MODULE 21
ÉLABORATION DE POLITIQUES, PLANS ET LÉGISLATIONS POUR PROTÉGER ET PROMOUVOIR LES DROITS ESC

Objet du module 21

Ce module a pour objet de suggérer aux activistes comment œuvrer  pour favoriser l’adoption de politiques, plans et législations nationaux qui protègent, promeuvent et satisfont les obligations du gouvernement liées aux droits ESC.

Ce module

  • Insiste sur l’importance de l’intervention des activistes dans l’élaboration des politiques et législations;
  • souligne l’importance de la mobilisation des pauvres dans le cadre d’une stratégie politique ou législative;
  • aborde l’importance des plans économiques et des plans d’action nationaux dans la protection des droits ESC;
  • traite de l’intégration des normes internationales des droits humains dans les législations nationales;
  • suggère certaines stratégies susceptibles d’être utilisées pour persuader les gouvernements d’adopter des politiques, plans et législations qui favoriseront les droits ESC.

Introduction

Le rôle que joue la société civile dans l’élaboration, la mise en pratique et le suivi d’une politique et législation sociales fait partie intégrante du fonctionnement d’une société démocratique.  Lorsque les conditions sont favorables à ce rôle, la responsabilisation du gouvernement s’accroît, facteur qui conduit à une meilleure protection des droits humains.  La corrélation entre la jouissance des droits ESC et la protection des autres libertés est bien établie.

Aucune famine substantielle n’a jamais eu lieu dans un pays indépendant possédant une forme de gouvernement démocratique et une presse relativement libre.  Des famines se sont produites dans d’anciens royaumes, des sociétés contemporaines autoritaires, des communautés tribales primitives, des dictatures technocrates modernes, des économies coloniales dirigées par des impérialistes du nord et des pays nouvellement indépendants du sud dirigés par des chefs d’États despotiques ou intolérants.  Elles ne se sont toutefois jamais matérialisées dans des pays indépendants dont les populations votent régulièrement, dont les partis d’opposition formulent leurs critiques, dont la presse s’exprime librement et questionne sans être censurée le bien-fondé des politiques gouvernementales. [1]

Du fait du rapport étroit entre la jouissance des libertés démocratiques et la protection des droits ESC, les activistes doivent absolument considérer l’intervention politique et les réfor­mes législatives comme étant capitales à l’avancement de ces droits.  Lorsqu’il n’existe au­cun espace politique du fait de la répression ou des atteintes aux libertés, les activistes des droits ESC et ceux qui se consacrent aux questions de droits civils et politiques doivent impé­rativement coopérer afin de créer les conditions nécessaires pour que les populations puissent jouir de tous ces droits.  Par ailleurs, les organismes de droits civils et politiques se doivent de reconnaître que les atteintes à la liberté ou la répression ne sont peut-être que des symptô­mes représentatifs de l’inégalité d’une société souffrant de privations et des conflits qui s’ensuivent.

Les activistes doivent organiser des campagnes visant à encourager les gouvernements à rati­fier les traités internationaux des droits humains.  Ces normes fournissent une structure per­mettant d’évaluer divers politiques et programmes menés par un gouvernement.  La ratifica­tion est la première étape du développement de politiques sur les droits humains, car elle représente l’engagement d’un gouvernement à respecter, protéger et promouvoir les droits couverts par les traités.

Les gouvernements ne s’intègrent toutefois pas dans le régime des droits humains par le sim­ple fait de ratifier des traités.  Même pendant leurs campagnes de ratifications, les activistes auront recours aux normes internationales en vigueur pour évaluer les politiques et pratiques de leurs gouvernements respectifs.  Leurs campagnes seront organisées pour la promulgation de lois et l’élaboration de politiques qui adhèrent aux normes internationales, indépendam­ment du fait que leur gouvernement soit partie ou non à ces traités.

Il convient de considérer l’intervention dans l’élaboration des politiques et dans les réformes législatives comme faisant partie du processus de mobilisation de ceux qui sont privés de leurs droits.  Elle constitue un moyen important pour augmenter la confiance des populations.  De même, la mobilisation des populations fait partie intégrante du processus visant à influer sur l’élaboration des politiques et des lois.

Des plans économiques/plans d’action nationaux et droits ESC

Les politiques et plans d’un gouvernement dans les sphères ESC expriment ses priorités et ses engagements, notamment vis-à-vis de ses obligations en matière de droits ESC.  Par ail­leurs, le plan d’action national ou les plans économiques d’un pays ont un impact sur toutes les questions économiques et sociales de la société.  Ils constituent donc des outils cruciaux à la mise en place et au suivi des obligations relatives aux droits humains.  Ils sont particuliè­rement importants pour:

         clarifier la nature précise des obligations d’un État et

         élaborer des standards concrets (ou points de référence) pour évaluer le respect des obliga­tions d’un gouvernement (Voir le module 19).

Développement d'une politique nationale à partir de questions et luttes locales

Le Ghad est une terre du district de Saharanpur, situé dans l'État de Uttar Pradesh en Inde. La région est rocailleuse et l'agriculture difficile. Plus de 40 000 familles y survivent en fabriquant de la corde appelée baan à partir d'une herbe locale qui croît abondamment dans les forêts avoisinantes. Depuis un certain nombre d'années, leur accès à cette ressource naturelle s'est vu progressivement restreint du fait de la politique gouvernementale. Avant l'indépendance, les Britanniques avaient le contrôle de toutes les forêts et imposaient des restrictions à leur accès, tout en autorisant les populations locales à cueillir l'herbe. Après l'indépendance, le gouvernement créa une Corporation des forêts qui devint l'agence de collecte et de vente de cette herbe. Les concessions des populations locales furent résiliées et ces dernières durent avoir recours à des intermédiaires pour acheter leur herbe. Par conséquent, le prix de l'herbe augmenta considérablement, mais l'industrie du papier la paya un prix bien plus bas.

Vikalp, une ONG, entreprit d'organiser les populations locales et de les aider à acheter de l'herbe en vrac directement auprès de la Corporation des forêts. Par la suite, ces populations formèrent leur propre organisation pour demander leur droit de récolter et d'utiliser les ressources forestières. Elles demandèrent que les forêts soient considérées comme ressources communes des populations locales, qui étaient à même de protéger les forêts, à la différence des fonctionnaires qui succombaient aux pressions des intérêts commerciaux.

Leur lutte pour le contrôle et l'accès à un bien commun se concrétisa lorsque le gouvernement établit sa nouvelle politique sur les forêts. Avec Vikalp et d'autres organismes préoccupés par cette question, les populations locales purent influer sur la nouvelle politique formulée en 1986, qui incorporait un bon nombre des demandes présentées lors des luttes de Ghad et d'autres lieux.

Tous les deux sont fondamentaux pour mettre un gouvernement en face de ses obligations et élaborer des mécanismes améliorés de mise en œuvre et de suivi des droits ESC.

Outre les plans économiques nationaux normaux, les déclarations et programmes d’action adoptés au cours de la conférences des Nations Unies sur les droits de l’homme (1993), de la Quatrième conférence mondiale sur la femme (1995) et du Sommet mondial pour le dévelop­pement social (1995) recommandaient également aux gouvernements de créer des plans d’actions nationaux (PAN) dans le cadre de leur engagement à assurer les droits humains, l’égalité de genre et le développement social.  Les ONG et autres acteurs de la société civile peuvent contribuer au développement des plans économiques et des plans d’action nationaux évoqués au cours des conférences des Nations Unies et les utiliser comme stratégies pour as­surer la jouissance des droits ESC.  Ils peuvent tenter d’influer sur le contenu des plans éco­nomiques nationaux et des PAN avec les objectifs suivants: 

         assurer que les plans d’un pays reflètent précisément les mesures qui ont été prises pour encourager le respect des droits ESC et les barrières qui existent encore dans le pays, em­pêchant la jouissance totale et équitable de ces droits;

         persuader le gouvernement d’établir des objectifs clairs dans ses plans pour réaliser pleine­ment ces droits, en mettant en place des indicateurs, points de référence et délais afin de mesurer la progression vers ces buts;

         identifier les groupes vulnérables et défavorisés qui ont besoin d’une assistance spéciale de l’État pour avoir accès à ces droits (par exemple, personnes atteintes du VIH/SIDA, femmes des régions rurales, travailleurs migrants, handicapés, enfants pauvres, personnes âgées et indigènes);

         identifier les mécanismes permettant aux groupes défavorisés d’avoir accès aux droits ESC et aux mécanismes de redressement; 

         identifier les principales mesures politiques, législatives et institutionnelles nécessaires pour atteindre les objectifs établis dans les plans, et/ou

         persuader le gouvernement d’allouer les ressources adéquates (financières, humaines, tech­niques, etc.) pour assurer la pleine réalisation des droits ESC. 

Les plans économiques ou les plans d’action nationaux peuvent servir d’outil public pour éva­luer dans quelle mesure un gouvernement se consacre aux droits ESC et respecte les traités internationaux qui les protègent.

Ces plans peuvent servir à suivre la progression d’un gouvernement vers la réalisation de ces droits.  Plus les indicateurs, points de référence et délais prévus dans ces plans seront détail­lés, plus il sera facile de suivre cette progression.  Ils peuvent également contribuer à l’identification des principaux problèmes et obstacles qui empêchent ou retardent la réalisa­tion des points de référence et objectifs pertinents.

Ils peuvent servir d’outil pour tenir un gouvernement res­ponsable de la réalisation des objectifs qu’il établit.  Par exemple, lorsqu’un gouver­nement agit contrairement à ses enga­gements selon les termes d’un plan, les médias le signaleront et la pres­sion publique pourra l’amener à ho­norer ses engagements.  Par ailleurs, les plans d’action nationaux adoptés aux termes de la Déclaration de Vienne (sur les droits de l’homme) sont déposés aux Nations Unies et constituent un engagement interna­tional.  Il peut donc être possible d’exercer une pression internatio­nale sur un gouvernement coupable d’une grave violation de ses enga­gements en matière de droits hu­mains selon les termes de ses plans d’action nationaux.

Plans d'action nationaux
L'expérience de l'Afrique du Sud

L'Afrique du Sud dut s'atteler à la tâche d'intégrer les clauses sur les droits ESC contenues dans sa Constitution dans des plans nationaux destinés à faire appliquer ces droits. L'un des points traités concernait l'eau: le droit d'avoir accès à une quantité suffisante d'eau figure dans la section 27 de sa Constitution. À cette fin, le Département de l'eau créa une législation qui reconnaît le droit constitutionnel d'avoir accès à l'eau et en donne une définition plus détaillée. La Loi sur l'approvisionnement en eau (1997) définit comme suit le droit d'avoir accès à une quantité suffisante d'eau: " le niveau minimum prescrit d'approvisionnement en eau nécessaires pour fournir sans faute de l'eau en quantité et de qualité suffisantes aux foyers, y compris les foyers non-officiels, afin d'entretenir la vie et l'hygiène personnelle ". Cette définition est analysée dans un certain nombre de documents politiques qui identifient les six éléments suivants d'un approvisionnement en eau suffisant: quantité, camionnage, disponibilité, assurance de l'approvisionnement, qualité et caractéristiques de valorisation. (Une définition est également fournie pour l'hygiène de base.)

Comme décrit dans le module 19, le ministère quantifia à 25 litres par personne et par jour la quantité minimum d'eau. Il convint également que l'eau doit être disponible à moins de 200 mètres des habitations, que son débit ne doit pas être inférieur à 10 litres par minute et qu'elle doit être sans danger pour la communauté. Cela signifie que l'eau non traitée doit être disponible 98% du temps, et que le fonctionnement et l'entretien du système doivent être efficaces. Enfin, un guide était créé en conjonction avec le Département de la santé prescrivant les normes sanitaires minimales pour l'évaluation de la qualité de l'approvisionnement en eau.

Le Département de l'eau établit un objectif à moyen terme: 50-60 litres d'eau par personne et par jour (basé sur les directives de l'OMS), et un objectif à long terme: un service d'approvisionnement complet et le raccordement de tous les foyers. La nouvelle législation de l'eau fournit en outre un cadre pour l'utilisation équitable et durable, la gestion et la conservation des ressources en eau. Le ministère doit établir une stratégie nationale de ces ressources après consultation avec la société en général, et les autorités locales sont obligées d'adopter un Plan de développement des services d'approvisionnement en eau pour leur mise en place et amélioration progressives sur une période de cinq ans.

Cette étude de cas démontre la manière dont on peut utiliser les plans nationaux (avec les points de références) afin de donner substance aux droits ESC et les faire appliquer. En éclairant leur contenu essentiel et en établissant des points de références concrets pour évaluer les progrès vers leur pleine réalisation, ces plans permettront de propulser les droits ESC au cœur du mouvement des droits humains.

Des plans peuvent également être adoptés pour des groupes spécifiques, par exemple, les femmes et les enfants.

Les plans économiques et les plans d’action nationaux ont bien entendu des limites.  Étant donné qu’ils sont souvent élaborés en grande partie par des fonctionnaires du gouvernement, ils peuvent donc refléter les propres normes du gouvernement qui servent ensuite à le suivre et à déterminer ses responsabilités. C’est tout particulièrement le cas si un plan n’est pas éla­boré dans le cadre d’un processus consultatif élargi et amplement relayé par les médias.  Si on le considère principalement comme document technique reflétant une politique gouver­nementale établie, les organisations et communautés seront peu enclines à l’utiliser comme outil de suivi et de plaidoyer.  Son bien-fondé en tant que mécanisme permettant de tenir le gouvernement responsable de l’application des droits ESC diminuera également.

L’intégration des droits ESC dans la législation

Selon l’article 2(1) du PIDESC, l’État s’engage à agir « en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le présent Pacte par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l'adoption de mesures législatives ».  Dans son Observation générale 3, le CDESC déclare que le recours à la législation « est hautement souhaitable et que, dans certains cas, il peut même être indispensable. » à la réalisation de ces droits.

Une structure législative est nécessaire pour:

         fournir une définition plus précise et détaillée de la portée et du contenu de divers droits ESC précisés dans les instruments internationaux et les constitutions nationales.  Par exemple, une législation est nécessaire pour traiter du « droit à un logement adéquat » sti­pulé dans l’article 11 du PIDESC;

         prescrire les responsabilités et fonctions exactes des différentes sphères d’un gouverne­ment aux niveaux national, provincial et local afin d’appliquer un droit donné;

         créer une structure institutionnelle cohérente et coordonnée pour l’application d’un droit;

         empêcher et interdire les mesures qu’ont prises des fonctionnaires et des particuliers (par exemple, propriétaires, employeurs, sociétés, etc.) afin de limiter la jouissance des droits ESC; et

         assurer le recours à des mécanismes spécifiques permettant de remédier aux violations d’un droit.

 

L'intégration des normes des droits humains dans la législation nationale
Extraits du projet de loi sud-africaine sur les logements locatifs (B 29B-99)

PROJET DE LOI

Définir la responsabilité du gouvernement en termes de propriété locative, créer des mécanismes visant à promouvoir la mise à disposition de propriétés locatives, promouvoir l'accès à des logements adéquats par des mécanismes assurant le fonctionnement correct du marché des logements locatifs, assurer la création de tribunaux de logements locatifs, définir les fonctions, pouvoirs et devoirs de ces tribunaux, établir des principes généraux pour la résolution des conflits dans le secteur des logements locatifs, faciliter les bonnes relations entre locataires et propriétaires et, à cette fin, établir les conditions générales relatives aux baux locatifs, abroger la Loi sur le contrôle des loyers de 1976; et envisager toutes les questions s'y rapportant.

PRÉAMBULE

ATTENDU QUE, aux termes de la section 26 de la Constitution de la République d'Afrique du Sud de 1996, chaque personne a le droit d'avoir accès au logement adéquat;

ATTENDU QUE l'État doit prendre des mesures législatives et autres mesures raisonnables, dans la mesure de ses ressources, afin d'aboutir à la réalisation progressive de ce droit;

ATTENDU QUE personne ne peut être expulsé de son logement ou voir son logement démoli sans que la cour en ait décidé ainsi, après avoir tenu compte de toutes les circonstances pertinentes;

ATTENDU QUE aucune législation n'autorise les expulsions arbitraires;

ATTENDU QUE les logements locatifs constituent un élément clé du secteur de l'habitation;

ATTENDU QUE il est nécessaire de promouvoir la mise à disposition de logements locatifs;

ATTENDU QUE il est nécessaire d'équilibrer les droits des locataires et des propriétaires et de créer des mécanismes destinés à protéger tant les locataires que les propriétaires des pratiques inéquitables et de l'exploitation;

ET ATTENDU QUE il est nécessaire de créer des mécanismes permettant de résoudre rapidement les conflits entre locataires et propriétaires, à un coût minimum pour les parties;

EN FOI DE QUOI, le Parlement de la République d'Afrique du Sud décrète ce qui suit:

TABLE DES MATIÈRES

CHAPITRE 1

DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES
1. Définitions

CHAPITRE 2

PROMOTION DES PROPRIÉTES LOCATIVES
2. Responsabilité du gouvernement vis-à-vis de la promotion des propriétés locatives
3. Mesures visant à augmenter la mise à disposition des propriétés locatives

CHAPITRE 3

RELATIONS ENTRE LOCATAIRES ET PROPRIÉTAIRES
4. Dispositions générales
5. Dispositions relatives aux baux locatifs

CHAPITRE 4

TRIBUNAL DES LOGEMENTS LOCATIFS
6. Application du chapitre
7. Etablissement de tribunaux de logements locatifs
8. Fonctions du tribunal
9. Composition du tribunal
10. Réunions du tribunal
11. Personnel
12. Financement et rapport des activités du tribunal
13. Plaintes
14. Bureaux de renseignements
15. Réglementations

CHAPITRE 5

DISPOSITIONS GÉNÉRALES
16. Transgressions et pénalisations
17. Examen
18. Abrogations et réformes législatives
19. Montants économisés
20. Titre abrégé et entrée en vigueur . . .

CHAPITRE 2
PROMOTION DES PROPRIÉTÉS LOCATIVES

Responsabilité du gouvernement dans la promotion des logements locatifs

2. (1) Le gouvernement doit-
(a) promouvoir la stabilité et la croissance du marché afin qu'il réponde progressivement à la demande latente en logements locatifs abordables, à la demande émanant des personnes historiquement défavorisées par une discrimination injuste et des personnes pauvres, par la création de mesures d'incitation, de mécanismes et autres mesures qui-
(i) améliorent les conditions du marché des logements locatifs;
(ii) incitent l'investissement dans les zones urbaines et rurales ayant besoin d'être revitalisées et ressuscitées; et
(iii) rectifient les pratiques désorganisées de l'habitat résidentiel en lançant, en encourageant et en facilitant de nouveaux aménagements dans les zones en question ou en réaménageant ces zones;
(b) faciliter la mise à disposition de logements locatifs, en partenariat avec le secteur privé . . .
(3) Le gouvernement national doit élaborer une structure politique, y compris des normes et standards, sur les logements locatifs afin d'appliquer la sous-section (1).
(4) Les administrations provinciales et locales doivent poursuivre, de manière équilibrée et équitable, les objectifs de la sous-section (1) dans le cadre de la politique nationale sur les logements locatifs mentionnée à la sous-section (3) et dans le contexte d'une politique nationale élargie; ils doivent consacrer une attention particulière aux logements locatifs dans l'exécution de leurs fonctions, dans l'exercice de leurs pouvoirs, ainsi que dans l'exécution de leurs devoirs et responsabilités relatifs à l'aménagement des habitations . . .

CHAPITRE 4

TRIBUNAL DES LOGEMENTS LOCATIFS

Composition du tribunal

9. (1) Le tribunal, constitué d'au moins trois et d'au plus cinq membres, se compose comme suit-
(a) un président
(b) au moins deux et au plus quatre membres nommés par le MEC [membre du Comité exécutif d'une province] en nombre égal, dont-
(i) deux membres au plus doivent avoir des compétences en gestion immobilière; et
(ii) deux membres au plus doivent avoir des compétences relatives aux consommateurs . . .

Plaintes

13. (1) Tout locataire ou propriétaire, ou tout groupe de locataires ou de propriétaires, peut porter plainte auprès du tribunal, de la manière prescrite, pour pratique déloyale . . .

CHAPITRE 5
DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Examen

17. Sans porter atteinte aux droits constitutionnels qu'a toute personne d'avoir accès à un tribunal, les procédures d'un tribunal peuvent être examinées par la Haute Cour de Justice dans son domaine de compétence . . .

Stratégies visant à persuader les gouvernements d’adopter des politiques et législations favorables aux droits ESC

Les stratégies particulières que devraient suivre les ONG afin de persuader les gouverne­ments d’adopter des politiques et législations visant à favoriser les droits ESC dépendent en grande partie du contexte national et des questions en jeu.  Il est parfois possible de persuader les technocrates de mettre sur pied ou de réformer des plans nationaux et/ou une législation en présentant un texte bien conçu soulignant les implications politiques qu’auront les normes internationales ou constitutionnelles sur les droits ESC.  Dans un autre contexte, une mobili­sation populaire et une campagne publique peuvent s’avérer plus efficaces.

Voici plusieurs stratégies possibles:

         participation à des forums consultatifs sur les processus politiques et législatifs clés (exa­mens budgétaires, commissions législatives, par exemple);

         présentation de déclarations aux ministères qui mettent sur pied des politiques dans des domaines cruciaux pour les droits ESC;

         dépôt de propositions lors d’audiences publiques organisées par le gouvernement et les corps législatifs;

         lobbying auprès des agents publics responsables de l’adoption et de l’application de la législation (par exemple, députés, fonctionnaires des administrations locales);

         campagnes, activités dans les médias, etc., visant à susciter une prise de conscience et la mobilisation du public et des communautés affectées);

         participation au plaidoyer pour les droits ESC et à des actions menées conjointement avec un large spectre d’organisations dans la société civile; et

         recours aux normes internationales et, le cas échéant, aux normes nationales afin d’assurer une législation efficace et l’allocation de ressources budgétaires adéquates pour faire appliquer les droits.  Par exemple, aux termes des dispositions de leur Constitution relatives aux droits ESC, les groupes sud-africains ont formé des lobbies et entrepris des campagnes sur les dépenses sociales et la législation.

Il est crucial que les ONG qui se consacrent aux droits ESC forment des lobbies pour obtenir des processus transparents et participatifs en ce qui concerne l’élaboration des politiques et à l’adoption de la législation.  Ces tâches portent notamment sur l’accès à l’information, l’équité des procédures ad­ministratives, les procédures consultatives pour le développement des budgets et des po­litiques à tous les niveaux du gouverne­ment, un système de dépôt de propositions et des audiences publiques dans le cadre du pro­cessus législatif.  Elles sont cruciales pour assurer la pleine intégration des droits ESC dans la politique et la législation.

Auteur: L’auteur de ce module est Sandra Liebenberg.  Les recherches sur lesquelles est fondé ce module ont été menées avec l’assistance financière de l’EUFHRSA (Fondation de l’Union européenne pour droits de l’homme en Afrique du Sud).  Les points de vue exprimés ici ne représentent pas nécessairement le point de vue officiel de l’EUFHRSA.  Cet orga­nisme est financé par l’Union européenne, dans le cadre du Programme européen pour la recons­truction et le développement.

L’assemblée des pauvres et le pouvoir du peuple

Les impacts négatifs résultant de plus de quarante ans de développement économique et indus­triel amenèrent les groupes défavorisés à se rassembler. Cela constitua l’un des mouve­ments populai­res les plus importants de l’histoire de la Thaïlande.  Le 10 décembre 1995, les représentants des populations touchées par les constructions de barrages, les conflits terriens et forestiers, les projets d’infrastructures gouvernementales, ainsi que les représentants des pauvres urbains et des ouvriers persécutés et exploités, se réunirent pour établir une stratégie afin de résoudre leurs problèmes.  Des étudiants, des ONG et des représentants de popula­tions d’autres pays d’Asie souffrant de problèmes similaires se joignirent à eux.  Le 14 dé­cembre 1995, dans un village créé pour protes­ter contre le barrage du Pak Mool (voir le mo­dule 15), fut adoptée une déclaration visant à créer un réseau appelé « l’Assemblée des pau­vres »; ce réseau devait fournir une assistance mutuelle aux différents réseaux membres et renforcer leur pouvoir de négociation.  Le jour suivant, des milliers de personnes présentèrent une lettre ouverte au premier ministre thaïlandais à l’occasion d’une réunion des chefs des gouvernements d’Asie du sud-est.  Ce geste attira l’attention des mé­dias locaux et internatio­naux.  Le gouvernement thaïlandais ne tint pas compte de la lettre, ni des manifestations sui­vantes de l’Assemblée des pauvres.

Le 25 mars 1996, plus de 10 000 personnes venant de vingt et une provinces s’assemblèrent devant le siège du gouvernement à Bangkok ; ils dressèrent un « Village des pauvres » au cœur de la ville.  Le gouvernement entama des négociations avec les représentants de l’Assemblée, négo­ciations qui n’aboutirent pas.  Au bout de cent jours, l’Assemblée décida de se disperser pour re­venir plus nombreuse.  Le 25 janvier 1997, le Village des pauvres qui se recréa comptait près de 20 000 personnes, qui se tenaient sur une bande de plus d’un kilomètre à proximité du siège du gouvernement.

L’Assemblée constituait une forme non-violente de protestation de la part de populations jusqu’alors ignorées.  Formée de différents comités assurant le bon ordre parmi près de 20 000 personnes, elle était un modèle d’organisation.  Son long effort fut couronné de succès lorsque le gouvernement nouvellement élu annonça être disposé à négocier.  À l’issue de quatre-vingt dix-neuf jours, le gouvernement convint d’accéder entre autres aux demandes suivantes:

         les communautés forestières participeraient à la rédaction du nouveau projet de loi fores­tière;

         les projets gouvernementaux qui avaient entraîné des problèmes de survie pour les popula­tions locales seraient annulés;

         les villageois qui avaient perdu leurs terres et leurs moyens d’existence du fait de la con­struc­tion de sept barrages recevraient des compensations;

         avant de mettre en place tout projet important, des études seraient entreprises sur leur impact social et environnemental;

         les petits exploitants agricoles participeraient à la rédaction du plan de développement économi­que et social du pays;

         une nouvelle loi sur les taudis serait promulguée, rédigée avec la participation des représen­tants des groupes urbains pauvres;

         un institut serait créé pour examiner et mettre en place des politiques assurant la sécurité et la santé des travailleurs.

Douze comités furent créés pour suivre l’application de ces aspects de l’accord ainsi que d’autres aspects.

NOTES


1.  Amartya Sen, Development as Freedom (Royaume-Uni: Oxford University Press, 1999), 152.


Droits résérves