en habeas corpus ou autre recours similaire et de celles selon lesquelles le détenu n'était autorisé à recevoir des visites que lorsque cela était jugé nécessaire. Il a également été demandé si les dispositions selon lesquelles le traitement des détenus visait à réformer et éduquer ces personnes afin de les aider à se réinsérer dans la société en développant chez eux un sens de l'esprit national étaient conformes aux dispositions du Pacte. S'agissant de l'article 8 du Pacte, des précisions ont été souhaitées au sujet des dispositions du Code pénal prévoyant une peine de réclusion criminelle avec une "certaine quantité de travail".

482. Les membres du Comité ont tenu à avoir des informations complémentaires sur l'application de l'article 14 du Pacte ainsi que sur l'organisation judiciaire, y compris les dispositions législatives et administratives régissant l'exercice des fonctions de juge, la destitution de ces fonctions et les sanctions disciplinaires dont les membres de l'ordre judiciaire pouvaient faire l'objet. Il a été demandé comment l'indépendance et l'impartialité de la magistrature étaient garanties; s'il existait un système d'assistance judiciaire et de consultation juridique gratuites et, dans l'affirmative, comment il fonctionnait, et si les procureurs étaient soumis à l'autorité du pouvoir exécutif ou du pouvoir judiciaire. A cet égard, il a été demandé quel était le rôle exact du procureur, de quelle manière on garantissait son indépendance, et quelles responsabilités avaient été confiées aux centres de consultation en matière de droits de l'homme qu'il avait créés. Il a été demandé dans quelle mesure plus précisément les restrictions mentionnées dans le rapport comme étant apportées au droit d'une personne privée de sa liberté de communiquer avec un avocat étaient compatibles avec les dispositions du Pacte; et quel était exactement le sens de la réserve formulée par le Gouvernement à l'égard des recours contre des jugements rendus par des tribunaux militaires en vertu de lois spéciales. Des renseignements ont également été demandés au sujet de l'application de l'article 15 du Pacte, s'agissant en particulier de l'effet rétroactif d'une décision d'inconstitutionnalité.

483. En ce qui concerne les articles 12 et 13 du Pacte, des éclaircissements ont été demandés sur les restrictions ou limitations de fait et de droit apportées au droit de circuler librement, s'agissant des voyages en République populaire démocratique de Corée; sur la mesure dans laquelle certaines dispositions de la loi de surveillance sociale - en vertu de laquelle toute personne soupçonnée d'infractions tombant sous le coup de la loi sur la sécurité nationale pouvait être placée sous surveillance pendant une période pouvant aller jusqu'à deux ans, sur une base renouvelable - étaient compatibles avec les dispositions du Pacte; ainsi que sur la loi relative à l'enregistrement des résidents. Il a été demandé quelles "restrictions préventives" pouvaient, en vertu de l'article 12 de la Constitution, être apportées au droit de circuler librement; et quelles dispositions législatives régissaient l'admission dans le pays de "réfugiés de la mer", ou leur expulsion. Enfin, des renseignements ont été souhaités au sujet de l'état des négociations entreprises en vue de la résolution du grave problème posé par la séparation de certaines familles et en vue de leur réunification.

484. A propos des articles 17, 18 et 19 du Pacte, il a été demandé si des tentatives avaient jamais été faites pour contraindre des personnes à renoncer à leurs convictions; si des efforts pour promouvoir l'anticommunisme continuaient d'être faits nonobstant l'évolution intervenue dans le monde; si l'objection de conscience était admise par la loi; et s'il y avait des prisonniers politiques. A cet égard, il a été demandé si la condition selon laquelle de tels prisonniers semblaient ne pouvoir être libérés qu'à la condition d'abandonner leurs opinions et leurs convictions était conforme au Pacte. Des éclaircissements ont aussi été demandés sur le sens d'une phrase du rapport aux termes de laquelle la loi sur la radiodiffusion avait pour objet d'aider à façonner l'opinion publique.

485. En ce qui concerne les articles 21 et 22 du Pacte, les membres du Comité ont tenu à avoir des informations sur la dissolution présumée de certains syndicats d'enseignants et de professeurs d'établissements primaires, secondaires et supérieurs privés. Il a été demandé pour quelle raison une autorisation préalable devait être obtenue pour organiser des réunions ou des manifestations, dans combien de cas cette autorisation avait été refusée et pour quels motifs.

486. A propos de l'article 24 du Pacte, des renseignements supplémentaires ont été demandés sur la définition précise du terme "mineurs" ainsi que sur les mesures prises pour empêcher l'emploi des enfants à un âge où ils devraient être obligatoirement scolarisés.

487. Se référant à l'article 25 du Pacte, les membres du Comité ont tenu à savoir pourquoi il était interdit à certains enseignants et à certains journalistes de fonder un parti politique ou d'y adhérer.

488. En ce qui concerne l'article 27 du Pacte, les membres du Comité ont souhaité recevoir des informations complémentaires sur la situation et la composition des minorités religieuses et autres du pays.

489. Dans sa réponse, le représentant de l'Etat partie a rappelé que les relations entre la République de Corée et la République populaire démocratique de Corée étaient parmi les principales causes de la situation des droits de l'homme dans son pays. L'adoption de l'Accord sur la réconciliation, la non-agression, les échanges et la coopération, ainsi que de la Déclaration commune sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne, avait fait naître l'espoir d'un dialogue bilatéral. En mai 1992, trois organismes avaient été créés pour élaborer un accord de base concernant l'unification, mais l'absence de consensus sur la question nucléaire avait ralenti les négociations. Pour le Gouvernement de la République de Corée, les principes de l'autodétermination, de la paix et de la démocratie devaient être les fondements de la réunification de la péninsule. L'autre partie ayant un point de vue différent, il était difficile de prévoir l'issue du dialogue entamé. Il fallait espérer toutefois qu'un accord sur le regroupement familial serait prochainement conclu étant donné qu'à l'heure actuelle, les membres de familles séparés les uns des autres n'étaient toujours pas autorisés à se téléphoner ou à s'écrire.

490. La République de Corée se trouvait encore confrontée à un risque très réel de déstabilisation et de provocation militaire et tant que le terrorisme serait un instrument de la politique étrangère de l'autre partie, la République de Corée serait obligée de maintenir la loi sur la sécurité nationale. Cette loi, strictement appliquée et interprétée dans l'esprit de la Constitution et du Pacte, n'était utilisée que pour contrecarrer les actes subversifs qui mettaient en péril la sécurité nationale et l'ordre démocratique. L'essentiel d'une décision adoptée en avril 1990 par la Cour constitutionnelle définissant, entre autres, les activités "mettant en péril la sécurité et la survie nationales" ainsi que l'"ordre démocratique libéral fondamental" avait été incorporé à la loi sur la sécurité nationale. En vertu de ces dispositions, nul ne pouvait être condamné pour le seul motif d'avoir exprimé des idées communistes ou de sympathiser avec la République populaire démocratique de Corée, à la condition toutefois que ces affinités n'aient pas pour conséquence la commission d'actes précis. Le concept d'espionnage ne s'appliquait qu'aux activités de renseignement susceptibles de mettre en péril la sécurité nationale, et le crime d'espionnage n'était invoqué que contre ceux qui avaient à l'évidence tenté de transmettre des informations sachant que leur divulgation représentait un danger pour la République de Corée. Des personnes ont été condamnées en vertu de la loi sur la sécurité nationale pour tentative de coup d'Etat ou incitation au renversement du Gouvernement par la violence. Dans tous les cas, elles ont bénéficié de toutes les garanties constitutionnelles destinées à leur assurer un procès équitable. L'amendement apporté à la loi sur la sécurité nationale n'avait pas d'effet rétroactif. La loi non modifiée continuait à s'appliquer aux actes commis avant l'introduction de l'amendement.

491. Se référant aux questions portant sur le statut du Pacte, le représentant de l'Etat partie a précisé qu'en vertu de l'article 6 de la Constitution, le Pacte avait le même effet que la législation interne. Les garanties prévues par le Pacte ne pouvaient en aucun cas être abrogées par des lois ultérieures car la République de Corée était attachée aux droits de l'homme et s'employait à mieux faire connaître le Pacte dans la population. De plus, la plupart des droits consacrés par le Pacte l'étant aussi par la Constitution, toute loi nationale incompatible avec le Pacte serait déclarée non conforme à la Constitution. Si un particulier affirme être victime de violations de droits protégés par le Pacte, le tribunal statuera, dans la plupart des cas, sur la base de la législation nationale. Dans les rares cas où cela ne serait pas possible, le Pacte pourra être directement invoqué devant les tribunaux. De plus, tous les droits consacrés par le Pacte étant, selon le Gouvernement, couverts par l'article 37 de la Constitution, aucun ne pouvant être négligé. Toute plainte était examinée par l'administration compétente. Si le plaignant n'était pas satisfait de la suite qui y était donnée, il pouvait automatiquement saisir les tribunaux. Par ailleurs, chacun était libre de recourir aux procédures prévues par le Protocole facultatif. Le Gouvernement s'emploiera à tenir compte dans sa future législation de toute observation concernant la République de Corée qui pourrait être formulée par le Comité.

492. Au sujet des questions ayant trait à l'égalité et à la non- discrimination, le représentant de l'Etat partie a déclaré que la liste figurant à l'article 11 de la Constitution était purement indicative et que d'autres motifs de discrimination, dont les convictions politiques, n'étaient pas exclus. L'expression "discrimination culturelle raisonnable" visait à tenir compte des différents degrés d'instruction. Le droit d'accéder à la fonction publique n'était pas garanti aux étrangers, mais le Gouvernement employait des étrangers sous contrat. La situation des femmes avait évolué, mais, dans la plupart des cas, les travailleuses comptaient encore parmi les salariés les moins bien rémunérés et seules quelques femmes occupaient des postes élevés dans l'enseignement. Par ailleurs, les services de puériculture mis à la disposition des familles à faible revenu restaient insuffisants et les pratiques discriminatoires traditionnelles envers les femmes subsistaient encore. Le Gouvernement s'employait à faire disparaître les stéréotypes traditionnels, à promouvoir la participation des femmes aux activités sociales et économiques et à développer les services sociaux. Il envisageait aussi de modifier la loi sur la nationalité en vertu de laquelle les femmes étaient obligées, au moment du mariage, d'adopter la nationalité de leur conjoint ou de se faire naturaliser en cas de naturalisation du conjoint.

493. Au sujet de l'article 4 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a déclaré qu'en vertu de l'article 37 de la Constitution et conformément au paragraphe 2 de l'article 4 du Pacte, il ne pouvait être porté atteinte à l'"aspect essentiel" d'une liberté ou d'un droit. En vertu de l'article 76 de la Constitution, le Président pouvait prendre un décret d'exception en cas d'insurrection, de menace extérieure, de calamité naturelle ou de crise financière ou économique grave. Si l'Assemblée nationale jugeait ensuite que le décret d'exception n'était pas justifié, ce dernier était immédiatement révoqué.

494. En ce qui concerne l'article 6 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a déclaré qu'en plus des délits prévus par la loi sur la sécurité nationale, 15 crimes étaient passibles de la peine de mort. Une sentence de mort pouvait être prononcée en cas de cambriolage accompagné de circonstances aggravantes odieuses. Le Gouvernement qui a déjà considérablement réduit le nombre des délits passibles de la peine capitale a l'intention de progresser encore dans cette voie. La loi sur la sécurité nationale ne traite que d'un genre de crime : les activités contre l'Etat qui mettent en danger la sécurité nationale, et nombre de délits énumérés dans la loi, par exemple le meurtre à des fins insurrectionnelles, sont également couverts par le Code pénal. En vertu de la loi sur l'administration pénale, la sentence de mort est exécutée par pendaison. L'avortement est punissable en vertu du Code pénal, mais la loi sur la santé maternelle et infantile autorise des exceptions en cas de viol, d'inceste et de danger pour la mère. La référence dans le rapport à l'avortement pour des raisons d'eugénisme se rapporte au cas où le foetus présente de graves malformations.

495. Au sujet de l'article 7 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a souligné que les tribunaux n'admettaient les aveux que s'il était prouvé, avec une quasi-certitude, qu'ils avaient été faits librement. Se référant aux cas précis évoqués par des membres du Comité, il a précisé que la condamnation de M. Kim Rae Park reposait sur des preuves objectives et non sur des aveux extorqués sous la torture, comme on l'avait prétendu. Sa peine avait été réduite pour bonne conduite et il avait été placé en liberté surveillée le 25 mai 1991. A la suite d'une enquête sur la mort violente de M. Jong Chul Park, en janvier 1987, cinq officiers de police ont été reconnus coupables et condamnés à des peines de prison allant de 3 à 10 ans. En outre, six autres officiers de police ont été condamnés à des peines de prison allant de 2 à 10 ans, 14 à des peines avec sursis et neuf autres attendent d'être jugés. Les lieux de détention sont régulièrement inspectés par des procureurs et des représentants du Ministère de la justice et toute plainte pour traitement inhumain fait l'objet d'une enquête du ministère public. S'agissant des peines d'emprisonnement de longue durée prononcées pour tentative de renversement du Gouvernement par la violence, le représentant a déclaré que le Gouvernement ne pouvait se permettre de libérer des personnes s'il n'était pas certain que pareille libération ne mettait pas la sécurité nationale en péril.

496. Répondant aux questions soulevées au sujet des articles 9, 10 et 11 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a déclaré que la détention préventive ne pouvait se prolonger au-delà de six mois et que le tribunal devait se prononcer dans ce délai ou libérer le prévenu. Il n'existait aucune exception au droit d'un prévenu de communiquer avec son avocat et la Cour constitutionnelle avait décidé, en janvier 1992, que l'article 62 de la loi sur l'administration pénale était inconstitutionnel parce qu'il interdisait aux détenus de rencontrer leur avocat hors de la présence d'un fonctionnaire pénitentiaire. Le système correctionnel visait à empêcher les récidives et à assurer la réinsertion sociale des détenus; aussi dispensait-on dans les prisons une instruction destinée à leur inculquer de bons principes civiques. Les détenus condamnés en application de la loi sur la sécurité nationale participaient eux aussi à des programmes d'éducation comprenant, entre autres, des débats sur des idéologies divergentes destinés à faire en sorte que leur retour dans la société ne pose pas de problème au pays. Ceux dont les convictions, si elles se traduisaient par des actes, pourraient constituer un danger pour le pays étaient exclus du régime de la libération conditionnelle. L'inculcation aux détenus de ce qu'il était convenu d'appeler en République de Corée un "esprit civique sain" visait à les imprégner des valeurs culturelles traditionnelles propres à leur pays pour qu'ils soient en mesure de s'adapter à une vie normale à leur retour dans la société.

497. Se référant aux questions posées au sujet de l'article 14 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a déclaré que les procureurs étaient des magistrats de l'Exécutif placés sous l'autorité du Ministère de la justice, dont la loi sur l'administration de la justice garantissait l'indépendance. Ils ne pouvaient être suspendus autrement qu'à la suite d'une mise en accusation ou d'une condamnation et le niveau de leur rémunération était garanti. L'Agence de planification de la sécurité nationale rassemblait, aux fins de la sécurité intérieure, des renseignements sur les activités communistes et subversives et conduisait des enquêtes dans un nombre limité de cas, notamment sur des violations présumées de la loi sur la sécurité nationale. Les juges étaient nommés pour 10 ans, mais étaient rééligibles. Ils ne pouvaient être suspendus autrement qu'à la suite d'une mise en accusation ou d'une condamnation pour certains délits et leurs activités politiques étaient soumises à des restrictions. La Cour constitutionnelle statuait sur la constitutionnalité des lois, les cas de mise en accusation, la dissolution des partis politiques et les conflits de juridiction. La loi sur les tribunaux militaires établissait les procédures de la justice militaire et garantissait les droits fondamentaux du défendeur comme le Code de procédure pénale s'agissant des tribunaux ordinaires, la seule exception étant le droit de recours. Pouvaient relever de la justice militaire les civils s'étant rendus coupables de délits, d'espionnage militaire, de fourniture d'aliments contaminés à des soldats et d'activités illégales au regard de la loi martiale à l'égard de prisonniers de guerre ou de factionnaires. A cet égard, l'expression "loi d'exception" figurant dans le rapport se référait à la loi martiale proclamée en cas d'état de siège ou de guerre.

498. Au sujet des articles 12 et 13 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a précisé que l'espoir d'une réunification pacifique restant à concrétiser, certaines restrictions s'appliquaient aux voyages à destination de la République populaire démocratique de Corée, conformément au paragraphe 3 de l'article 12 du Pacte qui prévoyait des restrictions à la liberté de circulation pour des raisons de sécurité nationale. Le Gouvernement coréen collaborait avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés pour assurer une assistance humanitaire aux réfugiés de la mer en attendant leur départ, soit à destination du pays où ils comptaient se réinstaller soit d'un pays tiers disposé à les accueillir. A ce jour, quelque 1 220 réfugiés de la mer ont ainsi été réinstallés dans des pays tiers; 155 résidaient encore dans un camp d'accueil provisoire.

499. En réponse aux questions concernant les articles 17, 18 et 19 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a souligné que la République de Corée ne pratiquait pas la censure. On pouvait, par exemple, librement se procurer ou consulter les écrits de Marx, de Lénine et d'autres auteurs prônant le communisme dans les librairies et les bibliothèques universitaires. Toutefois, la loi sur la sécurité nationale contenait des restrictions à toute propagande susceptible de déstabiliser le pays et interdisait la publication, la reproduction, le transport ou la diffusion de matériels de propagande mettant en péril la sécurité nationale. Dans le souci de maintenir l'ordre et la moralité publics, la loi sur les spectacles, la loi sur les films et la loi relative aux enregistrements et matériels audio-visuels imposaient, conformément à l'article 19 du Pacte, des restrictions très limitées en ce qui concernait les films, les disques et les cassettes.

500. Au sujet des articles 21, 22 et 25 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a indiqué que lorsque la police était avisée de la tenue d'une réunion ou d'une manifestation, elle s'assurait du respect des règlements en matière d'horaire et de lieu et en évaluait les conséquences éventuelles sur la fluidité de la circulation. Si elle estimait qu'il y avait un risque de violence ou une menace évidente à l'ordre et à la sécurité publics, elle faisait parvenir aux organisateurs un avis d'interdiction qui pouvait être contesté devant les tribunaux. Le comité d'examen des demandes de réunions et de manifestations récemment constitué a publié des normes objectives limitant les restrictions à la liberté de réunion dans le souci de mieux protéger les droits de l'homme. Pour qu'ils puissent conserver la plus grande impartialité en ce qui concernait la politique des partis, il était interdit aux enseignants et aux journalistes d'adhérer à certains partis politiques. En vertu de l'article 8 de la Constitution, le Gouvernement pouvait saisir la Cour constitutionnelle en vue d'obtenir la dissolution d'un parti si celui-ci avait des objectifs ou des activités contraires à l'ordre démocratique fondamental.

501. Au sujet de l'article 24 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a déclaré que son gouvernement n'épargnait aucun effort pour empêcher le travail des enfants dans les bars ou autres lieux de divertissement.

502. Au sujet de l'article 27 du Pacte, le représentant de l'Etat partie a fait valoir que la République de Corée était une nation homogène, aux caractéristiques bien distinctes, dont la population partageait une langue et une culture communes, à l'exception de quelque 51 000 résidents d'origine étrangère dont 23 500 Chinois. Tous jouissaient, dans tous les domaines, des droits fondamentaux de la personne humaine, conformément à la Constitution et au Pacte.

Observations finales de membres du Comité

503. Des membres du Comité ont remercié le représentant de l'Etat partie du concours qu'il avait apporté au Comité pour la manière dont il avait présenté le rapport et répondu aux nombreuses questions qui lui avaient été posées. Ce rapport, présenté dans les délais prescrits, contenait des renseignements détaillés sur les lois et règlements ayant trait à l'application du Pacte. Toutefois, il ne donnait guère de renseignements sur l'application du Pacte dans la pratique et sur les facteurs et difficultés y faisant obstacle.

504. Des membres se sont félicités de l'adhésion de la République de Corée à plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, dont le Pacte et son Protocole facultatif, et de son adhésion à l'OIT. Ils ont noté avec satisfaction que la République de Corée envisageait de retirer les réserves qu'elle avait formulées à l'égard du Pacte. Par ailleurs, des progrès avaient été réalisés en matière d'assistance juridique et dans la voie d'une réduction de la portée de la loi sur la sécurité nationale. L'opposition pouvait désormais se manifester et la Cour constitutionnelle jouait son rôle résolument et en toute indépendance.

505. Toutefois, certaines des préoccupations exprimées par des membres du Comité n'avaient pas été pleinement dissipées. La Constitution ne protégeait pas tous les droits consacrés par le Pacte et l'argument selon lequel, en vertu de l'article 37 de la Constitution, divers droits et libertés non énumérés dans la Constitution n'en étaient pas pour autant négligés n'a pas été jugé satisfaisant. Des membres se sont déclarés extrêmement préoccupés par le maintien en vigueur de la loi sur la sécurité nationale. Certes, la situation politique dans laquelle se trouvait la République de Corée ne pouvait manquer d'avoir des répercussions sur l'ordre public intérieur, mais il ne fallait toutefois pas en exagérer l'importance. L'application des lois ordinaires et des lois pénales spécifiques semblait devoir suffire pour réprimer les atteintes à la sécurité nationale. On a fait observer avec inquiétude que certaines questions qui relevaient de la loi sur la sécurité nationale étaient définies en termes plutôt vagues, ce qui semblait permettre une large interprétation et permettre que des sanctions soient prises pour réprimer des actes qui n'étaient peut-être pas vraiment dangereux pour l'Etat. Ainsi, en matière d'espionnage, le fait que la notion de secret d'Etat ait une acception très large pouvait ouvrir la voie à des abus.

506. Des membres du Comité se sont déclarés préoccupés par la persistance de certaines formes de discrimination à l'égard des femmes; du nombre encore élevé de délits passibles de la peine de mort; de l'inclusion du cambriolage dans les délits passibles de la peine capitale, clairement contraire aux dispositions de l'article 6 du Pacte; du recours excessif à la force par la police; de la durée excessive de la détention préventive; de l'application effective du paragraphe 3 de l'article 9 du Pacte; de l'ampleur des pouvoirs d'enquête de l'Agence de planification de la sécurité nationale; de l'application de l'article 12, notamment en ce qui concernait les visites en République populaire démocratique de Corée, problèmes qui relevaient de l'article 15 du Pacte; du fait que des personnes continuent d'être emprisonnées en raison de leurs opinions politiques; et de la nécessité d'obtenir une autorisation préalablement à l'organisation de réunions ou de manifestations. Par ailleurs, les conditions dans lesquelles les prisonniers étaient rééduqués ne constituaient pas un processus normal de réadaptation, mais traduisaient l'emploi de méthodes coercitives contraires aux dispositions du Pacte relatives à la liberté de conscience.

507. Le représentant de l'Etat partie a donné aux membres du Comité l'assurance que les observations qu'ils avaient formulées seraient transmises à son gouvernement et a souligné l'importance que son pays attachait au dialogue avec le Comité. Les conclusions que l'examen du rapport avait inspirées au Comité avaient rendu le Gouvernement coréen plus que jamais conscient des responsabilités que lui imposait le Pacte. Les appréciations favorables formulées par des membres du Comité encourageraient le Gouvernement à redoubler d'efforts en faveur des droits de l'homme et leurs critiques l'inciteraient à accélérer l'introduction des améliorations qui s'imposaient encore.

508. En concluant l'examen du rapport initial de la République de Corée, le Président a remercié la délégation coréenne d'avoir fourni des réponses claires et détaillées aux questions posées par des membres du Comité. Il a formulé l'espoir que toutes les observations du Comité seraient transmises aux autorités compétentes et dûment prises en compte lors de l'élaboration de nouvelles lois ou de la révision des lois existantes.

Observations du Comité

509. Comme il est indiqué plus haut au paragraphe 45, le Comité a décidé, à sa 1123e séance, le 24 mars 1992, d'adopter des observations reflétant les vues de l'ensemble de ses membres à la fin de l'examen de chacun des rapports des Etats parties.

510. Conformément à cette décision, à sa 1173e séance, le 29 juillet 1992, le Comité a adopté les observations ci-après.


Introduction

511. Le Comité remercie l'Etat partie d'avoir établi un rapport bien étayé par des faits, qui a été présenté dans le délai prescrit. Le rapport contient des renseignements détaillés sur les lois et règlements touchant l'application du Pacte. Toutefois, le Comité note que le rapport ne renferme pas suffisamment de renseignements au sujet de la mise en oeuvre des dispositions du Pacte dans la pratique et des facteurs et difficultés qui pourraient entraver son application. En même temps, le Comité se félicite des réponses claires et complètes et des précisions détaillées données oralement par la délégation.


1. Aspects positifs

512. Le Comité note avec satisfaction que ces dernières années la République de Corée est devenue partie à un certain nombre d'instruments relatifs aux droits de l'homme, en particulier au Pacte et à son Protocole facultatif, et qu'elle a fait la déclaration prévue à l'article 41 du Pacte. Elle a aussi adhéré à l'OIT. Le Comité note également avec satisfaction que la République de Corée étudie actuellement la possibilité de lever les réserves qu'elle avait faites à l'égard du Pacte. En outre, des progrès ont été accomplis en ce qui concerne l'octroi de l'aide judiciaire et la limitation du champ d'application de la loi sur la sécurité nationale. L'opposition interne est davantage tolérée et la Cour constitutionnelle, organe indépendant, joue un rôle énergique et important.


2. Facteurs et difficultés entravant l'application du Pacte

513. Le Comité note que les relations entre la République de Corée et la République populaire démocratique de Corée semblent encore être un facteur qui influe beaucoup sur la situation des droits de l'homme dans la République de Corée. La conclusion récente de l'Accord sur la réconciliation, la non-agression, les échanges et la coopération constitue apparemment une mesure positive. Selon les autorités, toutefois, la République de Corée se heurte encore à une menace très réelle de déstabilisation et de provocation militaire et le Gouvernement continue donc à estimer qu'il est indispensable de maintenir en vigueur la loi sur la sécurité nationale pour protéger la sécurité et l'intégrité de son système démocratique libéral.


3. Principaux sujets de préoccupation

514. Le Comité se déclare préoccupé par le fait que la Constitution ne consacre pas tous les droits énoncés dans le Pacte. De même, les dispositions de l'article 11 de la Constitution concernant la non-discrimination semblent assez incomplètes au regard des articles 2 et 26 du Pacte. Ces préoccupations n'ont pas été atténuées par l'argument selon lequel, conformément à l'article 37 de la Constitution, il ne faut pas négliger les divers droits et libertés qui n'y sont pas énumérés.

515. La principale préoccupation du Comité porte sur le maintien en vigueur de la loi sur la sécurité nationale. La situation particulière dans laquelle se trouve la République de Corée a certainement des incidences sur l'ordre public dans ce pays, mais son influence ne doit pas être surestimée. Le Comité estime que les lois ordinaires et en particulier les lois pénales en vigueur devraient suffire à répondre aux atteintes à la sécurité nationale. De plus, certaines questions traitées dans la loi sur la sécurité nationale sont définies en termes assez vagues, ce qui permet une interprétation très large qui pourrait avoir pour effet de sanctionner des actes qui ne sont peut-être pas véritablement dangereux pour la sécurité de l'Etat et d'encourager l'adoption de mesures non autorisées par le Pacte.

516. Le Comité tient à exprimer sa préoccupation au sujet de l'utilisation d'une force excessive par la police, de l'étendue des pouvoirs d'investigation de l'organisme chargé de la sécurité nationale et de l'application de l'article 12, en particulier en ce qui concerne les visites dans la République populaire démocratique de Corée. Le Comité estime également que les conditions dans lesquelles les prisonniers sont rééduqués ne constituent pas une réinsertion au sens normal du terme et que les mesures de coercition utilisées dans le cadre de ce processus pourraient constituer une violation des dispositions du Pacte touchant la liberté de conscience. La définition très large des secrets d'Etat dans le contexte de l'espionnage peut également donner lieu à des abus.

517. Le Comité se déclare également préoccupé par le nombre encore élevé d'infractions passibles de la peine de mort. En particulier, l'inclusion du vol qualifié parmi les infractions passibles de la peine de mort est manifestement contraire aux dispositions de l'article 6 du Pacte. La très longue période pendant laquelle une personne peut être interrogée avant d'être inculpée est incompatible avec les dispositions du paragraphe 3 de l'article 9 du Pacte. Les autres préoccupations exprimées portent sur le fait que l'on continue d'emprisonner des personnes pour leurs opinions politiques, la persistance de la discrimination contre les femmes dans certains domaines, des problèmes relatifs au principe de la légalité des peines visées à l'article 15 du Pacte et l'obligation d'obtenir une autorisation préalable pour organiser des réunions et des manifestations.


4. Suggestions et recommandations

518. Compte tenu de l'évolution positive de la situation des droits de l'homme dans l'Etat partie ces dernières années, le Comité recommande à l'Etat partie d'intensifier ses efforts pour que sa législation soit plus conforme aux dispositions du Pacte. A cette fin, des efforts énergiques devraient être entrepris pour abroger progressivement la loi sur la sécurité nationale que le Comité considère comme un obstacle important à la pleine réalisation des droits consacrés dans le Pacte, et, dans l'intervalle, pour ne pas porter atteinte à certains droits fondamentaux. De plus, des mesures devraient être prises pour réduire les cas où la peine de mort est appliquée, harmoniser dans une très large mesure le Code pénal avec les dispositions de l'article 15 du Pacte et réduire encore les restrictions concernant l'exercice du droit de réunion pacifique (art. 21). Enfin, le Comité suggère que le gouvernement de l'Etat partie étudie activement la possibilité de lever sa réserve générale touchant l'article 14 et prenne d'autres mesures en vue de mieux faire connaître à son opinion publique les dispositions du Pacte et du Protocole facultatif.

 



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