University of Minnesota



Observation Generale 21, Article 10 (quarante-quatrième session, 1992), Compilation des commentaires generaux et Recommendations generales adoptees par les organes des traites, U.N. Doc. HRI\GEN\1\Rev.1 (1994).



1. L'observation générale ci-après remplace l'observation générale No 9 (16), qu'elle reprend et développe.

2. Le paragraphe 1 de l'article 10 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques s'applique à toute personne privée de sa liberté en vertu des lois et de l'autorité de l'Etat et qui est détenue dans une prison, un hôpital -- un hôpital psychiatrique en particulier --, un camp de détention, un centre de redressement ou un autre lieu. Les Etats parties devraient veiller à ce que le principe énoncé dans cette disposition soit respecté dans toutes les institutions et tous les établissements placés sous leur juridiction et où des personnes sont retenues.

3. Le paragraphe 1 de l'article 10 impose aux Etats parties une obligation positive en faveur des personnes particulièrement vulnérables du fait qu'elles sont privées de liberté et complète d'interdiction de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants prévue à l'article 7 du Pacte. Ainsi, les personnes privées de leur liberté non seulement ne peuvent être soumises à un traitement contraire à l'article 7, notamment à des expériences médicales ou scientifiques, mais encore ne doivent pas subir de privation ou de contrainte autre que celles qui sont inhérentes à la privation de liberté; le respect de leur dignité doit être garanti à ces personnes de la même manière qu'aux personnes libres. Les personnes privées de leur liberté jouissent de tous les droits énoncés dans le Pacte, sous réserve des restrictions inhérentes à un milieu fermé.

4. Traiter toute personne privée de liberté avec humanité et en respectant sa dignité est une règle fondamentale d'application universelle, application qui, dès lors, ne saurait dépendre des ressources matérielles disponibles dans l'Etat partie. Cette règle doit impérativement être appliquée sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinions politiques ou autres, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.

5. Les Etats parties sont invités à indiquer dans leurs rapports dans quelle mesure ils se conforment aux normes des Nations Unies applicables au traitement des détenus: l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus (1957), l'Ensemble de principes pour la protection des personnes soumises à une forme quelconque d'emprisonnement (1988), le Code de conduite pour les responsables de l'application des lois (1978) et les Principes d'éthique médicale applicables au rôle du personnel de santé, en particulier des médecins, dans la protection des prisonniers et des détenus contre la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (1982).

6. Le Comité rappelle que les rapports doivent comporter des informations détaillées sur les dispositions législatives et administratives nationales qui ont des incidences sur le droit prévu au paragraphe 1 de l'article 10. Il estime également nécessaire qu'y soient précisées les mesures concrètes prises par les autorités compétentes pour contrôler l'application effective des règles relatives au traitement des personnes privées de leur liberté. Les Etats parties devraient aussi renseigner dans leurs rapports sur les structures de supervision des établissements pénitentiaires, de même que sur les mesures précises prises pour empêcher la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants et pour assurer l'impartialité de la supervision.

7. Le Comité rappelle en outre que les rapports devraient indiquer si les diverses dispositions applicables font partie intégrante de l'enseignement et de la formation qui sont dispensés aux personnels ayant autorité sur des personnes privées de leur liberté et si ces personnels respectent strictement ces dispositions dans l'accomplissement de leurs devoirs. De même, il conviendrait de préciser si les personnes arrêtées ou détenues peuvent s'informer de ces dispositions et disposent des recours utiles leur permettant d'obtenir que ces règles soient respectées, de se plaindre lorsqu'il n'est pas tenu compte de celles-ci et d'obtenir juste réparation en cas de violation.

8. Le Comité rappelle que le principe énoncé au paragraphe 1 de l'article 10 constitue le fondement des obligations plus précises que les paragraphes 2 et 3 du même article 10 imposent aux Etats parties en matière de justice pénale.

9. Le paragraphe 2 de l'article 10 prévoit en son alinéa a) que les prévenus doivent, sauf circonstances exceptionnelles, être séparés des condamnés. Cette séparation est nécessaire pour faire ressortir qu'un prévenu n'est pas une personne condamnée et qu'il a le droit d'être présumé innocent, comme le dispose le paragraphe 2 de l'article 14. Les rapports des Etats parties devraient indiquer comment est assurée la séparation entre les prévenus et les condamnés et préciser en quoi le régime des prévenus diffère de celui des condamnés.

10. En ce qui concerne le paragraphe 3 de l'article 10, relatif aux condamnés, le Comité souhaite recevoir des informations détaillées sur le système pénitentiaire des Etats parties. Aucun système pénitentiaire ne saurait être uniquement distributif; il devrait essentiellement viser le redressement et la réadaptation sociale du prisonnier. Ceux-ci sont invités à préciser s'ils disposent d'un système d'assistance postpénitentiaire et à donner des renseignements sur son efficacité.

11. Dans un certain nombre de cas, les renseignements fournis par l'Etat partie ne comportent de référence précise ni aux dispositions législatives ou administratives ni aux mesures pratiques qui visent à assurer la rééducation du condamné. Le Comité souhaite être précisément informé des mesures prises pour assurer l'instruction, l'éducation et la rééducation, l'orientation et la formation professionnelle, ainsi que des programmes de travail destinés aux détenus à l'intérieur de l'établissement pénitentiaire et à l'extérieur.

12. Pour pouvoir apprécier si le principe énoncé au paragraphe 3 de l'article 10 est pleinement respecté, le Comité souhaite en outre connaître les mesures spécifiques appliquées durant la détention, par exemple l'individualisation et la classification des condamnés, le régime disciplinaire, l'isolement cellulaire et la détention sous le régime de haute sécurité ainsi que les conditions dans lesquelles sont assurés les contacts du condamné avec le monde extérieur (famille, avocat, services sociaux et médicaux, organisations non gouvernementales).

13. Le Comité a par ailleurs constaté dans les rapports de certains Etats parties des lacunes en ce qui concerne le régime applicable aux mineurs prévenus ou délinquants. L'alinéa b) du paragraphe 2 de l'article 10 dispose que les jeunes prévenus doivent être séparés des adultes, mais il ressort des renseignements présentés dans les rapports que certains Etats parties n'accordent pas toute l'attention nécessaire au fait qu'il s'agit là d'une disposition impérative du Pacte. En outre, le texte ajoute que les affaires mettant en cause des mineurs doivent être examinées aussi rapidement que possible. Les rapports devraient préciser les mesures prises par les Etats parties pour donner effet à cette disposition. Enfin, selon le paragraphe 3 de l'article 10, les jeunes délinquants doivent être séparés des adultes et soumis à un régime de détention approprié à leur âge et à leur statut légal, par exemple des horaires de travail réduits et la possibilité de recevoir la visite de membres de leur famille, afin de favoriser leur amendement et leur rééducation. Le Pacte n'indique pas quel doit être l'âge de la responsabilité pénale. Il appartient donc à chaque Etat partie de déterminer cet âge compte tenu du contexte social et culturel et des autres conditions, mais, selon le Comité, le paragraphe 5 de l'article 6 implique que toute personne âgée de moins de 18 ans devrait être traitée comme un mineur, du moins pour ce qui est des questions relatives à la justice pénale. Les Etats parties devraient fournir des renseignements sur le groupe d'âge auquel les personnes doivent appartenir pour être traitées comme des mineurs, et sont invitées à indiquer s'ils appliquent l'Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs, dites Règles de Beijing (1987).

 



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