University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant,
Arabie saoudite, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.148 (2001).




COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT
Vingt-sixième session


EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION


Observations finales du Comité des droits de l'enfant

Arabie saoudite


1. À ses 687ème et 688ème séances (voir CRC/C/SR.687 et 688), tenues le 19 janvier 2001, le Comité des droits de l'enfant a examiné le rapport initial de l'Arabie saoudite (CRC/C/61/Add.2), reçu le 15 octobre 1998, et adopté à la 697ème séance, tenue le 26 janvier 2001 les observations finales ci-après :

A. Introduction

2. Le Comité note que le rapport initial de l'État partie a été établi selon ses directives. Il regrette toutefois que le rapport se caractérise essentiellement par son juridisme, et qu'il ne renferme pas d'évaluation critique de la situation actuelle en ce qui concerne l'exercice des droits de l'enfant dans le pays. Il constate que les réponses écrites à ses questions, qu'il a trouvées instructives, lui ont été présentées en temps voulu. Il se félicite également de la présence d'une délégation de haut niveau, ce qui a contribué à un dialogue franc.

B. Aspects positifs

3. Le Comité se félicite que l'État partie ait ratifié la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Il accueille également avec satisfaction l'information fournie par la délégation selon laquelle l'État partie envisage de ratifier le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

4. Le Comité se félicite également de la création du Comité sur les mauvais traitements délibérément infligés aux enfants.

5. Il note avec satisfaction que l'État partie a accordé une aide financière généreuse aux pays en développement.


C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la convention

6. Notant les valeurs universelles d'égalité et de tolérance inhérentes à l'Islam, le Comité constate que l'interprétation étroite que les autorités de l'État donnent des textes islamiques entrave l'exercice de nombreux droits fondamentaux protégés par la Convention.

D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1. Mesures d'application générale


Réserve

7. Le Comité craint que, par son ampleur et son imprécision, la réserve générale formulée par l'État partie n'annule potentiellement nombre de dispositions de la Convention, ce qui suscite des préoccupations quant à sa compatibilité avec l'objet et le but de la Convention, et avec la mise en œuvre globale de la Convention.

8. Le Comité recommande à l'État partie de retirer sa réserve, conformément à la Déclaration et au Programme d'action de la Conférence mondiale sur les droits de l'homme (1993).

Législation

9. Le Comité est préoccupé par le fait que plusieurs droits prévus dans la Convention n'ont pas été transposés en droit interne. En particulier, la Loi fondamentale et d'autres lois applicables n'interdisent pas expressément tous les motifs de discrimination visés à l'article 2 de la Convention. En outre, le Comité note que certains aspects du droit interne ne sont pas compatibles avec la Convention (par exemple, la discrimination à l'égard des femmes et des non-musulmans, et le recours à des peines judiciaires, telles que la flagellation) et qu'un grand nombre de lois, pertinentes au regard des droits de l'enfant (notamment celles relatives à l'état des personnes, au Code pénal, et aux codes de procédure pénale et civile), n'ont pas encore été codifiées.

10. Le Comité recommande à l'État partie de procéder à un examen approfondi de la Loi fondamentale et du droit interne, notamment des règlements administratifs et des règles de procédure, afin de s'assurer qu'ils sont conformes aux normes internationales relatives aux droits de l'homme, en particulier à la Convention, qu'ils sont suffisamment clairs et précis et qu'ils sont publiés et accessibles au public.

Coordination

11. Le Comité est inquiet de ce que la coordination et la coopération administratives soient insuffisantes aux échelons national et local en vue de la mise en œuvre de la Convention.

12. Eu égard à la Déclaration et au Programme d'action de Vienne de 1993 (par. 71), le Comité recommande à l'État partie de poursuivre la mise au point d'un plan d'action national détaillé qui lui permette de s'acquitter des obligations assumées en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, notamment la Convention, dans le cadre d'un processus ouvert et consultatif. Il conviendrait de favoriser la coordination et la coopération intersectorielles des autorités administratives aux échelons national et local ainsi qu'entre ces échelons. Le Comité recommande à l'État partie d'apporter un appui suffisant aux autorités locales, notamment en matière de perfectionnement des capacités professionnelles, en vue de la mise en œuvre de la Convention.

13. Le Comité est préoccupé par l'insuffisance des efforts déployés pour faire participer la société civile à l'application de la Convention.

14. Le Comité recommande à l'État partie d'envisager systématiquement de faire participer la société civile, tout particulièrement les associations et groupes de défense des enfants, à tous les stades de la mise en œuvre de la Convention, notamment à celui de l'élaboration des politiques. Il recommande aussi à l'État partie de redoubler d'efforts pour faire participer les acteurs étatiques pertinents, tels que les agents des administrations locales et la police, au dialogue avec la société civile, et l'encourage à appuyer les initiatives prises pour renforcer le rôle de la société civile.

Collecte de données

15. Le Comité est préoccupé par le fait que l'on ne collecte pas systématiquement et que l'on n'exploite pas efficacement les données ventilées relatives aux mineurs de 18 ans en ce qui concerne les droits consacrés dans la Convention pour évaluer les progrès et concevoir des politiques visant à mettre en œuvre la Convention.

16. Le Comité recommande à l'État partie de mettre au point un mécanisme chargé de recueillir et d'analyser les données concernant les mineurs de 18 ans. Il encourage l'État partie à solliciter une assistance technique à cet égard, notamment auprès de l'UNICEF.

Structures de surveillance

17. Le Comité souligne l'importance que revêt la création d'un mécanisme indépendant ayant pour mandat d'observer et d'évaluer régulièrement les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la Convention aux échelons national et local. En outre, il note qu'en l'absence de mécanismes indépendants et efficaces pour en surveiller l'application, les garanties en matière de non-discrimination, de liberté religieuse et de procès équitable prévues en droit interne ne suffisent pas, par elles-mêmes, à garantir l'exercice de ces droits, entre autres droits fondamentaux.

18. Le Comité encourage l'État partie à envisager de créer, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l'homme ("Principes de Paris", résolution 48/134 de l'Assemblée générale), une institution nationale indépendante de défense des droits de l'homme chargée de surveiller et d'évaluer les progrès de la mise en œuvre de la Convention au niveau national et, le cas échéant, au niveau local. Cette institution devrait avoir compétence pour recevoir des plaintes relatives à des violations des droits de l'enfant, pour enquêter sur ces violations en employant des méthodes adaptées à l'enfant, et pour y remédier. Le Comité encourage l'État partie à solliciter une assistance technique, notamment auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et de l'UNICEF.

Formation/diffusion d'informations sur la Convention

19. Le Comité est préoccupé par le fait que les professionnels qui travaillent avec et pour les enfants, ainsi que le grand public, notamment les enfants, sont peu sensibilisés à la Convention. Il est également préoccupé de ce que l'État partie ne mène pas d'activités de diffusion et de sensibilisation de façon systématique et ciblée.

20. Le Comité recommande à l'État partie de mettre au point un programme permanent de diffusion de renseignements sur la mise en œuvre de la Convention à l'intention des enfants et des parents, de la société civile et de tous les secteurs et niveaux de l'administration. En outre, il recommande à l'État partie de renforcer ses efforts pour élaborer des programmes permanents de formation systématique aux droits de l'homme, y compris aux dispositions de la Convention, à l'intention de toutes les catégories professionnelles qui s'occupent d'enfants (conseil consultatif, juges, avocats, responsables de l'application des lois, fonctionnaires, agents des collectivités locales, personnel des établissements et lieux de détention réservés aux enfants, enseignants, personnel soignant, y compris les psychologues et les travailleurs sociaux). Il encourage l'État partie à demander notamment au Haut-Commissariat aux droits de l'homme et à l'UNICEF une aide technique à cet égard.


2. Définition de l'enfant

21. Le Comité est préoccupé par le fait que le droit saoudien ne donne pas une définition claire de l'enfant, ni ne précise l'âge de la majorité. Ainsi, l'absence de disposition concernant l'âge minimum du mariage peut se traduire par une application arbitraire et désordonnée de la loi et par une discrimination entre les garçons et les filles.

22. Le Comité recommande à l'État partie de revoir sa législation de manière à aligner la définition de l'enfant, l'âge de la majorité, ainsi que les prescriptions en matière d'âge minimum sur les principes et dispositions de la Convention, en veillant en particulier à ce que les règles n'établissent aucune distinction fondée sur le sexe, et à ce qu'elles soient exécutées conformément à la loi.


3. Principes généraux

Le droit à la non-discrimination

23. Le Comité est préoccupé par la persistance de la discrimination dans l'État partie. Il relève, en particulier, que la discrimination directe et indirecte à l'encontre des filles et des enfants nés hors mariage, notamment en matière d'état civil (par exemple, le fait que les femmes n'aient pas de carte d'identité) et d'état des personnes (succession, garde, tutelle, par exemple), est incompatible avec l'article 2. Il s'inquiète également de ce que le droit de la nationalité n'accorde pas les mêmes droits civiques aux enfants nés de femmes saoudiennes mariées à des étrangers. Il se déclare préoccupé par la persistance de stéréotypes sur le rôle et les responsabilités des femmes et des hommes.

24. Conformément à l'article 2 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de prendre des mesures efficaces, notamment en adoptant ou en abrogeant des lois civiles et pénales selon que de besoin, pour prévenir et éliminer la discrimination fondée sur le sexe et la naissance dans tous les domaines de la vie civile, économique, politique, sociale et culturelle. À cet égard, il encourage l'État partie à examiner les pratiques d'autres États qui ont réussi à concilier les droits fondamentaux et les textes islamiques. Il recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures appropriées, par exemple de réaliser des campagnes générales de sensibilisation, afin de prévenir et de combattre les attitudes négatives dans ce domaine, notamment au sein de la famille, ainsi que de former les membres des professions judiciaires, en particulier les magistrats, à tenir compte des disparités entre les sexes. Il conviendrait de mobiliser les dignitaires religieux à l'appui de ces efforts.

Intérêt supérieur de l'enfant

25. Le Comité s'inquiète du fait que le principe général de l'intérêt de l'enfant énoncé à l'article 3 de la Convention n'est pas toujours une considération primordiale dans les mesures intéressant les enfants, notamment dans le domaine du droit de la famille (par exemple, la loi prévoit que la garde de l'enfant est déterminée par l'âge de l'enfant, plutôt que par l'intérêt supérieur de celui-ci, et elle est discriminatoire).

26. Le Comité recommande à l'État partie de revoir sa législation et les mesures administratives de manière à ce que celles-ci reflètent dûment et prennent en considération l'article 3 de la Convention.

Droit à la vie

27. L'âge de la majorité n'étant pas défini, le Comité est vivement préoccupé par le fait que la peine de mort puisse être prononcée pour des infractions commises par des personnes âgées de moins de 18 ans au moment des faits, contrairement aux dispositions de l'article 3 et de l'alinéa a) de l'article 37 de la Convention.

28. Le Comité recommande vivement à l'État partie de prendre immédiatement des mesures pour édicter une loi portant abolition de la peine de mort pour les infractions commises par des mineurs de 18 ans.

Respect des opinions de l'enfant

29. Le Comité est préoccupé par le fait que le respect des opinions de l'enfant demeure limité, notamment à l'école, devant les tribunaux et surtout dans la famille, étant donné l'attitude traditionnelle affichée par la société à l'égard des enfants.

30. Le Comité encourage l'État partie à promouvoir et à faciliter, conformément à l'article 12 de la Convention, le respect des opinions de l'enfant et sa participation à toute affaire le concernant, au sein de la famille, à l'école, devant les tribunaux et les organes administratifs. À cet égard, le Comité recommande à l'État partie d'élaborer des programmes de perfectionnement, dans le cadre d'instances communautaires, à l'intention des enseignants, des travailleurs sociaux et des fonctionnaires locaux pour qu'ils puissent aider les enfants à formuler leurs opinions en connaissance de cause, et pour faire en sorte que celles-ci soient prises en considération. Il recommande à l'État partie de solliciter l'assistance de l'UNICEF, notamment.


4. Libertés et droits civils

Liberté de pensée, de conscience et de religion

31. Le Comité souligne que la réalisation des droits fondamentaux de l'enfant ne saurait être dissociée de la réalisation des droits fondamentaux de ses parents, ou de la réalisation des droits de l'homme au sein de la société en général. Compte tenu des articles 14 et 30 de la Convention, et de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, de 1981 (résolution 36/55 de l'Assemblée générale), le Comité se déclare préoccupé par les restrictions imposées à la liberté de religion, et considère que les restrictions imposées à la liberté de manifester sa religion ne sont pas compatibles avec les critères énumérés au paragraphe 3 de l'article 14.

32. Le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures nécessaires, notamment en adoptant ou en abrogeant des lois si besoin est, pour prévenir et éliminer les mesures discriminatoires fondées sur la religion ou la conviction touchant la reconnaissance, l'exercice et la jouissance des droits fondamentaux et des libertés fondamentales dans tous les domaines de la vie civile, économique, politique, sociale et culturelle. Il recommande à l'État partie de tout faire pour lutter contre l'intolérance fondée sur la religion ou la conviction, notamment en organisant des campagnes de sensibilisation.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

33. Compte tenu de l'alinéa a) de l'article 37 de la Convention, le Comité est très préoccupé par le fait que des mineurs de 18 ans en détention peuvent être soumis à des châtiments corporels, tels que la flagellation, en vertu de l'article 28 du Règlement sur la détention et l'emprisonnement de 1977. Il est également préoccupé par le fait que des personnes ayant commis des infractions alors qu'elles avaient moins de 18 ans peuvent être soumises à divers traitements et peines cruels, inhumains ou dégradants, telles la flagellation, la lapidation ou l'amputation, qui sont systématiquement imposés par les autorités judiciaires. Le Comité estime que l'application de ces mesures est incompatible avec la Convention. Il est en outre préoccupé par les informations selon lesquelles les membres des comités pour la propagation de la vertu et la prévention du vice harcèlent et agressent régulièrement des personnes de moins de 18 ans, notamment pour infraction au code vestimentaire.

34. Le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que soient abolis les châtiments corporels, notamment la flagellation et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, à l'égard des personnes qui auraient commis des infractions alors qu'elles étaient âgées de moins de 18 ans. Il recommande également à l'État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que les responsables de l'application des lois respectent et protègent la dignité humaine et qu'ils défendent et préservent les droits individuels de toutes les personnes dans le cadre de leur mission.


5. Milieu familial et protection de remplacement

Violence, sévices, négligence et mauvais traitements

35. Vu les articles 19 et 39 de la Convention, le Comité est préoccupé par la fréquence de la maltraitance d'enfants dans les écoles et au sein de la famille. Il note également avec inquiétude que la violence familiale est un problème en Arabie saoudite, et que cela a des effets néfastes sur les enfants.

36. Le Comité recommande à l'État partie de prendre des mesures législatives pour interdire toutes les formes de violence physique ou mentale contre les enfants, y compris les châtiments corporels et les sévices sexuels, dans la famille, à l'école, et dans les établissements de soins. Il recommande également à l'État partie d'accompagner ces mesures de campagnes destinées à sensibiliser la population aux conséquences préjudiciables des mauvais traitements infligés aux enfants, et d'encourager le recours à des formes de discipline positive et non violente en lieu et place des châtiments corporels. Il faut renforcer les programmes de réadaptation et de réinsertion des enfants victimes de violence. De plus, il est nécessaire de mettre en place des procédures et des mécanismes appropriés pour recevoir les plaintes, suivre les cas de maltraitance, procéder à des enquêtes et poursuivre les responsables, et veiller à ce que les enfants ne pâtissent pas des poursuites judiciaires. Le Comité recommande de former les enseignants, les responsables de l'application des lois, le personnel chargé de la protection des enfants, les juges et les professionnels de la santé afin qu'ils soient à même de déceler les cas de mauvais traitements, de les dénoncer et de les prendre en charge. En outre, l'État partie devrait recruter, former et employer des policières. Il conviendrait de se pencher sur la question des barrières socioculturelles qui dissuadent les victimes de demander une aide, en vue de les surmonter. Le Comité recommande à l'État partie de mettre en place des lignes de téléassistance et des structures d'accueil, gérées par un personnel féminin, en vue de protéger les femmes et les enfants exposés à des sévices, ou cherchant à y échapper. Il recommande à l'État partie de solliciter une assistance auprès de l'UNICEF et de l'OMS, notamment.


6. Soins de santé de base et bien-être

Droit à la santé et aux soins de santé

37. Tout en prenant note des progrès importants réalisés en vue de développer les soins de santé primaires et les services sanitaires spécialisés, le Comité est préoccupé par l'insuffisance des informations disponibles sur la santé des adolescents, par exemple en ce qui concerne l'accès aux services de santé génésique et d'orientation en matière de santé mentale.

38. Le Comité recommande à l'État partie d'entreprendre une étude approfondie qui aurait pour objet de comprendre la nature et l'étendue des problèmes de santé des adolescents et, avec la pleine participation d'adolescents, de s'en servir de base pour définir des politiques et programmes concernant la santé de l'adolescent. Eu égard à l'article 24, ll recommande que les adolescents puissent bénéficier d'une éducation en matière de santé de la reproduction, d'une aide psychopédagogique et de services de réadaptation adaptés aux besoins de l'enfant. Le Comité recommande à l'État partie de solliciter l'assistance de l'UNICEF et de l'OMS, notamment.


7. Éducation, loisirs et activités culturelles

Éducation

39. Tout en notant les efforts considérables déployés par l'État partie pour améliorer la scolarisation, le Comité demeure préoccupé par le fait que le système éducatif continue de privilégier l'apprentissage par pure mémorisation plutôt que le développement de l'esprit analytique. Il s'inquiète également de ce que les objectifs de l'éducation présentés dans le rapport ne reflètent pas pleinement les objectifs énoncés à l'article 29 de la Convention. En particulier le Comité est vivement préoccupé :

a) Par le fait que la politique de l'État partie en ce qui concerne l'éducation des filles (par exemple, les articles 9 et 153 de la directive sur l'éducation de 1969) établit des discriminations à l'encontre des filles et est incompatible avec l'alinéa a) de l'article 29 de la Convention, et

b) Par le fait que le développement et le respect des droits de l'homme, la tolérance et l'égalité entre les sexes et à l'égard des minorités religieuses et ethniques ne figurent pas expressément dans les programmes.

40. Le Comité recommande à l'État partie d'entreprendre, en y associant pleinement les enfants, une réforme des programmes et des méthodes pédagogiques qui mette l'accent sur l'importance du développement de l'esprit critique et des aptitudes à résoudre les problèmes. Compte tenu de l'article 2 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de tenir dûment compte des objectifs de l'éducation énoncés à l'article 29, d'orienter l'éducation vers l'épanouissement de la personnalité de l'enfant et le développement maximal de ses talents et de ses aptitudes mentales et physiques, et d'envisager de faire une place dans les programmes scolaires, y compris dans l'enseignement primaire, aux droits de l'homme, notamment à la Convention relative aux droits de l'enfant, afin de lutter contre la discrimination à l'égard des filles, en particulier. Le Comité encourage l'État partie à solliciter l'assistance de l'UNICEF et de l'UNESCO, notamment.


8. Mesures spéciales de protection

Administration de la justice pour mineurs

41. Le Comité est préoccupé par le fait que, l'âge de la majorité n'étant pas défini, et en l'absence d'un Code pénal et d'un Code de procédure pénale publiés, des mineurs de 18 ans peuvent être poursuivis pour infraction de la même manière que les adultes (c'est-à-dire sans bénéficier de procédures spéciales), et être passibles des mêmes peines que les adultes. Il craint également que l'absence de mécanisme indépendant et efficace de suivi et d'enregistrement des plaintes, qui soit compatible avec l'intérêt de l'enfant, et la difficulté d'accès à un conseil ne puissent exposer l'enfant à un risque d'arrestation et de détention arbitraires au regard du Règlement sur la détention et l'emprisonnement de 1977, et des Principes concernant l'arrestation, l'isolement temporaire et la détention provisoire de 1983. Il est préoccupé de ce que les mineures de 18 ans sont détenues avec des femmes adultes, en vertu des lois de 1975 sur les institutions d'aide sociale pour jeunes femmes.

42. Le Comité recommande à l'État partie de mettre en place un système de justice pour mineurs, en intégrant pleinement dans sa législation et sa pratique les dispositions de la Convention, en particulier les articles 37, 40 et 39, ainsi que les autres règles internationales applicables dans ce domaine, telles que les Règles de Beijing, les Principes directeurs de Riyad, les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale. Il recommande à l'État partie d'accélérer la promulgation d'un Code pénal et d'un Code de procédure pénale. Il conviendrait en particulier de veiller à ce qu'il ne soit recouru à la privation de liberté qu'en dernier ressort, à ce que les enfants aient accès à l'aide judiciaire et à des mécanismes indépendants et efficaces d'enregistrement de plaintes, et à ce que les mineurs de 18 ans ne soient pas détenus avec les adultes. Le Comité recommande à l'État partie de solliciter l'assistance, notamment, du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, du Centre pour la prévention de la criminalité internationale, du Réseau international de la justice pour mineurs et de l'UNICEF, par l'intermédiaire du Groupe de coordination de la justice pour mineurs.


9. Protocoles facultatifs

43. Le Comité encourage l'État partie à ratifier et à mettre en œuvre les protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant, d'une part, la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants et, d'autre part, l'implication d'enfants dans les conflits armés.

10. Diffusion des rapports

44. Enfin, eu égard au paragraphe 6 de l'article 44 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de diffuser largement le rapport initial et d'envisager de le publier avec les réponses écrites à la liste de questions soulevées par le Comité, les comptes rendus analytiques pertinents et les observations finales que le Comité a adoptées à l'issue de l'examen dudit rapport. Ce document devrait être largement diffusé afin de susciter des débats et de sensibiliser le Gouvernement, le Parlement et le grand public, y compris les organisations non gouvernementales concernées, à la Convention, à sa mise en œuvre et à son suivi.



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