University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Mexique, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.112 (1999).



COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT

Vingt­deuxième session



EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité des droits de l'enfant


MEXIQUE

1. Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Mexique (CRC/C/65/Add.6) et l'additif à ce rapport (CRC/C/65/Add.16) à ses 568ème et 569ème séances (voir CRC/C/SR.568 et 569), tenues le 27 septembre 1999, et a adopté À sa 586ème séance, tenue le 8 octobre 1999. les observations finales suivantes.


A. Introduction

2. Tout en se félicitant de la présentation du deuxième rapport périodique du Mexique, le Comité regrette que ses directives n'aient pas été suivies pour l'élaboration de celui­ci. Il remercie la délégation mexicaine de l'additif au rapport ainsi que des nombreux renseignements qu'elle lui a fournis oralement. Il prend note avec satisfaction des réponses écrites aux questions posées dans la liste des points à traiter (CRC/C/Q/MEX/2), tout en regrettant que ces dernières lui aient été présentées tardivement. Il juge particulièrement encourageante la déclaration de la délégation selon laquelle la Convention guide l'action du Gouvernement mexicain dans le domaine des droits de l'enfant. Il se félicite par ailleurs du dialogue constructif et ouvert qu'il a entretenu avec la délégation mexicaine.


B. Mesures de suivi mises en oeuvre et progrès réalisés
par l'État partie

3. Des initiatives telles que le Programme national d'action en faveur de l'enfance (1995­2000), le Plan de développement national (1995­2000) et le Programme pour l'éducation, la santé et la nutrition (PROGRESA) constituent des mesures positives conformes aux recommandations du Comité (voir CRC/C/15/Add.13, par. 16). À cet égard, le Comité se félicite du fait que le Mexique, qui était l'un des six pays organisateurs du Sommet mondial pour les enfants, tenu en 1990, ait pris des mesures pour organiser en collaboration avec les cinq autres pays une série de réunions visant à évaluer les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs fixés par les États à cette occasion.

4. Compte tenu de sa recommandation (CRC/C/15/Add.13, par. 19), le Comité se félicite des multiples mesures prises par l'État partie, notamment par la Commission nationale des droits de l'homme (CNDH) et le Système national pour le développement intégral de la famille (DIF), en vue de faire mieux connaître les principes et dispositions de la Convention. À cet égard, il se félicite également de la tenue des élections fédérales des enfants en 1997 qui illustre le principe du respect de l'opinion de l'enfant (art. 12 de la Convention).

5. Le Comité note avec satisfaction l'adhésion de l'État partie à la Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l'élimination de la violence contre la femme (Convention de Belém do Pará) et du processus de réforme législative visant à faire de la violence dans la famille une infraction pénale au regard des lois nationales. Il considère que ces mesures constituent une contribution positive à la lutte contre la discrimination à l'égard des femmes et les mauvais traitements infligés aux enfants, conformément à sa recommandation (CRC/C/15/Add.13, par. 18).

6. Le Comité se félicite de l'adhésion de l'État partie en 1994 à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale de 1993, conformément à sa recommandation (CRC/C/15/Add.13, par. 18), ainsi que de son adhésion en 1999 à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

7. Le Comité se félicite en outre de la mise en oeuvre du Programme réciproque pour le versement des pensions alimentaires (URESA/RURESA) signé par l'État partie et les États­Unis d'Amérique, qui, étant donné le fort taux d'émigration de ressortissants mexicains vers ce pays, revêt une importance particulière.

8. Le Comité se réjouit par ailleurs des mesures prises par l'État partie pour lutter contre l'abus de drogues chez les enfants, notamment de l'accord signé avec l'UNICEF et le Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID) en vue de prévenir et combattre l'abus de drogues chez des enfants.


C. Facteurs et difficultés entravant la mise en oeuvre
de la Convention

9. Le Comité note que la pauvreté généralisée et les disparités économiques et sociales de longue date continuent d'affliger les groupes les plus vulnérables, dont les enfants, et de faire obstacle à l'exercice des droits de l'enfant au Mexique. Il note également que cette situation a empiré sous l'effet de graves crises et de réformes économiques radicales.


D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations du Comité


1. Mesures d'application générales

10. Tout en notant les mesures prises par l'État partie en vue d'appliquer la recommandation concernant la nécessité d'harmoniser la législation nationale avec la Convention (CRC/C/15/Add.13, par. 15), notamment dans le cadre de l'adoption du Code pour la protection de l'enfance, le Comité reste préoccupé par le fait que les lois en vigueur en matière de droits de l'enfant, tant au niveau fédéral qu'au niveau des États, ne reflètent toujours pas les principes et dispositions de la Convention et que les mesures prises en vue d'harmoniser la législation nationale semblent fragmentées et ne tiennent pas compte de la dimension holistique de la Convention. Le Comité recommande à nouveau que l'État partie poursuive ses réformes législatives en vue de s'assurer que la législation interne en matière de droits de l'enfant, tant au niveau fédéral qu'au niveau des États, soit pleinement conforme aux principes et dispositions de la Convention et reflète son caractère holistique.

11. Le Comité se félicite de la nomination de 32 procureurs pour la défense des droits du mineur et de la famille dans les États et prend note des propositions visant à promulguer une loi d'ensemble définissant le rôle et les pouvoirs de leurs bureaux. Il constate toutefois avec préoccupation que ces derniers ne disposent que de pouvoirs et de ressources financières et humaines limités pour oeuvrer efficacement à la défense des droits de l'enfant. Le Comité recommande que l'État partie poursuive ses efforts, notamment par le biais de mesures législatives, en vue de renforcer le mandat et l'indépendance des bureaux des procureurs pour la défense des droits du mineur et de la famille tant au niveau fédéral qu'au niveau des États, et d'accroître leurs ressources financières et humaines.

12. Compte tenu de la recommandation qu'il a faite (CRC/C/15/Add.13, par. 15), le Comité se félicite des mesures prises par le Ministère de la santé et le DIF en vue de coordonner et de suivre la mise en oeuvre du Plan national d'action (1995­2000) et prend note de la création du Système national de suivi de la mise en oeuvre de la Convention (1998). Il reste toutefois préoccupé par le fait que ce système ne soit opérationnel que dans sept États mexicains. À cet égard, il recommande que l'État partie continue de prendre des mesures effectives en vue d'accélérer la création de commissions dans le cadre du Système national de suivi de la Convention au niveau fédéral et au niveau des États en vue de garantir la mise en oeuvre de celle­ci. Il encourage en outre l'État partie à continuer de collaborer étroitement avec les organisations non gouvernementales travaillant dans le domaine des droits de l'enfant. Il recommande par ailleurs de favoriser la participation de ces organisations à la conception et à la mise en oeuvre des politiques et programmes du Système national.

13. Tout en prenant note des statistiques sur la situation des enfants contenues dans l'additif au rapport de l'État partie, notamment de celles qui ont été élaborées pour le suivi du Plan national d'action en faveur de l'enfance (1995­2000), le Comité reste préoccupé par l'absence de données désagrégées sur tous les domaines visés par la Convention. Il recommande à l'État partie de continuer d'examiner et de mettre à jour son système de collecte de données de façon à ce qu'il englobe tous les domaines visés par la Convention. En outre, il encourage l'État partie à utiliser les informations qui résulteront de son prochain recensement de la population (2000) pour établir des données désagrégées sur les droits de l'enfant. Ce système devrait couvrir tous les enfants de moins de 18 ans et mettre spécialement l'accent sur la situation des groupes d'enfants vulnérables, afin de permettre l'évaluation des progrès accomplis dans la réalisation des droits des enfants et de faciliter l'élaboration de politiques visant à améliorer la mise en oeuvre des dispositions de la Convention. À cet égard, le Comité encourage l'État partie à demander une assistance technique, notamment à l'UNICEF.

14. En ce qui concerne la formation des professionnels travaillant avec et pour les enfants (voir la recommandation énoncée au paragraphe 19 du document CRC/C/15/Add.13), le Comité se félicite des mesures prises dans ce domaine, notamment par la CNDH et le DIF. Il encourage l'État partie à poursuivre la mise en oeuvre de programmes systématiques d'éducation et de formation relatifs aux dispositions de la Convention à l'intention des parlementaires et de tous les groupes professionnels travaillant pour et avec les enfants, tels que les juges, les avocats, les responsables de l'application des lois, les fonctionnaires, les travailleurs municipaux, le personnel des établissements et des centres de détention pour enfants, les enseignants, le personnel des services de santé, y compris les psychologues, et les travailleurs sociaux. Une assistance technique pourrait être demandée à cet égard, notamment au Haut­Commissariat aux droits de l'homme et à l'UNICEF.

15. Compte tenu de la recommandation qu'il a faite (CRC/C/15/Add.13, par. 16), le Comité se félicite des mesures prises par l'État partie en vue d'élaborer et de mettre en oeuvre des politiques et programmes sociaux en faveur des enfants. Il reste toutefois préoccupé par la pauvreté et les inégalités sociales et régionales qui continuent de toucher un grand nombre d'enfants ainsi que leurs familles, en dépit de l'action du gouvernement dans ce domaine. Le Comité recommande à nouveau (voir CRC/C/15/Add.13, par. 16) aux autorités d'agir "dans toutes les limites des ressources dont elles disposent", à la lumière des articles 2, 3 et 4 de la Convention. Il recommande en outre à l'État partie de veiller en priorité à ce que des crédits budgétaires suffisants soient alloués aux services sociaux destinés aux enfants et que la protection des enfants appartenant aux groupes vulnérables et marginalisés fasse l'objet d'une attention particulière.


2. Définition de l'enfant

16. Le Comité se déclare préoccupé par la précocité de l'âge minimum légal du mariage, qui est de 16 ans pour les garçons et 14 ans pour les filles dans la plupart des États du Mexique, et par le fait que cet âge ne soit pas le même pour les deux sexes. Cette situation est contraire aux principes et dispositions de la Convention et constitue une forme de discrimination fondée sur le sexe qui entrave l'exercice de tous les droits. Le Comité recommande à l'État partie de réexaminer sa législation, tant au niveau fédéral qu'au niveau des États, en vue de relever et d'harmoniser l'âge minimum légal du mariage pour les garçons et pour les filles.


3. Principes généraux

17. Le Comité se félicite de l'information fournie par l'État partie au sujet du référendum public national sur les droits de l'enfant et prend note du processus de réforme constitutionnelle entamé à la suite de ce référendum; ces deux initiatives sont dans le droit fil de sa recommandation (CRC/C/15/Add.13, par. 15 et 16). À cet égard, le Comité encourage l'État partie à poursuivre son action dans le but d'incorporer à la Constitution les principes de la non­discrimination et de l'intérêt supérieur de l'enfant (art. 2 et 3 de la Convention).

18. Tout en prenant acte des mesures prises par l'État partie en vue d'appliquer la recommandation concernant la protection des droits des groupes d'enfants les plus vulnérables (CRC/C/15/Add.13, par. 18), notamment celles mises en oeuvre par le PROGRESA, le DIF, l'Institut national des autochtones (INI) et CONMUJER, le Comité considère que ces mesures doivent être renforcées. Il réitère sa recommandation et suggère en outre à l'État partie de renforcer les mesures visant à réduire les disparités économiques et sociales, notamment entre les zones urbaines et rurales, et à empêcher la discrimination à l'égard des groupes d'enfants les plus défavorisés, comme les filles, les enfants handicapés, les enfants appartenant à des groupes autochtones et ethniques, les enfants vivant et/ou travaillant dans la rue et les enfants des zones rurales.

19. Le Comité prend note des dispositions prises sur le plan législatif en vue d'incorporer les principes de l'"intérêt supérieur de l'enfant" (art. 3) et du "respect de l'opinion de l'enfant" (art. 12) dans la législation interne, tant au niveau des États qu'au niveau fédéral. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que ces principes ne sont pas pleinement appliqués. Il recommande que de nouvelles mesures soient prises en vue d'assurer la mise en oeuvre des principes de l'"intérêt supérieur de l'enfant" et du "respect de l'opinion de l'enfant", en particulier du droit de l'enfant à faire entendre sa voix au sein de la famille, à l'école et dans d'autres institutions sociales. Ces principes devraient également être pris en compte dans toutes les politiques et tous les programmes concernant les enfants. Il faudrait renforcer les activités de sensibilisation de la population en général, y compris des responsables locaux, ainsi que les programmes éducatifs relatifs à la mise en oeuvre de ces principes afin de modifier l'attitude traditionnelle à l'égard des enfants, qui sont trop souvent considérés comme des objets (Doctrina de la Situación Irregular) plutôt que des sujets de droit.

20. Compte tenu de l'article 6 et des dispositions connexes de la Convention, le Comité se déclare préoccupé par les menaces qui pèsent sur le droit des enfants à la vie du fait de la militarisation du pays et des affrontements avec des "groupes civils armés irréguliers" dans certaines régions, notamment dans les États du Chiapas, d'Oaxaca, de Guerrero et de Veracruz. Le Comité recommande que l'État partie prenne des mesures effectives en vue de protéger les enfants contre les effets négatifs de ces affrontements. Il recommande également l'adoption de mesures pour la réadaptation des enfants victimes.


4. Liberté et droits civils

21. Bien que l'État partie ait progressé de façon appréciable dans le domaine de l'enregistrement des naissances, le Comité estime qu'il devrait redoubler d'efforts pour s'assurer que toutes les naissances sont enregistrées, notamment celles des enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables. Le Comité recommande à l'État partie de renforcer les mesures visant à garantir l'enregistrement immédiat de la naissance de chaque enfant, notamment dans les zones rurales et isolées et au sein des groupes autochtones.

22. Le Comité considère que les mesures prises par l'État partie en vue de promouvoir le droit des enfants à la participation doivent être améliorées et renforcées. Compte tenu des articles 12, 13, 14 et 15 de la Convention, le Comité recommande que de nouvelles mesures soient prises en vue de promouvoir la participation des enfants au sein de la famille, de l'école et d'autres institutions sociales et de garantir l'exercice effectif de leurs libertés fondamentales, notamment les libertés d'opinion, d'expression et d'association.

23. Bien que le Comité note avec satisfaction les mesures prises par l'État partie en vue d'appliquer sa recommandation (CRC/C/15/Add.13, par. 17), il demeure préoccupé par le nombre persistant de cas présumés d'enfants ayant été détenus dans des conditions extrêmes assimilables à des traitements cruels, inhumains ou dégradants et d'enfants victimes de sévices infligés par des membres de la police ou des forces armées. Le Comité recommande à l'État partie de renforcer ses mécanismes judiciaires pour que les plaintes relatives aux brutalités, aux mauvais traitements et aux sévices infligés aux enfants par la police puissent être examinées efficacement et que les cas de violences commises sur des enfants puissent faire l'objet d'enquêtes appropriées afin d'empêcher que leurs auteurs restent impunis. À cet égard, il approuve les recommandations formulées par le Comité contre la torture en mai 1997 (A/52/44, par. 166 à 170).


5. Milieu familial et protection de remplacement

24. Tout en se félicitant des mesures prises par l'État partie en vue d'appliquer la recommandation qu'il a faite (CRC/C/15/Add.13, par. 18), le Comité reste préoccupé par l'insuffisance des mesures visant à apporter une protection de remplacement aux enfants privés de milieu familial. Le Comité recommande à l'État partie de continuer à prendre les mesures nécessaires pour mettre en place des dispositifs autres que le placement d'enfants en établissement (comme l'adoption dans le pays et le placement en famille d'accueil). Il lui recommande en outre de renforcer son système de surveillance et d'évaluation afin de garantir l'épanouissement des enfants vivant en établissement. Le Comité encourage l'État partie à continuer de prendre des mesures pour assurer l'examen périodique du placement et du traitement des enfants, comme le prévoit l'article 25 de la Convention.

25. En dépit de l'adoption du Programme national de lutte contre la violence dans la famille pour 1999­2000 (PRONAVI), le Comité demeure préoccupé par le fait que, comme le reconnaît l'État partie dans son rapport, les violences physiques et sexuelles dans la famille et en dehors de celle­ci constituent un problème sérieux au Mexique. Il se déclare également préoccupé par le fait que la législation interne, tant au niveau fédéral qu'au niveau des États, n'interdise pas explicitement le recours aux châtiments corporels dans les écoles. Compte tenu notamment des articles 19 et 39 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de poursuivre son action, notamment par la mise en place de programmes pluridisciplinaires de traitement et de réadaptation, en vue de prévenir et de combattre les sévices et les mauvais traitements infligés aux enfants au sein de la famille, à l'école et dans la société en général. Il suggère de renforcer l'application des lois relatives à de tels crimes, de mettre en place des procédures et mécanismes appropriés permettant d'examiner efficacement les plaintes d'enfants victimes de mauvais traitements afin que ceux­ci puissent avoir rapidement accès à la justice, et d'interdire explicitement dans la législation les châtiments corporels dans la famille, à l'école et dans d'autres institutions. En outre, des programmes éducatifs devraient être mis en place pour lutter contre les comportements sociaux traditionnels dans ce domaine. Le Comité encourage l'État partie à faire appel à la coopération internationale à cet effet, notamment en demandant l'aide de l'UNICEF et des organisations non gouvernementales internationales.


6. Santé et bien­être

26. En ce qui concerne l'amélioration des normes de santé applicables aux enfants, notamment la réduction de la mortalité infantile, le Comité reste préoccupé par la persistance de disparités régionales en matière d'accès aux soins ainsi que par les taux élevés de malnutrition chez les enfants de moins de cinq ans et les enfants d'âge scolaire, notamment dans les zones rurales et isolées et parmi les groupes autochtones. Le Comité recommande à l'État partie de continuer à prendre des mesures appropriées pour favoriser l'accès de tous les enfants aux soins et aux services de santé de base. Il est nécessaire de mener davantage d'actions concertées en vue de garantir l'égalité d'accès aux soins et de lutter contre la malnutrition, en accordant une attention particulière aux enfants appartenant aux groupes autochtones et à ceux vivant dans les zones rurales et isolées.

27. Tout en se félicitant des mesures et des programmes mis en oeuvre par l'État partie dans le domaine de la santé des adolescents, notamment du Programme national de prévention pour les mères adolescentes et du Conseil national de prévention et de lutte contre le sida (CONASIDA), le Comité demeure préoccupé par le taux élevé de mortalité liée à la maternité chez les adolescentes et le nombre élevé de grossesses précoces. Le Comité recommande à l'État partie de continuer à lutter contre la propagation du VIH/sida et de prendre en considération les recommandations adoptées par le Comité à l'issue de la journée de débat général sur "les enfant vivant dans un monde marqué par le VIH/SIDA" (CRC/C/80). Il lui recommande également de prendre de nouvelles mesures en vue de mettre en place des services de consultation adaptés à la situation des enfants et des centres de soins et de réadaptation pour les adolescents.


7. Éducation, loisirs et activités culturelles

28. S'il note avec satisfaction les réalisations de l'État partie dans le domaine de l'éducation, le Comité reste préoccupé par les taux élevés d'abandon et de redoublement dans le primaire et le secondaire et par les disparités existant entre les zones rurales et urbaines en matière d'accès à l'enseignement. Il s'inquiète particulièrement de la situation des enfants appartenant aux groupes autochtones sur le plan de l'accès à l'enseignement et de l'inadéquation des programmes scolaires bilingues qui leur sont actuellement proposés. Compte tenu des articles 28 et 29 et des autres articles pertinents de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de poursuivre son action dans le domaine de l'éducation en renforçant ses politiques et son système éducatif afin de réduire les disparités régionales en matière d'accès à l'enseignement et de consolider les programmes favorisant le maintien dans le système scolaire ainsi que les activités de formation professionnelle à l'intention des élèves ayant abandonné leurs études. Il lui recommande en outre de continuer à prendre des mesures concrètes en vue d'améliorer la situation des enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables sur le plan éducatif, en accordant une attention particulière aux programmes bilingues destinés aux enfants des groupes autochtones. Il encourage l'État partie à demander une assistance technique dans ce domaine, notamment à l'UNICEF et à l'UNESCO.


8. Mesures spéciales de protection

29. Bien qu'il soit conscient des mesures prises par l'État partie, notamment par l'INI, le Comité demeure préoccupé par les conditions de vie des enfants appartenant aux groupes autochtones, notamment pour ce qui est de la pleine jouissance de tous les droits consacrés par la Convention. Compte tenu des articles 2 et 30 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les enfants appartenant à des groupes autochtones contre la discrimination et pour leur garantir la jouissance de tous les droits reconnus dans la Convention.

30. Tout en se félicitant du fait que la législation de l'État partie soit conforme aux normes internationales du travail et que des mesures aient été prises en vue d'éliminer le travail des enfants, le Comité constate avec préoccupation que l'exploitation économique reste l'un des principaux problèmes touchant les enfants mexicains. Il s'inquiète notamment du fait que seuls les "enfants des rues" aient été classés comme "enfants qui travaillent" dans le deuxième rapport périodique de l'État partie. Il considère que cette méprise donne une idée erronée de l'ampleur du phénomène social et fausse la manière dont il est perçu. À cet égard, il se déclare particulièrement préoccupé par le fait qu'un grand nombre d'enfants continuent de travailler, notamment dans le secteur informel et dans l'agriculture, ainsi que par l'insuffisance des mesures d'application des lois et l'absence de mécanismes de surveillance appropriés. Compte tenu notamment des articles 3 et 32 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de revoir sa position sur la question du travail des enfants. La situation des enfants effectuant des travaux dangereux, en particulier dans le secteur informel, mérite une attention particulière. Le Comité recommande également que la législation sur le travail des enfants soit appliquée, que les services d'inspection du travail soient renforcés et que des sanctions soient imposées en cas de violation. Il recommande en outre à l'État partie d'envisager de demander une assistance technique dans le cadre du Programme international pour l'abolition du travail des enfants (IPEC) de l'Organisation internationale du Travail (OIT). Il encourage l'État partie à envisager de ratifier la Convention de l'OIT (No 138) concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi (1973) et la nouvelle Convention de l'OIT (No 182) concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination (1999).

31. Compte tenu de l'évaluation et des recommandations formulées par la Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants (voir E/CN.4/1998/101/Add.2) concernant la situation des enfants victimes d'exploitation sexuelle au Mexique, le Comité se félicite des mesures prises par l'État partie pour lutter contre ce phénomène, notamment de la création de la Commission interinstitutionnelle chargée d'éliminer l'exploitation sexuelle des enfants. À cet égard, et compte tenu de l'article 34 et d'autres articles pertinents de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour appliquer les recommandations faites par la Rapporteuse spéciale à l'issue de sa visite au Mexique. Il lui recommande en particulier d'entreprendre une étude sur la question de l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales en vue d'élaborer et de mettre en oeuvre des politiques et des mesures appropriées, notamment en matière de soins et de réadaptation; de renforcer sa législation nationale, y compris les sanctions à l'encontre des auteurs, et de mener des campagnes de sensibilisation à cette question.

32. Tout en prenant note des mesures adoptées par l'État partie concernant les "enfants rapatriés" (menores fronterizos), le Comité demeure particulièrement préoccupé par le fait qu'un très grand nombre de ces enfants sont victimes de réseaux de trafiquants, qui les exploitent à des fins sexuelles ou économiques. Il se déclare également préoccupé par le nombre croissant de cas de trafic et de vente d'enfants qui sont amenés dans l'État partie depuis les pays voisins pour y être livrés à la prostitution. À cet égard, le Comité recommande à l'État partie de continuer à prendre d'urgence des mesures concrètes en vue de protéger les enfants mexicains migrants, de renforcer l'application des lois et de mettre en oeuvre son programme national de prévention. Dans l'optique d'une lutte efficace contre le trafic et la vente d'enfants au niveau international, le Comité suggère à l'État partie de redoubler d'efforts dans le domaine des accords bilatéraux et régionaux avec les pays voisins afin de faciliter le rapatriement des enfants victimes de ce trafic et de favoriser leur réadaptation. Il approuve par ailleurs les recommandations formulées par la Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants (voir E/CN.4/1998/101/Add.2) concernant la situation des enfants vivant dans les zones frontalières.

33. En ce qui concerne le fonctionnement du système de justice pour mineurs, le Comité reste préoccupé par les faits suivants :

a) La législation fédérale et celle des États ne sont pas totalement conformes aux principes et dispositions de la Convention, s'agissant notamment de l'âge précoce de responsabilité pénale;

b) La privation de liberté n'est pas toujours utilisée uniquement en dernier recours;

c) Les enfants sont souvent détenus avec les adultes dans les postes de police;

d) Les procédures sont longues;

e) Les conditions dans les centres de détention sont très mauvaises;

f) L'accès des mineurs à l'assistance juridique est insuffisant;

g) Les mesures de réadaptation des délinquants juvéniles sont insuffisantes;

h) Les centres de détention font l'objet d'une surveillance et d'un contrôle insuffisants;

i) Le personnel qualifié travaillant dans les centres de détention est peu nombreux.

Compte tenu des articles 37, 40 et 39 de la Convention et des autres normes pertinentes dans ce domaine, comme les Règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyadh) et les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté, le Comité recommande à l'État partie :

a) De mettre en place un véritable système de justice pour mineurs conformément aux dispositions de la Convention et aux autres normes internationales pertinentes;

b) De veiller à l'amélioration des conditions de vie des enfants dans les prisons et les centres de détention;

c) De créer des centres pour la réadaptation des enfants en conflit avec la loi;

d) D'interdire l'usage de la violence aux agents de la force publique;

e) De veiller à ce que la privation de liberté ne soit utilisée qu'en dernier recours;

f) De garantir aux enfants en détention provisoire un accès rapide à la justice;

g) De mettre au point des mesures propres à remplacer la privation de liberté;

h) De renforcer ses programmes de formation aux normes internationales pertinentes à l'intention des juges, des spécialistes et du personnel travaillant dans le domaine de la justice pour mineurs.

Le Comité suggère par ailleurs à l'État partie de songer à demander une assistance technique, notamment au Haut­Commissariat aux droits de l'homme, au Centre de prévention de la criminalité internationale, à l'UNICEF et au Réseau international en matière de justice pour mineurs, par l'intermédiaire du Groupe de coordination de la justice pour mineurs.

34. Enfin, conformément au paragraphe 6 de l'article 44 de la Convention, le Comité recommande que l'État partie assure à son rapport périodique et à ses réponses écrites une large diffusion auprès de la population en général et qu'il envisage de publier le rapport, les comptes rendus analytiques des séances pertinentes et les observations finales adoptées par le Comité. Un tel document devrait être largement diffusé pour susciter des débats et faire connaître la Convention, sa mise en oeuvre et son suivi auprès des pouvoirs publics, du Parlement et de la population en général, y compris des organisations non gouvernementales.



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