Convention européenne en matière d'adoption des enfants, (STE No. 058), entré en vigueur April 26, 1968.

 

Préambule

Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires de la présente Convention,
Considérant que le but du Conseil de l'Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses membres afin, notamment, de favoriser leur progrès social;
Considérant que, bien que l'institution de l'adoption des enfants existe dans la législation de tous les Etats membres du Conseil de l'Europe, il y a dans ces pays des vues divergentes sur les principes qui devraient régir l'adoption, ainsi que des différences quant à la procédure d'adoption et aux effets juridiques de l'adoption;
Considérant que l'acceptation de principes communs et de pratiques communes en ce qui concerne l'adoption des enfants contribuerait à aplanir les difficultés causées par ces divergences et permettrait en même temps de promouvoir le bien des enfants qui sont adoptés,
Sont convenus de ce qui suit:

Partie I – Engagements et champ d'application

Article 1er

Chaque Partie contractante s'engage à assurer la conformité de sa législation aux dispositions de la partie II de la présente Convention et à notifier au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe les mesures prises à cette fin.

Article 2

Chaque Partie contractante s'engage à prendre en considération les dispositions énoncées dans la partie III de la présente Convention et si elle donne effet, ou si, après avoir donné effet, elle cesse de donner effet à l'une quelconque de ces dispositions, elle devra le notifier au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Article 3

La présente Convention concerne uniquement l'institution juridique de l'adoption d'un enfant qui, au moment où l'adoptant demande à l'adopter, n'a pas atteint l'âge de 18 ans, n'est pas ou n'a pas été marié, et n'est pas réputé majeur.

Partie II – Dispositions essentielles

Article 4

L'adoption n'est valable que si elle est prononcée par une autorité judiciaire ou administrative ci-après appelée l'autorité compétente.

Article 5

  • Sous réserve des paragraphes 2 à 4 du présent article, l'adoption n'est prononcée que si au moins les consentements suivants ont été accordés et n'ont pas été retirés:
    1. le consentement de la mère et, lorsque l'enfant est légitime, celui du père ou, s'il n'y a ni père ni mère qui puisse consentir, le consentement de toute personne ou de tout organisme qui serait habilité à exercer les droits parentaux à cet égard;
    2. le consentement du conjoint de l'adoptant.
  • Il n'est pas permis à l'autorité compétente:
    1. de se dispenser de recueillir le consentement de l'une des personnes visées au paragraphe 1 ci-dessus, ou
    2. de passer outre au refus de consentement de l'une des personnes ou de l'un des organismes visés audit paragraphe 1,

    sinon pour des motifs exceptionnels déterminés par la législation.

  • Si le père ou la mère est privé de ses droits parentaux envers l'enfant, ou en tout cas du droit de consentir à l'adoption, la législation peut prévoir que son consentement ne sera pas requis.
  • Le consentement d'une mère à l'adoption de son enfant ne sera accepté que s'il est donné après la naissance, à l'expiration du délai prescrit par la législation et qui ne doit pas être inférieur à 6 semaines ou, s'il n'est pas spécifié de délai, au moment où, de l'avis de l'autorité compétente, la mère aura pu se remettre suffisamment des suites de l'accouchement.
  • Dans le présent article, on entend par père et mère les personnes qui sont légalement les parents de l'enfant.
  • Article 6

  • La législation ne peut permettre l'adoption d'un enfant que par deux personnes unies en mariage, qu'elles adoptent simultanément ou successivement, ou par un seul adoptant.
  • La législation ne peut permettre une nouvelle adoption d'un enfant que dans l'un ou plusieurs des cas suivants:
    1. lorsqu'il s'agit d'un enfant adoptif du conjoint de l'adoptant;
    2. lorsque le précédent adoptant est décédé;
    3. lorsque la précédente adoption est annulée;
    4. lorsque la précédente adoption a pris fin.

    Article 7

  • Un enfant ne peut être adopté que si l'adoptant a atteint l'âge minimum prescrit à cette fin, cet âge n'étant ni inférieur à 21 ans ni supérieur à 35 ans.
  • Toutefois, la législation peut prévoir la possibilité de déroger à la condition d'âge minimum:
    1. si l'adoptant est le père ou la mère de l'enfant, ou
    2. en raison de circonstances exceptionnelles.

    Article 8

  • L'autorité compétente ne prononcera une adoption que si elle a acquis la conviction que l'adoption assurera le bien de l'enfant.
  • Dans chaque cas, l'autorité compétente attachera une particulière importance à ce que cette adoption procure à l'enfant un foyer stable et harmonieux.
  • En règle générale, l'autorité compétente ne considérera pas comme remplies les conditions précitées si la différence d'âge entre l'adoptant et l'enfant est inférieure à celle qui sépare ordinairement les parents de leurs enfants:
  • Article 9

  • L'autorité compétente ne prononcera une adoption qu'après une enquête appropriée concernant l'adoptant, l'enfant et sa famille.
  • L'enquête devra, dans la mesure appropriée à chaque cas, porter notamment sur les éléments suivants:
    1. la personnalité, la santé et la situation économique de l'adoptant, sa vie de famille et l'installation de son foyer, son aptitude à éduquer l'enfant;
    2. les motifs pour lesquels l'adoptant souhaite adopter l'enfant;
    3. les motifs pour lesquels, au cas où l'un seulement de deux époux demande à adopter un enfant, le conjoint ne s'associe pas à la demande;
    4. la convenance mutuelle entre l'enfant et l'adoptant, la durée de la période pendant laquelle il a été confié à ses soins;
    5. la personnalité et la santé de l'enfant; sauf prohibition légale, les antécédents de l'enfant;
    6. le sentiment de l'enfant au sujet de l'adoption proposée;
    7. la religion de l'adoptant et la religion de l'enfant, s'il y a lieu.
  • Cette enquête devra être confiée à une personne ou à un organisme reconnus par la loi ou agréés à cet effet par une autorité judiciaire ou administrative. Elle devra, dans la mesure du possible, être effectuée par des travailleurs sociaux qualifiés en ce domaine par leur formation ou par leur expérience.
  • Les dispositions du présent article n'affectent en rien le pouvoir et l'obligation qu'a l'autorité compétente de se procurer tous renseignements ou preuves concernant ou non l'objet de l'enquête, et qu'elle considère comme pouvant être utiles.
  • Article 10

  • L'adoption confère à l'adoptant à l'égard de l'enfant adopté les droits et obligations de toute nature qui sont ceux d'un père ou d'une mère à l'égard de son enfant légitime.
    L'adoption confère à l'adopté à l'égard de l'adoptant les droits et obligations de toute nature qui sont ceux d'un enfant légitime à l'égard de son père ou de sa mère.
  • Dès que naissent les droits et obligations visés au paragraphe 1 du présent article, les droits et obligations de même nature existant entre l'adopté et son père ou sa mère ou tout autre personne ou organisme cessent d'exister. Néanmoins, la législation peut prévoir que le conjoint de l'adoptant conserve ses droits et obligations envers l'adopté si celui-ci est son enfant légitime, illégitime ou adoptif.
    En outre, la législation peut maintenir pour les parents l'obligation alimentaire envers l'enfant, l'obligation de l'entretenir, de l'établir et de le doter pour le cas où l'adoptant ne remplit pas une de ces obligations.
  • En règle générale, l'adopté sera mis en mesure d'acquérir le patronyme de l'adoptant ou de l'ajouter à son propre patronyme.
  • Si un parent légitime a le droit de jouissance sur les biens de son enfant, le droit de jouissance de l'adoptant sur les biens de l'adopté peut, nonobstant le paragraphe 1 du présent article, être limité par la législation.
  • En matière successorale, dans la mesure où la législation donne à l'enfant légitime un droit dans la succession de son père ou de sa mère, l'enfant adopté est traité à cet égard de la même manière que s'il était l'enfant légitime de l'adoptant.
  • Article 11

  • Si l'enfant adopté n'a pas, dans le cas d'adoption par une seule personne, la nationalité de l'adoptant ou, dans le cas d'adoption par des époux, leur commune nationalité, la Partie contractante dont l'adoptant ou les adoptants sont ressortissants facilitera l'acquisition de sa nationalité par l'enfant.
  • La perte de nationalité qui pourrait résulter de l'adoption est subordonnée à la possession ou à l'acquisition d'une autre nationalité.
  • Article 12

  • Le nombre d'enfants que peut adopter un même adoptant ne sera pas limité par la législation.
  • Il ne pourra pas être interdit par la législation à une personne d'adopter un enfant pour le motif qu'elle a, ou pourrait avoir, un enfant légitime.
  • Si l'adoption améliore la situation juridique de l'enfant, il ne pourra pas être interdit par la législation à une personne d'adopter son enfant illégitime.
  • Article 13

  • Tant que l'adopté n'est pas majeur, l'adoption ne peut être révoquée que par décision d'une autorité judiciaire ou administrative pour motifs graves et uniquement si la révocation pour de tels motifs est admise par la législation.
  • Le paragraphe précédent ne concerne pas les cas où:
    1. l'adoption est nulle,
    2. l'adoption prend fin par suite de la légitimation de l'adopté par l'adoptant.

    Article 14

    Lorsque les enquêtes effectuées pour l'application des articles 8 et 9 de la présente Convention se rapporteront à une personne qui réside ou a résidé sur le territoire d'une autre Partie contractante, cette Partie contractante devra s'efforcer d'obtenir que les renseignements nécessaires qui lui sont demandés soient fournis sans délai. Les autorités peuvent communiquer directement entre elles à cet effet.

    Article 15

    Des dispositions seront prises pour prohiber tout gain injustifié provenant de la remise d'un enfant en vue de son adoption.

    Article 16

    Chacune des Parties contractantes conserve la faculté d'adopter des dispositions plus favorables à l'enfant adopté.

    Partie III – Dispositions supplémentaires

    Article 17

    L'adoption ne peut être prononcée que si l'enfant a été confié aux soins des adoptants pendant une période suffisamment longue pour que l'autorité compétente puisse raisonnablement apprécier les relations qui s'établiraient entre eux si l'adoption était prononcée.

    Article 18

    Les pouvoirs publics veilleront à la promotion et au bon fonctionnement d'institutions publiques ou privées auxquelles ceux qui désirent adopter ou faire adopter un enfant peuvent s'adresser en vue d'obtenir aide et conseil.

    Article 19

    Les aspects sociaux et juridiques de l'adoption figureront aux programmes de formation des travailleurs sociaux.

    Article 20

  • Des dispositions seront prises pour qu'une adoption puisse, le cas échéant, intervenir sans que l'identité de l'adoptant soit révélée à la famille de l'enfant.
  • Des dispositions seront prises pour prescrire ou pour permettre que la procédure d'adoption se déroule à huis clos.
  • L'adoptant et l'adopté pourront obtenir des documents extraits des registres publics dont le contenu atteste le fait, la date et le lieu de la naissance de l'adopté, mais ne révèle pas expressément l'adoption ni l'identité de ses parents d'origine.
  • Les registres publics seront tenus ou, à tout le moins, leurs énonciations reproduites de telle manière que les personnes qui n'y ont pas un intérêt légitime ne puissent apprendre le fait qu'une personne a été adoptée, ou, si ce fait est connu, l'identité de ses parents d'origine.
  • Partie IV – Clauses finales

    Article 21

  • La présente Convention est ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe. Elle sera ratifiée ou acceptée. Les instruments de ratification ou d'acceptation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
  • La Convention entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt du troisième instrument de ratification ou d'acceptation.
  • Elle entrera en vigueur à l'égard de tout Etat signataire qui la ratifiera ou l'acceptera ultérieurement, trois mois après la date du dépôt de son instrument de ratification ou d'acceptation.
  • Article 22

  • Après l'entrée en vigueur de la présente Convention, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe pourra inviter tout Etat non membre du Conseil à adhérer à la présente Convention.
  • L'adhésion s'effectuera par le dépôt, près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, d'un instrument d'adhésion qui prendra effet trois mois après la date de son dépôt.
  • Article 23

  • Toute Partie contractante peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, désigner le ou les territoires auxquels s'appliquera la présente Convention.
  • Toute Partie contractante peut, au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, ou à tout autre moment par la suite, étendre l'application de la présente Convention, par déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, à tout autre territoire désigné dans la déclaration et dont elle assure les relations internationales ou pour lequel elle est habilitée à stipuler.
  • Toute déclaration faite en vertu du paragraphe précédent pourra être retirée, en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, aux conditions prévues par l'article 27 de la présente Convention.
  • Article 24

  • Toute Partie contractante dont la législation prévoit plus d'une forme d'adoption aura la faculté de n'appliquer qu'à une de ces formes les dispositions des paragraphes 1, 2, 3 et 4 de l'article 10 de la présente Convention, et des paragraphes 2 et 3 de l'article 12.
  • La Partie contractante faisant usage de cette faculté le notifiera au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, ou lorsqu'elle fera une déclaration conformément au paragraphe 2 de l'article 23 de la présente Convention, et indiquera les modalités de l'exercice de cette faculté.
  • Cette Partie contractante peut mettre fin à l'exercice de cette faculté; elle en avisera le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
  • Article 25

  • Toute Partie contractante peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, ou encore lorsqu'elle fera une déclaration conformément au paragraphe 2 de l'article 23 de la présente Convention, formuler au maximum deux réserves au sujet des dispositions de la partie II de celle-ci.
    Des réserves de caractère général ne sont pas permises, chaque réserve ne peut porter que sur une disposition.
    Chaque réserve aura effet pendant cinq ans à partir de l'entrée en vigueur de la présente Convention à l'égard de la Partie considérée. Elle pourra être renouvelée pour des périodes successives de cinq ans, au moyen d'une déclaration adressée avant l'expiration de chaque période au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
  • Toute Partie contractante peut retirer, en tout ou en partie, une réserve formulée par elle en vertu du paragraphe précédent, au moyen d'une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe et qui prendra effet à la date de sa réception.
  • Article 26

    Chaque Partie contractante communiquera au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe les noms et adresses des autorités auxquelles peuvent être transmises les demandes prévues par l'article 14.

    Article 27

  • La présente Convention demeurera en vigueur sans limitation de durée.
  • Toute Partie contractante pourra, en ce qui la concerne, dénoncer la présente Convention en adressant une notification au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
  • La dénonciation prendra effet six mois après la date de la réception de la notification par le Secrétaire Général.
  • Article 28

    Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil et à tout Etat ayant adhéré à la présente Convention:

    1. toute signature;
    2. le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion;
    3. toute date d'entrée en vigueur de la présente Convention conformément à son article 21;
    4. toute notification reçue en application des dispositions de l'article 1er;
    5. toute notification reçue en application des dispositions de l'article 2;
    6. toute déclaration reçue en application des dispositions des paragraphes 2 et 3 de l'article 23;
    7. toute information reçue en application des dispositions des paragraphes 2 et 3 de l'article 24;
    8. toute réserve formulée en application des dispositions du paragraphe 1 de l'article 25;
    9. le renouvellement de toute réserve, effectué en application des dispositions du paragraphe 1 de l'article 25;
    10. le retrait de toute réserve, effectué en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 25;
    11. toute notification formulée en application des dispositions de l'article 26;
    12. toute notification reçue en application des dispositions de l'article 27 et la date à laquelle la dénonciation pendra effet.

    En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention.
    Fait à Strasbourg, le 24 avril 1967, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats signataires et adhérents.

     


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