University of Minnesota



Observations finales du Comité des droits de l'enfant, Bahreïn, U.N. Doc. CRC/C/15/Add.175 (2002).




COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Vingt-neuvième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 44 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité des droits de l’enfant: Bahreïn

1.       À ses 769e et 770e séances (voir CRC/C/SR.769 et 770), tenues le 28 janvier 2002, le Comité des droits de l’enfant a examiné le rapport initial de Bahreïn (CRC/C/11/Add.24), reçu le 3 juillet 2000, et adopté, à la 777e séance (voir CRC/C/SR.777), tenue le1er février 2002, les observations finales ci‑après.

A.  Introduction

2.       Le Comité note que le rapport initial de l’État partie est structuré conformément à ses directives mais que le gros des renseignements y figurant consiste en une énumération de dispositions juridiques ou en affirmations relatives à des garanties sans aucune indication sur la manière dont les droits sont effectivement exercés dans la pratique. Le Comité prend note avec satisfaction des renseignements supplémentaires fournis. Les réponses écrites ont été communiquées dans les délais impartis sans toutefois apporter suffisamment de compléments d’information sur les points mentionnés dans la liste. Le Comité se félicite de la participation d’une délégation de haut niveau, qui a contribué à l’instauration d’un dialogue franc et ouvert.

B.  Aspects positifs

3.       Le Comité se félicite des éléments suivants:

a)       Le rythme des réformes politiques, notamment l’adoption de la Charte d’action nationale et les préparatifs en vue de l’institution d’une chambre basse élue du Parlement en 2004 ainsi que de l’institution de conseils municipaux élus;

b)      La création en octobre 1999 du Comité des droits de l’homme du Conseil consultatif;

c)       L’abolition en février 2001 de la loi de 1974 sur la sûreté de l’État et des cours de sûreté de l’État;

d)      La coopération avec la communauté internationale dans le domaine des droits de l’homme, en particulier la visite du Groupe de travail sur la détention arbitraire en octobre 2001 et les visites d’ONG internationales de défense des droits de l’homme, ainsi que les efforts déployés en vue de promouvoir et faciliter la tâche des ONG nationales;

e)       La ratification de la Convention n° 111 de 1958 de l’OIT concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession et la création du Haut-Conseil des femmes chargé d’aider les gouvernements à formuler des politiques concernant les femmes;

f)       Le fait qu’un enseignement relatif aux droits de l’homme est obligatoire pour les étudiants en droit du premier cycle à l’Université de Bahreïn;

g)       La ratification de la Convention n° 182 de 1999 de l’OIT concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants;

h)       La création en 1999 du Comité national de l’enfance chargé d’assurer la coordination de l’application de la Convention;

i)        L’excellent niveau des indicateurs de la santé et le bon classement du pays dans le Rapport mondial sur le développement humain 2001 du PNUD.

C.  Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

4.       Tout en notant les valeurs universelles d’égalité et de tolérance inhérentes à l’islam, le Comité constate que dans l’État partie l’interprétation étroite des textes islamiques dans des domaines en rapport avec le statut personnel est susceptible d’entraver l’exercice de certains des droits fondamentaux consacrés par la Convention.

D.  Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.  Mesures d’application générales

Législation

5.       Le Comité constate avec préoccupation que le système de tribunaux de la charia, dont relèvent les musulmans et qui sont compétents pour les affaires touchant au statut personnel (mariage, divorce, garde et tutelle, succession, entretien), n’est à bien des égards pas conforme aux normes internationales élémentaires et minimales en matière de garanties et de procédures
– dont celles consacrées par la Convention – sans lesquelles le droit à un procès équitable ou à un accès adéquat aux tribunaux ne peut être garanti dans la pratique. En particulier, le Comité note avec préoccupation que:

a)       La charia n’est toujours pas codifiée et est appliquée de manière classique sans référence à la législation de l’État;

b)      Du fait qu’il n’est pas codifié, ce système risque de déboucher sur l’arbitraire, sur des incohérences et un manque d’uniformité entre les jugements rendus par les différents cadis ou juges ou entre les ressorts chiites et les ressorts sunnites, ainsi que sur des divergences avec les décisions des tribunaux laïcs.

6.       Le Comité recommande à l’État partie:

a)      D’entreprendre un réexamen exhaustif de sa législation interne, de sa réglementation administrative et de ses règles de procédure, y compris la charia, afin d’en déterminer la conformité avec les normes internationales relatives aux droits de l’homme, dont la Convention;

b)      De veiller à ce que les textes de loi soient suffisamment clairs et précis, soient publiés et soient accessibles à la population.

Coordination

7.       Le Comité note que le Comité national de l’enfance est chargé de coordonner l’action des ministères et des ONG aux fins de l’application de la Convention sans toutefois sembler être investi d’un mandat précis à cet égard. Dans le même temps, il note que le Comité national de l’enfance surveille l’application de la Convention et recueille et présente des plaintes. Le Comité est préoccupé par cette combinaison de tâches et le flou des relations que le Comité national de l’enfance entretien avec le Comité des droits de l’homme du Conseil consultatif.

8.       Le Comité recommande à l’État partie:

a)      De mettre en place un organe efficace chargé de coordonner les activités des ministères et des ONG aux fins de l’application de la Convention et investi d’un mandat précis et de compétences adéquates, un cadre juridique et un secrétariat général dotés des ressources humaines, financières et autres voulues;

b)      De parachever et mettre en œuvre un plan d’action nationale global pour l’enfance, en veillant à ce qu’il soit élaboré dans le cadre d’un processus ouvert, consultatif et participatif, qu’il se fonde sur les droits de l’homme et comporte un volet relatif à l’application de la Convention.

Structures de suivi

9.       Tout en prenant note de la création du Comité des droits de l’homme du Conseil consultatif ainsi que des renseignements fournis selon lesquels ledit Comité des droits de l’homme continue à recueillir des plaintes individuelles concernant l’exercice des droits de l’enfant, le Comité juge préoccupant pourtant que le Comité des droits de l’homme:

a)       Ne soit pas pleinement conforme aux Principes de Paris;

b)      Ne soit pas doté d’une procédure adaptée aux besoins des enfants pour traiter des plaintes relevant de la Convention.

10.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De veiller à ce que le Comité des droits de l’homme soit pleinement conforme aux Principes de Paris concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (résolution 48/134 de l’Assemblée générale);

          b)      De renforcer son appui au Comité des droits de l’homme en le dotant de ressources humaines et financières suffisantes et d’inclure expressément dans son mandat la surveillance et l’évaluation des progrès dans l’application de la Convention. Le Comité des droits de l’homme devrait être accessible aux enfants, avoir compétence pour recueillir les plaintes concernant les droits de l’enfant ainsi que pour enquêter sur ces violations, en employant des méthodes adaptées à l’enfant, et pour y remédier. À ce propos, l’État partie devrait envisager de doter le Comité des droits de l’homme d’une structure spécialisée pour l’enfance;

          c)       De demander une assistance technique, notamment au Haut‑Commissariat aux droits de l’homme et à l’UNICEF.

Collecte de données

11.     Le Comité note avec satisfaction que le Comité national de l’enfance a entrepris en 2000 une enquête ayant pour objet de recueillir et analyser des données sur la situation des femmes et des enfants au Bahreïn. Il note également avec satisfaction que l’Office central de la statistique a mis en route, en collaboration avec la Commission économique et sociale des Nations Unies pour l’Asie occidentale, un programme national de statistiques sexospécifiques ayant pour objectif de renforcer la capacité nationale de production, d’utilisation et de diffusion de statistiques sexospécifiques.

12.     Le Comité encourage l’État partie:

          a)      À poursuivre ses efforts en vue de la mise en place d’un système de collecte des données permettant de recueillir des données ventilées relatives à tous les domaines couverts par la Convention et concernant toutes les personnes de moins de 18 ans, dont celles appartenant aux groupes les plus vulnérables (à savoir les non‑ressortissants, les enfants vivant dans des zones reculées, les enfants handicapés, les enfants des ménages économiquement faibles) et à utiliser ces données pour évaluer les progrès et formuler des politiques aux fins de l’application de la Convention;

          b)      À demander une assistance technique, notamment à l’UNICEF.

Affectation de ressources

13.     Tout en prenant note des informations fournies par la délégation faisant apparaître un accroissement des investissements dans les secteurs de la santé et de l’éducation, le Comité s’inquiète de la tendance grandissante à la privatisation de ces secteurs et des répercussions potentiellement négatives de cette évolution sur l’exercice par tous les enfants de Bahreïn de leurs droits économiques, sociaux et culturels.

14.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De poursuivre et d’amplifier ses efforts en vue de l’affectation du maximum de ressources humaines et financières possible à la santé, à l’éducation, à la culture et autres services sociaux;

          b)      De déployer des efforts analogues afin d’assurer l’application intégrale de la Convention;

          c)       De déterminer le montant et la proportion des crédits inscrits au budget de l’État consacrés aux enfants par le canal des secteurs public et privé ainsi que d’en évaluer les effets et la qualité de même que (vu l’augmentation du coût des prestations) l’accessibilité des services à l’enfance.

Coopération avec la société civile

15.     Tout en notant les dispositions importantes prises afin de faciliter la constitution d’ONG, notamment dans le domaine des droits de l’homme, le Comité reste préoccupé par l’insuffisance des efforts déployés pour associer systématiquement la société civile, en particulier dans le domaine des droits et libertés civils, à l’application de la Convention.

16.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      D’envisager d’adopter une approche systématique tendant à associer la société civile, en particulier les associations d’enfants et les ONG de défense des droits de l’homme, à tous les stades de la mise en œuvre de la Convention, s’agissant en particulier des droits et libertés civils;

          b)      De veiller à mettre en conformité la loi de 1989 régissant les sociétés, clubs et organisations à caractère culturel, social ou sportif avec l’article 15 de la Convention et les autres normes internationales relatives à la liberté d’association, dans le souci d’un élargissement de leur participation.

Formation/diffusion de la Convention

17.     Le Comité constate avec préoccupation que la Convention n’a pas été publiée dans son intégralité et, en particulier, que ses articles 11, 21, 22, 38 et 41 à 54 ont été supprimés du texte publié. Le Comité prend acte des renseignements fournis au sujet des efforts entrepris, notamment par les médias, pour sensibiliser à la Convention mais estime préoccupant que l’État partie ne mène pas d’activités systématiques et ciblées de diffusion et de sensibilisation.

19.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De veiller à ce que la Convention soit publiée dans son intégralité et ainsi diffusée;

          b)      De mettre en route un programme permanent de diffusion d’informations sur la Convention et son application auprès des enfants et des parents, de la société civile et de tous les secteurs et échelons de l’administration, notamment de lancer des initiatives en direction des groupes vulnérables dont les membres sont illettrés ou n’ont pas reçu d’éducation de type scolaire;

          c)       D’élaborer des programmes permanents de formation systématique aux droits de l’homme, dont les droits de l’enfant, à l’intention de toutes les catégories professionnelles qui travaillent pour et avec les enfants (juges, avocats, responsables de l’application des lois, fonctionnaires, agents des collectivités locales, personnel des établissements et lieux de détention réservés aux enfants, enseignants, personnel soignant, etc.);

          d)      De demander une aide, notamment au Haut‑Commissariat aux droits de l’homme, et à l’UNICEF.

2.  Définition de l’enfant

20.     Le Comité note avec préoccupation qu’il n’a pas été fixé d’âge minimum pour le mariage et que dans d’autres domaines la législation bahreïnite présente des incohérences en ce qui concerne les âges minima.

21.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De poursuivre l’examen de sa législation et, le cas échéant, de prendre des dispositions en vue de la modifier de manière à ce que les exigences en matière d’âges minima ne soient pas discriminatoires entre hommes et femmes, soient expressément fixées et que leur respect soit assuré en recourant à la loi; et, en particulier;

          b)      De fixer un âge minimum pour le mariage qui soit le même pour les hommes et les femmes.

3.  Principes généraux

22.     Le Comité estime préoccupant que les principes de non‑discrimination (art. 2 de la Convention), d’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3), de survie et de développement (art. 6) et de respect des opinions de l’enfant (art. 12) ne soient pleinement pris en considération ni dans la législation et les décisions administratives et judiciaires de l’État partie, ni dans ses politiques et programmes concernant les enfants.

23.     Le Comité recommande à l’État partie d’intégrer de manière appropriée les principes généraux de la Convention, en particulier les dispositions des articles 2, 3, 6 et 12 dans tous les textes législatifs pertinents concernant l’enfance et de les respecter dans toutes ses décisions d’ordre politique, judiciaire et administratif ainsi que dans les projets, programmes et services ayant des répercussions sur tous les enfants. Ces principes devraient orienter la planification et la prise de décisions à tous les échelons, ainsi que les décisions rendues par les institutions de protection sociale et sanitaires, les tribunaux et les autorités administratives.

Le droit à la non‑discrimination

24.     Le Comité se félicite des mesures en cours d’adoption tendant à réviser la législation afin de l’aligner sur la Charte d’action nationale 2001 et à élaborer des projets d’amendement à la Constitution. Toutefois, il constate avec préoccupation que les motifs de non‑discrimination énoncés à l’article 18 de la Constitution de 1973 et dans l’article 2 du chapitre 1 de la Charte d’action nationale ne correspondent pas pleinement aux motifs de non‑discrimination mentionnés à l’article 2 de la Convention.

25.     Le Comité encourage l’État partie à profiter de cette occasion pour réviser l’article 18 de sa Constitution, ainsi que l’article 2 du chapitre 1 de la Charte d’action nationale, concernant la non‑discrimination, et de veiller à ce que ses dispositions couvrent pleinement tous les motifs de non‑discrimination visés à l’article 2 de la Convention.

26.     Tout en prenant note des améliorations sensibles apportées à la condition des femmes à Bahreïn, le Comité juge préoccupant qu’une discrimination persiste dans l’État partie, en contravention avec l’article 2 de la Convention. En particulier, le Comité juge préoccupant:

          a)       La discrimination à l’égard des femmes et des enfants nés hors du mariage dans le cadre du droit du statut personnel en vigueur (notamment en matière de succession, de garde et de tutelle);

          b)      Le fait que certains cours de formation professionnelle de niveau secondaire soient réservés exclusivement à un sexe.

27.     Conformément à l’article 2 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De prendre des mesures efficaces, en particulier en adoptant des lois ou, le cas échéant, abolissant des textes législatifs, en vue de prévenir et d’éliminer la discrimination fondée sur le sexe et la naissance dans tous les domaines de la vie civile, économique, politique, sociale et culturelle;

          b)      De prendre toutes les mesures requises, telles que le lancement de campagnes générales de sensibilisation du public, en vue de prévenir et de combattre les attitudes sociétales négatives dans ce domaine, en particulier à l’intérieur de la famille;

          c)       De dispenser aux membres des professions juridiques, en particulier aux membres de l’appareil judiciaire, une formation destinée à les sensibiliser aux questions de parité, et de faire appel aux dirigeants religieux pour soutenir ces efforts.

28.     Tout en jugeant encourageants les progrès sensibles accomplis dans ce domaine, le Comité constate avec préoccupation que des disparités d’accès aux services sociaux persistent dans les communautés chiites par rapport aux zones à majorité sunnite. Il s’inquiète en outre de l’exercice de leurs droits par les enfants d’apatrides (bidoun) et de non‑ressortissants, en particulier ceux d’entre eux qui sont handicapés.

29.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De poursuivre ses efforts tendant à assurer que tous les enfants relevant de sa juridiction puissent exercer tous les droits consacrés dans la Convention sans discrimination, conformément à l’article 2;

          b)      De continuer à accorder la priorité et à affecter des ressources aux services sociaux destinés aux enfants des groupes les plus vulnérables;

          c)       D’envisager de ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles.

30.     Le Comité demande que dans le prochain rapport périodique figurent des informations spécifiques sur les mesures et programmes pertinents pour la Convention relative aux droits de l’enfant lancés par l’État partie comme suite à la Déclaration et au Programme d’action adoptés et à la Conférence mondiale de 2001 contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, compte tenu de l’Observation générale no 1 sur le paragraphe 1 de l’article 29 de la Convention (Buts de l’éducation) adoptée par le Comité.

Intérêt supérieur de l’enfant

31.     Le Comité constate avec préoccupation que dans les décisions concernant les enfants, le principe général d’intérêt supérieur de l’enfant énoncé à l’article 3 de la Convention n’est pas toujours une considération primordiale, tel étant notamment le cas en matière de droit de la famille.

32.     Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa législation et ses dispositions administratives afin d’y faire toute la place voulue à l’article 3 de la Convention et d’assurer la prise en considération du principe qui y est consacré lors de la prise des décisions d’ordre administratif et judiciaire ou concernant les politiques.

Respect des opinions de l’enfant

33.     Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements fournis concernant la réalisation par des enfants d’une série télévisée pour les enfants. Toutefois, il note avec préoccupation que les attitudes traditionnelles à l’égard des enfants dans la société sont susceptibles d’entraver le respect de leurs opinions, en particulier dans la famille et à l’école, et que les enfants ne sont pas systématiquement entendus dans le cadre des procédures judiciaires et administratives portant sur des affaires les concernant.

34.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De continuer à promouvoir et à faciliter, notamment par la voie législative, au sein de la famille, à l’école, dans les institutions, devant les tribunaux et devant les organes administratifs, le respect des opinions des enfants et leur participation à toute affaire les concernant, conformément à l’article 12 de la Convention;

          b)      D’élaborer des programmes de perfectionnement en milieu communautaire à l’intention des parents, des enseignants, des travailleurs sociaux et des fonctionnaires locaux, afin de les former à aider les enfants à formuler leurs vues et opinions en toute connaissance de cause et de leur apprendre à tenir compte de ces vues et opinions;

          c)       De demander une aide, notamment à l’UNICEF.


4.  Libertés et droits civils

Protection contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

35.     Le Comité estime encourageants les efforts entrepris par l’État partie dans le souci de parvenir à une ouverture et une transparence accrues dans le domaine des droits de l’homme, notamment le retrait de sa réserve concernant l’article 20 de la Convention contre la torture et les autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, et la décision de transférer la responsabilité des poursuites judiciaires du Ministère de l’intérieur au Ministère de la justice. Le Comité déplore toutefois que dans son rapport l’État partie n’ait fourni aucune indication au sujet des graves allégations faisant état d’actes de torture et d’arrestations arbitraires de personnes de moins de 18 ans figurant dans divers rapports, notamment les décisions et opinions du Groupe de travail sur la détention arbitraire (voir E/CN.4/1997/Add.1, E/CN.4/1998/44/Add.1) et les rapports du Rapporteur spécial contre la torture (voir E/CN.4/1997/7/Add.1, E/CN.4/1999/61, E/CN.4/2000/9, E/CN.4/2001/66).

36.     Le Comité recommande vigoureusement à l’État partie:

          a)      D’enquêter efficacement sur toutes les affaires de torture et autres peines ou traitements inhumains et dégradants de la part de policiers ou d’autres agents de l’État et de traduire les responsables en justice;

          b)      D’accorder toute l’attention voulue aux victimes de ces violations et leur assurer de manière adéquate indemnisation, réadaptation et réinsertion sociale;

          c)       De faire figurer dans ses rapports ultérieurs des renseignements sur la suite donnée aux recommandations formulées plus haut.

5.  Milieu familial et protection de remplacement

Violences/sévices/négligence/mauvais traitements

37.     Le Comité note avec satisfaction qu’une conférence régionale sur la maltraitance à enfant s’est tenue à Bahreïn en octobre 2001 et que l’Institut bahreïnite des sciences a été chargé de réaliser une étude nationale sur ce problème.  Le Comité constate toutefois avec préoccupation l’insuffisante sensibilisation aux problèmes des mauvais traitements à l’encontre d’enfants dans la famille, ainsi qu’à la violence domestique et à ses répercussions sur les enfants.

38.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De veiller à ce que l’étude susmentionnée soit exhaustive et permette de déterminer la nature et l’ampleur des mauvais traitements et abus dont sont victimes les enfants, y compris dans la famille, et d’en utiliser les résultats aux fins de la formulation de politiques et programmes visant à remédier à ce problème;

          b)      De prendre des mesures d’ordre législatif pour interdire toutes les formes de violence, y compris les châtiments corporels, et les agressions sexuelles sur enfant, dans la famille, à l’école, et dans d’autres institutions;

          c)       De mener des campagnes destinées à sensibiliser la population aux conséquences préjudiciables de la maltraitance des enfants, et d’encourager les recours à des formes de discipline positives, non violentes, en lieu et place des châtiments corporels;

          d)      De mettre en place des procédures et mécanismes adaptés aux besoins des enfants pour recueillir les plaintes, les instruire, procéder à des enquêtes et intervenir s’il y a lieu;

          e)      D’enquêter sur les cas de maltraitance et d’engager des poursuites contre les responsables, en veillant à ce que l’enfant ayant subi des abus ne soit pas soumis à des mesures vexatoires au cours de la procédure judiciaire et à ce que sa vie privée soit protégée;

          f)       De fournir des soins aux victimes et d’en assurer la réadaptation et la réinsertion;

          g)      De former les enseignants, les responsables de l’application des lois, les agents de protection de l’enfance, les juges et les professionnels de la santé à dépister, signaler et traiter les affaires de maltraitance;

          h)      De continuer à solliciter une assistance, notamment auprès de l’UNICEF et de l’OMS.

6.  Santé et protection sociale

Santé des adolescents

39.     Le Comité prend note avec satisfaction du renseignement indiquant qu’il a été proposé d’incorporer une formation relative à la santé des adolescents dans le programme d’enseignement. Il constate cependant avec préoccupation que trop peu de renseignements ont été fournis au sujet de la santé des adolescents, s’agissant en particulier de l’accès aux services de santé de la procréation et des services de conseil dans le domaine de la santé mentale.

40.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De formuler des politiques et programmes concernant la santé des adolescents, notamment dans le domaine de l’éducation, en veillant à une pleine participation des adolescents;

          b)      De veiller à ce que les adolescents puissent avoir accès à des services de conseil confidentiels et adaptés aux besoins des enfants; d’amplifier les efforts dans le domaine de l’éducation relative à la santé des adolescents dans le cadre du système éducatif;

          c)       De solliciter une assistance, notamment de l’UNICEF et de l’OMS.

7.  Éducation

Éducation

41.     Tout en notant les informations selon lesquelles l’accès à l’éducation de base est gratuit et pratiquement universel, le Comité constate avec préoccupation que l’éducation n’est pas encore obligatoire et que l’enseignement préprimaire n’est disponible que par le canal d’établissements privés.

42.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De promulguer rapidement le projet de loi sur l’éducation gratuite et obligatoire;

          b)      De prendre des dispositions en vue de dispenser un enseignement préprimaire gratuit.

43.     Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements détaillés fournis dans le rapport concernant les buts de l’éducation. Tout en notant la proposition adoptée par le Comité national dans ce domaine, le Comité juge préoccupant que dans les programmes d’enseignement ne figure encore aucun enseignement relatif aux droits de l’homme, notamment à la Convention.

44.     Le Comité recommande à l’État partie, compte tenu de l’Observation générale no 1 du Comité sur les buts de l’éducation:

          a)      D’incorporer un enseignement relatif aux droits de l’homme, notamment aux droits de l’enfant, dans les programmes d’enseignement, portant en particulier sur la promotion et le respect des droits de l’homme, de la tolérance, de l’égalité des sexes, et des minorités religieuses et ethniques;

          b)      De demander une aide, notamment à l’UNICEF et à l’UNESCO.

8.  Mesures spéciales de protection

Exploitation économique

45.     Le Comité note avec préoccupation que l’âge minimum d’admission à l’emploi fixé à l’article 50 de la loi de 1976 (14 ans) est inférieur à l’âge de l’achèvement de l’éducation de base (15 ans). En outre, il juge préoccupant que l’article 58 de cette loi prévoit une dérogation pour les entreprises familiales.

46.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De ratifier la Convention no 138 de 1973 de l’OIT concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi;

          b)      De mettre en œuvre les Recommandations de l’OIT no 146 (concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi) et no 190 (concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants);

          c)       De demander une aide, notamment à l’OIT.

Administration de la justice pour mineurs

47.     Le Comité est préoccupé par les points suivants:

          a)       L’âge minimum de la responsabilité pénale n’est pas fixé: même si l’article 32 du Code pénal de 1976 stipule que les personnes de moins de 15 ans ne sont pas pénalement responsables, en application de la loi de 1976 sur la délinquance juvénile elles peuvent faire l’objet de sanctions, telles que jusqu’à 10 ans de détention en centre de protection sociale en cas d’infraction majeure (voir art. 12 de la loi de 1976 sur la délinquance juvénile);

          b)      En vertu de l’article 2 de la loi de 1976 sur la délinquance juvénile, les personnes commettant des infractions d’état (telles que mendicité, abandon scolaire, mauvaise conduite, etc.) s’exposent à des sanctions judiciaires;

          c)       En vertu du Code pénal de 1976 et du Code de procédure pénale de 1966, les personnes de moins de 18 ans peuvent être poursuivies pour des crimes et délits au même titre que les adultes (c’est‑à‑dire en l’absence de procédures spéciales) et encourent les mêmes peines que les adultes.

48.     Le Comité recommande à l’État partie:

          a)      De revoir et modifier toute la législation en vigueur afin d’intégrer pleinement dans les procédures et pratiques du système de justice pour mineurs les dispositions de la Convention, en particulier ses articles 37, 40 et 39, ainsi que les diverses règles internationales applicables dans ce domaine, telles que les Règles de Beijing, les Principes directeurs de Riyad, les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale;

          b)      De fixer l’âge minimum de la responsabilité pénale en se conformant aux principes et dispositions de la Convention;

          c)       De dépénaliser les infractions d’état;

          d)      De veiller à ce que la privation de liberté ne soit utilisée qu’à titre de mesure de dernier ressort, qu’elle dure aussi peu de temps que possible, soit prononcée par un tribunal et que les personnes de moins de 18 ans ne soient pas détenues avec des adultes;

          e)      De veiller à ce que les enfants aient accès à une aide juridique et à des mécanismes indépendants et efficaces de recueil des plaintes;

          f)       D’envisager d’adopter des mesures autres que la privation de liberté, telles que mise à l’épreuve, travail d’intérêt général ou peines avec sursis;

          g)      De former des professionnels dans le domaine de la réadaptation et de la réinsertion sociales des enfants;

          h)      De demander une aide, notamment au Haut‑Commissariat aux droits de l’homme, au Centre de prévention de la criminalité international, au Réseau international de la justice pour mineurs et à l’UNICEF, par le canal du Groupe de coordination des services consultatifs et de l’assistance technique dans le domaine de la justice pour mineurs.

9.  Protocoles facultatifs

49.     Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, l’un concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants, et l’autre la participation d’enfants aux conflits armés.

10.  Diffusion des documents

50.     Eu égard au paragraphe 6 de l’article 44 de la Convention, le Comité recommande que le rapport initial présenté par l’État partie soit largement diffusé dans le grand public et qu’il soit envisagé de publier en même temps que ce rapport les réponses écrites à la liste des points à traiter établie par le Comité, les comptes rendus analytiques correspondants et les observations finales adoptées par le Comité au terme de l’examen de ce rapport. Ces documents devraient être largement diffusés afin de susciter un débat et de contribuer à faire connaître la Convention aux pouvoirs publics, aux parlementaires et à l’ensemble de la population, notamment les organisations non gouvernementales concernées, et de les tenir informés de son application et de son suivi.

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