University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Érythrée, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.204 (2003).



                                                                                                         
                                                                                                         


COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Trente‑troisième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales: Érythrée

1.       Le Comité a examiné le rapport initial de l’Érythrée (CRC/C/41/Add.12) à ses 865e et 866e séances (CRC/C/SR.865 et 866), tenues le 20 mai 2003, et a adopté les observations finales ci‑après à la 889e séance (CRC/C/SR.889), tenue le 6 juin 2003.

A.  Introduction

2.       Le Comité se félicite de la présentation du rapport initial, complet et bien rédigé, de l’État partie, ainsi que des réponses écrites détaillées à sa liste des points à traiter (CRC/C/Q/ERI/1) qui lui ont permis de se faire une meilleure idée de la situation des enfants dans l’État partie. Il est également reconnaissant à l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau et a apprécié le dialogue franc qui s’est engagé et des réactions positives aux suggestions et recommandations qui ont été présentées au cours du débat.

B.  Aspects positifs

3.       Le Comité se félicite des efforts entrepris par l’État partie après l’accession à l’indépendance en 1993, et qui ont permis:

          a)       De réduire la mortalité infantile de plus de 50 % et d’amener la portée vaccinale de 10 à 60 %;

          b)      D’élever le taux de scolarisation et d’alphabétisation et d’introduire la langue maternelle dans les écoles primaires en tant que langue d’enseignement;

          c)       De concevoir des programmes visant à améliorer l’accès des filles à l’éducation, notamment grâce à la participation à l’Initiative pour l’éducation des filles en Afrique;

          d)      D’élaborer une stratégie et des programmes visant à lutter contre les mutilations génitales féminines;

          e)       D’offrir des soins de substitution aux enfants qui se sont retrouvés orphelins à la suite des conflits armés, tout en évitant le placement en institution.

4.       Le Comité se félicite du fait que l’État partie a adhéré à la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction en 2001 et qu’il a ratifié, en 2000, la Convention de l’OIT concernant l’âge minimum de 1973 (Convention no 138).

C.  Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

5.       Le Comité reconnaît que les suites des conflits armés ajoutés à la sécheresse qui sévit actuellement, à la pauvreté et aux programmes d’ajustement structurel, empêchent l’État partie de mette en œuvre intégralement les dispositions de la Convention.

D.  Principaux sujets de préoccupation, suggestions et recommandations

1.  Mesures d’application générales

Législation

6.       Le Comité se félicite de la création du Comité chargé de la législation relative à l’enfance qui a pour mission d’examiner la compatibilité de la législation nationale et de la Convention, et relève que la nouvelle Constitution est généralement conforme aux principes et dispositions de la Convention. Il est néanmoins préoccupé par le fait que, pour une large part, le droit coutumier et les traditions, parfois même les lois récemment adoptées et les codes transitoires qui sont encore en vigueur, ne reflètent pas entièrement les principes et dispositions de la Convention.

7.       Le Comité recommande à l’État partie de procéder à la révision de la législation transitoire et des lois coutumières et locales et d’adopter toutes les mesures nécessaires pour les rendre conformes aux principes et dispositions de la Convention. Il recommande aussi à l’État partie de veiller à ce que la législation soit effectivement mise en œuvre.

Coordination et plans d’action nationaux

8.       Le Comité se félicite de l’adoption du Programme d’action national en faveur des enfants pour la période 1996‑2000 et 2002‑2006 et de la création du Comité national sur les droits de l’enfant chargé de coordonner les activités relatives à la mise en œuvre de la Convention. Il est néanmoins préoccupé de voir que ce mécanisme n’est pas doté des ressources suffisantes pour s’acquitter de son mandat.

9.       Le Comité recommande à l’État partie de renforcer le Comité national sur les droits de l’enfant et de lui donner en particulier davantage de moyens pour coordonner les activités entreprises à l’échelon national et local. Il y a lieu de doter le mécanisme de coordination et le Programme d’action national en faveur des enfants de ressources financières et humaines suffisantes; l’État partie devrait si nécessaire tenter d’obtenir une aide internationale à cet effet.

Suivi indépendant

10.     Le Comité est préoccupé par l’absence de mécanisme indépendant chargé de suivre la mise en œuvre de la Convention et d’en évaluer les progrès à intervalles réguliers, habilité à recevoir des plaintes de particuliers et à y donner suite.

11.     Le Comité, compte tenu de son Observation générale no 2 concernant le rôle des institutions nationales de défense des droits de l’homme, invite l’État partie à poursuivre ses efforts visant à créer un mécanisme indépendant et efficace conformément aux Principes de Partis, doté de ressources humaines et financières suffisantes et d’accès facile pour les enfants, qui surveille la mise en œuvre de la Convention, examine les plaintes émanant d’enfants, rapidement et dans le respect de la sensibilité de l’enfant, et offre des voies de recours en cas de violation des droits reconnus aux enfants dans la Convention.

Ressources en faveur de l’enfance

12.     Bien que les investissements destinés à financer la mise en place d’une infrastructure de services sociaux aient augmenté à la suite de l’accord de paix, le Comité constate avec préoccupation que les crédits budgétaires et l’aide internationale au développement sont insuffisants pour faire face aux besoins prioritaires en matière de défense et de protection des droits des enfants, à l’échelon national et local.

13.     Le Comité recommande à l’État partie de s’attacher tout particulièrement à mettre en œuvre intégralement l’article 4 de la Convention en accordant la priorité, dans son budget, à la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels des enfants, en particulier ceux qui appartiennent aux groupes économiques défavorisés «dans toutes les limites … des ressources dont ils disposent et, si nécessaire, dans le cadre de la coopération internationale». Le Comité invite en outre l’État partie et les donateurs internationaux à renouer le dialogue, notamment pour ce qui touche aux programmes visant à la mise en œuvre des droits de l’enfant.

Rassemblement de données

14.     Le Comité déplore que le rapport de l’État partie ne contienne pas de données statistiques complètes et à jour.

15.     Le Comité recommande à l’État partie de mettre au point un système de rassemblement de données recouvrant tous les domaines visés par la Convention et de faire en sorte que toutes les données et indicateurs soient utilisés pour l’élaboration, la surveillance et l’évaluation des politiques, programmes et projets visant à la mise en œuvre effective de la Convention. L’État partie devrait envisager de faire appel à l’assistance technique de l’UNICEF, entre autres.

Coopération avec la société civile

16.     Le Comité se félicite de l’importance attachée par les autorités nationales aux droits de l’enfant ainsi que de la coopération entre le Gouvernement et les organisations de la société civile à l’échelle nationale à cet égard. Il est préoccupé en revanche de voir que la coopération de l’État partie avec les organisations de la société civile à l’échelle internationale est très réduite depuis 1997.

17.     Le Comité souligne le rôle important de la société civile, qui doit être associée à la mise en œuvre des dispositions de la Convention, et recommande à l’État partie d’encourager une coopération plus étroite avec les ONG et d’envisager de faire appel de manière plus systématique à la participation des ONG internationales, notamment celles qui ont vocation à défendre les droits de l’homme, et d’autres secteurs de la société civile qui travaillent auprès des enfants et en faveur des enfants, à tous les stades de la mise en œuvre de la Convention.

2.  Définition de l’enfant

18.     Le Comité se félicite de ce que, dans le Code civil transitoire comme dans le projet de code civil, les enfants soient définis comme les jeunes âgés de moins de 18 ans et que la Constitution dispose que les hommes et les femmes ayant atteint la majorité légale ont le droit, en donnant leur accord, de se marier et de fonder une famille librement. Il est cependant préoccupé de voir que l’âge minimum au mariage n’est pas le même en droit coutumier, et qu’en fait beaucoup d’enfants sont mariés entre 13 et 15 ans.

19.     Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place des programmes de sensibilisation impliquant la communauté et les chefs traditionnels et religieux et la société dans son ensemble, y compris les enfants, afin de mettre en œuvre la législation et d’enrayer la pratique des mariages précoces.

3.  Principes généraux

Discrimination

20.     Le Comité constate avec préoccupation que, comme l’a relevé l’État partie, la discrimination persiste dans la société à l’égard de groupes vulnérables d’enfants parmi lesquels les filles, les enfants handicapés, les orphelins du sida et les enfants nés hors mariage.

21.     Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts afin de veiller à la mise en œuvre des lois en vigueur qui garantissent le principe de la non‑discrimination et du plein respect de l’article 2 de la Convention et d’adopter une stratégie préventive et complète en vue d’éliminer la discrimination, quel qu’en soit le motif, ainsi que celle qui s’exerce à l’encontre des groupes vulnérables.

22.     Le Comité demande que le prochain rapport périodique contienne des renseignements précis sur les mesures et programmes en relation avec la Convention relative aux droits de l’enfant entrepris par l’État partie pour donner effet à la Déclaration et au Programme d’action adoptés en 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme et la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, compte tenu de l’Observation générale no 1 sur le paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention (buts de l’éducation).

Intérêt supérieur de l’enfant

23.     Le Comité constate avec préoccupation que, dans les mesures concernant les enfants, le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant consacré à l’article 3 de la Convention, n’est pas toujours la considération déterminante, notamment en droit coutumier.

24.     Le Comité recommande à l’État partie de réviser la législation et les mesures administratives afin de veiller à ce qu’elles tiennent dûment compte des dispositions de l’article 3 de la Convention et que ce principe soit pris en considération dans les décisions prises en matière administrative, politique, judiciaire ou autres. Il recommande en outre à l’État partie de collaborer avec les autorités locales, les ONG et les chefs communautaires, pour lancer des campagnes d’information afin de faire connaître le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Respect de l’opinion de l’enfant

25.     Le Comité constate avec préoccupation que le Code civil transitoire garantit uniquement aux enfants à partir de 15 ans le droit d’être entendu et que les pratiques et attitudes traditionnelles empêchent toujours la pleine mise en œuvre de l’article 12 de la Convention, en particulier en ce qui concerne les filles.

26.     Le Comité recommande à l’État partie de modifier la législation afin qu’elle reflète pleinement l’article 12 de la Convention et que chaque enfant «qui est capable de discernement» puisse exprimer librement son opinion, y compris dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant. Il recommande également à l’État partie de lancer une campagne nationale en vue de sensibiliser le public au droit des enfants à la participation, en particulier au niveau local et dans les communautés traditionnelles, et d’encourager le respect de l’opinion de l’enfant dans la famille et à l’école, et dans le système de protection et le système administratif et judiciaire.

4.  Droits et libertés civils

Enregistrement des naissances

27.     Le Comité se dit préoccupé du fait que, bien que les parents soient tenus en vertu de la loi d’enregistrer leurs enfants à la naissance, beaucoup d’enfants ne le sont pas.

28.     Le Comité invite instamment l’État partie, en application de l’article 7 de la Convention, à intensifier ses efforts afin de veiller à ce que tous les enfants soient enregistrés à la naissance, en supprimant les coûts administratifs à la charge des parents, en organisant des campagnes de sensibilisation et en créant des unités mobiles d’enregistrement dans les régions rurales. Il recommande également à l’État partie de prendre des mesures analogues pour enregistrer tous les enfants qui ne l’ont pas été à la naissance. L’État partie devrait envisager à cet égard à faire appel à l’assistance technique de l’UNICEF, du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et d’autres donateurs potentiels.

Liberté d’expression et de religion

29.     Le Comité, sachant que la Constitution de l’État partie garantit le droit à la liberté d’expression et de religion, est préoccupé par ce qui lui a été rapporté au sujet des mesures ayant des incidences pour les enfants et les jeunes, prises à l’encontre d’étudiants et de groupes religieux, qui lui ont été rapportées, et qui montrent que ces droits n’ont pas été pleinement respectés.

30.     Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que ces droits soient pleinement respectés à l’égard de tous les enfants, comme le veut la Convention, et de prévenir toute violation de la liberté d’expression et de religion.

Violence, y compris les mauvais traitements

31.     Le Comité est préoccupé par l’absence de données concernant les mauvais traitements infligés aux enfants, sévices et châtiments corporels notamment. Il constate également avec préoccupation que les châtiments corporels ne sont pas expressément interdits par la loi et qu’ils sont largement répandus dans la famille et dans les institutions.

32.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De créer un mécanisme destiné à rassembler des données sur les victimes et les auteurs de sévices, ventilées par sexe et par âge, afin d’évaluer dûment l’étendue du problème et d’élaborer des politiques et programmes en vue d’y faire face;

          b)      D’organiser des campagnes d’éducation du public sur les conséquences négatives des mauvais traitements infligés aux enfants et, en collaboration avec les chefs communautaires et d’autres personnes, de préconiser des formes de discipline constructives et non violentes plutôt que des châtiments corporels;

          c)       D’interdire expressément dans la loi les châtiments corporels, dans la famille, à l’école et dans d’autres institutions;

          d)      De mettre en place des procédures et mécanismes efficaces chargés de recevoir les plaintes de sévices et d’y donner suite et d’ouvrir des enquêtes, y compris d’intervenir si nécessaire, et de veiller à ce que les victimes puissent avoir accès à une assistance;

          e)      De faire appel à cet égard à l’assistance technique de l’UNICEF, entre autres.

5.  Milieu familial et protection de remplacement

Responsabilité parentale

33.     Le Comité se félicite de ce que la Constitution accorde aux parents des droits et devoirs égaux au sein de la famille, mais il est préoccupé de voir que, dans l’ensemble, le Code civil transitoire et le droit coutumier ne reconnaissent pas le principe consacré à l’article 18 de la Convention selon lequel «les deux parents ont une responsabilité commune pour ce qui est d’élever l’enfant et d’assurer son développement», en particulier en ce qui concerne la garde des enfants en cas de divorce.

34.     Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que, lorsque le juge ou le conseil de famille décide d’accorder la garde de l’enfant à l’un des parents, la décision soit prise en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant et avec sa participation. L’État partie devrait ainsi veiller à ce que les deux parents soient dûment informés de leurs droits et de leurs responsabilités, en particulier en cas de divorce.

Protection de remplacement et adoption

35.     Le Comité se félicite des efforts faits par l’État partie pour placer les orphelins dans la famille élargie et offrir une aide financière à ladite famille, en particulier lorsqu’il s’agit d’une famille dirigée par une femme. Il se félicite aussi des renseignements fournis au cours des échanges de vues, qui montrent que les critères exigés des futures familles adoptives ne sont pas aussi restrictifs que ceux qui étaient signalés dans le rapport de l’État partie (par. 169). Le Comité se félicite des efforts faits par l’État partie pour fermer progressivement les grands orphelinats et autres institutions et de ne placer les enfants dans des foyers d’hébergement qu’en dernier recours, mais il demeure préoccupé de voir que les services existants sont insuffisants pour accueillir le nombre important d’orphelins, parmi lesquels les orphelins du sida, et les enfants réfugiés non accompagnés ou les enfants déplacés.

36.     Le Comité recommande à l’État partie de continuer de s’efforcer de placer les enfants dans la famille élargie à titre de protection de remplacement, et d’encourager leur adoption le cas échéant. Il recommande aussi à l’État partie de continuer de développer le cas échéant son programme de création de foyers d’hébergement et de faire appel à l’aide internationale à cet égard.

Sévices à enfants

37.     Le Comité relève avec préoccupation l’absence de renseignements sur les diverses formes de sévices infligés aux enfants dans la famille et le fait qu’aucune protection effective des enfants contre les sévices sexuels et physiques n’est prévue dans la législation.

38.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De réformer la législation relative aux violences familiales de façon à ce que les sévices sexuels et physiques soient expressément interdits;

          b)      De procéder à des études sur la violence domestique, les mauvais traitements et les sévices (y compris les sévices sexuels à l’intérieur de la famille) de façon à adopter des politiques et programmes efficaces pour combattre toutes les formes de sévices;

          c)       De mettre en place un mécanisme efficace chargé de recevoir les plaintes de sévices, d’y donner suite et d’ouvrir des enquêtes, y compris, si nécessaire, d’engager des poursuites, dans le respect de la sensibilité de l’enfant et de façon à préserver la vie privée des victimes;

          d)      De mettre en place un système complet à l’échelle nationale en vue de fournir le cas échéant un soutien et une aide aux victimes et aux auteurs d’actes de violence familiale, au lieu de se contenter d’intervenir ou de châtier, et de faire en sorte que toutes les victimes de violence aient accès à des services de consultation et bénéficient d’une aide au rétablissement et à la réinsertion, tout en évitant leur stigmatisation;

          e)      De faire appel à cet égard à l’assistance technique de l’UNICEF et du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), entre autres.

6.  Santé de base et bien‑être

39.     Le Comité prend note avec satisfaction du programme mis en place par l’État partie pour développer les services de santé, grâce auquel la couverture de la population est passée de 10 à 70 % depuis l’indépendance, ainsi que du programme de coopération avec l’UNICEF en matière de santé et de services de santé. Il est préoccupé en revanche par le taux élevé de mortalité infantile et néonatale imputable à des infections respiratoires aiguës, à des diarrhées, au paludisme et à la malnutrition. Il est également préoccupé de voir qu’un nombre considérable de familles n’a pas accès à l’eau potable et à des installations d’assainissement, ce qui contribue à la propagation de maladies transmissibles.

40.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De continuer de développer l’accès aux services de santé, en particulier dans les zones rurales, et d’améliorer les compétences du personnel des services de santé en vue de réduire le taux de mortalité néonatale;

          b)      De continuer de renforcer la mise en œuvre des politiques et programmes existants en matière de santé, et en particulier la Politique nationale relative à l’allaitement maternel et aux pratiques de sevrage (1995) et le Programme érythréen relatif à l’approvisionnement en eau des zones rurales et à l’assainissement de l’environnement;

          c)       D’accélérer l’adoption du projet de loi sur la commercialisation des produits alimentaires pour les nourrissons et les enfants.

Santé des adolescents

41.     Le Comité est préoccupé par l’absence de données concernant la fréquence de la toxicomanie, de la tabagie et des cas de suicide. Il est également préoccupé par l’augmentation des cas d’infections sexuellement transmissibles chez les adolescents.

42.     Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour évaluer la fréquence de la toxicomanie, de la tabagie et des suicides et d’adopter des mesures efficaces pour prévenir et traiter les problèmes de santé concernant les adolescents, y compris la propagation des infections sexuellement transmissibles, en prévoyant des cours d’éducation sexuelle, des services de consultations et l’accès aux préservatifs.

VIH/sida

43.     Le Comité est préoccupé par la propagation rapide du VIH/sida dans l’État partie.

44.     Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre activement les activités entreprises en collaboration avec l’UNICEF afin d’enrayer la propagation du VIH/sida et d’intégrer le respect des droits de l’enfant dans l’élaboration et la mise en œuvre de ses politiques et stratégies concernant les enfants infectés par le VIH ou atteints du sida, ainsi que leur famille, en tenant compte notamment des Directives concernant le VIH/sida et les droits de l’homme (E/CN.4/1997/37, annexe) et de l’Observation générale no 3 du Comité intitulée «Le VIH/sida et les droits de l’enfant».

Pratiques traditionnelles

45.     S’il se félicite de l’adoption d’une stratégie visant à faire disparaître la pratique nocive des mutilations génitales féminines, le Comité est très préoccupé par le fait que cette pratique est très répandue dans l’État partie, et touche près de 90 % des filles. Le Comité est également préoccupé par d’autres pratiques traditionnelles nocives, dont les mariages précoces qui sont à l’origine du taux élevé de mortalité maternelle.

46.     Le Comité recommande à l’État partie de renforcer la mise en œuvre de la Stratégie visant à éliminer les mutilations génitales féminines (1999) et de réformer la législation de façon à interdire expressément cette pratique. Il recommande également à l’État partie de mettre en place des programmes d’éducation et de sensibilisation analogues, en coopération avec les ONG et les chefs communautaires, eu égard à d’autres pratiques traditionnelles nocives comme les mariages précoces.

Enfants handicapés

47.     Le Comité se félicite des renseignements fournis par l’État partie au cours des échanges de vues au sujet de l’élaboration d’une politique nationale de protection de l’enfant et de la famille, qui comprend des mesures visant à intégrer les enfants handicapés dans le système éducatif. Il demeure néanmoins préoccupé par le fait que les enfants handicapés sont souvent victimes de discrimination dans la société et qu’un pourcentage important d’entre eux ne fréquentent pas l’école ou ne participent pas à la vie sociale et culturelle.

48.     Le Comité recommande à l’État partie:

a)      D’adopter et de mettre en œuvre le projet de politique nationale en faveur des personnes handicapées, qui devrait englober des mesures visant à informer le public des moyens de prévenir les handicaps, et veiller à ce que les droits des enfants soient dûment intégrés parmi ces principes;

b)      D’adopter et de mettre en œuvre le projet de politique nationale de protection de l’enfant et de la famille;

c)       De continuer d’intensifier ses efforts pour lutter contre les attitudes discriminatoires à l’égard des enfants handicapés, notamment chez les enfants et les parents, et d’encourager la participation des enfants handicapés à tous les aspects de la vie sociale et culturelle;

d)      D’élaborer un programme prévoyant une formation appropriée des enseignants afin que tous les enfants handicapés aient accès à l’enseignement, y compris la formation professionnelle, et qu’ils soient dans la mesure du possible intégrés dans le système éducatif ordinaire.

Niveau de vie

49.     Le Comité est préoccupé par le faible niveau de vie, qui entrave le respect et la jouissance des droits des enfants et la capacité de leur famille à leur offrir une protection satisfaisante.

50.     Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, en mettant dûment l’accent sur la surveillance de ses effets sur les droits des enfants, et de consacrer des ressources humaines et financières suffisantes, y compris en faisant appel à l’aide internationale, de façon à garantir la mise en œuvre de sa stratégie.

7.  Éducation, loisirs et activités culturelles

51.     Le Comité apprécie les efforts entrepris par l’État partie pour élever le taux de scolarisation dans l’enseignement de base, réduire l’analphabétisme, promouvoir les activités culturelles et récréatives et dispenser un enseignement dans la langue d’origine des neuf groupes ethniques. Il est toutefois préoccupé de voir que le taux de scolarisation et d’alphabétisation est encore faible, surtout dans l’enseignement secondaire et préprimaire, et qu’il existe un écart important entre le nombre de garçons et de filles scolarisés. Il constate aussi avec préoccupation que le nombre d’enseignants dûment formés est faible et que les possibilités de perfectionnement des enseignants sont limitées.

52.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De continuer d’intensifier les mesures visant à élever le taux de scolarisation dans l’enseignement primaire et l’enseignement de base, en particulier en ce qui concerne les filles;

          b)      De prendre des mesures supplémentaires pour augmenter le budget de l’enseignement;

          c)       De poursuivre ce qui a été entrepris dans le domaine des activités culturelles et récréatives;

          d)      De développer l’éducation préscolaire dans le système public, notamment dans les zones rurales, d’augmenter le nombre de maîtres de niveau préscolaire dûment formés et de faire prendre conscience aux parents de l’intérêt de l’éducation préscolaire;

          e)      D’accorder la priorité à la formation des enseignants et de continuer de renforcer et de développer les mesures prises à cet égard, et d’intensifier le recrutement d’enseignants qualifiés, en particulier de femmes et de personnes appartenant à tous les groupes ethniques appelés à donner des cours en langue maternelle;

          f)       D’inscrire l’enseignement des droits de l’homme dans le programme d’études.

8.  Mesures spéciales de protection

Enfants victimes du conflit armé, y compris les enfants réfugiés et déplacés

53.     Le Comité se félicite de la vaste expérience de l’État partie qui a mis en place des structures visant à la protection des enfants vulnérables séparés de leur famille, et au niveau national et sur le terrain, ainsi que de l’existence de la Commission érythréenne pour les réfugiés et les secours; il n’en est pas moins préoccupé de voir qu’un nombre important d’enfants continuent de subir les conséquences du conflit armé, en particulier les enfants rapatriés, les enfants déplacés à l’intérieur du pays, les enfants victimes de mines et ceux qui ont été séparés de leurs parents lorsque les Érythréens ont été expulsés d’Éthiopie au moment de la guerre de frontière (1998-2001).

54.     Le Comité recommande à l’État partie de continuer de développer les programmes visant à offrir une aide et un soutien aux enfants touchés par le conflit armé, y compris les enfants rapatriés et déplacés et les enfants victimes de mines, en accordant une attention particulière aux ménages dirigés par une femme. Le Comité recommande en particulier à l’État partie:

          a)      De ratifier la Convention relative aux statuts des réfugiés de 1951 et le Protocole y relatif de 1967 et d’adopter une législation en faveur des réfugiés conforme aux normes internationales, notamment en ce qui concerne les droits et obligations des demandeurs d’asile;

          b)      D’intensifier ses efforts en vue de retrouver les membres de la famille des enfants réfugiés et déplacés et de les réunir, y compris les familles qui ont été expulsées d’Éthiopie pendant la guerre de frontière;

          c)       De mettre en place des structures et procédures administratives pour traiter les dossiers des demandeurs d’asile, y compris les enfants;

          d)      De faire appel au soutien et à l’assistance technique d’organisations internationales, si possible d’institutions des Nations Unies et en particulier du Haut‑Commissariat pour les réfugiés, et d’ONG, en vue d’accélérer les travaux de déminage et la réinsertion sociale et, si nécessaire, la réhabilitation de toutes les victimes des récents conflits armés.

Exploitation économique

55.     Le Comité se félicite de la ratification en 2000, par l’État partie, de la Convention no 138 de l’OIT, mais il demeure préoccupé par le nombre important d’enfants qui travaillent dans la rue, dans le secteur agricole et comme employés domestiques.

56.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De réaliser une enquête sur le nombre d’enfants qui travaillent comme employés domestiques et dans le secteur agricole afin de concevoir et de mettre en œuvre des politiques visant à prévenir et à combattre l’exploitation économique des enfants dans ces secteurs;

          b)      De continuer de s’attacher à mettre en œuvre le Programme de réadaptation des enfants des rues;

          c)       De ratifier la Convention sur les pires formes de travail des enfants, (Convention no 182 de 1999, de l’OIT).

Exploitation sexuelle

57.     Si l’État partie considère que la prostitution, y compris la prostitution d’enfants, n’est pas un problème grave, le Comité constate avec préoccupation l’absence de données précises sur l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales.

58.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      D’accélérer l’adoption et la mise en œuvre du projet de loi sur les enfants érythréens et du plan national d’action en vue de la réinsertion des professionnels du sexe;

          b)      De procéder à une étude des enfants qui travaillent dans le commerce du sexe et d’établir à partir de là des politiques et programmes visant à prévenir l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, notamment en mettant au point un plan d’action national sur l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, selon ce qui a été convenu aux première et deuxième réunions du Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, qui se sont tenues en 1996 et en 2001;

          c)       De former des responsables de l’application des lois, des travailleurs sociaux et des magistrats chargés de recevoir des plaintes, d’y donner suite, d’ouvrir une enquête et d’engager des poursuites d’une manière adaptée à la sensibilité des enfants et dans le respect de leur vie privée;

          d)      De donner la priorité à des services de réadaptation et de veiller à ce que les victimes bénéficient de services d’enseignement et de formation professionnelle, d’une assistance en matière psychosociale et de services de consultation;

          e)      De coopérer avec les pays de la région pour lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et le trafic d’enfants.

Justice pour mineurs

59.     Le Comité constate avec préoccupation que l’âge minimum de la responsabilité pénale est trop bas (9 ans), que les jeunes de 15 à 18 ans en conflit avec la loi sont jugés comme des adultes, que les mineurs délinquants privés de liberté ne sont pas séparés des adultes et qu’aucun programme de réhabilitation et de réinsertion n’est prévu à leur intention.

60.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De garantir le plein respect des normes relatives à la justice pour mineurs, en particulier les articles 37, 39 et 40 de la Convention, l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing) et les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), compte tenu également des débats que le Comité a eus à l’occasion de sa journée de débat général sur l’administration de la justice pour mineurs, organisée en 1995 (CRC/C/46, chap. III, sect. c);

          b)      De faire en sorte de toute urgence que les mineurs en détention soient séparés des adultes;

          c)       De fixer un âge minimum de responsabilité pénale précis qui soit acceptable par rapport aux normes internationales;

          d)      De veiller à ce que tous les enfants entre l’âge minimum et l’âge de 18 ans reçoivent la protection spéciale garantie en vertu de la Convention;

          e)      De mettre en place des tribunaux pour mineurs;

          f)       De faire appel à l’assistance technique de l’UNICEF et du Haut‑Commissariat aux droits de l’homme, entre autres, pour obtenir une assistance technique en vue de réformer la justice pour mineurs, en ce qui concerne en particulier la détention des mineurs et les services de réinsertion.

9.  Protocoles facultatifs

61.     Le Comité relève que l’État partie n’a pas ratifié les protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, le premier concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants, et le second l’implication d’enfants dans les conflits armés.

62.     Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, le premier concernant la vente d’enfants et la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants, et le second l’implication d’enfants dans les conflits armés.

10.  Diffusion des documents

63.     Enfin, conformément au paragraphe 6 de l’article 44 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie d’assurer au rapport initial et aux réponses écrites qu’il a soumises une large diffusion auprès du public et d’envisager de publier ledit rapport ainsi que les comptes rendus des séances consacrés à son examen et les observations finales adoptées par le Comité. Le document ainsi produit devrait être largement diffusé de façon à susciter un débat et contribuer à faire connaître la Convention, sa mise en œuvre et son suivi au Gouvernement, au Parlement et au grand public, y compris les organisations non gouvernementales concernées.

11.  Prochain rapport

64.     À la lumière de la recommandation sur la périodicité des rapports adoptée par le Comité à sa vingt‑neuvième session (CRC/C/114), le Comité souligne l’importance d’une pratique en matière de présentation des rapports qui soit pleinement conforme aux dispositions de l’article 44 de la Convention. Un aspect important des responsabilités des États parties envers les enfants qui découlent de la Convention est de veiller à ce que le Comité des droits de l’enfant ait régulièrement la possibilité d’examiner les progrès réalisés dans la mise en œuvre de cet instrument. Il est donc crucial que les États parties présentent leurs rapports régulièrement et dans les délais voulus. À titre exceptionnel, et pour aider l’État partie à rattraper son retard et à présenter ses rapports conformément à la Convention, le Comité invite celui‑ci à soumettre ses deuxième et troisième rapports en un rapport unique d’ici au 1er septembre 2006, date fixée pour la présentation du troisième rapport. Ce rapport ne devrait pas avoir plus de 120 pages (voir CRC/C/118). Le Comité attend de l’État partie qu’il présente ensuite un rapport tous les cinq ans, comme la Convention le prévoit.

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