University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant,
République dominicaine, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.150 (2001).




COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT
Vingt-sixième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité des droits de l'enfant

République dominicaine


1. Le Comité a examiné le rapport initial de la République dominicaine (CRC/C/8/Add.40), reçu le 1er décembre 1998, et son rapport complémentaire (CRC/C/8/Add.44), reçu le 13 décembre 2000, à ses 693ème et 694ème séances (voir CRC/C/SR.693 et 694), tenues le 24 janvier 2001, et il a adopté à la 697ème séance, tenue le 26 janvier 2001 les observations finales ci-après.

A. Introduction

2. S'il se félicite que l'État partie ait présenté son rapport initial, le Comité regrette que celui-ci l'ait fait tardivement et que son rapport n'ait pas été établi selon ses directives. Le Comité accueille favorablement les réponses écrites à sa liste des points à traiter (CRC/C/Q/DOMREP/1) et le rapport complémentaire (CRC/C/8/Add.44) qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des enfants dans l'État partie. Il est encouragé par le dialogue constructif et direct qu'il a eu avec l'État partie, dont la délégation a traité les principales questions soulevées par la Convention, et se félicite aussi de ses réactions positives aux suggestions et recommandations faites au cours de la discussion.

B. Aspects positifs

3. Les lois relatives à la mise en œuvre des droits de l'enfant, telles que la loi No 14-94, également connue sous le nom de Code de la protection des enfants et des adolescents (1994), la loi générale sur l'éducation (1997), la loi contre la violence familiale (1997), la loi générale pour la jeunesse (2000) et la loi générale sur les incapacités (2000) sont considérées comme des mesures positives en faveur de la mise en œuvre de la Convention dans l'État partie.

4. Le Comité se félicite de la ratification de la Convention No 138 de l'OIT concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi et de la Convention No 182 de l'OIT concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination (1999).

5. Le Comité note l'institution de juridictions spéciales (tribunaux et cours d'appel) pour enfants et adolescents ainsi que de la Cour suprême de justice pour mineurs au sein de la Cour suprême.

6. Le Comité note également la signature (en 1996) d'un mémorandum d'accord entre l'État partie et l'Organisation internationale du Travail/IPEC ainsi que la création d'un Comité national pour l'abolition du travail des enfants.


C. Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

7. Il est préoccupant de constater que la pauvreté est largement répandue et que les disparités économiques et sociales qui existent de longue date touchent les groupes les plus vulnérables, notamment les enfants, et entravent la jouissance des droits de l'enfant dans l'État partie.

D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

D.1 Mesures d'application générale


Législation

8. Le Comité se félicite de l'adoption de la loi No 14-94 (Code de la protection des enfants et des adolescents) et prend acte des mesures prises par l'État partie en prévision de la mise en œuvre de cette loi, mais il demeure préoccupé par l'absence de politique globale, notamment des ressources financières et humaines ainsi que des réformes administratives nécessaires à la pleine application de cette législation.

9. Le Comité recommande à l'État partie d'achever en priorité la mise en œuvre de la loi No 14-94 (Code de la protection des enfants et des adolescents). Il recommande en outre de prendre des mesures efficaces, consistant notamment à allouer autant que faire se peut toutes les ressources disponibles - tant financières qu'humaines - à la pleine application de cette législation.

Coordination

10. Le Comité note la création du Conseil directeur (Organismo Rector), à qui est confiée la charge d'assurer la coordination des organismes gouvernementaux travaillant à la mise en œuvre de la Convention, mais il demeure préoccupé par la capacité et les ressources limitées dont dispose cet organisme pour s'acquitter comme il convient de son mandat. Il est également préoccupé par la faiblesse de la coordination interinstitutionnelle et le chevauchement des mesures et des fonctions. Il déplore en outre que le Conseil directeur n'entretienne guère de rapports et dialogue peu avec les ONG.

11. Le Comité recommande à l'État partie de prendre toutes mesures utiles pour renforcer le rôle de coordination du Conseil directeur afin de lui permettre de s'acquitter efficacement de son mandat aux niveaux national, régional et local. Il recommande en outre à l'État partie de garantir une plus large participation de la société civile et des organisations non gouvernementales au sein du Conseil directeur, ainsi qu'une coopération efficace avec les autres conseils nationaux (CONANI, CONAPLUVI, CONADIS, etc.).

Collecte de données et surveillance

12. Le Comité se déclare préoccupé par l'absence d'un système de collecte de données couvrant tous les domaines de la Convention et d'un système de surveillance du respect de la Convention. Il est tout particulièrement préoccupé par le fait que les enfants d'origine haïtienne nés sur le territoire de l'État partie ou appartenant à des familles migrantes haïtiennes n'ont pas été incorporés dans le recensement de 1996 et que les statistiques concernant les enfants en conflit avec la loi sont très limitées.

13. Le Comité recommande à l'État partie de continuer à développer et renforcer son système de collecte de données, en vue de couvrir tous les domaines de la Convention. Un tel système devrait couvrir tous les enfants de moins de 18 ans, en mettant particulièrement l'accent sur les groupes vulnérables, notamment les enfants d'origine haïtienne nés sur le territoire de l'État partie ou appartenant à des familles migrantes haïtiennes, ce qui est une condition nécessaire pour mesurer les progrès accomplis dans la mise en œuvre des droits de l'enfant et pour aider à concevoir des politiques visant à assurer une meilleure application des dispositions de la Convention.

14. Le Comité recommande en outre à l'État partie de mettre en place un système indépendant et efficace de surveillance de l'application de la Convention en vue de mesurer les progrès accomplis dans la mise en œuvre des droits de l'enfant et d'évaluer les politiques visant à assurer une meilleure application des dispositions de la Convention. À cet égard, il encourage l'État partie à solliciter une assistance internationale, notamment auprès de l'UNICEF.

Budget et ressources financières consacrés aux enfants

15. Le Comité se déclare préoccupé par la faiblesse des crédits budgétaires et de la mobilisation de ressources en faveur du secteur social, notamment des secteurs qui répondent aux besoins des groupes d'enfants les plus vulnérables, ainsi que par le caractère limité des activités communautaires (comités des droits de l'enfant, municipalités amis des enfants) participant à la protection des droits de l'enfant. En outre, il déplore l'absence de données ventilées spécifiques sur les crédits budgétaires nationaux consacrés à la satisfaction des besoins des enfants.

16. Le Comité réitère sa recommandation tendant à ce que toutes les mesures visant à mettre en œuvre les droits économiques, sociaux et culturels soient prises "dans la limite des ressources disponibles" conformément aux articles 2, 3 et 4 de la Convention et qu'une attention particulière soit accordée à l'efficacité de la mobilisation des ressources et de la répartition des crédits budgétaires, notamment en ce qui concerne la protection des enfants appartenant à des groupes vulnérables et marginalisés. Il recommande en outre à l'État partie de mettre en place un système local de surveillance et d'évaluation de la situation des enfants vivant dans des régions où règne une extrême pauvreté, de façon à accorder, la priorité à ces groupes d'enfants dans la répartition des ressources budgétaires.

Diffusion de la Convention

17. Quoiqu'il ne méconnaisse pas l'intérêt des mesures prises pour faire plus largement connaître les principes et dispositions de la Convention, le Comité est d'avis que ces mesures doivent être renforcées. Il prend acte de l'existence d'une formation spécifique des juges, mais il est préoccupé de ce que les programmes de formation actuellement offerts aux membres des catégories professionnelles qui travaillent au contact et dans l'intérêt des enfants ne peuvent être suivis par la totalité d'entre eux.

18. Le Comité recommande à l'État partie de renforcer les efforts qu'il consacre à la diffusion des principes et des dispositions de la Convention afin de sensibiliser la société aux droits des enfants par le biais de la mobilisation sociale. L'accent devrait être mis en particulier sur la diffusion de la Convention au sein des groupes minoritaires, ainsi que dans les régions rurales et reculées. Le Comité encourage l'État partie à envisager de solliciter une assistance technique dans ce domaine, notamment auprès du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et de l'UNICEF.

19. Le Comité encourage l'État partie à poursuivre ses efforts d'éducation et de formation systématiques destinés à faire connaître les dispositions de la Convention aux membres de toutes les catégories professionnelles qui travaillent au contact et dans l'intérêt des enfants, en particulier les parlementaires, les juges, les avocats, les agents de la force publique, les fonctionnaires, les employés municipaux, le personnel des établissements et des lieux où sont détenus des enfants, les enseignants, le personnel soignant, y compris les psychologues, et les travailleurs sociaux. À cet égard, l'État partie pourrait solliciter une assistance technique, notamment auprès du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et de l'UNICEF.


D.2 Définition de l'enfant

20. Tout en notant que la législation sur cette question fait actuellement l'objet d'un examen, le Comité se déclare préoccupé par le fait que l'âge légal minimum du mariage avec le consentement des parents n'est pas le même pour les filles (15 ans) que pour les garçons (16 ans).

21. Le Comité recommande à l'État partie de relever l'âge légal minimum du mariage, qui devrait être le même pour les filles et pour les garçons.


D.3 Principes généraux

Non-discrimination

22. Le Comité est profondément préoccupé par la discrimination dont souffrent les enfants d'origine haïtienne nés sur le territoire de l'État partie ou appartenant à des familles migrantes haïtiennes, notamment leur accès limité au logement, à l'éducation et aux services sanitaires, et note en particulier l'absence de mesures visant spécifiquement à traiter ce problème. Sont également sources de préoccupation les formes existantes de disparité économique et sociale, de même que la discrimination sexuelle et raciale.

23. Eu égard à l'article 2 et aux autres articles pertinents de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de prendre en priorité des mesures efficaces pour faire en sorte que les enfants d'origine haïtienne nés sur le territoire de l'État partie ou appartenant à des familles migrantes haïtiennes aient le même accès au logement, à l'éducation et aux services sanitaires que les autres enfants. Il recommande aussi à l'État partie de renforcer et de multiplier les mesures visant à réduire les disparités économiques et sociales, notamment entre les zones urbaines et les zones rurales, à prévenir la discrimination à l'encontre des groupes d'enfants les plus défavorisés, tels que les filles, les enfants handicapés, les enfants vivant et/ou travaillant dans la rue et les enfants vivant dans les zones rurales, et à leur garantir la pleine jouissance de tous les droits reconnus dans la Convention.

Intérêt supérieur de l'enfant et respect des opinions de l'enfant

24. Le Comité est préoccupé de ce que deux principes généraux de la Convention, énoncés aux articles 3 (intérêt supérieur de l'enfant) et 12 (respect des opinions de l'enfant) ne soient pas pleinement appliqués et dûment intégrés dans la mise en œuvre des politiques et programmes de l'État partie.

25. Le Comité recommande de redoubler d'efforts pour veiller à l'application des principes de "l'intérêt supérieur de l'enfant" et du "respect des opinions de l'enfant", en particulier de son droit de participer à la vie de la famille, de l'école, d'autres institutions et de la société en général afin de permettre à l'enfant de s'épanouir pleinement dans le respect de sa dignité. Ces principes devraient être également pris en considération dans tous les programmes et politiques relatifs à l'enfance. Il conviendrait de mieux informer le grand public, notamment les responsables locaux, et de renforcer les programmes d'éducation concernant l'application de ces principes afin de modifier la perception traditionnelle qui veut que les enfants soient des objets et non des sujets de droits.


D.4 Libertés et droits civils

Enregistrement des naissances

26. Tout en prenant acte des initiatives prises par l'État partie dans le domaine de l'enregistrement des naissances, le Comité demeure préoccupé par le grand pourcentage d'enfants qui ne sont pas enregistrés et auxquels on ne délivre pas de cartes d'identité, ce qui les empêche de jouir pleinement de leurs droits. La situation des enfants d'origine haïtienne ou appartenant à des familles migrantes haïtiennes dont le droit à l'enregistrement à la naissance a été dénié par l'État partie est particulièrement préoccupante. Par suite de cette politique, ces enfants ne sont pas en mesure de jouir pleinement de leurs droits, par exemple de l'accès aux soins de santé et à l'éducation.

27. Eu égard à l'article 7 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de renforcer et de multiplier ses efforts pour assurer l'enregistrement de tous les enfants dès leur naissance. L'accent devrait être mis en particulier sur l'enregistrement des enfants appartenant aux groupes les plus vulnérables, notamment les enfants d'origine haïtienne ou appartenant à des familles migrantes haïtiennes.

Maltraitance

28. S'il note que la loi interdit clairement toutes les formes de torture, le Comité se déclare préoccupé par les allégations persistantes selon lesquelles des enfants sont détenus dans des conditions assimilables à un traitement cruel, inhumain ou dégradant ou sont physiquement maltraités par des membres des forces de police.

29. Eu égard à l'article 37 et aux autres articles pertinents de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de faire jouer efficacement ses mécanismes judiciaires pour traiter les plaintes faisant état de brutalités policières, mauvais traitements et sévices à enfants, et pour que les cas de violence et sévices à enfants fassent l'objet d'enquêtes en bonne et due forme afin d'éviter que leurs auteurs restent impunis. Il encourage l'État partie à envisager de ratifier la Convention de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.


D.5 Milieu familial et protection de remplacement

Enfants privés de leur milieu familial

30. Le Comité demeure vivement préoccupé par la fragilité des liens familiaux, le grand nombre d'enfants qui ont été privés de leur milieu familial, et en particulier par les informations concernant les difficultés et la lenteur avec lesquelles familles et enfants séparés sont réunis, le manque de mécanismes de protection efficaces pour les enfants vivant dans des institutions, ainsi que le fait que les enfants sont placés dans de tels établissements pour de longues périodes et que l'on privilégie un tel placement au détriment de la recherche de mesures de protection de remplacement (par exemple l'adoption et le placement nourricier).

31. Le Comité recommande à l'État partie de renforcer et de multiplier les programmes qu'il consacre, en collaboration avec les ONG intéressées, à aider les familles dans le besoin, notamment les familles monoparentales et celles qui éprouvent des difficultés socioéconomiques ou autres, par exemple les très jeunes couples ayant des enfants. Le Comité recommande aussi à l'État partie d'élaborer d'autres programmes pour favoriser la protection de remplacement, en particulier les placements nourriciers, de donner une formation complémentaire au personnel des services de protection sociale et de mettre en place des systèmes indépendants de surveillance et d'examen des plaintes en ce qui concerne les établissements de protection de remplacement. Il invite instamment l'État partie à ne rien ménager pour renforcer les programmes de recherche des familles et pour fournir une assistance, notamment une formation, aux parents afin de les dissuader d'abandonner leurs enfants. Il recommande en outre à l'État partie d'assurer dans des conditions satisfaisantes l'examen périodique du placement des enfants vivant en institution, et de mettre en place un mécanisme indépendant et aisément accessible de suivi des plaintes concernant le traitement de ces enfants.

32. Le Comité encourage l'État partie à ratifier la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération dans le domaine de l'adoption internationale, ainsi qu'à conclure des accords bilatéraux.

Protection contre les sévices et le délaissement

33. S'il se félicite de l'adoption d'une législation spéciale qui criminalise la violence familiale, de la désignation du mois d'avril comme mois de la prévention de la violence envers les enfants et de la création d'un numéro d'appel gratuit à la disposition des enfants maltraités, le Comité se déclare préoccupé de ce que les violences physiques et sexuelles - dans la famille comme à l'extérieur de celle-ci - sont largement répandues dans la société. Il déplore, d'autre part, le manque de ressources, tant financières qu'humaines, ainsi que le manque de personnel qualifié pouvant prévenir et combattre un tel phénomène. L'insuffisance des mesures et des services de réadaptation en faveur des victimes et les possibilités restreintes d'accès à la justice sont d'autres sujets de préoccupation.

34. Eu égard aux articles 19 et 39 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de prendre les mesures propres à prévenir et combattre la maltraitance des enfants au sein de la famille, à l'école et dans la société en général, notamment en renforçant les programmes pluridisciplinaires et les mesures de réadaptation déjà en place. Il suggère, entre autres, que les lois soient appliquées avec plus de rigueur pour de telles infractions et que les procédures et mécanismes d'examen des plaintes émanant d'enfants victimes de sévices soient renforcés de façon à assurer aux enfants concernés un accès rapide à la justice et à mettre fin à l'impunité des auteurs de tels actes. En outre, des programmes éducatifs devraient être élaborés pour changer les attitudes traditionnelles de la société en la matière. Le Comité encourage l'État partie à songer à faire appel à cet effet à la coopération internationale, notamment celle de l'UNICEF.


D.6 Santé et bien-être

35. Tout en prenant note des succès rencontrés par l'État partie dans le domaine de la santé et du bien-être, le Comité est préoccupé par le taux de mortalité infanto-juvénile très élevé ainsi que par la prévalence de la malnutrition parmi les enfants. Il déplore aussi l'accès limité aux centres de santé, notamment dans les zones rurales. La persistance de problèmes de santé liés à un accès insuffisant à l'eau potable et au réseau d'assainissement est également source de préoccupation.

36. Le Comité recommande à l'État partie de continuer à prendre toutes les mesures propres à améliorer l'infrastructure sanitaire, au moyen notamment de la coopération internationale, pour garantir à tous les enfants l'accès aux soins et aux services de santé de base et accroître l'accès à l'eau potable et au réseau d'assainissement. Il convient de redoubler d'efforts concertés pour lutter contre la malnutrition et faire en sorte d'adapter et d'appliquer au plan national une politique nutritionnelle et un plan d'action en faveur des enfants. Le Comité recommande aussi à l'État partie de lancer des initiatives en matière de réduction de la mortalité infantile, en s'inspirant par exemple du programme de prise en charge intégrée des maladies de l'enfant mené conjointement par l'OMS et l'UNICEF.

Santé des adolescents

37. Le Comité se déclare préoccupé par les taux encore élevés de mortalité maternelle et de grossesse chez les adolescentes, par l'accès insuffisant des adolescentes à l'éducation en matière de santé génésique et aux services d'aide psychopédagogique, notamment à l'extérieur des établissements scolaires, par l'incidence croissante du VIH/sida, des maladies sexuellement transmissibles et de l'abus des drogues et substances psychotropes (par exemple de l'intoxication aux solvants) parmi les enfants et les adolescents ainsi que par l'absence d'informations sur la santé mentale.

38. Le Comité suggère d'entreprendre une étude générale et multidisciplinaire afin d'évaluer l'ampleur des problèmes de santé chez les adolescents, notamment en ce qui concerne les grossesses précoces et la mortalité maternelle. Il recommande à l'État partie d'adopter des politiques globales de la santé de l'adolescent et de renforcer les services d'éducation en matière de santé génésique et d'aide psychopédagogique. Il recommande en outre à l'État partie de continuer à prendre des mesures de prévention de la propagation du VIH/sida et de prendre en considération les recommandations adoptées à l'issue de sa journée de débat général sur "Les enfants vivant dans un monde marqué par le VIH/sida" (CRC/C/80). Il recommande aussi que les efforts se poursuivent, tant sur le plan des ressources financières que sur celui des ressources humaines, dans la mise en place de services d'aide psychopédagogique adaptés aux besoins des enfants ainsi que d'installations de soins et de réadaptation destinés aux adolescents. Les mesures visant à combattre et prévenir l'abus des drogues parmi les enfants devraient être renforcées. Le Comité recommande en outre de développer les services de santé mentale.

Enfants handicapés

39. S'il note l'adoption de la loi générale de 2000 sur les incapacités et la création du Conseil national pour la prévention des incapacités, le Comité est préoccupé par l'absence de données sur les enfants handicapés et l'insuffisance des mesures prises par l'État partie pour garantir à ces enfants un accès effectif aux services sanitaires, pédagogiques et sociaux, et pour faciliter leur pleine intégration dans la société. Il est également préoccupé par le petit nombre de spécialistes bien formés qui travaillent au contact et au service des enfants handicapés.

40. Eu égard aux Règles pour l'égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l'Assemblée générale, annexe), le Comité recommande à l'État partie d'élaborer des programmes de dépistage précoce pour prévenir les incapacités, d'appliquer aux enfants handicapés d'autres mesures que le placement en institution, de songer à organiser des campagnes de sensibilisation pour réduire la discrimination dont ils sont victimes, d'encourager l'insertion des enfants handicapés dans le système d'enseignement ordinaire et dans la société et, le cas échéant, de mettre en place des programmes et centres d'éducation spécialisés. Il recommande en outre à l'État partie de demander une assistance technique afin de dispenser une formation au personnel spécialisé travaillant avec et pour les enfants handicapés. Il peut faire appel à cet effet à la coopération internationale, notamment celle de l'UNICEF.


D.7 Éducation, loisirs et activités culturelles

41. Le Comité se félicite des efforts déployés par l'État partie dans le domaine de l'éducation, en particulier de l'inclusion d'un enseignement des droits de l'homme, y compris des droits de l'enfant, dans les programmes scolaires, mais il demeure préoccupé par les taux élevés d'abandon et de redoublement dans les cycles primaire et secondaire, les disparités régionales dans l'accès à l'éducation, le nombre insuffisant d'enseignants suffisamment formés et l'accès limité des enfants aux matériels et manuels scolaires. Il est également préoccupant de constater que diverses formes de discrimination et d'exclusion entravent encore le droit à l'éducation de certains groupes d'enfants, par exemple les adolescentes enceintes, les enfants non enregistrés, les enfants handicapés et les enfants d'origine haïtienne nés sur le territoire de l'État partie ou appartenant à des familles migrantes haïtiennes, ce qui dénote qu'une attention insuffisante est accordée à l'article 29 de la Convention.

42. Eu égard à l'article 28 et aux autres articles pertinents de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de poursuivre ses efforts en faveur de l'éducation en renforçant ses politiques et son système de manière à améliorer les programmes favorisant le maintien des élèves dans le système scolaire et de dispenser une formation professionnelle à ceux qui abandonnent leurs études; améliorer l'infrastructure scolaire; poursuivre la réforme des programmes d'études, y compris des méthodes d'enseignement; éliminer les disparités entre les zones urbaines et les zones rurales pour ce qui est de la scolarisation et de la fréquentation scolaire et mettre en place des programmes d'éducation spécialisée tenant compte des besoins des enfants vulnérables. Il recommande en outre d'intégrer expressément les buts de l'éducation mentionnés à l'article 29 de la Convention dans les programmes scolaires.


D.8 Mesures spéciales de protection de l'enfance

Exploitation économique et notamment travail des enfants

43. Le Comité reste préoccupé par le fait qu'un grand nombre d'enfants travaillent encore, en particulier dans le secteur informel, notamment en tant que domestiques, dans l'agriculture et dans le milieu familial. L'insuffisance des mesures d'application des lois et l'absence de mécanismes de surveillance appropriés pour faire face à cette situation sont également un sujet de préoccupation.

44. Eu égard, notamment, aux articles 3, 6 et 32 de la Convention, le Comité recommande à l'État partie de continuer à œuvrer en coopération avec l'OIT/IPEC en vue de l'élaboration et de la mise en œuvre d'un plan national pour l'élimination du travail des enfants et de mettre en application toutes les mesures prévues dans le cadre du mémorandum d'accord conclu en 1996 avec l'OIT/IPEC. La situation des enfants effectuant des travaux dangereux, en particulier dans le secteur non structuré où se trouve la majorité des enfants qui travaillent, appelle une attention particulière. Le Comité recommande aussi que la législation sur le travail des enfants soit appliquée, que les services d'inspection du travail soient renforcés et que des sanctions soient imposées en cas d'infraction.

Enfants vivant et/ou travaillant dans la rue

45. Il est préoccupant de constater qu'un grand nombre d'enfants vivent et/ou travaillent dans la rue.

46. Le Comité recommande à l'État partie de mettre au point une politique globale pour s'attaquer à ce problème, notamment dans les domaines suivants : accès adéquat aux soins de santé; services de réadaptation des victimes de violences physiques ou sexuelles et des toxicomanes; services de réconciliation avec les familles; enfin éducation, formation professionnelle et apprentissage de l'autonomie fonctionnelle. Le Comité recommande aussi à l'État partie d'œuvrer en collaboration et en coordination avec la société civile à cet égard et de prêter un appui plus conséquent aux programmes non gouvernementaux existants.

Exploitation sexuelle

47. Tout en notant la création de la Commission nationale interinstitutions pour la prévention et l'élimination de la prostitution des enfants dans les centres touristiques, le Comité se déclare préoccupé par l'absence de données et d'études approfondies sur la question de l'exploitation sexuelle à des fins commerciales et de la maltraitance sexuelle des enfants, ainsi que l'inexécution du Plan d'action national qui devait traiter ce problème. Il se déclare en outre vivement préoccupé par l'augmentation du nombre d'enfants victimes dans l'État partie d'exploitation sexuelle à des fins commerciales, souvent liée semble-t-il au tourisme sexuel.

48. Eu égard à l'article 34 et aux autres articles pertinents de la Convention, le Comité recommande à l'État partie d'entreprendre des études en vue de renforcer les politiques et mesures actuelles, notamment en matière de soins et de réadaptation, pour prévenir et combattre ce phénomène. Il recommande à l'État partie de tenir compte des recommandations formulées dans le Programme d'action adopté par le Congrès mondial contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, tenu à Stockholm en 1996.

Administration de la justice pour mineurs

49. En ce qui concerne l'administration du système de justice pour mineurs, le Comité se déclare préoccupé par la lenteur avec laquelle ce système est mis en place, l'absence de données sur les enfants ayant maille à partir avec le système de justice pour mineurs, les conditions qui règnent dans les centres spécialisés accueillant les enfants en conflit avec la loi, la situation des enfants détenus en compagnie des adultes dans les prisons et le caractère limité des programmes de formation des professionnels qui travaillent dans le système de justice pour mineurs.

50. Le Comité recommande à l'État partie de continuer à prendre des mesures propres à éliminer tous les obstacles existants (voir par. 47) à la pleine application de son système de justice pour mineurs, conformément à la Convention, notamment à ses articles 37, 40 et 39, et aux autres normes internationales pertinentes telles que l'Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad) et les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté. À cet égard, il suggère en outre à l'État partie d'envisager de demander une assistance technique, notamment au Haut-Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme, au Centre de prévention de la criminalité internationale, au Réseau international pour la justice pour mineurs et à l'UNICEF par le biais du Groupe de coordination des services consultatifs et de l'assistance technique dans le domaine de la justice pour mineurs.

Protocoles facultatifs

51. Le Comité encourage l'État partie à ratifier et à mettre en œuvre les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant, d'une part, la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants et, d'autre part, la participation d'enfants aux conflits armés.

Diffusion des rapports (art. 44)

52. Enfin, eu égard au paragraphe 6 de l'article 44 de la Convention, le Comité recommande que le rapport initial et les réponses écrites présentés par l'État partie soient largement diffusés dans le grand public et que soit envisagée la publication du rapport ainsi que des observations finales adoptées à son sujet par le Comité, de même que des comptes rendus analytiques correspondants. Le document qui serait ainsi colligé devrait être largement diffusé de façon à susciter un débat et à contribuer à faire connaître la Convention, son application et sa surveillance aux dirigeants, aux parlementaires et au grand public, notamment aux organisations non gouvernementales concernées.



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