University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Mongolie, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.48 (1996).


COMITE DES DROITS DE L'ENFANT

Onzième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION


Observations finales du Comité des droits de l'enfant : Mongolie


1. Le Comité a examiné le rapport initial de la Mongolie (CRC/C/3/Add.32) à ses 264ème, 265ème et 266ème séances (CRC/C/SR.264 à 266), les 10 et 11 janvier 1996, et a adopté ** A la 289ème séance, le 26 janvier 1996. les observations finales ci-après.


A. Introduction

2. Le Comité remercie le Gouvernement mongol de son rapport initial, des réponses écrites adressées aux questions figurant dans la liste des points à traiter (CRC/C/11/WP.2) et du dialogue constructif et fructueux qui a eu lieu. Il est encouragé par la franchise et l'esprit de coopération qui ont marqué la discussion, au cours de laquelle les représentants de l'Etat partie ont évoqué non seulement des orientations de la politique et des programmes, mais aussi des difficultés rencontrées au cours de l'application de la Convention.

B. Aspects positifs

3. Le Comité note avec satisfaction que le gouvernement a fait une place prioritaire à l'enfance dans son ordre du jour politique, à une époque difficile de transition politique et économique, et que dans cet esprit il a organisé plusieurs rencontres de haut niveau, telles que le Sommet national sur la protection et le développement des enfants (1995), il a proclamé 1995 "Année des enfants" et 1996 "Année de l'éducation", et il a affecté 20 % du budget national à l'éducation.

4. Le Comité se félicite de ce que l'Etat partie ait manifesté l'intention de demander des conseils et une assistance technique en vue d'assurer la pleine application des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant dans la législation et dans le domaine de l'administration de la justice des mineurs.

5. Le Comité note l'action engagée par le gouvernement en matière de réforme législative, en particulier l'adoption d'une nouvelle Constitution, d'une nouvelle loi sur l'éducation, et l'élaboration en cours d'une législation concernant les droits de l'enfant.

6. Le Comité se félicite également de la mise en place de mécanismes chargés des questions concernant l'enfance et les droits de l'enfant, en particulier le Centre national pour l'enfance et le Conseil national pour l'enfance.

7. Le Comité est encouragé par la volonté du gouvernement de diffuser la Convention relative aux droits de l'enfant dans la société mongole et de faire connaître, par l'intermédiaire des médias et en particulier de la télévision, toutes les activités qui s'y rapportent.

C. Facteurs et difficultés entravant la mise en oeuvre de la Convention

8. Le Comité note les difficultés rencontrées par la Mongolie dans la période actuelle de transition politique et de transformation sociale ainsi que de crise économique profonde. La situation de nombreux enfants a empiré par suite d'une pauvreté croissante et de l'augmentation du chômage. Le Comité note également les particularités géographiques et climatiques de l'Etat partie qui peuvent, dans une certaine mesure, influer sur la vie quotidienne des enfants.

D. Principaux sujets de préoccupation

9. Le Comité s'inquiète des répercussions, pour les enfants, de la situation économique difficile que traverse le pays. A cet égard, il se demande en particulier si des mesures appropriées ont bien été prises pour protéger les enfants, notamment ceux qui appartiennent aux groupes les plus vulnérables, eu égard aux articles 3 et 4 de la Convention.

10. Le Comité est préoccupé par le fait qu'il ne soit pas accordé suffisamment d'attention à la nécessité de mettre en place un mécanisme de coordination efficace entre les ministères ainsi qu'entre les autorités centrales et les autorités locales, pour la mise en oeuvre de politiques de promotion et de protection des droits de l'enfant.

11. Le Comité est aussi préoccupé par le fait qu'il ne soit pas accordé suffisamment d'attention à la nécessité d'établir un système de collecte de données systématique et complet, d'arrêter des indicateurs appropriés et de créer des mécanismes de surveillance pour tous les domaines visés par la Convention, en particulier les phénomènes les moins visibles tels que les violences ou mauvais traitements dont sont victimes des enfants, et ce, en ce qui concerne tous les enfants, y compris les enfants appartenant à des groupes minoritaires, les enfants nomades, ceux qui n'ont qu'un seul parent, les enfants des zones rurales, les enfants placés en institution, les handicapés et ceux qui vivent ou travaillent dans la rue.

12. Le Comité est préoccupé par le fait que l'Etat partie n'ait pas encore tenu entièrement compte dans sa législation des principes généraux de la Convention : article 2 (non-discrimination), article 3 (intérêt supérieur de l'enfant), article 6 (droit à la vie, à la survie et au développement) et article 12 (respect des opinions de l'enfant).

13. Le Comité s'inquiète de l'insuffisance des mesures prises pour assurer l'enregistrement des enfants à la naissance ainsi que du risque que des enfants vivant dans des régions reculées ne soient pas enregistrés et, en conséquence, soient privés de leurs droits fondamentaux.

14. Le Comité est préoccupé par l'absence de législation applicable à l'adoption internationale.

15. Le Comité est préoccupé par le taux élevé d'abandons scolaires, en particulier parmi les garçons des zones rurales, ainsi que par l'augmentation du travail des enfants qui lui a été signalée. Il estime également préoccupantes les difficultés que rencontrent les enfants des zones rurales et des régions reculées, ainsi que les enfants handicapés, pour accéder aux services essentiels tels que les soins de santé, les services sociaux et l'enseignement.

16. Le Comité est préoccupé de constater que les mesures voulues n'ont pas encore été prises pour empêcher et combattre efficacement les mauvais traitements que subissent les enfants dans le cadre familial, et s'inquiète également de l'insuffisance des informations à ce sujet. Le problème de l'exploitation sexuelle des enfants doit aussi faire l'objet d'une attention particulière.

17. La situation en ce qui concerne l'administration de la justice des mineurs et notamment la question de sa compatibilité avec les articles 37 et 40 de la Convention ainsi qu'avec d'autres normes applicables telles que les Règles de Beijing, les Principes directeurs de Riyad et les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, donnent matière à préoccupation.

E. Suggestions et recommandations

18. Le Comité recommande à l'Etat partie de prendre des mesures plus poussées pour renforcer la coordination entre les différents mécanismes gouvernementaux qui s'occupent des droits de l'homme et des droits de l'enfant, aux niveaux central et local, ainsi que pour assurer une coopération plus étroite avec les organisations non gouvernementales.

19. Le Comité recommande en outre à l'Etat partie d'entreprendre de rassembler toutes les données nécessaires sur la situation des enfants en s'attachant aux différents aspects visés par la Convention, sans oublier les enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables. Il émet également l'avis qu'il faudrait mettre en place un système de surveillance pluridisciplinaire pour évaluer les progrès réalisés et les difficultés rencontrées dans la concrétisation des droits reconnus par la Convention aux niveaux central et local, et en particulier pour surveiller de façon régulière les incidences des mutations économiques sur les enfants. Ce système de surveillance devrait permettre à l'Etat partie de formuler les politiques appropriées et de lutter contre les disparités sociales et les préjugés traditionnels constatés. Le Comité encourage également l'Etat partie à envisager la mise en place d'un mécanisme indépendant, tel que l'institution d'un médiateur.

20. Le Comité est d'avis que de plus grands efforts sont nécessaires pour faire en sorte que les dispositions et les principes de la Convention soient largement diffusés auprès des enfants et des adultes, et bien compris par les uns et les autres, compte tenu de l'article 42 de la Convention. Il voudrait encourager l'Etat partie à pousser plus avant la réflexion systématique sur la manière de sensibiliser davantage la population aux droits des enfants relatifs à la participation, eu égard à l'article 12 de la Convention.

21. Le Comité recommande que des programmes de formation sur les droits de l'enfant soient périodiquement organisés pour les catégories professionnelles qui travaillent avec les enfants ou pour les enfants, y compris les enseignants, les responsables de l'application de la loi, les travailleurs sociaux et les juges, et que les questions concernant les droits de l'homme et les droits de l'enfant figurent dans les programmes de formation qui leur sont destinés.

22. Il faudrait donner la priorité à l'enregistrement des naissances, afin que tous les enfants sans exception soient reconnus comme des personnes et jouissent pleinement de leurs droits. Le Comité encourage l'adoption de nouvelles mesures visant à assurer l'enregistrement des naissances, y compris la création de bureaux d'état civil itinérants.

23. A la lumière de l'article 2 de la Convention, le Comité recommande également à l'Etat partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre l'abandon scolaire chez les garçons des zones rurales et pour renforcer l'accès des enfants aux services de base (santé, éducation et protection sociale) dans les zones rurales, et l'accès des enfants handicapés à ces services dans le pays tout entier.

24. Le Comité recommande que, dans le cadre de sa réforme législative, le gouvernement tienne pleinement compte des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant et spécialement des principes généraux énoncés dans cet instrument (art. 2, 3, 6 et 12).

25. En ce qui concerne l'adoption internationale, le Comité est d'avis que l'Etat partie devrait dès que possible élaborer et adopter une législation réglementant ce fait de société. L'Etat partie est également encouragé à ratifier la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale.

26. Afin d'accroître la protection des enfants réfugiés, le Comité recommande à l'Etat partie de ratifier la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

27. Le Comité encourage le Gouvernement mongol à accorder une attention particulière à l'application intégrale de l'article 4 de la Convention et à veiller à une répartition judicieuse des ressources aux niveaux central et local. Il faut décider des affectations budgétaires destinées à concrétiser les droits économiques, sociaux et culturels dans toutes les limites des ressources disponibles et sans perdre de vue l'intérêt supérieur de l'enfant.

28. A la lumière de l'article 19 de la Convention, le Comité recommande en outre au gouvernement de prendre toutes les mesures appropriées, y compris sur le plan législatif, pour combattre la pratique des mauvais traitements dans le cadre familial et des violences sexuelles dirigées contre des enfants. Il propose, entre autres choses, que les autorités rassemblent des données et entreprennent une étude complète en vue de mieux comprendre la nature et l'ampleur du problème, et qu'elles adoptent des programmes sociaux en vue d'empêcher les violences de toute sorte dont sont victimes des enfants.

29. Dans le domaine de l'administration de la justice des mineurs, le Comité recommande des réformes législatives tenant pleinement compte de la Convention relative aux droits de l'enfant, en particulier des articles 37, 39 et 40, ainsi que d'autres normes internationales applicables, telles que les Règles de Beijing, les Principes directeurs de Riyad et les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté. Il y a lieu d'accorder une attention particulière à la prévention de la délinquance des jeunes, à la protection des droits des enfants privés de liberté, au respect des principes fondamentaux et des garanties légales dans tous les aspects de la justice des mineurs, ainsi qu'à l'indépendance et à l'impartialité absolues des juges pour enfants.

30. Dans le cadre des programmes d'assistance en cours du Centre pour les droits de l'homme et du Service de la prévention du crime et de la justice pénale, il y aurait lieu d'entreprendre une réforme législative dans le domaine des droits de l'enfant et d'organiser la formation des personnes qui, par profession, travaillent avec des enfants. Il y aurait lieu d'accorder une attention particulière aux programmes de formation concernant les normes internationales pertinentes, en particulier pour les juges, les responsables de l'application de la loi, le personnel des services de rééducation et les travailleurs sociaux. Le gouvernement est encouragé à envisager de demander expressément une assistance à cette fin au Centre pour les droits de l'homme et au Service de la prévention du crime et de la justice pénale. Le Comité émet également l'avis que le gouvernement devrait envisager de demander une assistance technique à d'autres organismes compétents, y compris l'Organisation internationale du Travail, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance et l'Organisation mondiale de la santé. Il engage aussi la communauté internationale à fournir une assistance et des conseils techniques à l'Etat partie pour appuyer les efforts que déploie actuellement ce dernier.

31. Le Comité encourage l'Etat partie à assurer une large diffusion au rapport que ce dernier lui a adressé, des comptes rendus analytiques des séances consacrées à l'examen de ce rapport et des observations finales adoptées par le Comité à la suite de l'examen du même rapport. Il suggère que ces documents soient portés à l'attention du Parlement, dans l'espoir qu'il sera donné suite aux suggestions et recommandations concrètes qui y sont formulées. A cet égard, le Comité préconise le renforcement de la coopération avec les organisations non gouvernementales.



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