COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION
DE LA DISCRIMINATION RACIALE
Cinquante-sixième session
6-24 mars 2000
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR
LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION
Conclusions du Comité pour l'élimination de la
discrimination raciale
Zimbabwe
1. Le Comité a examiné les deuxième, troisième et
quatrième rapports périodiques du Zimbabwe regroupés en un seul document
(CERD/C/329/Add.1) à ses 1374ème et 1375ème séances (CERD/C/SR.1374 et 1375)
tenues les 7 et 8 mars 2000. À sa 1395ème séance, le 22 mars 2000, il a
adopté les conclusions suivantes.
A. Introduction
2. Le Comité se félicite de la présentation des rapports
du Zimbabwe qui est conforme aux principes directeurs applicables à la présentation
des rapports des États parties. Il se déclare satisfait des informations supplémentaires
fournies dans le document de base (HRI/CORE/1/Add.55) et oralement par la
délégation. Il juge encourageants le dialogue constructif, ouvert et franc
qui s'est instauré avec la délégation et les réactions positives qu'ont suscitées
les suggestions et recommandations formulées au cours de la discussion.
B. Facteurs et difficultés
entravant l'application de la Convention
3. Le Comité note qu'avant 1980, la législation et
les politiques mises en œuvre par le régime de la minorité blanche au
Zimbabwe ont engendré la ségrégation et la discrimination raciales dans le
pays. Les séquelles de l'évolution sociale et politique du Zimbabwe ainsi
que le fardeau de la dette extérieure et d'autres préoccupations économiques
ont entravé la pleine mise en œuvre de la Convention.
C. Aspects positifs
4. Le Comité prend note des efforts déployés par l'État
partie dans le secteur de l'éducation en vue de combattre la ségrégation raciale,
d'introduire l'utilisation des langues minoritaires et de faire figurer l'enseignement
des droits de l'homme dans les programmes d'étude au moyen de méthodes novatrices.
5. Le Comité se félicite de la promulgation récente
par le Zimbabwe de la loi sur la prévention de la discrimination qui, entre
autres dispositions, interdit "toute discrimination fondée sur la race,
l'appartenance tribale, le lieu d'origine, l'origine nationale ou ethnique,
l'opinion publique, la couleur, la croyance ou le sexe" et l'amendement
de 1997 à la loi relative au médiateur qui habilite désormais ce dernier
à enquêter sur les violations des droits de l'homme commises par des membres
des forces de défense, des forces de police et des services pénitentiaires.
6. Le Comité prend note de la modification apportée
à la loi sur l'administration des successions qui répond à des préoccupations
précédemment évoquées au sujet du droit coutumier concernant le mariage
et les successions.
7. Le Comité accueille avec satisfaction l'initiative
de l'État partie d'introduire, avec l'appui du Comité international de la
Croix-Rouge, une formation aux droits de l'homme à l'intention des fonctionnaires
ainsi que des membres de la police et des forces de défense.
D. Sujets de préoccupation
et recommandations
8. Le Comité est préoccupé par le fait que la médiatrice
est dotée de pouvoirs restreints pour enquêter sur les actes accomplis par
des fonctionnaires dans des domaines apparentés à la discrimination raciale.
Il déplore aussi que l'article 4 de l'amendement relatif à la loi sur le médiateur
limite son intervention aux cas où des plaintes ont été déposées. Il recommande
à l'État partie de prendre les mesures nécessaires pour permettre au médiateur
de contrôler la façon dont les fonctionnaires exercent leurs pouvoirs.
9. Le Comité prend note des problèmes rencontrés
par le Ministère de l'éducation dans la lutte contre la ségrégation raciale
du fait de l'instauration du système mixte des écoles publiques et privées.
Il recommande à l'État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique,
des informations quantitatives et qualitatives supplémentaires sur la ségrégation
raciale à l'école.
10. Il est préoccupant que la loi sur la prévention
de la discrimination ne tienne pas suffisamment compte de tous les éléments
énumérés à l'article 4, en particulier en ce qui concerne l'obligation d'interdire
toutes les organisations et activités de propagande qui incitent à la discrimination
raciale ou qui l'encouragent et de les déclarer délits punissables. Il est
aussi préoccupant que la portée de l'article 6.1 de cette loi soit atténuée
par la mention d'un "élément de risque" alors que l'article 4
de la Convention ne fixe aucune limite et ne prévoit aucune condition à
l'interdiction de toute déclaration de caractère raciste.
11. Il est regrettable que la politique d'introduction
des langues minoritaires dans les programmes scolaires n'ait pas pu être
pleinement appliquée en raison de contraintes financières, humaines et matérielles.
L'État partie est encouragé à persévérer dans ses efforts tendant à accorder
la priorité, dans la formation pédagogique et dans l'établissement des programmes
d'enseignement, aux personnes connaissant des langues minoritaires.
12. Le Comité note avec préoccupation l'insuffisance
des informations fournies sur la situation des réfugiés, des migrants et
des non-ressortissants résidant au Zimbabwe. En outre, il note avec insatisfaction
que, selon la législation en vigueur, la citoyenneté est accordée plus facilement
à une non-ressortissante épouse d'un Zimbabwéen qu'à un non-ressortissant
ayant épousé une Zimbabwéenne et que les enfants nés de citoyens zimbabwéens
à l'étranger peuvent ne pas acquérir la citoyenneté. Il recommande à l'État
partie de revoir sa législation relative à la citoyenneté en vue de mettre
fin à cette discrimination. L'État partie est invité à fournir, dans son
prochain rapport périodique, des informations supplémentaires sur la situation
des réfugiés, des migrants et des non-ressortissants qui résident au Zimbabwe
ainsi que sur les mesures législatives qui garantissent la protection de
leurs droits.
13. Tout en prenant note des difficultés rencontrées
par l'État partie en ce qui concerne la redistribution des terres, le Comité
déplore que la situation ne se soit guère améliorée depuis l'examen du rapport
initial. Il s'inquiète de ce que les critères auxquels doivent satisfaire
les candidats pour bénéficier du plan d'installation dans l'agriculture
commerciale risquent de limiter le nombre d'agriculteurs noirs candidats.
Il recommande à l'État partie d'adopter des mesures en vue d'améliorer la
possibilité d'accès aux aides financières et techniques pour les agriculteurs
noirs qui, faute de ces aides, risquent de ne pas pouvoir bénéficier du
plan d'installation et, à cet égard, d'envisager d'autoriser l'accès des
terres communales au secteur de l'agriculture commerciale. L'État partie
est encouragé à poursuivre son étude des mesures de réforme agraire, en
vue de mettre en œuvre un vaste programme de réforme agraire au Zimbabwe,
dans le respect de la légalité et en s'attachant à renforcer les droits
économiques et sociaux de ses citoyens.
14. Le Comité déplore l'insuffisance des renseignements
donnés au sujet de l'article 6 de la Convention. Il demande à l'État partie
de fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur les
mesures adoptées pour faire mieux connaître la Convention et les mécanismes
judiciaires qui protègent contre toute forme de discrimination et sur le
développement d'une jurisprudence dans ce domaine.
15. Il est noté que l'État partie n'a pas fait la
déclaration prévue à l'article 14 de la Convention et certains membres du
Comité ont demandé que soit envisagée la possibilité de faire cette déclaration
.
16. Le Comité recommande que le prochain rapport
périodique de l'État partie soit à la disposition du public dès qu'il aura
été soumis et que les présentes conclusions fassent l'objet d'une large
diffusion. Il recommande en outre que le prochain rapport périodique de
l'État partie, attendu le 12 juin 2000, constitue un rapport de mise à jour
et traite de toutes les questions soulevées lors de l'examen du rapport
sur lequel portent les présentes conclusions.