2. Le Comité se félicite que l'Etat partie ait présenté son rapport initial et apporté des réponses écrites à la liste des points à traiter (CRC/C/Q/CUB.1). Il lui sait gré d'avoir engagé un dialogue ouvert et d'avoir reconnu les problèmes, les difficultés et défis auxquels le pays est confronté dans le cadre de l'application de la Convention.
3. Le Comité note les progrès historiques accomplis par l'Etat partie dans la mise en place de services pour l'enfance et la promotion du bien-être des enfants, en particulier dans les domaines de la santé et de l'éducation, dont les effets se font sentir dans les indicateurs socio-économiques du pays tels que le taux de mortalité infantile et le rapport entre enseignants et élèves.
4. Le Comité note avec satisfaction l'élaboration d'un plan d'action visant à atteindre les objectifs du Sommet mondial pour les enfants, qui est en cours d'application à l'échelle tant nationale que municipale.
5. Il est pris note des initiatives que le Gouvernement a récemment prises pour exécuter des programmes d'éducation sexuelle, en coopération avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP).
6. Le Comité prend note de l'importance que l'Etat partie attache à la prise en charge des handicapés et des mesures prioritaires prises dans ce domaine.
7. Le Comité prend également note de la volonté de l'Etat partie de venir en aide, sur le plan international, aux victimes de situations d'urgence, en particulier dans le cas des 14 000 victimes de la catastrophe écologique de Tchernobyl qui ont reçu un traitement grâce à Cuba.
8. Le Comité prend note des difficultés que l'Etat partie rencontre dans l'application de la Convention, suite à la rupture de ses liens économiques traditionnels et au renforcement de l'embargo commercial.
9. Le Comité trouve insuffisantes les mesures prises pour étudier et vérifier la compatibilité de la législation nationale avec les principes et les dispositions de la Convention, de façon à assurer la réalisation de l'ensemble des droits consacrés dans la Convention.
10. Le Comité craint que l'on n'ait pas pris les mesures voulues pour traiter comme il convient, dans le rapport de l'Etat partie, de tous les droits consacrés par la Convention.
11. Le Comité est préoccupé par l'approche sectorielle retenue par les mécanismes chargés de suivre l'application de la Convention et par leur inefficacité quant à la concrétisation de l'approche globale essentielle à une application exhaustive de la Convention.
12. Le Comité est en outre préoccupé par l'absence d'un mécanisme indépendant, tel qu'un médiateur, accessible aux enfants et chargé d'examiner les plaintes relatives à la violation de leurs droits et d'y donner suite.
13. Le Comité attire l'attention de l'Etat partie sur certaines lacunes relevées dans les données statistiques et autres informations rassemblées par l'Etat partie, notamment pour ce qui est du choix et de l'élaboration d'indicateurs pour suivre l'application des principes et des dispositions de la Convention. D'après les informations fournies dans le rapport de l'Etat partie, le Comité note que dans certains cas les données statistiques sur la situation des enfants ne sont recueillies que pour les enfants âgés de 15 ans au plus.
14. Le Comité est préoccupé par l'insuffisance des mesures prises pour intégrer l'enseignement des principes et dispositions de la Convention dans la formation dispensée aux spécialistes travaillant avec et pour les enfants, notamment les juges, les avocats, les responsables de l'application des lois, les enseignants, les travailleurs sociaux, les médecins et autres agents de santé, ainsi qu'au personnel des institutions de protection de l'enfance et aux fonctionnaires des administrations centrales et locales.
15. Le Comité est préoccupé par l'absence d'un âge minimum pour le consentement aux rapports sexuels et le manque de concordance entre l'âge d'achèvement de la scolarité obligatoire et l'âge minimum d'admission à l'emploi.
16. Le Comité trouve insuffisantes les mesures prises pour assurer la mise en oeuvre des principes généraux de la Convention dans la politique générale, la pratique et les procédures, en particulier en ce qui concerne les articles 3 (l'intérêt supérieur de l'enfant) et 12 (respect des opinions de l'enfant). Le Comité est d'avis que les mesures prises pour assurer le respect des vues de l'enfant au sein de la famille et dans la vie sociale, ainsi que dans le contexte des mesures administratives, des mécanismes de protection sociale et autres procédures qui concernent les enfants et leur sont applicables, sont insuffisantes.
17. Le Comité regrette l'insuffisance des informations fournies au sujet de la réalisation des libertés et droits civils de l'enfant.
18. Le Comité juge préoccupante l'absence apparente de mécanismes indépendants chargés de suivre la situation des enfants placés en institution.
19. Tout en prenant note des efforts déployés par l'Etat partie pour résoudre le problème de la maltraitance des enfants, notamment grâce à la mise en place d'un système d'alerte rapide pour les violences contre les enfants, le Comité estime que ces mesures sont insuffisantes pour protéger complètement les enfants contre de telles violations. En outre, des doutes sérieux subsistent au sujet de la possibilité pour un enfant de signaler des sévices et d'autres violations de ses droits au sein de la famille, à l'école ou dans d'autres institutions et de voir sa plainte prise au sérieux et suivie d'effet.
20. Le Comité est également préoccupé par certaines questions relatives aux enfants qui font preuve d'un comportement antisocial, à savoir l'accroissement du nombre d'enfants présentant des troubles du comportement et l'adéquation des mécanismes existants pour résoudre efficacement leurs problèmes.
21. Le Comité constate avec inquiétude que des obstacles continuent d'entraver la mise en oeuvre des programmes de planification familiale et d'éducation dans le pays, eu égard en particulier à l'absence de matériels et de services de qualité à Cuba.
22. Le Comité a noté qu'en dépit de l'absence de statistiques relatives au taux d'abandon scolaire les données disponibles laissaient apparaître une diminution du nombre d'enfants inscrits dans le cycle secondaire et une réduction du nombre de bourses disponibles pour permettre aux enfants de poursuivre leurs études.
23. S'agissant des questions relatives à l'abus et au trafic de drogues, au travail des enfants, à la prostitution et au suicide des enfants, le Comité prend note des informations fournies par l'Etat partie, selon lesquelles les enfants touchés sont peu nombreux et représentent des cas isolés. Il n'en tient pas moins à exprimer sa préoccupation devant le fait que l'Etat partie, compte tenu des problèmes sociaux et économiques considérables que connaît le pays, ne déploie pas suffisamment d'efforts pour élaborer des stratégies préventives afin que de tels problèmes ne se généralisent pas et, partant, ne mettent pas en danger les générations futures.
24. Le Comité constate également avec préoccupation que certaines questions relatives au système de la justice pour mineurs n'ont pas été convenablement traitées, notamment la compatibilité de ce système avec les principes et dispositions de la Convention, en particulier pour ce qui est de la protection accordée aux enfants âgés de 16 à 18 ans et de la détention d'enfants dans les mêmes locaux que des adultes.
25. Dans l'esprit de la Déclaration et du Programme d'Action de Vienne de 1993 et à la lumière des discussions entre ses membres, le Comité recommande que l'Etat partie envisage la possibilité de réexaminer, en vue de la retirer, la Déclaration qu'il a faite au sujet de la Convention.
26. Le Comité encourage l'Etat partie à examiner sa législation nationale pour faire en sorte qu'elle soit pleinement compatible avec les principes et dispositions de la Convention et que l'ensemble des droits consacrés dans la Convention soient pris en compte dans les lois, la politique et les mesures nationales.
27. Le Comité encourage l'Etat partie à envisager d'adhérer aux instruments connexes relatifs aux droits de l'homme, notamment la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale (1993) et la Convention relative au statut des réfugiés (1951).
28. L'Etat partie est instamment prié de prendre des mesures visant à renforcer les moyens des mécanismes nationaux de surveillance et de coordination relatifs aux droits de l'enfant, l'objectif étant d'assurer l'adoption d'une approche globale de l'application de la Convention et de mettre plus en évidence, sur le plan politique, les questions relatives à l'enfance.
29. Etant d'avis qu'il faut redoubler d'efforts pour faire en sorte que la Convention soit utilisée comme un outil politique et qu'elle serve de cadre à l'action en faveur de l'enfance, le Comité recommande que les futurs programmes d'action nationaux et locaux en faveur des enfants soient assortis de politiques, de programmes, de buts et d'objectifs inspirés des principes et des dispositions de la Convention.
30. Conformément aux principes et aux dispositions de la Convention, le Comité suggère que l'Etat partie envisage d'adopter, dans le cadre de la coopération internationale, des systèmes qui permettent la collecte, la compilation et l'analyse de données relatives aux enfants jusqu'à l'âge de 18 ans, y compris des informations sur les violations des droits de l'enfant, ventilées notamment par sexe et par lieu géographique.
31. Il est recommandé en outre que l'enseignement des principes et des dispositions de la Convention soit intégré dans la formation dispensée aux spécialistes travaillant avec et pour les enfants, notamment les médecins, les agents de santé, les travailleurs sociaux, les juges, les responsables de l'application des lois, les avocats, les enseignants, le personnel des institutions de protection de l'enfance et les fonctionnaires des administrations centrales et locales.
32. Conformément à la Convention, le Comité recommande une harmonisation de la législation, notamment pour ce qui est de l'âge de l'achèvement de la scolarité obligatoire et de l'âge minimum d'admission à l'emploi.
33. Le Comité recommande que des mesures supplémentaires soient prises pour assurer l'application effective des principes généraux de la Convention, notamment la non-discrimination, la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant et le respect des opinions de l'enfant. Ces principes devraient ainsi constituer le cadre de l'élaboration et la mise en oeuvre de mesures dans tous les domaines intéressant les enfants, qu'elles soient prises par les institutions de protection sociale, les autorités administratives ou les organes législatifs.
34. Le Comité encourage l'Etat partie à poursuivre les efforts visant à assurer une approche globale de l'application de la Convention, laquelle réaffirme que les droits de l'enfant sont indissociables, interdépendants et intimement liés, et qu'ils doivent être traités globalement. A cet égard, le Comité recommande qu'une attention particulière soit accordée à la réalisation des libertés et droits civils de l'enfant.
35. Le Comité recommande que des mesures supplémentaires soient prises pour protéger les enfants contre les sévices et les mauvais traitements, en particulier grâce au lancement d'une vaste campagne d'information visant la prévention des châtiments corporels et des brimades infligés à des enfants, que ce soit par des adultes ou par d'autres enfants.
36. En ce qui concerne la stratégie mise en place pour résoudre le problème des accidents touchant les enfants, le Comité suggère à l'Etat partie d'envisager de consacrer des efforts accrus aux mesures préventives.
37. Le Comité recommande que les programmes de planification familiale et d'éducation sanitaire bénéficient de ressources et d'une assistance accrues, en vue de résoudre le problème des grossesses précoces ou non désirées et de modifier le comportement sexuel des hommes. Des questions telles que l'incidence des cas de VIH/SIDA et de MST, le traitement des enfants infectés ou malades et la diminution du recours apparent à l'avortement comme méthode de planification familiale devraient également faire l'objet de programmes d'action. Il est également recommandé que des efforts importants soient déployés pour que les programmes éducatifs en matière de santé génésique ne soient pas seulement destinés aux couples mariés.
38. Le Comité est d'avis que l'Etat partie devrait de toute urgence réexaminer, en vue de le relever, l'âge minimum légal du consentement aux rapports sexuels.
39. Le Comité recommande que d'autres mesures d'ordre psychosocial soient prises pour prévenir et maîtriser les effets fragilisants des troubles du comportement chez les enfants.
40. En ce qui concerne l'application des articles 28 et 32 de la Convention, le Comité recommande que l'on prenne des mesures supplémentaires afin de mettre en oeuvre les recommandations de la Commission d'experts de l'OIT pour l'application des conventions et recommandations, pour ce qui est des obligations découlant de la Convention No 79 de l'OIT, qui prévoit, pour les jeunes de moins de 18 ans, une période de repos nocturne d'au moins 12 heures consécutives, comprenant l'intervalle s'étendant entre 10 heures du soir et 6 heures du matin. Le Comité suggère également que des efforts supplémentaires soient faits pour suivre plus attentivement l'application des articles 28 et 32 de la Convention, grâce notamment à l'élaboration et à l'utilisation de certains indicateurs pour illustrer les tendances dans des domaines tels que le taux d'abandon scolaire et l'entrée des enfants sur le marché officiel du travail.
41. Le Comité, s'il note que la mendicité, l'abus et le trafic de drogues et la prostitution enfantine ne constituent pas des problèmes majeurs dans le pays à l'heure actuelle, n'en recommande pas moins au Gouvernement d'être attentif, en vue de prévenir très tôt ces phénomènes.
42. Le Comité recommande en outre que le Code pénal prévoie la protection des enfants jusqu'à l'âge de 18 ans contre l'exploitation sexuelle. Il recommande également que des mesures supplémentaires soient prises pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants, en particulier par le biais du tourisme, compte tenu des recommandations adoptées au Congrès mondial contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, tenu à Stockholm.
43. Conformément au paragraphe 6 de l'article 44 de la Convention, le Comité recommande que le rapport initial et les réponses écrites présentés par l'Etat partie soient diffusés largement auprès du public et que l'on envisage de publier en même temps les comptes rendus analytiques des débats que le Comité a consacrés à ce rapport et les observations finales qu'il a adoptées à ce sujet. Ce document devrait être largement diffusé afin que le Gouvernement, l'Assemblée nationale et la population en général prennent conscience et débattent de la Convention, de son application et du suivi de sa mise en oeuvre.
44. Le Comité souhaiterait recevoir de l'Etat partie, par écrit, un complément d'information sur les questions et les problèmes soulevés au cours du débat, qui n'ont pas reçu de réponses complètes ou précises, notamment pour ce qui des questions relatives au droit de l'enfant au regroupement familial.