University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Croatie, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.52 (1996).


COMITE DES DROITS DE L'ENFANT

Onzième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité des droits de l'enfant : Croatie



1. Le Comité a examiné le rapport initial de la Croatie (CRC/C/8/Add.19) à ses 279ème, 280ème et 281ème séances (CRC/C/SR.279 à SR.281), les 23 et 24 janvier 1996, et il a adopté ** A sa 287ème séance, le 26 janvier 1996. les observations finales ci-après.

A. Introduction

2. Le Comité note avec satisfaction que les difficultés causées par la guerre n'ont pas entamé la détermination de l'Etat partie de protéger et de promouvoir les droits de l'enfant, comme en témoigne le fait qu'il a adhéré à la Convention dès l'indépendance, présenté en temps voulu son rapport initial et fourni au Comité des réponses franches et détaillées, oralement et par écrit, pour lui permettre d'examiner son rapport. Le Comité demande à l'Etat partie de lui soumettre un rapport intérimaire d'ici à la fin de 1997.

B. Aspects positifs

3. Le Comité a entendu avec satisfaction la délégation de l'Etat partie annoncer que le gouvernement avait l'intention de retirer sa réserve à l'article 9 de la Convention.

4. Le Comité prend note avec satisfaction des efforts réalisés pour harmoniser la législation et la pratique nationales avec les principes et dispositions de la Convention, notamment de l'adoption de lois sur la famille et sur la protection des enfants contre tous les types de mauvais traitements.

5. Le Comité se félicite qu'en vertu de la nouvelle Constitution, les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ratifiés par l'Etat l'emportent en droit sur la législation nationale. Il note avec satisfaction la création d'une commission parlementaire spéciale des droits de l'homme et des droits des communautés ou minorités ethniques ou nationales chargée de veiller à l'application des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et des dispositions pertinentes de la loi constitutionnelle.

6. Le Comité se félicite que, dans le cadre de l'article 4 de la Convention, le gouvernement soit prêt à coopérer avec l'Organisation des Nations Unies et d'autres organismes compétents, notamment avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme sur le territoire de l'ex-Yougoslavie, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture et le Comité international de la Croix-Rouge, dans les domaines des droits de l'homme et de l'assistance humanitaire.

7. En outre, le Comité accueille avec satisfaction les efforts que fait le gouvernement, en coopération avec les organisations non gouvernementales, pour sensibiliser le public aux droits de l'enfant. A cet égard, il se félicite de la Campagne européenne de la jeunesse contre le racisme, l'antisémitisme, la xénophobie et l'intolérance menée sous les auspices du Conseil de l'Europe.

8. Le Comité se félicite en outre des progrès réalisés dans le travail de remaniement de la loi relative à la citoyenneté, qui vise à éliminer les risques de discrimination.

9. Le Comité est heureux que le gouvernement ait exprimé l'intention de poursuivre en justice les personnes qui ont commis des crimes contre la population civile, notamment les enfants, pendant et après l'opération "Tempête" en août 1995 dans la région de la Krajina, et d'assurer la sécurité des personnes qui retournent dans leur foyer.

C. Facteurs et difficultés entravant la mise en oeuvre de la Convention

10. Le Comité a conscience des sérieuses difficultés auxquelles se heurte l'Etat partie pour mettre en oeuvre les dispositions de la Convention. Il note que le passage du pays à l'économie de marché a d'importantes répercussions sur la population, notamment sur tous les groupes vulnérables, dont les enfants.

11. Le Comité note également les problèmes majeurs causés par la guerre, laquelle a eu des conséquences graves sur la population, notamment sur les enfants, entraînant de lourdes pertes, des traumatismes physiques, émotionnels et psychologiques durables, ainsi que l'effondrement de certains services de base. Il note en particulier qu'un nombre inconnu d'enfants ont été victimes des violations les plus fondamentales de leur droit à la vie, et que le pays compte plus de 500 000 réfugiés et personnes déplacées auxquels des organismes humanitaires internationaux portent secours.

D. Principaux sujets de préoccupation

12. Tout en se félicitant de l'existence d'organismes gouvernementaux et de la création d'instances chargés de veiller au bien-être des enfants aux niveaux national et local, le Comité exprime le voeu qu'une coordination efficace s'établisse entre eux, de manière à ce que l'application de la Convention soit abordée de manière globale.

13. Le Comité est préoccupé par l'absence de mécanisme de surveillance intégrée et systématique concernant tous les domaines qui relèvent de la Convention et tous les groupes d'enfants, notamment ceux qui souffrent des conséquences de la guerre et de la transition économique.

14. Le Comité est préoccupé par l'effet qu'ont, sur les enfants, les difficultés économiques qui résultent de la transition vers une économie de marché. Il s'inquiète en particulier des conséquences néfastes que la privatisation de certains services sociaux pourrait avoir pour les groupes d'enfants les plus vulnérables. A cet égard, il voudrait notamment savoir si des mesures appropriées ont été prises pour protéger les enfants, à la lumière de l'article 4 de la Convention.

15. Le Comité exprime sa préoccupation au sujet de la loi relative aux biens détenus temporairement, en vertu de laquelle des biens peuvent être occupés temporairement en l'absence de leurs propriétaires. Le Comité craint que ceux-ci ne se heurtent à des difficultés s'ils regagnent leur foyer avant que les occupants actuels n'aient trouvé un autre logement.

16. Le Comité s'inquiète de ce qu'un certain nombre d'enfants non accompagnés, qui ont perdu le contact avec leur famille, se trouvent dans des institutions ou en placement nourricier. En outre, il craint que certains foyers d'accueil n'acceptent la responsabilité de ces enfants que pour des raisons financières. Il souligne que pareille situation n'est pas favorable au plein épanouissement des enfants qui vivent dans ces conditions.

17. Le Comité s'émeut de ce que des enfants puissent être enlevés à leur famille en raison de leur état de santé ou des difficultés financières de leurs parents.

18. Le Comité note avec une profonde préoccupation qu'il est apparemment fait peu de cas des décisions judiciaires. Il relève que des incidents continuent d'être signalés, au cours desquels des membres de groupes minoritaires, en particulier d'origine serbe et musulmane, seraient harcelés sans que les responsables ne soient inquiétés. Le Comité appelle l'attention sur les conséquences néfastes de ces incidents pour la société tout entière et pour la génération d'enfants qui sont les témoins de cette impunité.

E. Suggestions et recommandations

19. Le Comité recommande que le gouvernement ne ménage aucun effort pour encourager activement une culture de tolérance par tous les moyens possibles, y compris les écoles, les médias et la loi. Les enfants devraient apprendre à l'école à être tolérants et à vivre en harmonie avec des personnes venues d'horizons différents.

20. Le Comité recommande également, pour que vienne l'apaisement et que renaisse la confiance dans le pays, et dans l'esprit de l'article 17 de la Convention, que les médias publics jouent un rôle actif dans la promotion de la tolérance et de la compréhension entre les différents groupes ethniques et qu'il soit mis fin à la diffusion de programmes qui iraient à l'encontre de cet objectif.

21. Le Comité recommande que l'Etat partie prenne de nouvelles mesures, telles que la mise en place d'une structure permanente, pour améliorer la formulation des politiques et adopter des mesures propres à promouvoir et à protéger les droits de l'enfant.

22. Le Comité recommande que le gouvernement envisage de créer une structure de surveillance spéciale indépendante, soit dans le cadre des services existants du Médiateur, soit en tant qu'organisme distinct, et qu'à cette fin il entreprenne dès que possible d'étudier l'expérience d'autres pays de manière à prendre la décision la plus appropriée.

23. Le Comité recommande que des activités d'information du public et autres mesures appropriées soient mises en oeuvre pour mieux faire connaître les principes et dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant et d'autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, notamment en en intégrant l'étude dans les programmes scolaires, en vue de renforcer les institutions démocratiques, de parvenir à la réconciliation nationale, d'encourager la protection des droits des enfants appartenant à des minorités et de mettre fin à l'impunité dont bénéficient ceux qui harcèlent ces groupes.

24. Conformément aux efforts faits pour encourager le processus de réconciliation nationale et le dialogue national, le Comité recommande que des programmes d'initiation aux dispositions de la Convention soient organisés à l'intention des membres des forces armées, de la police et du pouvoir judiciaire.

25. Le Comité recommande que le système de placement nourricier soit étroitement surveillé de manière à mettre fin à tout mauvais traitement éventuel des enfants vivant dans ces conditions.

26. Le Comité recommande que, compte tenu de l'intérêt supérieur de l'enfant et, au besoin, dans le cadre de la coopération internationale, le gouvernement s'emploie tout particulièrement à résoudre le problème des propriétaires qui retournent dans leur foyer avant que les personnes qui l'occupent n'aient pu trouver un autre logement.

27. Le Comité recommande qu'un rapport intérimaire lui soit soumis d'ici à la fin de 1997 pour examen. Il prie l'Etat partie d'y faire figurer des informations sur l'évolution de la situation dans les domaines de la réforme juridique et judiciaire et sur les décisions prises pour améliorer la coordination des politiques concernant les enfants ainsi que la surveillance de la mise en oeuvre de la Convention. Ce rapport devrait également rendre compte des mesures prises pour répondre aux préoccupations exprimées par le Comité.

28. Le Comité recommande que le rapport de l'Etat partie, le compte rendu du dialogue qu'il a eu avec la délégation de cet Etat et les observations finales qu'il a adoptées soient largement diffusés dans toute la nation, dans toute les langues minoritaires ainsi qu'en langue croate. Il recommande l'ouverture d'un débat national au sein du gouvernement et entre celui-ci et les organisations internationales et les organisations non gouvernementales nationales, ainsi qu'au sein du public, sur la manière dont l'Etat partie applique la Convention.



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