University of Minnesota



Conclusions du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Belgique, U.N. Doc. E/C.12/1994/7 (1994).



 


COMITE DES DROITS ECONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS


EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE


Conclusions du Comité des droits économiques, sociaux et culturels


BELGIQUE

1. Le Comité a examiné le rapport initial de la Belgique sur les articles premier à 15 du Pacte (E/1990/5/Add.5) à ses 15ème, 16ème et 17ème séances, tenues les 11 et 13 mai 1994, et a adopté à sa 27ème séance (dixième session), tenue le 20 mai 1994 les conclusions ci-après :

A. Introduction

2. Le Comité remercie l'Etat partie pour le rapport complet qu'il a présenté et pour les renseignements complémentaires détaillés, y compris les données statistiques très complètes fournies, oralement et par écrit, par la délégation en réponse aux questions et aux observations du Comité. Il regrette néanmoins que le rapport ait été soumis avec près de 10 ans de retard. A cet égard, il prend note des explications données par le Gouvernement belge selon lesquelles ce retard est dû à la coïncidence d'un certain nombre de facteurs qui, entre autres, sont liés au profond processus de réforme de l'Etat, qui se traduit par une réorientation des responsabilités de ses administrations, à l'ampleur et à la complexité du système de sécurité sociale instauré en Belgique et aux restrictions budgétaires qui ont débouché sur une réduction du personnel des administrations publiques. Toutefois, le Comité souhaite souligner que ces explications ne sauraient justifier le Gouvernement belge. Les Etats parties doivent satisfaire aux obligations qu'ils ont contractées au niveau international en vertu du Pacte. Le Comité espère que le dialogue franc et excellent qu'il vient d'entamer avec l'Etat partie se poursuivra à l'avenir de manière régulière.

B. Facteurs et difficultés affectant l'application du Pacte

3. Le Comité regrette que les autorités belges, s'agissant du paragraphe 1 de l'article 2 du Pacte relatif aux mesures que les Etats parties doivent prendre en vue d'assurer progressivement la mise en oeuvre du Pacte, estiment que les dispositions du Pacte ne s'appliquent pas directement et qu'elles ne peuvent pas être invoquées directement par les plaignants devant les cours et tribunaux belges. Par ailleurs, le Comité remarque que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et d'autres conventions, comme la Charte européenne, auxquelles la Belgique est partie, sont directement applicables en vertu du droit belge. Le statut différent, dans le droit national, du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels semble être confirmé par une décision de la Cour de cassation de 1990. Le Comité se trouve en désaccord avec les autorités belges et rappelle que dans son Observation générale No 3 (1990) sur la nature des obligations des Etats parties comme le prévoit l'article 2 du Pacte, il se réfère à un certain nombre de dispositions du Pacte, notamment celles de l'article 8 relatives au droit de grève et celles de l'article 13 relatives au droit à l'éducation qui semblent être immédiatement applicables par les autorités judiciaires et autres organes dans bien des systèmes nationaux. Le Comité estime qu'il est difficilement acceptable de laisser entendre que les dispositions mentionnées, de par leur nature, ne s'appliquent pas d'elles-mêmes.

C. Aspects positifs

4. Le Comité félicite la Belgique des mesures qu'elle a prises pour traduire dans les faits les dispositions du Pacte, et notamment de l'insertion des droits économiques, sociaux et culturels dans le nouveau texte de la Constitution belge modifiée en février 1994.

5. Le Comité félicite également l'Etat partie de son système très complet d'assurance santé, système dont pourraient s'inspirer d'autres pays. Il note avec satisfaction que, depuis 1990, l'assurance maternité constitue un volet spécifique de la sécurité sociale en Belgique et que les allocations maternité ne constituent plus un obstacle à l'embauchage de femmes.

6. Le Comité note également avec satisfaction les mesures prises en Belgique pour garantir un revenu aux personnes âgées et, en particulier, pour verser une allocation aux personnes âgées dans le dénuement ou qui reçoivent une pension modeste.

7. Par ailleurs, le Comité se félicite d'apprendre que les dispositions juridiques qui établissent les critères prises en compte pour le calcul des pensions, dispositions qui semblent ne pas traiter hommes et femmes sur un pied d'égalité, sont en cours de modification afin d'assurer une égalité de traitement et d'introduire des prestations d'invalidité.

8. Le Comité note également qu'en ce qui concerne les grèves de fonctionnaires il n'y a pas eu de sanctions disciplinaires applicables ces dernières années et que le Conseil d'Etat, dans sa décision sur l'application de l'article 44 du décret royal de 1991, a déclaré qu'il garantissait de manière implicite le droit de grève des fonctionnaires.

D. Principaux sujets de préoccupation

9. Le Comité s'inquiète qu'il n'existe pas en Belgique de mesures législatives afin d'établir des critères clairs et objectifs destinés à réglementer l'accès des organisations d'employeurs et de travailleurs au Conseil national du travail et à diverses commissions des secteurs public et privé lorsque des conventions collectives sont élaborées. A cet égard, le Comité rappelle que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT a recommandé à maintes reprises la promulgation de mesures législatives de cet ordre.

10. De plus, le Comité note avec inquiétude qu'en Belgique les secteurs les plus vulnérables de la société ne bénéficient pas toujours d'une protection appropriée. A cet égard, le Comité s'inquiète particulièrement de la réduction en 1993 de certains subsides et prestations sociales, concernant notamment certaines catégories de médicaments remboursables. Le Comité regrette que cette tendance préjudiciable s'étende en Belgique et dans d'autres pays européens.

11. En outre, le Comité, tout en notant avec satisfaction que le droit au logement a été inséré dans le nouveau texte de la Constitution belge, s'interroge sur la viabilité des mesures prises pour faire respecter véritablement cette disposition de la Constitution. A cet égard, l'attention du gouvernement est appelée sur la section E ci-après.

E. Suggestions et recommandations

12. Le Comité recommande que le droit de grève figure explicitement dans la législation belge.

13. Le Comité recommande que les mesures législatives en cours d'élaboration qui sont destinées à réglementer l'accès des organisations d'employeurs et de travailleurs au Conseil national du travail et à d'autres organes soient rapidement promulguées.

14. Le Comité recommande aux autorités belges de prendre des mesures appropriées pour promouvoir des programmes d'investissement et, en particulier, encourager la création de logements sociaux. A cet égard, le Comité se réfère à son Observation générale No 4 (1991) sur le droit à un logement suffisant et souligne que, dans des cas où la jouissance de ce droit est gravement remise en cause, les autorités concernées devraient prendre les mesures qui s'imposent. Le Comité, étant donné les problèmes du secteur du logement, qui demeurent considérables, demande instamment au gouvernement de créer une commission du logement officielle et au plan national, composée de représentants du gouvernement, d'organisations non gouvernementales et d'autres groupes concernés. Etant donné les clauses antidiscriminatoires énoncées au paragraphe 2 de l'article 2 du Pacte, le Comité insiste pour que le gouvernement veille à ce que les personnes appartenant à des minorités ethniques, les réfugiés et les requérants d'asile soient pleinement protégés contre tout acte ou toute disposition législative qui pourrait, d'une manière quelconque, entraîner un traitement discriminatoire dans le logement. Etant donné les renseignements reçus par le Comité, selon lesquels tous les logements sociaux ne sont pas occupés par des personnes à faible revenu, le Comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les groupes à faible revenu aient accès aux logements sociaux d'un coût acceptable. Le Comité prie instamment le gouvernement d'appliquer plus intensivement la législation existante qui l'autorise à réquisitionner les biens et les logements laissés vacants par leurs propriétaires.

15. Enfin, le Comité demande au Gouvernement belge de présenter son deuxième rapport périodique pour le 31 mai 1997.



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