University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Australie, U.N. Doc. E/C.12/1/Add.50 (2000).





COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,

SOCIAUX ET CULTURELS

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE



Observations finales du Comité des droits économiques,
sociaux et culturels



Australie


1. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le troisième rapport périodique de l'Australie sur l'application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/1994/104/Add.22) à ses 45ème, 46ème et 47ème séances, les 24 et 25 août 2000, et a adopté, à sa 55ème séance, le 31 août 2000, les observations finales ci-après.

A. Introduction

2. Le Comité se félicite de la présentation du troisième rapport périodique de l'Australie, qui a été établi conformément aux directives révisées concernant la forme et le contenu des rapports énoncées par le Comité. Il note avec satisfaction que l'État partie a bien voulu avancer la date de la présentation de son troisième rapport périodique, ce qui témoigne de sa volonté de coopérer avec le Comité.

3. Le Comité se félicite du dialogue constructif qui s'est instauré entre la délégation de l'État partie et les membres du Comité. Il regrette néanmoins que, du fait de l'examen inopiné du rapport de l'État partie avant la date prévue, les réponses écrites à la liste des points à traiter n'aient pas été distribuées aux membres du Comité avant le dialogue avec la délégation. Le Comité regrette également que plusieurs questions n'aient pas reçu de réponse satisfaisante.


B. Aspects positifs

4. Le Comité reconnaît qu'en général la majorité des Australiens ont un niveau de vie élevé et que l'État partie poursuit ses efforts en vue de maintenir ce haut niveau de vie, comme en témoigne le fait que l'Australie occupe le quatrième rang dans le classement selon l'indicateur du développement humain du PNUD pour l'année 2000.

5. Le Comité note que l'État partie a pris des mesures pour rationaliser la réglementation de l'activité des entreprises et la prestation de services publics, notamment l'application, à partir du mois de juillet 2000, d'un régime fiscal sur les biens et les services qui vise à réduire l'impôt sur le revenu pour la majorité de la population active australienne.

6. Le Comité rend hommage à l'État partie pour ses efforts en vue d'un règlement de la récente crise financière en Asie.

7. Le Comité note avec satisfaction le rôle de premier plan joué par l'État partie dans le maintien de la paix et de la stabilité dans la région, notamment par la fourniture d'une aide économique et humanitaire, en particulier au Timor oriental.

8. Le Comité note qu'au mois d'août 1999, le Parlement a adopté une motion dans laquelle il a affirmé son attachement à la réconciliation avec les populations autochtones d'Australie en tant que priorité nationale importante, et exprimé "un profond et sincère regret" au sujet des politiques passées préjudiciables à ces populations. Le Comité note également qu'en mai 2000, le Conseil pour la réconciliation aborigène a présenté au peuple australien ses propositions finales en vue de l'adoption d'un Document de réconciliation dans l'optique de la formulation de mesures pour améliorer la situation des populations autochtones d'Australie.

9. Le Comité note que l'État partie a ouvert un crédit de 2,3 milliards de dollars australiens pour la mise en œuvre prioritaire des programmes en faveur des autochtones.

10. Le Comité se félicite du partenariat entre l'État partie et les communautés autochtones dans le cadre d'initiatives visant à promouvoir l'accès des populations autochtones à des services de santé adaptés à leur culture et à consacrer des ressources importantes à l'amélioration de la santé des autochtones en général.

11. Le Comité note que, malgré la persistance des inégalités entre les hommes et les femmes en matière d'emploi, le pourcentage des femmes occupant des postes de haut niveau a augmenté.

12. Le Comité se félicite des différents programmes mis en place par l'État partie pour combattre la violence au foyer, notamment les programmes "Partenariats contre la violence au foyer", "Initiatives contre la violence au foyer dans les milieux ruraux et les régions reculées", "Projet sur les relations hommes/femmes et la violence" et "Placement d'urgence".


C. Facteurs et difficultés entravant l'application du Pacte

13. Nonobstant les garanties en matière de droits économiques, sociaux et culturels figurant dans la législation de l'État partie, le Pacte n'a toujours pas de statut juridique aux niveaux de la fédération et des États, ce qui fait obstacle à sa pleine reconnaissance et à l'application de ses dispositions.

D. Principaux sujets de préoccupation

14. Le Comité note avec regret qu'en raison de la non-incorporation du Pacte en tant que loi dans l'ordre juridique interne, ses dispositions ne peuvent pas être invoquées devant les tribunaux.

15. Le Comité est profondément préoccupé par le fait qu'en dépit des efforts et des réalisations de l'État partie, les populations autochtones d'Australie continuent d'être relativement désavantagées dans l'exercice des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier dans le domaine de l'emploi, du logement, de la santé et de l'éducation.

16. Le Comité note avec regret que les amendements à la loi de 1993 sur les titres autochtones ont nui au processus de réconciliation entre l'État partie et les populations autochtones, pour qui ces amendements représentent une régression.

17. Le Comité note avec préoccupation que la loi de 1996 sur les relations au sein de l'entreprise favorise la négociation d'accords individuels avec les employeurs au détriment des conventions collectives, ce qui amoindrit le rôle de la Commission australienne pour les relations du travail. Il est en outre préoccupé par les restrictions qui résultent de cette loi en ce qui concerne la défense des salaires, la sécurité de l'emploi et le travail temporaire.

18. Le Comité note avec préoccupation que les travailleurs à domicile, qui sont essentiellement des femmes, ne bénéficient d'aucune forme de protection sociale et sont rémunérés à un taux nettement inférieur au salaire minimum, ce qui les obligent à travailler un nombre d'heures excessif pour subvenir aux besoins quotidiens de leur famille.

19. Le Comité note avec préoccupation que ni la loi ni les conventions collectives du travail ne prévoient un congé de maternité rémunéré, et que l'État partie n'a pas ratifié la Convention No 103 de l'OIT sur la protection de la maternité.

20. Le Comité regrette que l'absence d'un seuil de pauvreté fixé par l'État prive le Comité des critères dont il a besoin pour évaluer les progrès accomplis au fil des ans par l'État partie dans ses efforts pour combattre la pauvreté.

21. Le Comité est préoccupé par le fait que la loi de 1987 sur les baux à usage d'habitation (Nouvelle-Galles du Sud) n'assure pas suffisamment la sécurité de jouissance, et la protection contre les expulsions et l'augmentation arbitraire des loyers et que, de ce fait, les loyers à Sydney ont beaucoup augmenté et des expulsions forcées auraient eu lieu, en particulier dans le contexte des prochains Jeux olympiques.

22. Le Comité est profondément préoccupé par le fait que, malgré la garantie d'une couverture universelle dans le cadre du système Medicare, le problème des longues périodes d'attente avant l'admission dans les services médicaux hospitaliers, en particulier les services de chirurgie, n'a pas reçu l'attention voulue.

23. Le Comité note avec préoccupation qu'aucune mesure n'a été prise pour donner suite à ses recommandations de 1993 visant à renforcer l'enseignement des droits de l'homme dans le cadre des programmes éducatifs scolaires et non scolaires. En outre, l'État partie a donné des renseignements sur le financement des écoles publiques et privées mais n'a pas fourni suffisamment d'informations quant aux différences dans la qualité de l'enseignement dispensé dans les établissements publics et privés.


E. Suggestions et recommandations

24. Le Comité recommande vivement à l'État partie d'incorporer le Pacte dans sa législation afin que ses dispositions puissent être invoquées devant les tribunaux nationaux. Il prie instamment l'État partie de veiller à ce qu'il n'y ait aucun conflit entre le droit du Commonwealth et le droit national à cet égard. Il l'encourage à se conformer à la position prise par la Haute Cour en ce qui concerne "les attentes légitimes" nées de la ratification du Pacte.

25. Le Comité engage l'État partie à poursuivre ses efforts en vue de la réconciliation avec les populations autochtones d'Australie et afin d'améliorer leur situation en tant que groupe défavorisé.

26. Le Comité recommande à l'État partie de faire en sorte que les dispositions législatives relatives à la sécurité de l'emploi soient renforcées et effectivement mises en œuvre, en particulier dans le cas des groupes les plus vulnérables, tels que les travailleurs titulaires d'un contrat à durée déterminée, les travailleurs temporaires et les travailleurs occasionnels.

27. Le Comité recommande vivement à l'État partie de prendre des mesures en vue de protéger les travailleurs à domicile et de faire en sorte qu'ils perçoivent le salaire minimum officiel, bénéficient d'une protection sociale adéquate et jouissent de conditions de travail conformes à la loi.

28. Le Comité recommande à l'État partie de songer à adopter une loi instituant un congé de maternité rémunéré et à ratifier la Convention No 103 de l'OIT sur la protection de la maternité.

29. Le Comité recommande à l'État partie de limiter l'interdiction du droit de grève aux services essentiels, conformément à la Convention No 87 de l'OIT et, en ce qui concerne la fonction publique, aux fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité publique.

30. Le Comité recommande à l'État partie de veiller à ce que, dans les prisons privées, le travail soit volontaire et correctement rémunéré.

31. Le Comité demande à l'État partie de fournir des renseignements détaillés sur le programme Travail contre indemnités de chômage dans son quatrième rapport périodique.

32. Le Comité invite en outre l'État partie à garantir que la période d'attente de deux ans avant de pouvoir bénéficier d'une assistance dans le cadre de la sécurité sociale qui est imposée aux nouveaux immigrants ne porte pas atteinte à leurs droits à un niveau de vie suffisant.

33. Le Comité demande instamment à l'État partie de déterminer un seuil de pauvreté officiel, de sorte qu'une évaluation crédible de l'étendue de la pauvreté en Australie puisse être effectuée. Il souhaite que l'État partie fournisse des informations à ce sujet dans son quatrième rapport périodique.

34. Le Comité recommande vivement à l'État partie d'élaborer, à l'échelon fédéral, une stratégie du logement qui soit conforme aux Observations générales Nos 4 et 7 du Comité, et notamment de prendre des mesures pour protéger les locataires contre les expulsions forcées non justifiées et la hausse arbitraire des loyers. En outre, le Comité recommande à l'État partie de veiller à ce que les gouvernements des territoires et des États élaborent des politiques du logement conformes à cette stratégie.

35. Le Comité invite l'État partie à prendre les mesures requises pour inscrire l'enseignement des droits de l'homme dans les programmes scolaires aux niveaux primaire et secondaire, et prie l'État partie de l'informer dans son quatrième rapport périodique des mesures prises à cet effet.

36. Le Comité demande à l'État partie de fournir des renseignements supplémentaires plus détaillés, y compris des données statistiques par âge, par sexe et par groupe minoritaire, en ce qui concerne le droit au travail, le droit à des conditions de travail justes et favorables, le droit à la sécurité sociale, le droit au logement, le droit à la santé et le droit à l'éducation, dans son quatrième rapport périodique.

37. Enfin, le Comité invite l'État partie à diffuser largement en Australie les présentes observations finales et à l'informer des mesures qu'il aura prises pour mettre en œuvre ses recommandations, dans son quatrième rapport périodique, qui devra être présenté avant le 30 juin 2005.



Page Principale || Traités || Recherche || Liens