University of Minnesota



E. I. F. c. Pays-Bas, Communication No. 15/1999, U.N. Doc. CERD/C/58/D/15/1999 (2001).




Présentée par
: E.I.F. (représenté par un conseil)

Au nom de: L'auteur

État partie intéressé: Pays-Bas

Date de la communication: 4 mai 1998 (date de la lettre initiale)

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, créé en application de l'article 8 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Réuni le 21 mars 2001,

Ayant achevé l'examen de la communication n° 15/1999, soumise au Comité en vertu de l'article 14 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale,

Ayant pris en considération tous les renseignements écrits qui lui avaient été communiqués par l'auteur et l'État partie,

Tenant compte de l'article 95 de son règlement intérieur, en vertu duquel il est tenu de formuler son opinion sur la communication dont il est saisi,

Adopte le texte ci-après:


OPINION


1. L'auteur de la communication est E.I.F., citoyen néerlandais d'origine surinamaise. Sa communication a été soumise pour la première fois au Comité par son conseil le 4 mai 1998. Le 8 juillet 1999, celui-ci a fourni des renseignements complémentaires.


Rappel des faits présentés par l'auteur


2.1 L'auteur affirme avoir été renvoyé de l'École de police néerlandaise pour motifs raciaux et fait état de plusieurs actes de discrimination dont il aurait été victime lors de sa formation à l'École de police entre 1991 et 1993. Il signale notamment ceci:


2.2 L'auteur affirme en outre qu'il a été renvoyé de l'École de police, en 1994, après qu'un groupe d'élèves qu'il dirigeait avaient fait une déclaration publique dans laquelle ils s'étaient plaints de la façon dont les élèves étrangers étaient traités. Cette déclaration ainsi que les pressions exercées par les médias avaient conduit le Ministre de l'intérieur à nommer une commission, la «Commission Boekraad», chargée d'examiner les plaintes dont l'École de police était l'objet. Selon l'auteur, la Commission avait reconnu dans son rapport final que l'École avait commis des irrégularités qui s'étaient traduites par un traitement discourtois envers un certain groupe d'élèves et elle avait adressé diverses recommandations au Ministre.

2.3 L'auteur a saisi la Division du droit administratif du tribunal d'Amsterdam de son cas. Le 3 avril 1996, celle-ci avait annulé la décision de renvoi et reconnu que l'auteur avait été victime de discrimination. Cependant, par une décision du 6 novembre 1997, la cour d'appel centrale d'Utrecht chargée des questions relatives à la fonction publique et à la sécurité sociale avait confirmé la décision de renvoi.


Teneur de la plainte


3. L'auteur affirme que les faits, tels qu'ils sont décrits ci-dessus, constituent une violation par l'État partie des articles 2, 5, 6 et 7 de la Convention. Les actes de discrimination dont il a été victime lui ont causé un grave préjudice, tant matériel que moral et il devrait être indemnisé.


Observations de l'État partie


4.1 L'État partie signale que le recrutement à l'École de police d'élèves issus de minorités ethniques faisait partie à l'origine du Projet police et minorités ethniques, auquel avait fait suite, en 1988, le Plan de mesures antidiscriminatoires à l'embauche dans la police des minorités ethniques. L'Organisation police et minorités ethniques, créée en 1991, mène à bien divers projets en matière de recrutement et de sélection, de formation, d'orientation professionnelle et de recherche. En 1991, un cours a été proposé au corps enseignant de l'École de police pour lui permettre de développer ses connaissances et d'apprendre de quelle façon aborder les cultures des minorités ethniques. Le Comité Brekelmans a été créé le 11 mars 1992 pour mesurer le degré d'intégration des étudiants issus de minorités ethniques et leur capacité d'adaptation et faire des recommandations. Le Comité a présenté ses recommandations finales au Directeur de la police le 18 juillet 1992.


4.2 Le 14 décembre 1993, 21 élèves de l'École de police issus de minorités ethniques, dont l'auteur, ont adressé une lettre ayant pour titre «Appel au secours urgent» au Directeur général de l'ordre public et de la sécurité, à l'Institut de formation et de sélection de la police nationale ainsi qu'à plusieurs syndicats. Dans cette lettre, ils faisaient état d'attitudes discriminatoires dont ils avaient été l'objet à l'École de police. Un autre groupe d'élèves issus de minorités ethniques a écrit une lettre dans laquelle ils se distanciaient du contenu de la lettre du 14 décembre 1993. Ces deux lettres ont amené les Ministres de l'intérieur et de la justice, en consultation avec l'Institut de formation et de sélection de la police nationale, entre autres à ouvrir une enquête qui allait porter essentiellement sur les questions suivantes: a) celle de savoir si et dans quelle mesure les élèves issus de minorités ethniques n'étaient pas convenablement traités à l'École de police et, si tel était le cas, que faire pour que cette situation ne se reproduise pas; b) celle de savoir si, d'après les conclusions de l'enquête, il convenait de prendre des mesures et, éventuellement, lesquelles pour éviter que pareille situation ne se reproduise à l'avenir; c) celle de savoir si les élèves issus de minorités ethniques devaient accomplir des tâches qu'il n'était pas raisonnable de leur demander.


4.3 L'enquête a été confiée à un organe composé de trois membres, la Commission Boekraad, qui a conclu à l'absence de discrimination institutionnelle systématique dirigée contre les élèves de l'École de police issus de minorités ethniques, mais aussi que l'École ne dispensait pas encore un enseignement véritablement multiculturel et que les mesures prises pour atteindre ce but étaient inappropriées. La Commission a fait 14 recommandations visant à mettre en place un enseignement véritablement multiculturel. La recommandation nº 4 proposait de nommer un comité spécial d'experts extérieurs qui examineraient le cas de certains élèves issus de minorités ethniques dont les études avaient stagné. Le Comité sur les progrès des élèves issus de minorités ethniques (SAS) a été créé à cet effet.


4.4 Le Comité SAS a communiqué ses conclusions au Ministre de l'intérieur le 30 août 1995 et présenté des recommandations sur les 9 élèves dont il avait étudié le cas. Sur ces 9 élèves, 3 avaient finalement achevé leurs études, 1 allait les terminer dans l'année, 2 avaient été inscrits ailleurs dans le cadre d'une procédure de réorientation, 2 avaient bénéficié de prestations et le dernier avait engagé une procédure judiciaire sur la question de savoir si le fait de ne pas avoir achevé ses études avait occasionné ou non pour lui une perte de revenu.


4.5 L'auteur est né au Suriname et vit aux Pays-Bas depuis de nombreuses années. Avant d'entrer à l'École de police, il a suivi des cours de formation professionnelle supérieure à l'École de service social, puis il a travaillé comme enseignant. Il est entré à l'École de police le 20 août 1991, à l'issue d'une procédure de sélection qui ne différait de la procédure d'entrée habituelle appliquée aux élèves d'origine néerlandaise que sur quelques points de détail. Son admission signifiait qu'en tant qu'élève il était aussi fonctionnaire employé à titre temporaire par le Ministre de l'intérieur.


4.6 Le 6 juillet 1992, à la fin de sa première année d'études à l'École de police, l'auteur a été informé par le secrétaire du Comité responsable de l'organisation des examens qu'il n'était pas admis en deuxième année car ses résultats étaient insatisfaisants. En réalité, ses résultats étaient tels qu'il aurait pu être expulsé de l'École. Toutefois, il était autorisé à redoubler la première année. À ce stade, il ne s'est pas plaint d'attitudes discriminatoires à l'intérieur de l'École, ni envers lui-même ni envers ses camarades. À la fin de la deuxième année, ses résultats ont été de nouveau si médiocres que les enseignants ont estimé qu'il y avait lieu d'en discuter avec lui. Comme il avait été absent (pour cause de maladie) et qu'il n'avait pu passer tous ses examens, l'École a décidé de lui donner une seconde chance de les passer. Le directeur de l'École l'a donc invité à le rencontrer pour faire le point.

4.7 Lors de cette rencontre, le 6 septembre 1993, le directeur a informé l'auteur qu'il avait jusqu'à la fin du mois d'octobre 1993 pour passer les examens restants. L'auteur ne s'est pas non plus plaint à ce moment-là d'avoir subi un traitement discriminatoire. Le 16 septembre 1993, un projet de calendrier ayant été établi, l'auteur a été invité à en discuter mais il a refusé de le faire. Il a ensuite été formellement invité à passer ses examens. Il a alors déclaré qu'il était malade et ne s'est pas présenté le jour des épreuves.


4.8 Le 24 septembre 1993, lors d'une réunion de l'équipe médico-sociale de l'École de police, il a été noté que de l'avis des professeurs, l'auteur était parfaitement capable d'obtenir de bons résultats. En revanche, des doutes ont été émis quant aux raisons qu'il avait données de son absence. Il n'a été fait référence ni à la couleur de sa peau ni à son origine ethnique.


4.9 En décembre 1993, le Comité responsable de l'organisation des examens a décidé de proposer au directeur de l'École de renvoyer l'auteur le 1er mars 1994. Le directeur a notifié son renvoi à l'auteur le 26 janvier 1994. Le représentant de l'auteur a, par lettres datées du 18 février et du 24 mars 1994, demandé qu'une nouvelle chance soit donnée à l'auteur mais ce dernier a été renvoyé le 1er octobre 1994.


4.10 L'auteur a recouru contre son renvoi le 5 août 1994. Il a affirmé que ses notes médiocres et ses fréquentes absences n'étaient que la conséquence de la façon dont il avait été traité par le corps enseignant de l'École. Il a également déclaré que le Ministre avait eu tort de ne pas tenir compte dans son cas de la recommandation nº 4 de la Commission Boekraad mentionnée plus haut. À l'audience, tenue le 26 septembre 1994 dans le cadre de la procédure de recours, l'auteur a donné des exemples tendant à prouver que les enseignants avaient manqué d'objectivité à son égard. Toutefois, ces exemples ne faisaient nullement état de discrimination. Il a mentionné:

4.11 Le 1er décembre 1994, le Ministre a déclaré que le recours formé par l'auteur était dépourvu de fondement au motif qu'il n'avait pas été promis à l'auteur, ainsi que celui-ci l'avait prétendu, qu'aucune mesure affectant son statut juridique ne serait prise avant la fin de l'enquête de la Commission Boekraad. Le Ministre a également noté que, dans l'attente des recommandations de la Commission, la décision de renvoi avait été prise après mûre réflexion. De l'avis du Ministre, le renvoi était motivé par l'incapacité avérée de l'auteur à suivre cette formation, ainsi qu'en témoignaient ses mauvaises notes; de plus, l'auteur n'avait pas démontré de manière satisfaisante qu'il y avait le moindre lien de cause à effet entre ses mauvaises notes et la discrimination dont il affirmait avoir souffert.


4.12 L'auteur a fait appel de la décision devant le tribunal d'instance d'Amsterdam qui a déclaré le recours recevable au motif que le Ministre aurait dû tenir compte des conclusions de la Commission Boekraad. Le tribunal a également estimé qu'en créant le Comité sur les progrès des élèves issus de minorités ethniques (SAS), le Ministre avait implicitement assumé la responsabilité des problèmes rencontrés par ces élèves. Le tribunal a jugé que, dans la mesure où les autres élèves issus de minorités ethniques avaient eu la possibilité de bénéficier d'une évaluation individuelle effectuée par le Comité SAS, ce dont n'avait pas bénéficié l'auteur, le Ministre avait agi de manière incompatible avec le principe d'égalité.


4.13 Le 27 février 1997, le Ministre avait fait appel devant le Tribunal central de recours de la décision rendue par le tribunal d'instance au motif notamment que ce dernier avait, à tort, supposé que l'auteur était dans la même position que les neuf élèves issus de minorités ethniques dont le cas avait été étudié par le Comité SAS lors de son enquête. Ceux-ci avaient tous fait leurs études ailleurs qu'aux Pays-Bas et n'étaient pas dans le pays depuis très longtemps lorsqu'ils avaient commencé leurs études à l'École de police. Ils n'étaient donc pas encore pleinement intégrés dans la société néerlandaise. Ils avaient bénéficié d'une procédure d'entrée distincte, conçue spécialement pour les «authentiques» élèves issus de minorités ethniques, à savoir la procédure de sélection PPA mise au point dans le cadre du Plan de mesures antidiscriminatoires. L'auteur n'appartenait pas à cette catégorie. La procédure de sélection dans son cas ne différait de la procédure ordinaire appliquée aux élèves d'origine néerlandaise que sur quelques points de détail. Il n'y avait donc pas de raison que le cas de l'auteur soit examiné individuellement par le Comité SAS.


4.14 Le Tribunal central de recours a déclaré recevable le recours du Ministre et a cassé la décision du tribunal d'instance au motif que ni le rapport de la Commission Boekraad ni celui du Comité SAS ne permettaient de conclure que les mauvais résultats de l'auteur étaient la conséquence d'un traitement discriminatoire. En outre, sa situation était fondamentalement différente de celle des élèves qui n'avaient passé que peu de temps aux Pays-Bas avant de commencer leurs études, qui maîtrisaient mal la langue néerlandaise et qui n'étaient pas encore pleinement intégrés dans la société néerlandaise. Il n'y avait donc pas violation de l'obligation de diligence suffisante et/ou du principe d'égalité.


4.15 L'État partie conteste l'affirmation de l'auteur selon laquelle la discrimination et le racisme sont des pratiques institutionnelles et systématiques au sein de la police et que le Ministre n'a pas pris les mesures qui s'imposaient pour y mettre fin.


4.16 L'auteur affirme notamment que l'émission d'information télévisée Netwerk a attiré l'attention sur son cas et sur l'aspect institutionnel de la discrimination dans la police. Cependant, il a complètement omis de préciser quel était le propos du documentaire en question et quelles étaient les conclusions à en tirer. L'État partie considère donc que cela est sans rapport avec la question à l'examen.


4.17 L'auteur affirme sans raison que le Comité SAS est, en apparence, de parti pris car il a été constitué par le Ministre de l'intérieur et l'École de police. Six personnes indépendantes en étaient membres et ni le Gouvernement ni l'École de police n'ont influencé leurs travaux.


4.18 Le Gouvernement a estimé que les allégations de discrimination fondées sur l'origine ethnique présentées par 21 élèves issus de minorités ethniques justifiaient l'ouverture d'une enquête indépendante sur l'existence d'une quelconque discrimination. Les plaintes ont été instruites et des recommandations faites pour éviter toute discrimination à l'avenir. Toutes ces recommandations ont été suivies. Force est donc de conclure que le Gouvernement a agi conformément au paragraphe 1 b de l'article 2 et à l'article 7 de la Convention.


4.19 Le cas de l'auteur n'a pas été retenu pour être individuellement examiné par le Comité SAS, notamment parce que l'intéressé avait déjà été renvoyé lorsque le Comité a commencé son enquête. Mais même s'il avait toujours été inscrit à l'École à ce moment-là, il n'aurait pas eu droit à cet examen car rien n'indiquait que ses mauvais résultats étaient liés en quoi que ce soit à son origine ethnique. Le Ministre de l'intérieur s'est néanmoins penché sur la question de savoir si la médiocrité des notes de l'auteur était due, comme il l'affirmait, à une discrimination exercée par les enseignants tout au long du processus de prise de la décision de renvoi, jusques et y compris à l'audience du Tribunal central de recours.


4.20 L'auteur n'a pas apporté d'éléments prouvant qu'il avait été renvoyé parce qu'il était l'instigateur de la lettre «Appel au secours urgent» et que le Tribunal central de recours avait rendu sa décision sur la base de faits inexacts. Quant à l'affirmation selon laquelle le Ministre n'a pas pris en considération les conclusions de la Commission Boekraad au moment de se prononcer sur le recours formé par l'auteur, l'État partie souligne que le Ministre en a bel et bien tenu compte mais qu'elles ne lui ont pas permis de revenir sur sa décision.


4.21 Sur la base de ce qui précède, l'État partie déclare que le Gouvernement s'est conformé à l'obligation qui lui incombe en vertu des articles 5 a et 6 de la Convention d'assurer aux victimes de la discrimination raciale une protection effective de la loi et, le cas échéant, réparation pour tout dommage qu'elles pourraient subir par suite d'une telle discrimination. L'État partie conclut aussi qu'il n'a violé aucune disposition de la Convention à l'égard de l'auteur.


Commentaires du conseil


5.1 Le conseil relève un certain nombre d'inexactitudes dans les observations de l'État partie (1), qui montrent que l'affaire n'a pas été étudiée avec beaucoup de soin. Par exemple, avant d'entrer à l'École de police, l'auteur vivait aux Pays-Bas depuis six ans et non depuis «de nombreuses années» comme l'indique l'État partie. En outre, il n'a pas étudié à l'École de service social; il a étudié la médecine à l'Université d'Amsterdam de 1987 à 1990 et n'a jamais été enseignant.


5.2 L'auteur affirme que le fait de faire partie du groupe d'élèves de l'École issus de minorités ethniques qui n'avaient pas besoin d'une aide particulière (cours de néerlandais par exemple) ne le mettait pas à l'abri de la discrimination raciale. Les mécanismes d'exclusion en place à l'École de police étaient intacts en dépit du fait que le corps enseignant avait eu la possibilité de suivre une formation sur la façon de s'y prendre avec des étudiants de cultures différentes.


5.3 La lettre écrite en réponse à l'«Appel au secours urgent» était le fait non pas d'autres élèves issus de minorités ethniques (2) mais d'élèves blancs et il en ressortait que des incidents qui pouvaient être qualifiés de racistes avaient eu lieu. Les élèves blancs demandaient l'instauration d'un dialogue pour trouver une solution.


5.4 Bien que la Commission Boekraad ait conclu à l'absence de discrimination institutionnelle à l'École de police, elle a déclaré qu'il y avait de la discrimination et elle a recommandé à l'École d'instituer un code antidiscrimination.


5.5 L'auteur se plaint que le Comité SAS ne s'est jamais penché sur son cas bien qu'il ait été l'un des signataires de la lettre «Appel au secours urgent». Il ne comprend pas pourquoi ce comité n'a examiné que le cas de 9 des 21 signataires de la lettre et il exprime des doutes quant à son indépendance à l'égard du Ministère de l'intérieur. Il indique que le secrétaire du Comité était membre de la Direction de la police au Ministère de l'intérieur et que son Président avait siégé à la Commission Boekraad. Il affirme qu'une enquête indépendante aurait dû porter sur tous les aspects du problème et pas seulement sur le cas de quelques personnes. Il exprime également des doutes quant à l'indépendance de l'équipe médico-sociale de l'École de police, dont les membres étaient tous liés à l'École. L'équipe ne l'avait pas vraiment cru lorsqu'il avait exposé les raisons de son absence. En fait, tout ce qu'il avait dit avait été mis en doute. Autre élément attestant la discrimination, le fait que son renvoi de l'École ne lui avait été notifié qu'avec un préavis de deux jours, au lieu des trois mois exigés par la loi. Ce n'était que lorsqu'il avait menacé d'engager une action en justice que l'École avait rectifié la chose.


5.6 L'auteur ne partage pas l'avis de l'État partie selon lequel les incidents auxquels il a fait référence à l'audience du 26 septembre 1994 ne constituent pas une discrimination (3). Ils auraient dû être examinés par le Comité SAS ainsi que l'avait recommandé la Commission Boekraad. L'auteur ne partage toujours pas l'opinion de l'État partie qui estime que les recommandations de la Commission Boekraad ne s'appliquaient pas dans son cas et il appelle l'attention du Comité sur le fait que le tribunal d'instance d'Amsterdam était totalement de son avis. Par ailleurs, l'État partie semble dire que, ayant une bonne maîtrise de la langue néerlandaise, l'auteur ne pouvait pas avoir été en butte à de la discrimination. L'auteur fait observer que malgré tout il a toujours la peau foncée.


5.7 L'auteur conteste vivement la thèse de l'État partie selon laquelle son renvoi s'explique par ses mauvais résultats, lesquels seraient la conséquence directe de la situation psychologique dans laquelle il se trouvait du fait de la discrimination qu'il subissait. L'État partie ne peut nier que les policiers issus de minorités ethniques qui quittent la police sont plus nombreux que ceux qui y entrent, ce qui s'explique par la discrimination institutionnelle.


5.8 Enfin, l'auteur note que, dans ses observations, l'État partie ne nie pas qu'il a effectivement été victime des incidents décrits dans le paragraphe 2.1 plus haut. L'auteur ne partage toutefois pas sa conclusion, à savoir que ces incidents ont été pris en compte lorsque la décision de renvoi a été adoptée. Ces incidents ayant été à l'origine de ses mauvais résultats, son cas aurait dû être examiné attentivement et les recommandations de la Commission Boekraad appliquées.

Délibérations du Comité


6.1 Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale doit, conformément au paragraphe 7 a de l'article 14 de la Convention et aux articles 86 et 91 de son règlement intérieur, déterminer si cette communication est recevable. Le Comité note que l'État partie ne soulève pas d'objections quant à la recevabilité de la communication et qu'il a formulé des observations détaillées sur le fond. Le Comité estime que toutes les conditions énoncées dans les dispositions susvisées sont remplies. En conséquence, il décide que la communication est recevable.


6.2 Quant au fond de la communication, le Comité estime que certaines des allégations formulées par l'auteur, résumées au paragraphe 2.1 plus haut, ont une connotation raciste réelle. Toutefois, elles n'ont été évoquées ni devant le tribunal d'instance d'Amsterdam ni devant le Tribunal central de recours qui ont eu à connaître principalement de la question du renvoi de l'École de police. En outre, il n'apparaît pas, d'après les renseignements reçus par le Comité, que la décision de mettre fin à la participation de l'auteur à l'École de police soit le résultat d'une discrimination fondée sur la race. Rien ne vient non plus étayer l'allégation selon laquelle ses mauvais résultats scolaires étaient liés aux incidents visés au paragraphe 2.1.

7. Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, agissant en vertu du paragraphe 7 a de l'article 14 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, estime que les faits, tels qu'ils sont présentés, ne font pas apparaître une violation de la Convention par l'État partie.


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Notes


1. Voir par. 4.5 plus haut.
2. Voir par. 4.2 plus haut.
3. Voir par. 4.10 plus haut.



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