University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Fédération de Russie, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.110 (1999).




COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT


Vingt­deuxième session


EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales : Fédération de Russie

1. Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de la Fédération de Russie (CRC/C/65/Add.5) à ses 564ème et 565ème séances (voir CRC/C/SR.564 et 565), tenues le 23 septembre 1999, et a adopté, à sa 586ème séance, tenue le 8 octobre 1999, les observations finales ci­après.


A. Introduction

2. Le Comité se félicite de la présentation du deuxième rapport périodique de l'État partie et prend note des réponses détaillées fournies par écrit à la liste des points à traiter (CRC/C/Q/RUS/2). Il note avec satisfaction la présence au Comité d'une délégation de l'État partie composée de représentants de haut rang, la franchise dont elle a fait preuve lors des débats et les efforts constructifs déployés pour fournir des renseignements supplémentaires au cours du dialogue.


B. Mesures de suivi adoptées par l'État partie et progrès réalisés

3. Le Comité prend note des efforts faits par l'État partie pour renforcer le cadre législatif de protection des droits de l'enfant en Fédération de Russie, et notamment les modifications apportées au Code de la famille, à la législation pénale et à la loi sur l'éducation, ainsi que l'adoption, en 1999, de la loi fédérale pour la prévention du délaissement d'enfant et de la délinquance juvénile et, en 1998, de la loi fédérale sur les garanties fondamentales des droits de l'enfant.

4. Le Comité se félicite de la désignation d'un Commissaire des droits de l'homme en 1997, de la création d'un Comité intersectoriel et de la nomination de commissaires des droits de l'enfant dans cinq régions et villes. Le Comité note avec satisfaction la ferme intention exprimée par la délégation de l'État partie pour ce qui est de créer un Commissariat fédéral des droits de l'enfant, conformément aux recommandations du Commissaire des droits de l'homme, des membres de la Douma et d'ONG nationales.


C. Principaux sujets de préoccupation, suggestions et recommandations


1. Mesures d'application générales

(art. 4, 42 et 44, par. 6 de la Convention)


Législation

5. Tout en notant les nombreuses lois qui ont été adoptées et modifiées ces dernières années, le Comité reste préoccupé par le fait que l'État partie n'ait que partiellement donné suite à la recommandation qu'il avait formulée en 1993 tendant à ce qu'il mette sa législation en pleine conformité avec les principes et dispositions de la Convention.

6. Le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures voulues pour accélérer le processus de réforme législative, s'agissant en particulier d'améliorer l'administration de la justice pour mineurs et la procédure pénale, la protection des droits des enfants handicapés, la protection des enfants contre l'abus d'alcool, de drogue et d'autres substances, la pornographie et toutes les formes de violence et de mauvais traitements, y compris au sein de la famille, et pour mettre en place des normes et mécanismes de suivi applicables aux divers types d'établissements accueillant des enfants.

7. Le Comité encourage l'État partie à achever le processus d'adoption des résolutions et directives nécessaires et à affecter les spécialistes et ressources financières requis pour l'application effective de toutes les lois se rapportant aux enfants.

Mécanismes de suivi indépendants

8. Tout en se félicitant de la désignation en 1997 du Commissaire des droits de l'homme et de l'exécution de projets pilotes visant à créer des postes de commissaire des droits de l'enfant dans quelques régions, le Comité demeure préoccupé par les pouvoirs et le statut restreints de ces organes et estime indispensable que l'État partie prévoie un mécanisme de suivi indépendant pour surveiller la mise en oeuvre de la Convention dans le pays.

9. Le Comité recommande à l'État partie d'envisager la création d'un poste de médiateur fédéral à l'enfance indépendant qui ait des relations bien définies avec des mécanismes analogues à l'échelon régional, lesquels auraient chacun un mandat clairement établi et bien adapté aux besoins, notamment la tâche de contrôler les structures de protection et de justice pour mineurs, et seraient dotés de suffisamment de pouvoirs et de ressources pour être efficaces.

Coordination

10. Le Comité est conscient des efforts faits par l'État partie en vue de créer un comité de coordination pour la mise en oeuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant, mais il demeure préoccupé par le manque de coordination entre les différentes entités fédérales s'occupant des questions concernant les enfants et par l'absence de tout organe de liaison globalement responsable des stratégies, politiques et activités relatives aux droits de l'enfant au sein de l'État partie. En outre, le Comité craint que la délégation des responsabilités et des tâches des autorités fédérales à leurs homologues régionales ne s'accompagne pas de garanties suffisantes pour empêcher des disparités dans la protection des droits de l'enfant.

11. Le Comité encourage l'État partie à renforcer les liens de coordination entre les différents organismes gouvernementaux chargés des droits de l'enfant tant au niveau fédéral qu'à l'échelle régionale et d'envisager de regrouper les différentes institutions sous la direction d'un ministère central. Il exhorte en outre l'État partie à s'assurer que la répartition des responsabilités entre l'État fédéral et les autorités régionales garantisse la meilleure protection possible des droits de l'enfant.

Questions budgétaires/situation financière/répartition des allocations de l'État/financement

12. Le Comité craint que la crise financière prolongée ait eu des incidences néfastes sur le développement des enfants ­ notamment une dégradation de leurs conditions de vie ­ ainsi que sur la mise en oeuvre des programmes d'investissement dans le secteur social et, partant, sur le respect des droits de l'enfant. En particulier, le Comité est très préoccupé par l'étendue de la pauvreté, l'affaiblissement des structures familiales, le nombre croissant d'enfants délaissés et sans abri et d'enfants travaillant et vivant dans les rues, le nombre élevé de suicides, l'ampleur de l'abus de drogue et d'alcool et la progression de la délinquance juvénile.

13. Le Comité est conscient des efforts consentis par l'État partie pour "axer" temporairement l'aide disponible sur les familles ayant les revenus les plus faibles mais il s'inquiète vivement du sort des familles et des enfants qui ne recevront pas d'assistance pendant cette période intérimaire. Le Comité constate aussi avec préoccupation que les prestations de l'État, notamment les allocations pour enfant, ne sont pas versées ou le sont en retard.

14. Eu égard aux articles 2, 3 et 4 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures requises, dans toutes les limites des ressources dont il dispose, afin d'assurer que les allocations budgétaires pour la santé, l'éducation et d'autres services sociaux destinés aux enfants, notamment les enfants appartenant à des groupes vulnérables et marginalisés, bénéficient de la protection voulue.

15. En outre, le Comité encourage l'État partie à rechercher de nouvelles solutions pour régler les problèmes budgétaires, tels que la réorientation des dépenses, le classement des programmes par ordre de priorité et l'augmentation de la part de l'aide internationale consacrée à la promotion de la mise en oeuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant par l'État partie.

16. Le Comité exhorte l'État partie à veiller à ce que toutes les prestations soient servies, à ce que l'utilisation des allocations spéciales soit contrôlée et à ce que les projets présidentiels composant le programme "Les enfants de la Russie" reçoivent tous un financement adéquat.

17. Le Comité recommande par ailleurs à l'État partie de revoir ses politiques en matière d'allocation budgétaire pour utiliser au mieux les ressources affectées à la protection des groupes les plus vulnérables, et de poursuivre la mise en oeuvre de la recommandation formulée par le Comité, en 1993, tendant à ce que l'État partie suive de près les effets de la crise économique sur le niveau de vie des enfants.

Participation des ONG

18. Le Comité note avec inquiétude que sa recommandation de 1993 concernant la nécessité d'encourager la participation des ONG à la mise en oeuvre de la Convention n'a été que partiellement suivie.

19. Le Comité encourage l'État partie à resserrer ses liens de coopération avec les ONG et à appuyer plus vigoureusement les efforts qu'elles déploient pour fournir une formation, diffuser des informations sur la Convention et en suivre la mise en oeuvre, notamment par un renforcement du partenariat dans le cadre de la procédure d'établissement de rapports ainsi que du contrôle des institutions de protection de l'enfance et des centres de détention pour mineurs.

Diffusion des principes et dispositions de la Convention

20. Le Comité estime que l'État partie devrait, conformément à ce qu'il avait exhorté à faire en 1993, déployer plus d'efforts pour continuer à faire connaître les principes et dispositions de la Convention.

21. Le Comité recommande à l'État partie de prendre des mesures supplémentaires pour faire connaître et diffuser les principes et dispositions de la Convention auprès de la population adulte, y compris les groupes de professionnels et les parents, ainsi que parmi les enfants.


2. Principes généraux

(art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)


Non­discrimination (art. 2)

22. Tout en se félicitant de l'adoption par l'État partie d'une législation interdisant toute discrimination, le Comité demeure préoccupé par l'aggravation des disparités entre les régions, s'agissant en particulier de l'extrême nord, et entre les enfants des villes et des campagnes, dans les domaines de la législation, des allocations budgétaires, des politiques et des programmes en matière de services de santé, d'éducation et autres services sociaux ainsi que par la situation des enfants nécessitant une protection spéciale.

23. Le Comité constate aussi avec inquiétude que les filles vivant dans les zones rurales sont défavorisées, en particulier en ce qui concerne l'accès à l'enseignement, la santé et la protection contre les sévices sexuels et l'exploitation.

24. En outre, le Comité juge préoccupantes les informations de caractère général faisant état d'une progression du racisme et de la xénophobie dans l'État partie.

25. Le Comité recommande à l'État partie d'intensifier son action pour réduire les disparités économiques, sociales et régionales et de prendre des mesures supplémentaires, conformément à sa recommandation de 1993, pour prévenir toute forme de discrimination à l'encontre d'enfants et toute différence de traitement, notamment vis­à­vis des enfants handicapés et des enfants appartenant à des minorités religieuses et ethniques.

Droit à la vie (art. 6)

26. S'agissant de l'article 6 de la Convention, le Comité s'inquiète de la menace que représente pour le droit à la vie de l'enfant la rapide augmentation des taux de suicides et des homicides parmi les enfants, notamment les garçons.

27. Le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures appropriées pour enrayer la récente progression des suicides et homicides parmi les enfants et pour encourager la prévention, notamment par le renforcement des mesures visant à accroître les interventions en cas de crise et l'aide préventive ainsi que les services de consultation pour les enfants, en particulier les adolescents, et les familles à risque.


3. Libertés et droits civils

(art. 7, 8, 13 à 17 et 37 a))


Protection contre la torture (art. 37 a))

28. Le Comité estime préoccupantes les allégations faisant état de nombreux cas de torture et de maltraitance ainsi que de pratiques assimilables à un traitement inhumain ou dégradant ­ y compris de châtiments corporels infligés par des responsables de l'application des lois ­ dont sont victimes des enfants placés en institution, surtout lorsqu'il s'agit de centres de détention ou de prisons.

29. Le Comité recommande à l'État partie de prendre les mesures voulues pour mettre fin à ces pratiques et empêcher qu'elles ne se produisent et pour mener les investigations nécessaires sur de tels actes et punir les coupables. Il approuve par ailleurs la mise en oeuvre des recommandations formulées par le Comité contre la torture et le Rapporteur spécial sur la question de la torture au sujet de ces préoccupations.

30. En outre, le Comité recommande à l'État partie de mettre fin à la pratique des châtiments corporels dans les établissements de détention et de surveiller de près la situation en la matière.


4. Milieu familial et protection de remplacement

(art. 5, 18 (par. 1 et 2), 9 à 11, 19 à 21, 25, 27 (par. 4) et 39 de la Convention)


Sévices/délaissement/mauvais traitements/violence (art. 19)

31. Le Comité constate avec satisfaction que l'État partie est de plus en plus conscient des risques inhérents à la violence au foyer, mais il juge inquiétant qu'il y ait encore des cas d'enfants qui continuent d'être victimes de mauvais traitement au sein de la famille et délaissés. Il est également préoccupé par l'ampleur du problème de la violence à l'encontre des femmes et ses incidences sur les enfants.

32. Le Comité recommande à l'État partie d'accorder une attention particulière au problème des mauvais traitements, du délaissement et des sévices, notamment sexuels, dont sont victimes des enfants tant au sein de la famille que dans la société en général.

33. Le Comité souligne la nécessité d'organiser des campagnes d'information et d'éducation pour prévenir le recours à toute forme de violence physique ou mentale à l'encontre d'enfants et lutter contre ces pratiques, conformément à l'article 19 de la Convention.

34. Le Comité suggère également que des études approfondies soient entreprises sur ces questions pour faciliter l'élaboration de politiques et programmes, y compris des programmes de soins et de réadaptation.

35. En outre, compte tenu de la recommandation qui figure au paragraphe 21 de ses observations finales de 1993 (CRC/C/15/Add.4), le Comité encourage l'État partie à favoriser l'adoption de procédures de plainte, d'enquête et d'établissement des faits respectueuses de l'enfant en cas de violence et de mauvais traitements, et de renforcer les procédures d'enquête sur les infractions commises ainsi que les mesures visant à poursuivre et sanctionner les auteurs de telles infractions.

Examen périodique des placements (art. 25)

36. Le Comité est vivement préoccupé par les politiques et pratiques en vigueur en matière de placement en institution, par le nombre extrêmement élevé d'enfants placés dans des institutions et par les conditions de vie dans ces dernières. Dans l'optique de l'article 25 de la Convention, le Comité s'inquiète aussi de constater que l'examen périodique des placements n'est pas systématiquement effectué et que les recommandations qu'il avait formulées en 1993 à cet égard n'ont pas été entièrement appliquées.

37. Se référant au paragraphe 19 de ses observations finales de 1993 (CRC/C/15/Add.4), le Comité recommande à l'État partie de s'efforcer de formuler une politique nationale visant à diminuer les placements en institution, de recourir davantage à des solutions de remplacement et d'envisager des mesures pour renforcer les services sociaux axés sur la communauté.

38. Dans cette perspective, le Comité encourage l'État partie à prendre des mesures concrètes pour assurer aux familles dont les enfants risquent d'être délaissés ou maltraités, une aide et des services d'éducation et d'orientation de manière à empêcher que des actes de violence ne soient commis et que des enfants ne soient enlevés à leurs parents. Le Comité recommande aussi de développer les systèmes d'adoption et de placement familial pour éviter le recours au placement en institution.

39. Le Comité recommande par ailleurs l'adoption de procédures qui permettent d'assurer l'examen périodique de tous les types de placement. Eu égard au paragraphe 3 de l'article 3 de la Convention, le Comité recommande en outre à l'État partie de procéder à une réforme, y compris sur le plan juridique, du système d'institutions de placement en élaborant des normes pour ce qui est des conditions dans les institutions et pour leur inspection régulière, et, notamment en renforçant le rôle et les pouvoirs des mécanismes d'inspection indépendants, qui auraient le droit d'effectuer des visites d'inspection sans préavis dans les familles d'accueil et les établissements publics. À cet égard, le Comité exhorte l'État partie à solliciter une aide technique, notamment auprès du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Enfants handicapés (art. 23)

40. Le Comité est préoccupé par la situation des enfants handicapés, en particulier ceux qui souffrent d'une déficience mentale et ceux qui vivent dans des institutions. Le Comité juge, en particulier, inquiétants le système et les méthodes de dépistage actuels, les conditions des enfants handicapés placés dans des institutions, l'insuffisance de l'aide spécialisée pour le développement, le traitement et la réadaptation des enfants souffrant d'incapacités et la lenteur de l'intégration des enfants handicapés dans l'enseignement classique.

41. Le Comité encourage l'État partie à poursuivre les efforts entrepris pour améliorer le dépistage précoce des incapacités mentales ou physiques et pour éviter, dans la mesure du possible, que des enfants handicapés soient placés en institution. Il recommande le renforcement des services de traitement spécialisé ainsi que du soutien et des conseils fournis aux familles pour permettre aux enfants de vivre chez eux et faciliter leur intégration sociale.

42. Le Comité encourage l'État partie à redoubler d'efforts pour tirer parti de la coopération internationale, conformément au paragraphe 4 de l'article 23 de la Convention, de façon à améliorer les politiques d'intégration des enfants handicapés.

Adoption à l'étranger (art. 21)

43. Le Comité craint qu'il n'y ait pas suffisamment de garanties contre le transfert illicite et la traite des enfants en dehors de l'État partie et contre le risque de recours à l'adoption à l'étranger à des fins de traite et, notamment, d'exploitation économique et sexuelle.

44. Le Comité encourage l'État partie à envisager sérieusement de ratifier la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants. Il se félicite des informations indiquant que l'État partie examine la possibilité de ratifier la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale et l'exhorte à accélérer la procédure d'adhésion à la Convention. Dans l'optique de l'article 21 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de redoubler d'efforts pour mettre en place des procédures en matière d'adoption internationale afin de protéger l'intérêt supérieur de l'enfant.


5. Santé et bien­être

(art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26 et 27, par. 1 à 3 de la Convention)


Droit à la santé (art. 24)

45. Le Comité note avec satisfaction les efforts entrepris par l'État partie dans le domaine de la santé de base et de la protection sociale, en particulier pour améliorer les services de santé maternelle et réduire les taux de mortalité infantile. Il se félicite également de l'application par l'État partie de la recommandation qu'il lui avait adressée en 1993 au sujet des programmes de vaccination. Le Comité reste préoccupé par la persistance d'un taux de mortalité infantile élevé et par la détérioration de l'infrastructure et des services de santé. En outre, la progression des maladies parasitaires, infectieuses et respiratoires (tuberculose, en particulier) est très préoccupante, de même que l'accroissement de la malnutrition et le faible pourcentage d'enfants bénéficiant d'un allaitement maternel.

46. Le Comité recommande à l'État partie d'envisager de demander une assistance technique pour pouvoir continuer ses efforts en vue d'inverser le processus de détérioration des soins de santé primaires. En particulier, il exhorte l'État partie à poursuivre l'action entreprise pour enrayer la propagation de la tuberculose et des autres maladies, réduire le recours à l'avortement comme moyen de contraception et promouvoir l'allaitement maternel.

47. Le Comité juge préoccupant le manque d'information sur les campagnes de prévention du VIH/sida et des maladies sexuellement transmissibles (MST) et sur le pourcentage des personnes infectées.

48. Le Comité recommande à l'État partie d'oeuvrer pour garantir l'efficacité des mesures prises pour assurer l'accès des adolescents à l'éducation sexuelle, notamment à des informations sur la contraception et les MST ainsi que de l'action de promotion de la santé des adolescents par un renforcement des services de santé en matière de reproduction et de planification familiale et des services de consultation et des dispositions prises pour prévenir et combattre le VIH/sida, les MST et le phénomène des grossesses et avortements chez les adolescentes.


6. Éducation, loisirs et activités culturelles

(art. 28, 29 et 31 de la Convention)


Droit à l'éducation (art. 28 et 29)

49. Le Comité note les efforts consentis par l'État partie dans le domaine de l'éducation, en particulier l'adoption d'une nouvelle loi sur l'éducation visant à assurer d'une manière continue un enseignement de base gratuit et obligatoire et à améliorer l'accès à l'enseignement secondaire gratuit. À cet égard, le Comité demeure préoccupé par la progression des taux d'abandon scolaire, la diminution des taux d'inscription dans les écoles professionnelles et techniques ­ surtout parmi les filles ­ et la détérioration de l'infrastructure scolaire et des conditions d'emploi des enseignants, notamment les bas salaires et retards de paiement.

50. Le Comité encourage l'État partie à recueillir des renseignements sur les taux d'abandon scolaire et les causes de ce phénomène, et sur la situation des enfants renvoyés de l'école pour des raisons disciplinaires. Il exhorte en outre l'État partie à poursuivre ses efforts pour mettre le système éducatif à l'abri des incidences de la crise économique et en particulier à accorder une plus grande attention aux conditions d'emploi des enseignants. Le Comité encourage l'État partie à inscrire l'enseignement des droits de l'homme, y compris les droits de l'enfant, dans les programmes scolaires, en tant que matière distincte.

Accès aux services médicaux et aux différents services sociaux

51. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les administrations municipales de certaines villes continuent d'empêcher les parents et leurs enfants d'avoir accès aux services médicaux et éducatifs et à différents services sociaux lorsqu'ils ne sont pas résidents, bien que cette pratique soit interdite par la loi. Cela porte particulièrement préjudice aux enfants déplacés à l'intérieur du pays, aux migrants et aux demandeurs d'asile ainsi qu'aux enfants travaillant et vivant dans les rues.

52. Le Comité exhorte l'État partie à mettre fin à cette pratique discriminatoire à l'encontre des enfants sans permis de résidence, entre autres, en organisant des activités de formation et d'information à l'intention des autorités locales et des fonctionnaires chargés de l'application des lois.


7. Mesures spéciales de protection de l'enfance

(art. 22, 38 à 40, 37 b) à d) et 32 à 36 de la Convention)


Enfants réfugiés (art. 22)

53. Le Comité juge préoccupantes la façon dont sont traités les demandeurs d'asile et la pratique consistant à refuser aux enfants et à leur famille, en particulier lorsqu'ils ne sont pas originaires de territoires de l'ex­Union soviétique, le droit de présenter une demande d'asile.

54. Le Comité encourage l'État partie à garantir une protection juridique appropriée aux enfants réfugiés, y compris l'accès aux services de santé et éducatifs et à différents services sociaux.

55. Le Comité recommande à l'État partie d'entreprendre une étude des procédures, politiques et pratiques concernant le droit de déposer une demande d'asile, en particulier au nom d'enfants non accompagnés.

Enfants touchés par des conflits armés et mesures à prendre pour leur réadaptation (art. 38 et 39)

56. Le Comité juge préoccupant le non­respect des droits des enfants dans les régions de l'État partie en proie à des conflits armés, comme la Tchétchénie et le Daghestan. Il s'inquiète, en particulier, de la participation d'enfants aux conflits armés, des violations des dispositions du droit international humanitaire ainsi que du nombre d'enfants déplacés à l'intérieur du pays et de la situation dans laquelle ils se trouvent. Le Comité est par ailleurs préoccupé par le fait que les tribunaux tchétchènes appliquent la peine capitale et certains types de châtiment corporel, dont la mutilation, à des enfants. En outre, le Comité juge préoccupantes les informations faisant état d'exécutions sommaires, de disparitions involontaires, de mesures de détention arbitraire, d'actes de torture et de mauvais traitements dont seraient victimes des enfants dans la région.

57. Le Comité encourage l'État partie à veiller à ce que les enfants et autres civils soient protégés en période de conflit et à ce qu'un soutien et une aide à la réadaptation, notamment une assistance psychologique, soient fournis aux enfants déplacés à l'intérieur du pays et aux enfants vivant dans des régions touchées par des conflits armés.

Travail des enfants (art. 32)

58. Le Comité demeure préoccupé par le fait que le travail des enfants et leur exploitation économique soient de plus en plus répandus dans l'État partie. En outre, il s'inquiète du nombre élevé d'enfants travaillant et/ou vivant dans les rues, qui nécessitent une attention particulière, étant plus exposés à la délinquance juvénile, à l'abus d'alcool et de drogue ainsi qu'à l'exploitation sexuelle, notamment par des organisations criminelles.

59. Le Comité encourage l'État partie à veiller tout particulièrement à la pleine application des lois sur le travail, en particulier dans le secteur "informel", de façon à protéger les enfants de l'exploitation économique et sexuelle, notamment par le biais de la prostitution. Le Comité recommande à l'État partie d'entreprendre des recherches sur la question des enfants vivant et/ou travaillant dans les rues en vue d'améliorer les politiques, pratiques et programmes les concernant.

60. Enfin, le Comité recommande à l'État partie d'envisager de demander une aide technique à l'IPEC­OIT pour l'élaboration d'une politique globale en vue de prévenir et de combattre le problème de plus en plus répandu du travail des enfants, de redoubler d'efforts pour mettre en oeuvre les dispositions de la Convention No 138 de l'OIT concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi (1973) et d'étudier la possibilité de ratifier la Convention No 182 de l'OIT concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination (1999).

Abus de drogues et d'autres substances (art. 33)

61. Le Comité juge préoccupante la progression de la consommation d'alcool, de drogue et d'autres substances parmi les enfants et leurs familles.

62. Le Comité recommande à l'État partie de consentir des efforts supplémentaires pour prévenir l'abus d'alcool chez les enfants et empêcher leur participation à la distribution et à la consommation de drogue. Il recommande en outre que d'autres mesures soient prises pour assurer des services adéquats de traitement, de réadaptation et de soutien aux enfants et aux familles en proie à un problème d'abus d'alcool, de drogue et d'autres substances.

Exploitation sexuelle et violence sexuelle (art. 34)

63. Le Comité considère préoccupant le fait que les lois, les politiques et les programmes visant à protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle à des fins commerciales, la violence sexuelle et la pornographie soient insuffisants.

64. Se référant à la recommandation qu'il avait formulée au paragraphe 24 de ses observations finales de 1993 (CRC/C/15/Add.4), le Comité suggère à l'État partie de réaliser une étude approfondie sur l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, les sévices sexuels à enfant et l'utilisation des enfants pour la pornographie. Il recommande aussi que des mesures législatives supplémentaires soient prises et que les services soient renforcés pour améliorer la protection des enfants contre l'exploitation et la violence sexuelle et pour garantir les services de traitement et de réadaptation requis aux enfants victimes de ces pratiques. Le Comité encourage par ailleurs l'État partie à persévérer dans les efforts qu'il déploie pour faire face au problème de l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, à tenir compte des recommandations formulées dans le Programme d'action adopté lors du Congrès mondial contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales tenu à Stockholm en 1996.

Enfants appartenant à une minorité ou à un groupe autochtone (art. 30)

65. Tout en prenant note de la loi fédérale de 1996 sur l'autonomie culturelle nationale et des programmes destinés à aider les minorités, le Comité demeure préoccupé par les conditions de vie des minorités ethniques, en particulier dans le nord, et leur accès insuffisant aux services de santé et éducatifs ainsi qu'aux différents services sociaux. Il considère également préoccupante la montée de la discrimination sociale à l'encontre des enfants appartenant à des minorités ethniques.

66. Le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les enfants des minorités contre la discrimination et leur garantir un plein accès aux services éducatifs et de santé ainsi qu'aux différents services sociaux.

Administration de la justice pour mineurs (art. 37, 40 et 39)

67. La justice pour mineurs demeure un sujet de vive préoccupation pour le Comité, eu égard notamment au fait que l'État partie n'a pas pleinement appliqué la recommandation formulée par ce dernier en 1993 dans l'optique de la mise en place d'un système de justice pour mineurs et, notamment, de l'adoption d'une loi sur la justice pour mineurs et de la création de tribunaux pour mineurs.

68. Le Comité tient à exprimer son inquiétude au sujet des informations faisant état de brutalités et de tortures infligées par la police à des détenus mineurs durant la procédure d'enquête sur les délits dont ils étaient accusés et du fait que la durée de la détention provisoire des mineurs soit laissée à la discrétion du procureur. Le Comité juge également très préoccupants le traitement des jeunes délinquants placés dans des centres d'éducation surveillée, des lieux de détention provisoire ou des établissements d'éducation spéciale ainsi que les mauvaises conditions dans les centres de détention et les prisons en général.

69. Compte tenu des recommandations qu'il avait formulées aux paragraphes 22 et 23 de ses observations finales de 1993 (CRC/C/15/Add.4), des articles 37, 40 et 39 de la Convention ainsi que de l'Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), des Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad) et des Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, le Comité recommande à l'État partie de prendre des mesures concrètes en vue de procéder dès que possible à la réforme prévue du système de justice pour mineurs, et notamment d'adopter une législation complète sur la justice pour mineurs, de mettre en place des tribunaux pour mineurs où siégeraient des juges spécialisés dans la justice pour mineurs et de modifier le Code de procédure pénale de manière à transférer le pouvoir d'ordonner l'arrestation de mineurs, qui est actuellement détenu par le procureur, aux tribunaux pour mineurs, à limiter la durée de la détention provisoire et à accélérer la procédure judiciaire, ainsi que de former les responsables de l'application des lois et le personnel judiciaire aux droits de l'enfant et au rôle de la justice pour mineurs qui est axé sur la réadaptation, conformément aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

70. Le Comité invite instamment l'État partie à ne recourir à la privation de liberté dans le cadre de l'administration de la justice pour mineurs qu'en tant que mesure "de dernier ressort", comme l'exige la Convention. À cette fin, le Comité engage l'État partie à faire davantage appel à des solutions de remplacement, à dégager les ressources nécessaires pour l'application de ces solutions et à restructurer les établissements d'éducation surveillée pour mineurs en vue d'améliorer la réadaptation des jeunes délinquants.

71. Le Comité invite également instamment l'État partie à prendre sans tarder des mesures pour protéger les droits des enfants privés de leur liberté, en leur fournissant une aide juridique et en améliorant les conditions dans les lieux de détention, notamment dans les centres de détention provisoire et dans les établissements d'éducation surveillée. En outre, le Comité recommande la mise en place d'une procédure de plainte indépendante respectueuse de l'enfant, en coopération avec les ONG, l'examen rapide des violations des droits constatées et l'exécution de programmes destinés à faciliter la réadaptation et la réinsertion dans la société des jeunes remis en liberté.

72. Le Comité recommande à l'État partie de faire appel à la coopération et à l'assistance technique internationales en matière de justice pour mineurs, notamment à celle du Centre des Nations Unies pour la prévention internationale du crime, du Haut­Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, de l'UNICEF et du Réseau international sur la justice pour mineurs, par le biais du groupe de coordination des Nations Unies dans le domaine de la justice pour mineurs.

Diffusion des rapports

73. Enfin, eu égard au paragraphe 6 de l'article 44 de la Convention, le Comité recommande que le deuxième rapport périodique et les réponses écrites de l'État partie soient largement diffusés auprès du public, en même temps que le compte rendu analytique des réunions correspondantes et les observations finales adoptées par le Comité. Cela devrait susciter un débat et une prise de conscience de la Convention et du degré d'application de cette dernière, en particulier au sein du Gouvernement, des ministères compétents, du Parlement et des organisations non gouvernementales.



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