University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Maurice, U.N. Doc. E/C.12/1995/18,paras.228-247 (1996).




COMITE DES DROITS ECONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits économiques
sociaux et culturels


MAURICE

228. Le Comité a examiné le rapport initial de Maurice (E/1990/5/Add.21) à ses 40e, 41e et 43e séances, tenues les 27 et 28 novembre 1995, et il a adopté, à sa 55e séance, tenue le 6 décembre 1995, les observations finales ci-après.


A. Introduction

229. Le Comité est satisfait du rapport initial détaillé de l'Etat partie, établi conformément à ses directives générales révisées, rapport qui a été présenté peu après l'adoption par le Comité, en mai 1994, de ses observations finales sur le fond. Le Comité rappelle que, jusque-là, Maurice ne s'était pas acquitté des obligations contractées en vertu des articles 16 et 17 du Pacte concernant la présentation des rapports depuis qu'il est devenu Partie au Pacte, le 3 janvier 1976. Devant l'absence continue de rapports, le Comité, à sa dixième session, a examiné la situation relative à l'application par Maurice des droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte.

230. Le Comité remercie l'Etat partie de la réponse qu'il a envoyée par écrit à la liste de questions, et des renseignements supplémentaires communiqués par sa délégation au cours du dialogue franc et constructif qu'elle a eu avec les membres du Comité.


B. Facteurs et difficultés entravant l'application du Pacte

231. Le Comité estime que malgré l'isolement géographique de l'île Rodrigues et les problèmes logistiques que pose en conséquence la fourniture, par le gouvernement, de services de base - ce qui est un obstacle considérable -, le Gouvernement mauricien reste tenu d'assurer à la population de l'île l'exercice de ses droits économiques, sociaux et culturels.


C. Aspects positifs

232. Le Comité se félicite de la réaction positive de l'Etat partie aux observations finales évoquées au paragraphe 229 ci-dessus, dont il a été tenu compte lors de la modification de la législation mauricienne. Il se réjouit en particulier des amendements apportés en août 1995 à l'article 16 de la Constitution mauricienne, qui interdit maintenant toute discrimination fondée sur le sexe en plus de « la couleur ou la croyance », et à la loi de 1968 sur la citoyenneté, qui a éliminé toute discrimination fondée sur le sexe en ce qui concerne les épouses étrangères de Mauriciens.

233. Le Comité note avec satisfaction l'abrogation de la loi de 1984 sur les journaux et les publications périodiques, qui restreignait le droit à la liberté d'expression en ce qui concerne les politiques du gouvernement, notamment dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels.

234. Le Comité se félicite des mesures prises par l'Etat partie pour améliorer sa législation dans le domaine de la santé mentale et des handicaps physiques.

235. Le Comité note avec satisfaction que la croissance économique de Maurice, qui se poursuit, s'accompagne de résultats notables en ce qui concerne la mise en valeur des ressources humaines, ce dont il a déjà été pris note dans les observations finales de mai 1994. Les statistiques des indicateurs socio-économiques montrent que le gouvernement a pris à coeur son engagement déclaré d'assurer une meilleure éducation, une meilleure santé, une meilleure nutrition et un environnement plus propre à la population, d'améliorer la qualité de la vie et de promouvoir l'égalité.

236. Le Comité note avec satisfaction que l'Etat partie est disposé, comme l'a indiqué sa délégation, à poursuivre son dialogue constructif et sa coopération avec le Comité en vue d'assurer la mise en oeuvre effective des dispositions du Pacte.


D. Principaux sujets de préoccupation

237. Le Comité réaffirme sa préoccupation devant le fait qu'en dépit de progrès encourageants dans le domaine de la législation, les femmes mauriciennes jouent toujours un rôle subalterne dans la société, qui les empêche de jouir pleinement de leurs droits économiques, sociaux et culturels, notamment en ce qui concerne l'égalité des salaires entre hommes et femmes. Dans le secteur agricole par exemple, le Comité ne peut se satisfaire de l'explication fournie par la délégation mauricienne qui parle de différence et non de discrimination.

238. Le Comité s'inquiète également de la situation incertaine des travailleurs étrangers et de l'incapacité du gouvernement à garantir leurs droits tels qu'ils sont énoncés dans le Pacte, en particulier aux articles 6, 7 et 9.

239. S'agissant de l'article 8 du Pacte, le Comité continue d'être préoccupé par les restrictions qu'apporte la loi de 1973 sur les relations professionnelles, toujours en vigueur, aux droits syndicaux et au droit de grève. Il constate avec inquiétude que le projet de loi sur les syndicats et les relations professionnelles, proposé en 1994, loin de tenir compte des recommandations de la Commission spéciale de réexamen des lois, semble être encore moins favorable à l'exercice de ces droits, et a de ce fait été rejeté par l'ensemble du mouvement syndical mauricien. La même observation s'applique au projet de loi relatif au Conseil national sur la rémunération et la productivité.

240. Le Comité se déclare gravement préoccupé par l'augmentation, dont il est fait mention, des cas de maltraitance d'enfants, de prostitution d'enfants, de violence contre les femmes au sein de la famille, de grossesse précoce, d'avortement, de suicide, d'alcoolisme et de toxicomanie. Le Comité regrette que le gouvernement n'ait apparemment par fourni d'informations et de statistiques sur ces questions, bien que la délégation ait assuré que de plus amples renseignements seraient envoyés très prochainement.

241. Le Comité regrette aussi que l'Etat partie n'ait pas diffusé d'informations sur les droits de l'homme en général, et sur le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en particulier. Il note en outre avec préoccupation l'absence d'un enseignement des droits de l'homme dans tous les programmes scolaires.


E. Suggestions et recommandations

242. Le Comité encourage le gouvernement à poursuivre les efforts qu'il déploie actuellement pour éliminer les pratiques discriminatoires contre les femmes et leur garantir pleinement leurs droits économiques, sociaux et culturels dans l'application pratique de la nouvelle législation.

243. Le Comité recommande au gouvernement de revoir la situation des travailleurs étrangers afin de leur assurer la même protection que celle dont bénéficient les nationaux mauriciens, en particulier en ce qui concerne les dispositions des articles 6, 7 et 9 du Pacte.

244. Le Comité recommande que les modifications qu'il pourrait être proposé d'apporter à la législation sur les relations professionnelles dans un proche avenir tiennent compte du rapport de la Commission spéciale de réexamen des lois, et garantissent effectivement l'exercice des droits syndicaux, en particulier du droit de grève, conformément aux obligations que Maurice a assumées à cet égard.

245. Le Comité recommande une étude et une analyse approfondies de la situation en ce qui concerne la maltraitance d'enfants, la prostitution d'enfants, la violence contre les femmes au sein de la famille, la grossesse précoce, l'avortement, le suicide, l'alcoolisme et la toxicomanie, ainsi qu'un examen des moyens par lesquels l'Etat pourrait le plus efficacement protéger et garantir les droits économiques, sociaux et culturels de la population mauricienne touchée par ces problèmes. A cet égard, l'Etat partie devrait notamment s'employer à réunir des statistiques et autres renseignements pertinents.

246. Le Comité recommande au Gouvernement mauricien d'organiser sans plus tarder une campagne intensive et systématique d'information sur les droits de l'homme en général, et sur le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en particulier.

247. Le Comité recommande que des mesures soient prises en vue d'inscrire l'éducation dans le domaine des droits de l'homme dans tous les programmes scolaires, conformément aux buts et objectifs de la Décennie des Nations Unies pour l'éducation dans le domaine des droits de l'homme.



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