University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Islande, U.N. Doc. E/C.12/1/Add.32 (1999).



COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS
Vingtième session
Genève, 26 avril - 14 mai 1999
Point 8 de l'ordre du jour


EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE


Observations finales du Comité des droits économiques,
sociaux et culturels


ISLANDE

1. À ses 3ème, 4ème et 5ème séances (vingtième session), tenues les 27 et 28 avril 1999, le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de l'Islande sur la mise en oeuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/1990/6/Add.15) et, à sa 20ème séance tenue le 7 mai 1999, il a adopté les observations finales suivantes.


A. INTRODUCTION

2. Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique de l'État partie ainsi que pour les réponses écrites à la liste des points à traiter présentées par une délégation composée de représentants de divers ministères. Le Comité se félicite en particulier du dialogue franc et constructif qu'il a eu avec la délégation et de la volonté manifestée par celle-ci de répondre à ses questions et de fournir des renseignements complémentaires lorsque c'était possible. Le rapport de l'État partie est, d'une manière générale, conforme aux directives du Comité.


B. ASPECTS POSITIFS

3. Le Comité se félicite de la création du Centre islandais des droits de l'homme, qui montre que l'État partie respecte les droits de l'homme et qu'il est résolu à les promouvoir.

4. Le Comité salue les efforts déployés par l'État partie pour promouvoir l'objectif de l'égalité entre les sexes et d'une plus large participation des femmes aux affaires publiques. Il salue la loi sur l'égalité des droits entre l'homme et la femme, qui a ouvert la voie à des programmes spéciaux visant à promouvoir l'égalité de statut comme le Programme d'action (1998-2001) dont la finalité est d'éliminer les obstacles traditionnels à l'égalité. Le Comité se félicite que l'État partie ait reconnu que l'égalité formelle ou juridique n'est pas suffisante si elle n'entraîne pas, dans la pratique, d'égalité réelle entre les sexes. Il note, en particulier, qu'un objectif important du Gouvernement islandais est de lutter contre les inégalités de salaire fondées sur le sexe.

5. Le Comité prend note de la loi sur les droits des malades et de la loi sur une base de données pour le secteur de la santé qui, d'après les renseignements reçus, s'inscrit dans le droit fil de la première. Il note également la création du Conseil spécial sur la nutrition au sein du Ministère de la santé publique et la création du conseil pour la prévention de l'alcool et de la drogue. Il relève en particulier le programme appelé "Une Islande sans drogue pour l'an 2002." Il prend aussi note de l'adoption de la loi sur l'obligation scolaire en 1995, qui a transféré le contrôle des établissements scolaires du Gouvernement central aux autorités locales en vue d'améliorer la qualité de l'éducation.

6. Le Comité prend note de l'intention de l'État partie d'apporter à la loi No 133/1994 sur le droit des étrangers à travailler en Islande un amendement qui, s'il est adopté, éliminera la discrimination qui existe actuellement entre les ressortissants de pays membres de l'Espace économique européen (EEE), ainsi que la discrimination entre les conjoints de ressortissants de pays membres de l'EEE et les conjoints ressortissants de pays non membres de l'EEE.

7. En ce qui concerne le droit à la sécurité sociale, le Comité note l'affirmation de l'État partie selon laquelle les ressortissants de pays membres de l'EEE jouissent du privilège spécial de pouvoir obtenir des permis de travail, des allocations de chômage et des prestations de sécurité sociale pour leurs conjoints ou leurs enfants ressortissants de pays non membres de l'EEE. En outre, les réfugiés admis en Islande n'ont pas seulement le droit d'obtenir des permis de travail mais, à la différence des ressortissants de pays non membres de l'EEE, ne sont pas soumis à une période d'attente de six mois avant d'obtenir le droit à des prestations de santé.

8. Concernant le problème de la violence domestique, le Comité salue les programmes créés par l'État partie pour améliorer la situation des femmes battues et prévenir les actes de violence. En outre, le Comité félicite l'État partie pour les campagnes antialcool, antidrogue et antitabac qu'il a menées.

9. Le Comité note avec satisfaction que les organisations non gouvernementales islandaises jouent un rôle important dans la promotion des droits de l'homme et qu'elles sont consultées sur une base régulière. En particulier, il relève le rôle d'une ONG appelée Association pour les personnes âgées qui oeuvre à ce que cette catégorie de la population continue à remplir une fonction utile dans la société islandaise.


C. FACTEURS ET DIFFICULTÉS ENTRAVANT L'APPLICATION DU PACTE

10. Le Comité note qu'il n'y a pas de facteurs ni de difficultés entravant l'application du Pacte.


D. PRINCIPAUX SUJETS DE PRÉOCCUPATION

11. Le Comité relève une certaine désinvolture en ce qui concerne le fait que le Pacte ne sera pas incorporé dans la législation nationale dans un proche avenir.

12. Le Comité regrette que le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels n'ait pas encore été incorporé dans la législation nationale bien que l'État partie ait affirmé que certains de ces droits ont été incorporés dans divers textes de loi. Il note avec regret que les droits consacrés par le Pacte n'ont pas été invoqués devant les tribunaux.

13. Le Comité note que l'État partie a adopté un grand nombre de lois dont la pleine mise en oeuvre se fait encore attendre, comme en témoigne le fossé qui continue d'exister en matière de rémunération pour un travail égal entre les hommes et les femmes. En outre, le Comité des réclamations concernant l'égalité des droits, dont le mandat se limite à formuler des recommandations et à saisir la justice, ne semble pas être la meilleure voie de recours possible pour les victimes de discrimination.

14. Le Comité est très préoccupé de constater que la violence juvénile à l'égard des enfants est en augmentation et se demande s'il n'existe pas un lien entre ce phénomène et l'augmentation de la consommation d'alcool et de drogue par les enfants d'âge scolaire et les jeunes.

15. Le Comité est préoccupé par le manque de solidarité familiale et le recours croissant au placement dans des foyers d'accueil. Il constate avec inquiétude que des enfants quittent leur famille naturelle pour être élevé dans des foyers d'accueil temporaires ou permanents, ce qui donne naissance à des problèmes de garde, d'itinérance et de délinquance. Les enfants abandonnés appartenant à cette catégorie sont également davantage exposés au danger de la dépendance vis-à-vis de l'alcool et de la drogue.

16. Le Comité note avec inquiétude que, selon les renseignements fournis par l'Université d'Islande, 10 % de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté et constate que la délégation n'a pas pu donner d'explication plausible à ce sujet. Il note que le problème de la pauvreté affecte en particulier les familles monoparentales, les couples avec enfants, les agriculteurs, les étudiants et les employés de maison. Le budget alloué par l'État partie aux dépenses sociales semble être insuffisant pour aider ces groupes vulnérables en dépit de la relative richesse du pays et de ses ressources.

17. Le Comité exprime son inquiétude quant au taux élevé d'abandon scolaire dans le deuxième cycle de l'enseignement secondaire, situation que la délégation n'a pas pu expliquer de façon satisfaisante. En outre, le Comité note que 60 % des titulaires d'un diplôme universitaire sont des femmes contre 40 % seulement d'hommes, ce qui s'explique par le fait que la plupart des hommes reçoivent une formation professionnelle dans l'enseignement secondaire et sont décidés à exercer un métier plutôt qu'à faire des études universitaires. Il est difficile de dire, à ce stade, si le transfert du contrôle des établissements scolaires du Gouvernement central aux municipalités aggravera les disparités entre les municipalités riches et les municipalités moins riches.


E. SUGGESTIONS ET RECOMMANDATIONS

18. Le Comité réitère sa recommandation antérieure, visant à ce que toutes les mesures qui pourront être prises pour incorporer les obligations conventionnelles en matière de droits civils et politiques dans le système juridique islandais s'accompagnent simultanément de mesures similaires en matière de droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité demande à l'État partie de présenter, dans son prochain rapport périodique, un état de la jurisprudence existant sur l'application du Pacte. Il souhaite aussi avoir des renseignements sur les mesures globales que le Gouvernement aura prises pour mettre en oeuvre les droits économiques, sociaux et culturels et mesurer les progrès réalisés dans ce domaine. Il appelle, à cet égard, l'attention de l'État partie sur l'Observation générale No 9 relative à l'application du Pacte au niveau national.

19. Le Comité suggère à l'État partie de revoir et de renforcer les mécanismes institutionnels qu'il a mis en place dans le cadre de son administration pour faire en sorte que les obligations qui lui incombent en vertu du Pacte soient prises en compte, dès le début, dans la formulation de sa politique nationale dans des domaines comme la protection sociale, le logement, la santé et l'éducation.

20. Le Comité encourage l'État partie à augmenter ses dépenses sociales ainsi qu'à renforcer les services de santé et de protection sociale dans tout le pays. Il lui recommande d'établir une série d'indicateurs sociaux types sur l'abus de drogue et d'alcool et sur son traitement éventuel. Il recommande en outre l'élaboration de programmes éducatifs et sociaux de nature à aider les victimes de l'alcool et de la drogue dans une perspective à long terme.

21. Le Comité recommande que l'État partie étudie de manière plus approfondie la situation de pauvreté dans laquelle se trouvent les familles monoparentales, les couples avec enfants, les étudiants, les agriculteurs et les retraités handicapés, en vue de les arracher aux difficultés financières auxquelles ils sont confrontés.

22. Le Comité recommande que l'État partie lui présente, dans son prochain rapport périodique, un plan gouvernemental global visant à remédier aux difficultés des secteurs vulnérables de la population pauvre ainsi qu'un rapport sur les progrès accomplis dans ce domaine.

23. Le Comité prie l'État partie d'assurer une large diffusion aux présentes observations finales et de l'informer, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu'il aura prises pour donner effet à ces recommandations.



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