University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, République démocratique du Congo, U.N. Doc. E/C.12/COD/CO/4 (2009).


 


E/C.12/COD/CO/4

Conseil économique et social
Distr. générale

16 décembre 2009

Français

Original: anglais

 

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Quarante-troisième session

Genève, 2-20 novembre 2009

Examen des rapports présentés par les États parties conformément aux articles 16 et 17 du Pacte

Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

République démocratique du Congo

1. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné les deuxième à quatrième rapports périodiques de la République démocratique du Congo sur l’application du Pacte, regroupés en un seul document (E/C.12/COD/5), à ses 31e, 32e et 33e séances, tenues les 3 et 4 novembre 2009 (voir E/C.12/2009/SR.31, 32 et 33) et a adopté, à ses 51e et
52 e séances, tenues le 17 novembre 2009, les observations finales ci-après.

A. Introduction

2. Le Comité prend note avec satisfaction de la soumission des deuxième à quatrième rapports périodiques de l’État partie, regroupés en un seul document, mais regrette le retard de vingt et un ans pris pour le faire. Il accueille également avec satisfaction les réponses écrites à la liste des points à traiter (E/C.12/COD/Q/5/Add.1).

3. Le Comité se félicite de l’occasion qui lui a été donnée d’engager le dialogue avec les représentants de l’État partie et des réponses fournies par la délégation aux questions posées par les membres du Comité. Toutefois, il regrette la composition restreinte de la délégation de l’État partie et le fait que, très souvent, les informations fournies n’étaient pas suffisamment détaillées pour permettre au Comité d’évaluer de manière complète l’exercice, dans l’État partie, des droits consacrés par le Pacte.

B. Aspects positifs

4. Le Comité se félicite de la ratification de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de la Convention relative aux droits de l’enfant et des deux Protocoles facultatifs se rapportant à cette dernière. Il accueille également avec satisfaction la ratification des Conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) no 87 (1948) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical; no 105 (1957) sur l’abolition du travail forcé; no 111 (1958) concernant la discrimination (emploi et profession); no 138 (1973) concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi; no 182 (1999) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination; et no 135 (1971) concernant la protection des représentants des travailleurs dans l’entreprise et les facilités à leur accorder.

5. Le Comité se félicite de la promulgation, le 18 février 2006, d’une nouvelle Constitution qui englobe un grand nombre de droits de l’homme, y compris plusieurs des droits économiques, sociaux et culturels. Il se félicite également de la promulgation par l’État partie d’importants textes législatifs, notamment:

• Le Code de la protection de l’enfance en janvier 2009;

• La loi sur la protection des droits des personnes vivant avec le VIH/sida en juillet 2008;

• La loi no 6/020 du 10 octobre 2006 et la loi no 08/013 du 5 août 2008 sur l’organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature;

• La loi no 015/2002 du 16 octobre 2002 sur le Code du travail;

• La loi no 007/2002 sur le Code minier.

C. Facteurs et difficultés entravant l’application du Pacte

6. Le Comité reconnaît que l’instabilité persistante et les conflits armés récurrents dans certaines des provinces de l’État partie entravent sérieusement la capacité de l’État partie de s’acquitter des obligations internationales qui lui incombent en vertu du Pacte. Il considère cependant que l’impunité des auteurs de violations des droits de l’homme et l’exploitation illégale des ressources naturelles du pays, y compris par des entreprises étrangères, constituent des obstacles majeurs à l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie. Il rappelle que c’est à l’État partie qu’il incombe au premier chef de garantir la sécurité sur son territoire et de protéger ses populations civiles en ce qui concerne l’état de droit, les droits de l’homme et le droit humanitaire international.

D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

7. Le Comité regrette que le rapport de l’État partie et les réponses écrites à la liste des points à traiter ne contiennent pas de données factuelles ou de statistiques suffisamment détaillées pour lui permettre d’évaluer l’exercice, dans l’État partie, des droits consacrés par le Pacte. Il considère que de telles données sont essentielles à la surveillance de l’application du Pacte.

Le Comité demande instamment à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations plus concrètes sur la mise en œuvre du Pacte, notamment des données désagrégées et des statistiques pertinentes concernant l’application de ses lois et de ses dispositions administratives dans les différents domaines couverts par le Pacte.

8. Le Comité s’inquiète de ce que, en dépit du fait que les instruments internationaux priment la législation nationale et que plusieurs des droits consacrés dans le Pacte ont été incorporés dans la Constitution de 2006, les lois nationales contraires au Pacte et à la nouvelle Constitution n’ont pas été abrogées et que les textes donnant effet aux dispositions du Pacte ne sont guère appliquées. Il constate également avec préoccupation que l’État partie n’a pas donné pleinement effet aux dispositions du Pacte dans l’ordre juridique national, en particulier en prévoyant des recours judiciaires ou autres pour les violations des droits économiques, sociaux et culturels.

Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que la législation nationale soit conforme au Pacte et d’abroger officiellement toute loi contraire aux dispositions de celui-ci. Se référant à son Observation générale no 9 (1998) sur l’application du Pacte au niveau national, le Comité exhorte également l’État partie à prendre des mesures immédiates, y compris d’ordre législatif, pour instituer et garantir des recours internes utiles concernant l’ensemble des droits économiques, sociaux et culturels et à inclure, dans son prochain rapport périodique, des informations précises sur les décisions judiciaires donnant effet aux droits consacrés dans le Pacte.

9. Le Comité regrette que la création d’une commission nationale des droits de l’homme n’ait pas été prévue par la nouvelle Constitution du 18 février 2006.

Le Comité appelle l’État partie à accélérer le processus de mise en place d’une commission nationale des droits de l’homme et à veiller à ce que cet organe soit conforme aux Principes de Paris et soit doté de moyens financiers et humains suffisants. Se référant à son Observation générale no 10 (1998) sur le rôle des institutions nationales de défense des droits de l’homme dans la protection des droits économiques, sociaux et culturels, il demande instamment à l’État partie de veiller à ce que le mandat de la commission nationale des droits de l’homme englobe l’intégralité des droits économiques, sociaux et culturels, et que cet organe soit habilité à recevoir des plaintes individuelles et à mener des enquêtes. L’État partie est invité à inclure, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées tant sur le mandat que sur les principales activités pertinentes de la commission nationale des droits de l’homme.

10. Le Comité est vivement préoccupé par l’état du système de justice, caractérisé par une grave pénurie de juges, un manque de moyens, des ingérences des autorités politiques et militaires ainsi qu’un niveau élevé de corruption. Il constate également avec préoccupation que malgré l’adoption récente d’un plan d’action pour la réforme de la justice, faute d’une augmentation sensible des crédits budgétaires alloués à la justice, secteur qui ne reçoit actuellement que 1 % du budget de l’État, cette réforme est vouée à l’échec. Le Comité est en outre préoccupé par le fait que le Conseil supérieur de la magistrature ne dispose pas des ressources nécessaires à l’efficacité de son fonctionnement et que les nominations et la révocation des magistrats continuent d’être décidées en violation de la loi et du statut de la magistrature.

Le Comité demande instamment à l’État partie de redoubler d’efforts pour mettre en place un système de justice indépendant, efficace, responsable et doté des ressources nécessaires. Il appelle l’État partie à faire preuve d’une plus grande détermination politique à lutter contre l’impunité en dégageant les ressources nécessaires à la mise en œuvre rapide et intégrale du Plan d’action pour la réforme de la justice, récemment adopté, et au bon fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature. L’État partie devrait également de toute urgence créer une école de la magistrature et promulguer un code de déontologie des magistrats. Le Comité appelle en outre l’État partie à respecter pleinement l’autorité du Conseil supérieur de la magistrature en ce qui concerne la nomination et la révocation des magistrats.

11. Le Comité constate avec préoccupation que la corruption reste endémique dans l’État partie, et que le seul organisme d’État chargé de combattre la corruption, à savoir l’Observatoire du Code de l’éthique professionnelle, manque de ressources, d’indépendance et de crédibilité. Il regrette aussi que l’accord tripartite de lutte contre la corruption, signé en février 2008 avec l’Afrique du Sud et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), n’ait pas été encore appliqué.

Le Comité exhorte l’État partie à adopter des mesures vigoureuses, efficaces et assorties d’un calendrier pour promouvoir la bonne gouvernance et combattre la corruption. À cet égard, il demande instamment à l’État partie:

a) De reconnaître qu’il est urgent d’éradiquer la corruption dans tous les services gouvernementaux et au sein des forces de police aux niveaux national, provincial et local;

b) De faire mieux prendre conscience au personnel politique, aux parlementaires, aux fonctionnaires nationaux et locaux et aux agents de la force publique des conséquences néfastes de la corruption;

c) De former les juges, les procureurs, les policiers et les autres agents de la force publique à la stricte application des lois anticorruption;

d) De revoir le régime des peines applicables aux infractions liées à la corruption;

e) De prendre les mesures voulues afin que les fonctionnaires et le personnel militaire, notamment en leur versant des salaires, n’aient pas recours à l’extorsion envers les civils;

f) De veiller à la transparence de la conduite des autorités publiques, en droit comme dans la pratique;

g) D’appliquer l’accord tripartite signé avec l’Afrique du Sud et l’ONUDC;

h) De fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur les initiatives anticorruption, ainsi que sur les progrès accomplis et les obstacles rencontrés dans la lutte contre la corruption.

12. Le Comité constate avec une vive préoccupation que les défenseurs des droits de l’homme, en particulier ceux qui dénoncent la corruption et l’exploitation illégale des ressources naturelles et qui aident les victimes de violence sexuelle, sont régulièrement exposés à la détention arbitraire, à des menaces et attaques des forces de sécurité gouvernementales, des forces de police et de groupes armés, à des restrictions illégales de leurs activités, au harcèlement judiciaire, à des campagnes de diffamation, et à d’autres formes de stigmatisation.

Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre les mesures nécessaires, conformément à la Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, pour mettre fin au harcèlement permanent des défenseurs des droits de l’homme et pour faire en sorte que les auteurs des menaces et des attaques soient dûment poursuivis et sanctionnés. Il recommande également à l’État partie d’engager un dialogue permanent avec les défenseurs des droits de l’homme afin de mettre en œuvre des stratégies de protection et de promotion des droits économiques, sociaux et culturels dans tout le pays.

13. Le Comité s’inquiète de ce que, malgré l’adoption d’un Code minier en 2002 et d’un plan minier en 2004, ainsi que le réexamen actuel de l’ensemble des contrats miniers, l’exploitation illégale et la mauvaise gestion des ressources naturelles de l’État partie se poursuive, avec la complicité d’entreprises étrangères. Il note également avec une vive préoccupation que dans le Katanga, province très riche en ressources naturelles soumise à un contrôle effectif du Gouvernement, l’important secteur minier continue d’être exploité au détriment des droits des populations de cette province, qui demeurent extrêmement pauvres et privées des services sociaux et des infrastructures de base. Il est en outre préoccupé par l’absence de transparence caractérisant la révision actuelle des contrats miniers et l’octroi de nouveaux contrats à des entreprises étrangères, notamment la concession exclusive accordée dans le domaine de l’extraction de l’uranium (art. 1.2).

Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que ses ressources naturelles ne soient pas soumises à l’exploitation illégale et à la mauvaise gestion; de revoir sans tarder les contrats miniers d’une manière transparente et participative; d’abroger tous les contrats qui sont au détriment du peuple congolais et de veiller à ce que les futurs contrats soient établis de manière transparente et publique. Le Comité encourage également l’État partie à mettre en œuvre l’initiative de transparence des industries extractives, dont il est un pays candidat depuis 2008, en particulier pour ce qui est de la publication régulière des recettes tirées du pétrole, du gaz et de l’activité minière sous la forme d’informations simples, complètes et à la portée du grand public. L’État partie devrait aussi adopter des mesures appropriées pour contrôler l’exportation des ressources minières et pour imposer des sanctions draconiennes à ceux qui font le commerce illicite des ressources naturelles. Le Comité demande en outre à l’État partie de faire en sorte que des recettes provenant du secteur minier soient allouées au développement de la province de Katanga et que ses habitants bénéficient de services sociaux et d’infrastructures de base de façon que leurs conditions de vie puissent s’améliorer.

14. Le Comité constate avec préoccupation que, malgré l’adoption du Code forestier et un moratoire sur les concessions, le commerce illégal de bois et l’exploitation abusive des forêts du pays continuent d’être préjudiciables à l’écologie et à la biodiversité et de porter atteinte aux droits des populations autochtones, en particulier les Pygmées, d’occuper leurs terres ancestrales et de gérer leurs forêts selon leurs pratiques traditionnelles. Il est également préoccupé par le fait que les représentants des communautés autochtones n’ont pas été invités à prendre part à la deuxième session de la commission interministérielle chargée de revoir les contrats d’exploitation forestière, alors même que cette session était consacrée à la signature de contrats entre les autorités locales et les compagnies d’exploitation forestière (art. 1.2).

Le Comité demande instamment à l’État partie de faire respecter le moratoire sur les concessions jusqu’à ce que soit achevée l’opération de cartographie et de zonage et de veiller à ce que les futures concessions forestières ne privent pas les peuples autochtones de la jouissance effective de leurs droits sur leurs terres ancestrales et leurs ressources naturelles, mais qu’elles contribuent à la réduction de la pauvreté. L’État partie devrait faire en sorte que les projets forestiers soient axés sur la promotion des droits des peuples tributaires de la forêt et soient exécutés uniquement après la réalisation, en coopération avec les peuples concernés, d’études exhaustives visant à évaluer l’impact social, spirituel, culturel et écologique des activités prévues sur ces populations. Le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier la Convention no 69 (1989) de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants.

15. Le Comité constate avec préoccupation que les conflits liés à la terre, qui étaient au cœur du conflit de l’Ituri et demeurent la source de conflits dans de nombreuses provinces, ne sont toujours pas résolus et pourraient, par conséquent, déboucher sur de nouvelles confrontations interethniques. Il est en particulier préoccupé par le fait que le processus de consultation visant à réviser le droit foncier, bien qu’annoncé dans le rapport de l’État partie, n’a pas encore officiellement commencé et qu’aucune autre initiative n’est prévue pour empêcher de futurs litiges fonciers. Il est en outre préoccupé par les nombreux cas de paysans chassés de leurs terres en raison d’opérations minières à Kijiba, Kaposhi, Ngaleshi, Kifunga et Chimanga (Katanga) (art. 1.2).

Le Comité appelle l’État partie à lancer de toute urgence un processus de consultation dans le but de réviser le droit foncier en vigueur et garantir le régime foncier. En attendant l’adoption et l’application d’une telle loi, l’État partie devrait prendre toutes les mesures voulues, en consultation avec les autorités locales et régionales, pour résoudre les conflits fonciers en cours et prévenir d’autres litiges. Dans le cadre de ses efforts, l’État partie devrait envisager de financer les activités de sensibilisation et de médiation de la Commission foncière créée en février 2008 dans la province d’Ituri et de mettre en place dans les autres provinces des commissions foncières communautaires. L’État partie devrait également mener des enquêtes sur l’expulsion des paysans du Katanga, dédommager les intéressés et leur fournir d’autres terres agricoles.

16. Le Comité constate avec une vive préoccupation qu’en dépit de l’aide au développement fournie par la communauté internationale, il n’existe aucun cadre institutionnel durable dans l’État partie pour recevoir et utiliser cette aide. Il est également préoccupé par la baisse continue, durant la décennie écoulée, des ressources allouées aux secteurs sociaux, notamment la santé et la protection sociale, alors que les crédits budgétaires alloués à la défense et à la sécurité publique ont fortement augmenté, pour atteindre 30 % des dépenses de l’État. Le Comité est encore plus préoccupé par le fait que seule une faible portion des maigres crédits budgétaires alloués aux secteurs sociaux est effectivement décaissée. Il considère que la mauvaise gestion de l’aide de la coopération internationale et le déséquilibre des crédits budgétaires constituent de graves violations des obligations qui incombent à l’État partie en vertu du paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte (art. 2.1).

Le Comité attire l’attention de l’État partie sur sa déclaration intitulée «Appréciation de l’obligation d’agir “au maximum de ses ressources disponibles” dans le contexte d’un Protocole facultatif au Pacte» (E/C.12/2007/1) et recommande que l’État partie, qui procède actuellement au vote de son budget annuel pour 2010, augmente de manière substantielle ses dépenses nationales consacrées aux services sociaux et à l’assistance sociale, notamment le logement, l’alimentation, la santé et l’éducation, de façon à assurer, conformément au paragraphe 1 de l’article 2, la réalisation progressive des droits économiques, sociaux et culturels consacrés dans le Pacte. Le Comité demande également instamment à l’État partie de suivre une approche fondée sur les droits de l’homme dans le cadre de l’élaboration de son budget et de l’utilisation de l’aide internationale au développement, en prévoyant des lignes budgétaires stratégiques claires en faveur des groupes et des provinces les plus désavantagés et marginalisés. Il encourage en outre l’État partie à promouvoir la transparence et la responsabilité afin d’améliorer l’efficacité de la mise en œuvre des programmes de développement financés par les donateurs internationaux.

17. Le Comité constate avec préoccupation que, alors même que les Pygmées continuent de souffrir de formes extrêmes de marginalisation sociale − en particulier concernant leur accès aux documents d’identité, à l’éducation, à la santé et à l’emploi − et en dépit des appels répétés lancés par les organismes des droits de l’homme en faveur de la résolution de cette situation, l’État partie n’a pas encore pris les mesures voulues pour mettre fin à ces violations des droits de l’homme. Le Comité constate également avec une vive préoccupation que, dans les zones de guerre, les Pygmées ont été et continuent d’être soumis à des viols collectifs, à l’extermination et à la persécution, le tout dans une impunité totale (art. 2.2).

Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que la discrimination raciale soit expressément érigée en infraction et que les actes de discrimination raciale et les crimes commis à l’encontre des Pygmées soient portés devant la justice. Il demande également instamment à l’État partie de former les agents de l’État et d’organiser des campagnes de sensibilisation à la discrimination à l’encontre des Pygmées.

18. Tout en notant les nouvelles dispositions du Code du travail concernant les personnes handicapées, le Comité regrette que le rapport de l’État partie ne contienne pas d’informations suffisantes sur la situation concrète des personnes handicapées ni sur le régime juridique qui leur est applicable, notamment les mesures contre la maltraitance et la négligence. Il note avec préoccupation qu’en l’absence de services sociaux appropriés la plupart des adultes handicapés ont recours à la mendicité et que leurs enfants n’ont pas accès à l’éducation et à la santé (art. 2.2).

Le Comité attire l’attention sur son Observation générale n° 5 (1994) sur les personnes souffrant d’un handicap et demande instamment à l’État partie d’adopter une législation complète contre la discrimination en relation avec le handicap; cette législation doit prévoir en faveur des personnes handicapées des recours judiciaires dans toute la mesure possible et autant que de besoin, et des programmes sociaux qui leur permettent de mener une vie intégrée, autonome et indépendante. Le Comité demande également instamment à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant. L’État partie est invité à fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations détaillées sur les personnes handicapées, y compris les femmes et les enfants, en ce qui concerne la jouissance de leurs droits économiques, sociaux et culturels.

19. Le Comité est préoccupé de ce que l’État partie n’a pas connaissance de la discrimination généralisée dont souffrent les personnes atteintes d’albinisme. Il exprime aussi les vives préoccupations que lui inspire le fait que des personnes atteintes d’albinisme ont été tuées et que leurs organes ont été utilisés ou ont fait l’objet d’un trafic pour être utilisés dans des cérémonies de sorcellerie (art. 2.2).

Le Comité invite instamment l’État partie à faire d’urgence le nécessaire pour que soient menées dans les meilleurs délais des enquêtes efficaces et que soient poursuivies les personnes responsables du meurtre et de la mutilation d’albinos. Il l’exhorte par ailleurs à s’efforcer de lutter contre la discrimination dont des personnes atteintes d’albinisme sont effectivement l’objet dans l’État partie et, à cet effet, d’établir des liens d’étroite coopération avec les associations qui s’emploient à promouvoir et à protéger les droits des personnes atteintes d’albinisme, de soutenir financièrement les activités de ces associations, et de mener des campagnes d’information pour combattre les croyances superstitieuses qui sont préjudiciables à leur bien-être.

20. Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit des dispositions constitutionnelles garantissant le principe d’égalité entre femmes et hommes, des dispositions discriminatoires à l’égard des femmes, telles que celles qui sont contenues dans les articles 444, 448, 449 et 450 du Code de la famille, demeurent en vigueur en dépit des demandes répétées émanant d’organes de défense des droits de l’homme pour qu’elles soient abrogées. Le Comité est également préoccupé de ce que, en dépit du niveau élevé de violence dont les femmes sont victimes dans l’État partie, le problème n’a pas été abordé à titre prioritaire, ainsi qu’en témoignent la lenteur du processus d’élaboration de la loi sur l’égalité des sexes et de révision du Code de la famille; le nombre limité de femmes dans la vie publique ainsi que dans les instances de prise de décisions; et la persistance des inégalités de rémunération entre hommes et femmes. Le Comité est également préoccupé par la persistance de pratiques traditionnelles préjudiciables, telles que la pratique de la dot, le lévirat, la polygamie, les mariages forcés et précoces et les mutilations génitales féminines (art. 3).

À la lumière de son Observation générale no 16 (2005) sur le droit égal des hommes et des femmes à la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels (art. 3), le Comité rappelle à l’État partie qu’il s’agit d’une obligation immédiatement applicable pour les États parties. Il considère que l’abrogation de toutes les lois discriminatoires à l’égard des femmes exige une ferme volonté politique et invite par conséquent l’État partie à procéder sans plus attendre à leur abrogation. L’État partie devrait également accélérer le processus d’adoption de la loi sur l’égalité des sexes, adopter des lois interdisant les pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes et aux filles et relever à 18 ans l’âge minimum du mariage pour les filles. Le Comité recommande en outre à l’État partie de prendre sans retard des mesures de nature à modifier ou à éliminer les pratiques et stéréotypes culturels discriminatoires à l’égard des femmes, de faire de la promotion de l’égalité entre les sexes une composante explicite de toutes ses stratégies nationales de reconstruction et de développement et de prendre des mesures concrètes pour accroître le nombre de femmes aux postes de prise de décisions et pour faire appliquer le principe d’une égale rémunération pour un travail de valeur égale.

21. Le Comité constate avec préoccupation qu’en dépit des demandes répétées de la Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations, l’État partie n’a pas encore abrogé la législation qui autorise le recrutement de main-d’œuvre parmi les détenus à des fins de travail forcé (ordonnance no 15/APAJ du 20 janvier 1938), dans le cadre des programmes nationaux de production alimentaire (loi no 76-011 du 21 mai 1976 sur les efforts de développement national et son ordonnance d’application no 00748/BCE/AGRI/76 du 11 juin 1976) et en tant que moyen de prélever des impôts (art. 18 à 21 de l’ordonnance législative no 71/087 du 14 septembre 1971 sur les contributions personnelles minimum). Le Comité est également préoccupé de constater que le service civique obligatoire, dit Salongo, est toujours largement pratiqué (art. 6).

Le Comité invite l’État partie à se reporter à son Observation générale no 18 (2005) sur le droit au travail et l’exhorte à abroger la législation qui n’est pas conforme aux dispositions de l’article 6 du Pacte et à mettre fin immédiatement au programme de service civique obligatoire.

22. Le Comité exprime les préoccupations que lui inspirent les mesures insuffisantes prises par l’État partie face à la situation de milliers de mineurs employés dans des activités minières artisanales qui travaillent dans des conditions pénibles, sans contrat de travail et sans protection, ni vêtement, matériel ou formation adéquats que leur fourniraient les sociétés commerciales. Il est également préoccupé de ce que, tandis que ni le Gouvernement ni les sociétés commerciales qui profitent directement du travail des mineurs artisanaux n’assument la responsabilité de leur vie et de leur bien-être, des sommes importantes sont extorquées à ces travailleurs par les autorités, les douanes et les forces de police ainsi que par les associations qui sont censées protéger leurs intérêts. Il note en outre avec préoccupation que l’inspection du travail manque de ressources et qu’elle est soumise à des influences extérieures, ce qui l’empêche d’exercer un contrôle efficace sur les conditions de travail des mineurs (art. 7).

Le Comité invite instamment l’État partie à poursuivre le réexamen des contrats miniers et à adopter, en concertation avec les sociétés commerciales, une stratégie claire visant à éviter de nouveaux accidents dans les mines. L’État partie devrait en outre veiller à ce que les sociétés commerciales fournissent aux mineurs des contrats de travail et remplissent leurs obligations en matière de sécurité et de santé sur les lieux de travail, telles que définies dans le Code du travail. Le Comité exhorte l’État partie à renforcer l’inspection du travail, à lever l’interdiction sur les inspections, en vigueur depuis 1994, et à veiller à ce que des enquêtes indépendantes soient menées sur tous les cas signalés de décès et de blessures dans les mines ainsi que sur les cas d’extorsion de fonds à l’encontre des mineurs et que les responsables soient dûment sanctionnés. Il recommande également à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention no 155 de l’OIT sur la sécurité et la santé des travailleurs et le protocole s’y rapportant, ainsi que la Convention no 176 de l’OIT sur la sécurité et la santé dans les mines.

23. Le Comité exprime des préoccupations au sujet du grand nombre de cas de harcèlement, d’arrestation et de mise en détention de syndicalistes, de l’obstruction opposée aux activités syndicales dans certaines entreprises et de la création de syndicats fictifs dans le secteur privé, en particulier dans le secteur des ressources naturelles, pour décourager la création de véritables syndicats.

Le Comité invite instamment l’État partie à faire en sorte que les mesures antisyndicales fassent l’objet d’enquêtes appropriées et que les responsables de ces mesures soient traduits en justice et punis conformément à la loi. Il lui demande également de prendre des mesures appropriées pour garantir la liberté de former des syndicats et d’y adhérer, empêcher les ingérences dans la gestion et le fonctionnement des syndicats et supprimer les restrictions au droit de créer des syndicats dans la fonction publique et dans les services administratifs décentralisés. Le Comité affirme que les droits des travailleurs, tels que garantis par l’article 8 du Pacte, ne peuvent s’exercer que dans un climat dénué de violence, de pression ou de menaces quelles qu’elles soient (art. 8).

24. Le Comité note avec préoccupation que, bien que l’État partie reconnaisse les dysfonctionnements et le caractère extrêmement limité de la couverture du système de sécurité sociale, les mesures prises pour remédier à la situation ont été insuffisantes, ainsi qu’en témoignent la très grande lenteur du processus d’adoption du Code de la sécurité sociale et le manque de mesures concrètes pour garantir protection et assistance aux groupes les plus vulnérables et marginalisés (art. 9).

Le Comité, tout en reconnaissant les difficultés de l’État partie, considère que les contraintes budgétaires ne devraient pas être invoquées comme seule justification de l’insuffisance des progrès sur la voie de l’établissement d’un système de sécurité sociale. Il invite instamment l’État partie à accélérer le processus d’adoption d’un code de sécurité sociale et la mise en place d’un système de sécurité sociale durable. Il invite en outre l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour que bénéficient d’une assistance sociale ceux qui sont actuellement sans protection, en vue de permettre aux personnes et aux familles dans le besoin, y compris les travailleurs du secteur informel et d’autres individus et familles défavorisés et marginalisés, de vivre dans la dignité.

25. Le Comité est gravement préoccupé par l’ampleur des violences et atrocités sexuelles, notamment des viols collectifs et publics, à motivation ethnique, commis par tous les groupes armés, notamment par l’Armée congolaise (FARDC) et par la Police nationale congolaise (PNC), en violation du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire. Il regrette que les deux lois sur la violence sexuelle, qui ont été adoptées en 2006, n’aient pas été appliquées efficacement jusqu’à présent et que les auteurs d’actes de cette nature continuent de jouir de l’impunité. Il est vivement préoccupé de constater que des hommes accusés de viol sont souvent libérés sous caution ou relâchés à l’issue d’un règlement à l’amiable ou de pratiques de corruption tandis que les personnes qui survivent aux violences sexuelles subies sont rejetées par leur famille, sans recevoir de l’État partie des soins de santé, une aide à la réinsertion socioéconomique ou une indemnisation. Le Comité note en outre avec préoccupation que l’impunité prévaut également en ce qui concerne les sévices sexuels de plus en plus fréquemment commis en dehors des zones de conflit, ainsi que dans les cas de violence familiale qui sont très répandus dans l’État partie (art. 10.1).

Le Comité invite instamment l’État partie à mettre en œuvre d’urgence la stratégie de grande ampleur sur la violence sexuelle adoptée par le Gouvernement en avril 2009 et à allouer les ressources humaines et financières nécessaires à la réalisation des quatre objectifs principaux de cette stratégie, à savoir la lutte contre l’impunité, la protection et la prévention, la réforme du secteur de sécurité et la mise en œuvre d’une intervention multisectorielle en faveur des survivants. Le Comité exhorte l’État partie à faire en sorte sans plus tarder que des allocations budgétaires systématiques et durables soient prévues pour permettre de fournir sans délai une indemnisation, un appui psychologique et des soins de santé aux victimes de violence sexuelle. Il exhorte également l’État partie à aborder la question de la violence sexuelle dans le contexte plus large de la violence à caractère sexiste et à prendre toutes les mesures appropriées pour lutter contre la violence familiale et soutenir le processus d’émancipation des femmes.

26. Le Comité est préoccupé de ce que la traite et la vente d’enfants à des fins d’exploitation sexuelle ou commerciale sont un phénomène répandu qui s’intensifie. Il s’inquiète aussi de ce que des hommes, des femmes et des enfants continuent d’être régulièrement enlevés par des groupes armés, y compris les FARDC, et détenus dans l’État partie ou transportés de force dans des pays voisins aux fins de travail forcé ou d’esclavage sexuel. Il est également préoccupé par le fait que les lois existantes n’interdisent pas toutes les formes de traite et que l’État partie n’a toujours pas adopté de mesures pour combattre la traite (art. 10.3).

Le Comité invite instamment l’État partie à criminaliser toutes les formes de traite d’êtres humains, à condamner les responsables, à adopter des mesures efficaces contre la traite et l’exploitation sexuelle et commerciale des femmes et des enfants et à assurer aux victimes des mesures de réadaptation physique et psychologique et de réinsertion sociale, en leur fournissant notamment un abri, une prise en charge psychosociale et des soins médicaux.

27. Le Comité se dit vivement préoccupé par le fait que toutes les parties au conflit, y compris les FARDC, recrutent toujours des enfants dans leurs rangs et que des milliers d’enfants sont actuellement impliqués dans des conflits armés et victimes d’atrocités commises par des groupes militaires. Il note en outre avec préoccupation l’insuffisance des efforts faits pour poursuivre en justice les personnes qui ont été identifiées comme se livrant au recrutement et à l’emploi d’enfants soldats, et pour prévoir à l’intention des enfants, et en particulier des filles, des programmes de protection et de réinsertion dans la communauté (art. 10.3).

Le Comité invite instamment l’État partie à libérer immédiatement tous les enfants qui servent dans les FARDC et sont détenus dans des installations militaires et à traduire en justice tous les membres des FARDC qui ont recruté, utilisé et détenu des enfants soldats. Il demande également à l’État partie de s’acquitter de ses obligations en ce qui concerne la fourniture d’une assistance appropriée aux garçons et aux filles démobilisés pour assurer leur réadaptation physique et psychologique et leur réinsertion sociale.

28. Le Comité se dit vivement préoccupé par les niveaux élevés de violence, y compris la violence sexuelle dont sont victimes les enfants dans l’État partie, en particulier les filles, les enfants des rues, les enfants accusés de sorcellerie, les albinos, les orphelins, les enfants handicapés, les enfants autochtones et les enfants placés en détention. Il se dit également vivement préoccupé par le fait que des enfants sont victimes d’exploitation sexuelle et économique dans l’ensemble du pays à grande échelle (art. 10.3).

Le Comité invite instamment l’État partie à ne plus tolérer la violence à l’égard des enfants et à appliquer pleinement le Code de la protection de l’enfance adopté en janvier 2009. Il recommande que soient adoptées des mesures concrètes pour identifier et protéger les enfants les plus vulnérables et marginalisés. Il recommande en outre à l’État partie de continuer de solliciter l’aide du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et de l’OIT à cet égard.

29. Le Comité constate avec préoccupation que, bien que l’État partie ait adopté une stratégie de réduction de la pauvreté, 75 % de la population continue de vivre dans une pauvreté extrême. Il s’inquiète également de la baisse continue du niveau de vie et de l’espérance de vie. Il constate avec préoccupation que 83 % de la population n’a pas accès à l’eau potable tandis que 70 % n’a pas accès aux installations d’assainissement et 1 % seulement a accès à l’électricité, du fait principalement d’une mauvaise gestion des installations hydroélectriques d’Inga (art. 11).

Le Comité recommande à l’État partie de consacrer des fonds suffisants à la mise en œuvre de sa stratégie de réduction de la pauvreté et de garantir la pleine intégration des droits économiques, sociaux et culturels dans la stratégie, ainsi qu’il l’a recommandé dans sa déclaration sur la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/2001/10). Il invite en outre instamment l’État partie à redistribuer de l’aide internationale au développement et d’autres ressources affectées à des secteurs non prioritaires à des secteurs prioritaires et à faire en sorte que l’aide internationale au développement soit utilisée à la réalisation progressive des droits des Congolais à un niveau de vie suffisant.

30. Le Comité se dit préoccupé par le niveau élevé de malnutrition aiguë et chronique ainsi que par la vulnérabilité de la population à la pénurie alimentaire en dépit du formidable potentiel agricole de l’État partie. Il note avec préoccupation que sur les 6,7 millions d’hectares de terres arables que compte le pays, quelque 1,1 million d’hectares seulement sont actuellement cultivés en permanence (art. 11), que les ressources halieutiques et les capacités d’élevage demeurent sous-exploitées et que, bien que reconnu comme une priorité essentielle par l’État partie, le secteur agricole n’a reçu que 3,5 % du budget de l’État en 2008.

Le Comité invite instamment l’État partie à redoubler d’efforts pour relancer l’économie rurale du pays et garantir la sécurité alimentaire et nutritionnelle, notamment en adoptant un code de l’agriculture et un programme sur la sécurité alimentaire. L’État partie devrait accorder une priorité véritable au secteur agricole en allouant les ressources nécessaires pour remettre en état les infrastructures dans les domaines des transports et de l’agriculture, renforcer les capacités des communautés par des formations, améliorer l’accès aux intrants agricoles et au microcrédit pour dynamiser les activités agricoles, la pêche, l’élevage et l’artisanat et améliorer les techniques agricoles.

31. Le Comité est préoccupé par le fait qu’en dépit de la médiocrité et de l’insalubrité des conditions de logement dans l’ensemble de l’État partie et de l’explosion démographique des villes, aucun budget n’a été prévu au cours des trente dernières années pour améliorer les conditions de logement de la population et que l’État partie n’a toujours pas adopté de politique globale en matière de logement. Il est préoccupé en outre par la situation précaire dans laquelle se trouvent plus de 300 familles qui ont été expulsées de force de leur logement dans la localité de Kasa Vubu à Kinshasa en mars 2009 sur ordonnance du Ministère de l’agriculture sans bénéficier d’une indemnisation suffisante ni se voir proposer un relogement (art. 11.1).

Le Comité invite instamment l’État partie à adopter, à titre prioritaire, une politique nationale du logement visant à améliorer les établissements urbains pauvres et à garantir la sécurité d’occupation, des responsabilités institutionnelles claires étant attribuées aux niveaux national, provincial et local ainsi que des ressources financières suffisantes pour permettre son application effective. Il exhorte en outre l’État partie à faire en sorte que les personnes expulsées de force de leur propriété reçoivent une indemnisation suffisante et se voient proposer un relogement dans des conditions conformes aux directives adoptées par le Comité dans son Observation générale no 7 (1997) sur le droit à un logement suffisant (art. 11.1): expulsions forcées. Il prie également instamment l’État partie de veiller à ce que les nouveaux logements soient dotés des services de base, y compris l’eau potable, l’électricité, des équipements sanitaires et des installations d’assainissement et également de structures adéquates, y compris des écoles, des centres de soins de santé et des moyens de transport au moment de la réinstallation. À cet égard, le Comité appelle également l’attention de l’État partie sur les directives sur les expulsions forcées et les déplacements liés au développement élaborées par le Rapporteur spécial de l’ONU sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant (A/HRC/4/18).

32. Le Comité exprime les vives préoccupations que lui inspire le nombre alarmant et croissant de détenus, la plupart en attente d’être jugés, qui continuent de décéder dans les prisons surpeuplées de l’État partie en raison du manque de nourriture et de soins de santé, des conditions sanitaires inhumaines qui y règnent et des tortures qu’ils subissent. Il est vivement préoccupé par le fait que, bien que régulièrement et unanimement dénoncée, cette situation intolérable n’a pas jusqu’à présent reçu l’attention requise de la part de l’État partie, qui actuellement ne fournit de fonds qu’à une seule prison. Le Comité est en outre très préoccupé de constater qu’en dépit de la décision, prise par le Président en 2006, de fermer les prisons illégales, les services de sécurité utilisent toujours de nombreux lieux de détention illégaux auxquels les familles ainsi que les organisations internationales et les organisations non gouvernementales se voient refuser l’accès (art. 11.1).

Le Comité invite instamment l’État partie à recenser d’urgence la population pénitentiaire et à allouer les fonds nécessaires pour distribuer de la nourriture aux détenus. Il lui demande également de doter chaque prison d’un budget raisonnable et de réduire le surpeuplement des prisons, notamment en recourant à des méthodes substitutives à la détention provisoire et en relâchant toutes les personnes encore détenues en violation des normes internationales. L’État partie devrait également fermer immédiatement tous les lieux de détention illégaux et garantir l’accès des organisations internationales et des organisations non gouvernementales à tous les lieux de détention.

33. Le Comité se dit préoccupé par la situation précaire dans laquelle se trouvent les 1,7 million de personnes déplacées à l’intérieur de l’État partie, qui dépendent exclusivement de l’assistance fournie par des organisations humanitaires internationales. Il constate avec préoccupation que, du fait de l’insécurité qui continue de régner dans les provinces orientales de l’État partie, les personnes déplacées à l’intérieur du pays n’ont pas d’autre choix que de se cacher dans la forêt, où elles sont privées de toute assistance. Il constate également avec une vive préoccupation que les personnes déplacées à l’intérieur du pays sont régulièrement victimes de violations flagrantes des droits de l’homme commises par toutes les factions combattantes, y compris les FARDC.

Le Comité demande instamment à l’État partie, par l’intermédiaire de son Ministère de la solidarité et des affaires humanitaires, de s’acquitter des obligations qui lui incombent de protéger les personnes déplacées à l’intérieur du pays et de répondre à leurs besoins.

34. Le Comité constate avec une vive préoccupation que 4 millions de personnes ont perdu la vie depuis le début du conflit et que la plupart des décès étaient consécutifs à des maladies que l’on pouvait prévenir ou traiter. Il est vivement préoccupé de ce que la plupart des postes de santé ne fonctionnent plus, ce qui fait que 37 % de la population reste totalement privée de toute forme de soins de santé. Le Comité est également préoccupé par le fait que, là où des infrastructures existent, les frais à acquitter rendent les soins de santé difficilement accessibles, d’où des taux inquiétants de mortalité infantile, de mortalité des enfants de moins de 5 ans et de mortalité maternelle ainsi qu’une faible couverture vaccinale (art. 12).

Le Comité demande instamment à l’État partie d’honorer son engagement d’allouer 15 % de son budget à la mise en place d’un système de santé durable, comme annoncé dans son rapport au Comité. Il demande également instamment à l’État partie de fournir, dans son rapport périodique, des informations détaillées sur les résultats concrets obtenus grâce aux programmes que l’État partie a commencé à mettre en œuvre.

35. Le Comité constate avec préoccupation que malgré l’augmentation notable des crédits budgétaires alloués à l’éducation, l’accès aux écoles primaires reste payant et, par conséquent, hors de la portée de nombreux Congolais. Il note également avec préoccupation que la scolarisation des enfants, en particulier des filles, demeure à un niveau extrêmement faible, et que le faible niveau de l’enregistrement des naissances dans l’État partie continue d’être un des principaux obstacles à l’exercice du droit à l’éducation. Il est en outre préoccupé par le fait que seule une faible portion des ressources budgétaires allouées à l’éducation est réellement dépensée, en particulier dans des domaines prioritaires comme l’infrastructure scolaire et la rémunération correcte du corps enseignant.

À la lumière de son Observation générale no 11 (1999) sur les plans d’action pour l’enseignement primaire (art. 14), le Comité rappelle à l’État partie que l’article 14 du Pacte exige de tout État partie qui n’a pas encore pu assurer le caractère obligatoire et la gratuité de l’enseignement primaire qu’il s’engage à établir et à adopter, dans un délai de deux ans, un plan détaillé des mesures nécessaires pour réaliser progressivement, dans un nombre raisonnable d’années fixé par ce plan, la pleine application du principe de l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous. Le Comité exhorte également l’État partie à prendre toutes les mesures voulues pour faire en sorte que les naissances soient enregistrées sur tout son territoire et que les fonds alloués à l’éducation soient effectivement dépensés dans des domaines prioritaires comme les infrastructures éducatives et le corps enseignant. Le Comité demande à l’État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des informations précises sur les mesures qu’il aura prises pour assurer un enseignement primaire gratuit et obligatoire pour tous les enfants.

36. Le Comité est profondément inquiet de constater que l’exploitation systématique et abusive des ressources forestières dans l’État partie a eu des conséquences néfastes pour les terres et le mode de vie de nombreux peuples autochtones, en particulier les Pygmées vivant dans la province de l’Équateur, entravant l’exercice de leurs droits ainsi que leur lien matériel et spirituel avec la nature, et en fin de compte, avec leur identité culturelle propre.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter une législation et des mesures visant à reconnaître le statut des Pygmées et des autres peuples autochtones vivant dans l’État partie, afin de protéger les terres ancestrales ainsi que l’identité culturelle propre de ces peuples.

37. Le Comité invite l’État partie à mettre à jour son document de base conformément aux prescriptions applicables au document de base commun dans les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports, récemment approuvées par les organes de surveillance des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

38. Le Comité encourage l’État partie à envisager de signer et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

39. Le Comité invite l’État partie à adresser une invitation au Rapporteur spécial sur le logement convenable, au Rapporteur spécial sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible et à l’expert indépendant chargé d’examiner la question des obligations en rapport avec les droits de l’homme et l’assainissement, afin de tirer profit de leurs connaissances spécialisées dans l’élaboration de politiques se rapportant aux questions qui intéressent le Comité.

40. Le Comité demande à l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales à tous les niveaux de la société, en particulier auprès de la fonction publique, des forces armées, de l’appareil judiciaire et des organisations de la société civile, et de l’informer, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises pour les mettre en œuvre.

41. Le Comité recommande à l’État partie de solliciter l’aide du Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo aux fins de la mise en œuvre des présentes observations finales, ainsi que de l’élaboration de son prochain rapport périodique. Il encourage également l’État partie à continuer d’associer les organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au processus de discussion à l’échelon national avant la soumission de son prochain rapport périodique.

42. Le Comité demande à l’État partie de soumettre, avant le 30 juin 2013, son cinquième rapport périodique, établi conformément aux directives révisées concernant les rapports à soumettre au Comité, adoptées en 2008 (E/C.12/2008/2).

 



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