University of Minnesota



Observations finales du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Zambie, U.N. Doc. A/48/18,paras.236-256 (1993).






COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION


Conclusions du Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

Zambie


236. Les septième, huitième, neuvième, dixième et onzième rapports périodiques de la Zambie, soumis dans un document (CERD/C/239/Add.2), ont été examinés par le Comité à ses 988e séance, tenue le 3 août 1993 (voir CERD/C/SR.988).

237. Les rapports ont été présentés par le représentant de l'Etat partie, qui a indiqué qu'ils avaient été élaborés en tenant compte des questions posées au cours de la considération du sixième rapport périodique en 1985. Il a aussi attiré l'attention du Comité sur le document de base (HRI/CORE/1/Add.22) soumis par son gouvernement, qui contenait l'information d'ordre général sur le pays.

238. Le représentant a déclaré que l'article 3 de la Constitution se fondait sur la Charte des Nations Unies, et englobait les aspects principaux de la Convention. Il a précisé que la Convention n'était pas directement applicable en Zambie : ses dispositions devaient être incorporées dans la législation nationale pour qu'elles puissent être invoquées devant les tribunaux.

239. Etant entouré de huit pays (Angola, Botswana, Malawi, Mozambique, Namibie, Tanzanie, Zaïre et Zimbabwe), la Zambie accueillait de nombreux réfugiés venus de ces pays, ainsi que de l'Afrique du Sud. La Zambie offrait de nombreux services à ces réfugiés mais ne pouvait, faute de ressources suffisantes, garantir leur éducation. Le pays connaissait également de nombreux problèmes liés aux flux migratoires, et à la présence en Zambie d'un nombre très élevé de migrants clandestins. Tous ces problèmes affectaient négativement la mise en oeuvre effective de certaines dispositions de la Convention.

240. Des membres du Comité se sont félicités de la reprise du dialogue entre le Comité et la Zambie, qui avait été interrompu pendant 10 ans. Ils ont fait noter que la Zambie avait été gouvernée par un parti unique pendant la grande majorité de son existence en tant qu'Etat souverain, et avait connu de 1964 à 1991 un état d'urgence permanent, ce qui inévitablement avait entraîné des conséquences négatives sur la protection des droits fondamentaux de l'homme. En l'absence de rapports pendant plus de 10 ans, le Comité n'avait pu évaluer dans quelle mesure cette situation avait affecté la lutte contre la discrimination raciale dans le pays. Ils ont noté avec satisfaction que la nouvelle Constitution du 24 août 1991 contenait de nombreuses dispositions qui prévoyaient la protection des droits fondamentaux de l'homme, mais en même temps ont fait remarquer que la réintroduction de l'état d'urgence le 4 mars 1993 pourrait avoir des répercussions négatives sur les droits de l'homme en Zambie. Des membres du Comité ont aussi indiqué que l'absence d'information sur la composition ethnique de la société zambienne, aussi bien que de nombreuses lacunes dans le rapport qui n'avait pas été préparé conformément aux directives générales du Comité pour la préparation des rapports, rendait la tâche du Comité plus difficile à accomplir.

241. S'agissant de l'article premier de la Convention, des membres du Comité ont demandé des éclaircissements au sujet des plaintes de mauvais traitement des membres de la communauté asiatique, et sur le déclin prétendu de l'élément non africain de la population zambienne depuis 30 ans. Ils ont aussi demandé des précisions sur les modalités de l'incorporation de la Convention dans la législation de la Zambie, et sur les effets que pourrait avoir la réintroduction de l'état d'urgence sur l'application de la Convention.

242. A propos de l'article 4 de la Convention, des membres du Comité ayant noté que l'article 70, paragraphe 1, du code pénal satisfaisait les exigences spécifiées à l'alinéa a) de l'article 4 de la Convention ont demandé de l'information supplémentaire sur la mise en oeuvre des alinéas b) et c) de l'article 4 de la Convention.

243. En ce qui concernait l'article 5 de la Convention, des membres ont requis plus d'information au sujet de la jouissance des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, énoncés à l'article 5 de la Convention, eu égard aux diverses ethnies du pays.

244. Au sujet de l'article 6 de la Convention, des membres ont voulu que le Gouvernement fournisse quelques exemples de recommandations formulées par la Commission d'enquêtes (médiateur), qui était chargée de traiter les plaintes relatives à la discrimination raciale; des preuves de l'efficacité du tribunal présidentiel à l'égard des questions administratives liées au tribalisme; de l'information sur la jurisprudence du tribunal du travail concernant des cas de discrimination raciale et sur les réparations accordées aux victimes. Ils ont indiqué que l'article 23 de la Constitution ne correspondait pas aux dispositions de l'article 6 de la Convention et ont demandé des éclaircissements à ce sujet.

245. A l'égard de l'article 7 de la Convention, des membres ont voulu savoir quelles mesures avaient été prises par le Gouvernement zambien pour améliorer la formation des forces de police afin qu'elles respectent davantage les droits de l'homme; si le Gouvernement envisageait la traduction du texte de la Convention dans les langues principales parlées au pays; et si le Gouvernement avait sollicité l'assistance du Centre pour les droits de l'homme des Nations Unies pour l'aider à rédiger les rapports, pour la traduction de la Convention et pour l'organisation des séminaires sur la protection effective des droits de l'homme destinés aux membres du corps de police, de sécurité, et des forces armées.

246. Ayant constaté que la Zambie avait ratifié le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits c)vils et politiques, des membres ont demandé si le Gouvernement envisageait de faire la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention afin de reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de personnes ou de groupes de personnes relevant de sa juridiction qui se plaignaient d'être victimes d'une violation par l'Etat de l'un quelconque des droits énoncés dans la Convention.

247. Le représentant de l'Etat partie, répondant aux questions posées et commentaires faits par des membres du Comité, a précisé que la brièveté du rapport s'expliquait par le fait qu'il avait été rédigé en vue d'entamer un dialogue plutôt que pour couvrir la période de 10 ans qui s'était écoulée depuis la soumission du rapport précédent, en 1983. Il a assuré le Comité que bonne note avait été prise de toutes les observations et de toutes les questions, et que le prochain rapport serait rédigé conformément aux directives du Comité. Il a souligné que le Gouvernement souhaitait continuer à bénéficier de l'assistance technique de la part du Centre pour les droits de l'homme.

248. L'état d'urgence décrété en mars 1993 ne visait en aucun cas à appliquer des mesures discriminatoires, ni à arrêter des opposants politiques. Aucun parti politique n'avait été interdit, et la liberté d'expression avait été maintenue. En ce qui concernait l'expulsion des étrangers, le représentant a précisé que les mesures d'expulsion ne concernaient pas les réfugiés, mais des contrebandiers entrés clandestinement dans le pays pour voler les pierres précieuses qui y étaient produites.

249. La communauté asiatique était bien intégrée à la population et il n'existait pas de conflits entre la population zambienne et la population d'origine asiatique. Cette absence de conflit expliquait l'absence de législation sur ce sujet.

Conclusions

250. A sa 1007e séance, tenue le 17 août 1993, le Comité a adopté les conclusions suivantes.

a) Introduction

251. Le Comité s'est félicité que la Zambie ait soumis son onzième rapport périodique, ce qui démontrait la volonté du Gouvernement zambien de renouer, après 10 années, le dialogue avec le Comité. Le comité a noté avec regret que le rapport en question n'était pas conforme aux directives générales révisées pour la préparation des rapports et qu'il présentait des lacunes. Toutefois, le débat oral a permis au Comité de clarifier certains points préoccupants et de coopérer de nouveau avec le Gouvernement zambien en vue d'appliquer effectivement les dispositions de la Convention.

b) Aspects positifs

252. Le Comité a noté avec satisfaction qu'en novembre 1991, la Zambie était passée pacifiquement d'un système de parti unique à une démocratie multipartiste. Il a noté en outre que la nouvelle Constitution comportait des dispositions détaillées visant à assurer l'exercice des droits fondamentaux et leur protection dans le cadre de la loi. Le Comité a félicité la Zambie pour son soutien à la lutte de libération en Afrique australe et sa contribution au démantèlement de l'apartheid. Il a rendu hommage au Gouvernement zambien qui n'hésitait pas à accueillir en grand nombre des réfugiés de plusieurs pays d'Afrique.

c) Facteurs et difficultés faisant obstacle à l'application de la Convention

253. Le Comité a constaté que, presque tout au long de son existence en tant que nation, la Zambie avait été gouvernée par un parti unique et que, de 1964 à 1991, elle avait connu un état d'exception, avec un certain impact négatif sur la situation générale dans le pays du point de vue des droits de l'homme. Le retour à l'état d'exception, le 4 mars 1993, avait peut-être aussi affecté de façon négative la mise en oeuvre véritable de la Convention. Le Comité a noté que, faute de ressources financières suffisantes, le Gouvernement ne pouvait pas traduire la Convention dans les différentes langues du pays et réaliser les programmes d'éducation et de formation nécessaires dans le domaine des droits de l'homme, surtout à l'intention des responsables de l'application des lois.

d) Principaux sujets de préoccupation

254. Le Comité s'est demandé quelle était la place de la Convention dans son ensemble dans le cadre juridique de la Zambie et a constaté avec préoccupation que les dispositions essentielles de cet instrument n'avaient pas été incorporées dans la législation interne, en particulier les dispositions des alinéas b) et c) de l'article 4. Le Comité était également préoccupé par la proclamation récente de l'état d'exception; par le traitement dont certaines catégories de réfugiés faisaient l'objet; et par les actes de violence de nature discriminatoire qui auraient été perpétrés par des membres de la police. En outre, le Comité a estimé que la législation zambienne n'avait pas véritablement reconnu le principe des recours et le droit à réparation que l'article 6 de la Convention prévoyait en faveur des victimes. Le Comité a constaté, par ailleurs, que l'alinéa c) du paragraphe 4 de la section 23 de la Constitution de 1991 n'était pas conforme aux prescriptions de l'article premier de la Convention. Il était préoccupé aussi par les cas de discrimination à l'encontre des membres de la communauté asiatique en Zambie qui seraient le fait de fonctionnaires publics.

e) Suggestions et recommandations

255. Le Comité a recommandé que le Gouvernement zambien envisage comme il se devait de transcrire effectivement dans la législation interne les dispositions de la Convention et, en particulier, celles des alinéas b) et c) de l'article 4; que le texte de la Convention soit traduit et diffusé, au moins parmi les principaux groupes linguistiques; et qu'à cet effet, le concours du Centre pour les droits de l'homme soit sollicité. En outre, le Comité a considéré qu'à la lumière de la Déclaration et du Programme d'action de Vienne adoptés par la Conférence mondiale sur les droits de l'homme, le Gouvernement envisage sérieusement d'accepter la compétence du Comité conformément à l'article 14 de la Convention.

256. Le Comité a recommandé également que, conformément à sa recommandation générale XIII (42), les responsables de l'application des lois reçoivent une formation approfondie qui leur permette, dans l'exécution de leurs fonctions, de respecter et de protéger la dignité humaine et de faire respecter les droits de l'homme de tous sans distinction de race, d'ascendance, de couleur ou d'origine nationale ou ethnique. Le Comité a recommandé au Gouvernement zambien, à cette fin et pour préparer le prochain rapport, de solliciter l'assistance du Centre pour les droits de l'homme.



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