University of Minnesota



Observations finales du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, U.N. Doc. A/48/18,paras.382-425 (1993).






COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION


Conclusions du Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord


382. Le douzième rapport périodique du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, y compris les territoires dépendants (CERD/C/226/Add.4) a été examiné par le Comité de sa 996e à sa 998e séance, les 9 et 10 août 1993 (CERD/C/SR.996 à 998).

383. Le rapport a été présenté par le représentant de l'Etat partie, qui a rappelé l'importance que son gouvernement attachait au dialogue engagé avec le Comité. Il a souligné que la situation au Royaume-Uni était loin d'être entièrement satisfaisante en matière de discrimination raciale, étant donné qu'il était plus aisé de changer les textes que les mentalités. Il a rappelé que la loi sur les relations raciales de 1976 demeurait l'outil législatif essentiel pour l'application de la Convention au Royaume-Uni. La Commission pour l'égalité raciale (dont le nouveau Président était issu d'un groupe ethnique minoritaire) avait formulé 31 recommandations tendant notamment à modifier la législation, à augmenter les pouvoirs de la Commission et à prendre de nouvelles dispositions destinées à décourager la discrimination. Ces recommandations étaient actuellement à l'examen au sein du Gouvernement qui apporterait sa réponse à certaines d'entre elles d'ici la fin de l'année. Le nombre de plaintes concernant la discrimination portées devant les juridictions prud'homales avait quelque peu augmenté, ce qui semblait indiquer que le système prévu par la loi de 1976 était mieux connu et davantage utilisé.

384. Selon les données tirées du recensement de 1991 le premier à comporter des questions concernant l'origine ethnique la population issue de minorités ethniques serait d'environ 3 millions sur un total d'à peu près 55 millions de personnes, soit 5,5 %. De grandes disparités existaient entre les diverses communautés.

385. Le représentant a fait état de deux mesures concrètes visant à adapter le système judiciaire aux besoins des minorités ethniques. D'une part, la loi de 1991 sur la justice pénale faisait obligation au Ministère de l'intérieur de publier chaque année des données visant à faciliter la tâche des responsables de l'administration pénale, afin d'éviter toute discrimination; d'autre part, un comité consultatif sur les minorités ethniques créé en 1991 avait notamment été chargé de dispenser une formation portant sur les questions relatives aux minorités, à toutes les personnes appelées à rendre la justice. Il a souligné que le nombre des attentats racistes était une source de graves préoccupations; ainsi, le nombre de tels attentats signalés à la police était passé d'environ 4 400 en 1988 à 7 800 en 1992, et une estimation fondée sur une enquête officielle sur la criminalité en Grande-Bretagne donnait à penser que le nombre réel d'infractions à caractère raciste oscillerait entre 130 000 et 140 000 par an. Un "Groupe des attentats racistes" (Racial Attacks Group) avait été créé et avait publié deux rapports, en 1989 et 1992, qui avaient beaucoup contribué à la mise en place d'actions interinstitutions et au renforcement de la coopération entre organismes pour traiter de ce problème délicat. Il existait, par ailleurs un danger de violence entre les différentes communautés ethniques minoritaires, danger exacerbé, par exemple, par les réactions à l'attaque de la mosquée d'Ayodhya en Inde en 1992. La concentration des minorités ethniques dans les zones défavorisées des centres-villes était source de préoccupation; les autorités s'employaient à rénover ces zones, dans le cadre notamment de l'initiative "Défi urbain" (Urban Challenge) lancée en 1991, et dont l'un des objectifs était de dispenser une formation et de lancer des projets communautaires en faveur des minorités. Il existait actuellement 31 programmes d'action en partenariat, pour lesquels 37,5 millions de livres sterling seraient débloqués sur une période de cinq ans. Au total, les fonds alloués par les autorités pour ces programmes dépasseraient le milliard de livres sterling. De nombreux programmes contribuaient à la rénovation du centre des villes; ainsi le budget du programme urbain était actuellement de 156 millions de livres sterling.

386. Concernant les territoires dépendants, le représentant de l'Etat partie a indiqué qu'à l'exception de Hong-kong, pour qui deux rapports avaient été présentés, les onzième et douzième rapports périodiques avaient été regroupés en un seul texte, et ce en raison d'une pénurie aiguë de ressources et d'expertise technique dans ces territoires. Au sujet du rapport sur les îles Caïmanes, où il était fait mention de la possibilité de modifier la Constitution du territoire par l'incorporation d'une charte des droits de l'homme, il a précisé que cette réforme aurait lieu dans un proche avenir et que cette charte comprendrait une disposition relative à la lutte contre la discrimination. A propos de Hong-kong, où la Hong-Kong Bill of Rights Ordinance avait été promulguée en 1991, il a déclaré que le texte de la Charte des droits de l'homme avait été incorporé dans cette Ordinance.

387. Les membres du Comité ont exprimé leur satisfaction devant l'abondance des renseignements présentés par le Gouvernement du Royaume-Uni dans son rapport, ainsi que dans le document de base présenté en juin 1992 (HRI/Core/1/Add.5), et ont également bien accueilli la présentation franche et détaillée faite par le représentant de l'Etat partie. Ils ont noté avec satisfaction le sérieux avec lequel le Gouvernement envisageait ses obligations en ce qui concernait la présentation de rapports et sa volonté de poursuivre un dialogue fructueux avec le Comité et de donner effet aux dispositions de la Convention. Toutefois, ils ont relevé que le rapport ne se conformait pas entièrement aux directives énoncées par le Comité. Ils ont demandé de plus amples renseignements sur divers indicateurs sociaux très utiles pour savoir dans quelle mesure certains groupes minoritaires ne parvenaient pas à s'intégrer à la communauté. Ils ont souhaité savoir quelles mesures avaient été prises, outre le recensement de 1991, pour disposer de renseignements plus précis sur l'importance, les caractéristiques et la distribution des groupes ethniques minoritaires; ils ont également demandé de quelle façon les minorités ethniques avaient été consultées sur la formulation de la question relative à l'origine ethnique dans le cadre du recensement de 1991. Ils souhaitaient savoir si des mesures législatives avaient été prises, après 1990, afin de compléter la loi sur les relations raciales, et quelle suite avait été donnée par le Gouvernement aux recommandations formulées par la Commission pour l'égalité raciale en vue d'améliorer la législation.

388. En ce qui concerne la situation en Irlande du Nord, l'information fournie dans le rapport a été jugée trop générale. Les membres du Comité ont exprimé leur préoccupation du fait que la loi sur les relations raciales n'était pas appliquée en Irlande du Nord et que la Commission pour l'égalité raciale n'y était pas compétente. Des renseignements ont été demandés sur la composition ethnique des minorités d'Irlande du Nord et plus de précisions ont été requises en ce qui concerne les gens du voyage et leur situation par rapport aux autres groupes ethniques minoritaires, et au sujet des personnes d'origine chinoise, qui seraient victimes d'actes de racisme. Estimant que le Gouvernement du Royaume-Uni ne s'acquittait pas, pour ce qui est de l'Irlande du Nord, de son obligation de promulguer une législation interdisant la discrimination raciale, les membres du Comité ont demandé s'il n'était pas du moins envisagé d'appliquer à cette partie du Royaume la loi de 1976 sur les relations raciales. Ils ont souhaité savoir quelle avait été la réaction du Gouvernement à la publication en 1992 du document intitulé "Racism in Northern Ireland". Ils ont demandé des précisions sur l'aide des pouvoirs publics aux communautés ethniques minoritaires en Irlande du Nord. Les membres du Comité ont souhaité savoir de quels recours disposaient les personnes victimes de discrimination raciale en Irlande du Nord et quelles mesures avaient été prises pour permettre à chacun, sans distinction, d'exercer ses droits fondamentaux. Faisant état d'allégations selon lesquelles des Irlandais vivant au Royaume-Uni auraient été victimes d'actes de discrimination raciale, ils se sont enquis des mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre ce phénomène.

389. A propos de l'article 2 de la Convention, les membres du Comité ont voulu savoir comment les divers programmes et initiatives de lutte contre la discrimination raciale s'appliqueraient dans la pratique. Il a été demandé de plus amples informations sur les résultats des programmes de prévention de la délinquance actuellement engagés. Constatant que le nombre d'agents de police appartenant à des minorités ethniques ne s'était accru que faiblement, on a demandé quelles mesures étaient envisagées pour accroître ce nombre. Concernant les attentats racistes, dont l'ampleur était préoccupante, il convenait d'étudier plus à fond ce phénomène et d'adopter des mesures plus efficaces pour y remédier. A cet égard, les membres du Comité ont souhaité savoir si la police mettait véritablement en oeuvre de façon appropriée les mesures et recommandations formulées par le Racial Attacks Group, et si des sanctions effectives étaient prises contre les membres des forces de police auteurs d'actes délictueux. Ils ont demandé si les forces de police recevaient une formation spéciale pour être à même de prévenir les incidents racistes et si le public en général recevait une éducation appropriée visant à modifier les mentalités et inculquer aux citoyens les principes d'égalité et de tolérance. Ils ont voulu savoir si des sanctions pénales spéciales étaient prévues en cas d'agression à composante raciale et s'il n'était pas jugé nécessaire de punir plus sévèrement les auteurs de ces agressions. Compte tenu de la dimension internationale du problème, on a demandé quelles mesures le Royaume-Uni comptait prendre, en concertation avec d'autres Etats européens, pour faire face à la montée des attentats racistes. Les membres du Comité ont également demandé des explications concernant la situation des employés de maison à l'étranger et les mesures prises en leur faveur; il semblait, en effet, qu'un grand nombre de ces personnes seraient maltraitées à divers égards.

390. A propos de l'article 3 de la Convention, on a fait remarquer que le rapport de l'Etat partie ne fournissait pas de renseignements sur l'application de cet article et n'était pas conforme aux directives du Comité à cet égard. Les membres du Comité ont demandé à être informés sur l'état des relations avec le régime d'Afrique du Sud et sur les mesures prises concernant les actes ou pratiques de ségrégation raciale ayant pu se produire sur le territoire de l'Etat partie.

391. Concernant l'article 4 de la Convention, les membres du Comité ont rappelé le caractère contraignant de cet article et regretté qu'il n'ait pas été abordé dans le rapport du Royaume-Uni. Ils ont demandé à recevoir des précisions sur la portée de la législation promulguée afin d'appliquer le paragraphe a) de l'article 4. Ils ont également estimé que la déclaration interprétative du Royaume-Uni concernant l'article 4 risquait de nuire à l'application du paragraphe b) de l'article 4 de la Convention. Ils ont souhaité savoir si le Gouvernement envisageait de retirer cette déclaration interprétative et de prendre des sanctions contre les auteurs de violations des dispositions du paragraphe b) de l'article 4 et de modifier sa politique de tolérance à l'égard du Parti national britannique et d'autres partis politiques ou institutions à tendance fasciste ou antisémite, à propos desquels le Comité a souhaité recevoir plus d'informations.

392. S'agissant de l'article 5 de la Convention, il a été demandé s'il était envisagé, au Royaume-Uni, d'adopter une législation pour corriger les incidences particulières sur certains ressortissants appartenant à des minorités ethniques des réglementations relatives à l'immigration et à la nationalité. A ce propos, les membres du Comité ont demandé s'il était envisagé de mettre à jour la loi sur l'immigration concernant le Commonwealth, afin que tous les étrangers souhaitant s'installer au Royaume-Uni puissent être traités sur un pied d'égalité. Ils ont également souhaité avoir des éclaircissements sur la question des mariages polygames et sur les restrictions éventuelles du droit du libre choix du conjoint découlant de la réglementation actuelle en matière d'immigration. Il a été demandé de plus amples renseignements au sujet de la loi sur la nationalité britannique (Hong-kong) de 1990 et sur la procédure très sélective que prévoyait celle-ci en permettant aux autorités d'immatriculer comme citoyens britanniques 50 000 personnes "jouant un rôle important". Pour la question de l'asile, des éclaircissements ont été demandés sur les critères appliqués pour octroyer l'asile et sur les informations selon lesquelles certains demandeurs d'asile auraient été renvoyés de force dans des pays où leur sécurité n'était pas assurée. En matière d'emploi, des renseignements supplémentaires ont été demandés au sujet du recrutement dans le secteur privé. Alors qu'en vertu de la loi de 1968, la Royal Household (Maison royale) était tenue de ne pas pratiquer de discrimination raciale en matière d'emploi, elle avait été exemptée de cette prescription, pour une raison ou une autre, par la loi de 1976. Les membres du Comité ont également demandé ce que faisait le Gouvernement, en plus des mesures d'aide sociale, pour pallier le taux de chômage très élevé des groupes minoritaires. Dans le domaine de l'éducation, les membres ont demandé que l'on précise dans combien d'établissements l'enseignement était dispensé dans la langue maternelle de l'élève. Ils ont également demandé si du fait que les écoles avaient la possibilité de ne plus être contrôlées par les services locaux de l'éducation, les risques inhérents à un système de ségrégation raciale ne risquaient pas de s'aggraver. On a souhaité savoir combien de temps était réservé aux prières collectives de caractère essentiellement chrétien dans les écoles non confessionnelles et quels étaient les différents taux de mortalité infantile selon les groupes ethniques. Les membres ont également demandé s'il existait au Royaume-Uni des partis politiques établis sur une base ethnique, combien de membres du Parlement appartenaient à des groupes ethniques minoritaires et quel était l'impact des communautés ethniques sur les élections parlementaires.

393. A propos de l'article 6 de la Convention, les membres du Comité ont demandé si la Commission pour l'égalité raciale participait à l'élaboration ou à la révision des rapports présentés au Comité. Ils ont souhaité disposer de plus de renseignements sur le fonctionnement des juridictions prud'homales. Il a été demandé de plus amples informations sur les cas de discrimination raciale soumis aux tribunaux du Royaume-Uni ou à la Cour européenne des droits de l'homme, ainsi que des précisions sur les implications de la déclaration interprétative de l'Etat partie concernant l'article 6 en matière de réparation et d'indemnisation. Les membres du Comité ont également demandé si le Gouvernement envisageait de faire la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention.

394. Concernant l'article 7 de la Convention, les membres du Comité ont souhaité savoir lesquelles parmi les mesures indiquées au titre de l'application de cet article s'étaient révélées efficaces, et quel était le rôle du Département de l'éducation dans la politique globale de réduction des agressions raciales. On a demandé si les dispositions de la Convention étaient suffisamment enseignées, si les rapports présentés au Comité étaient publiés par le Gouvernement et si les conclusions de l'examen qui en était fait étaient divulguées.

395. Se référant à l'article 11 de la Convention, les membres ont demandé si le Royaume-Uni n'envisageait pas la possibilité de porter à l'attention du Comité, conformément aux dispositions de cet article, les cas de discrimination raciale qui auraient pu se produire dans d'autres Etats parties.

396. Les membres du Comité ont demandé si le Royaume-Uni envisageait de retirer, ou du moins de limiter au minimum, ses réserves et déclarations interprétatives concernant la Convention et notamment les articles 4 et 6. Ils ont souhaité savoir pourquoi les réserves concernant la Rhodésie et Fidji n'avaient pas encore été retirées.

397. Pour les territoires dépendants, les membres du Comité ont demandé pourquoi la Convention n'avait pas été incorporée à la législation interne de ces territoires et ils ont estimé qu'il restait beaucoup à faire à l'Etat partie pour s'acquitter de ses obligations juridiques au regard de la Convention vis-à-vis de ces territoires, notamment en adoptant une législation qui donne effet aux dispositions de l'article 4 de la Convention. Les membres du Comité ont demandé si les îles anglo-normandes et l'île de Man étaient des territoires relevant de la juridiction du Royaume-Uni et, dans l'affirmative, si la Convention leur était applicable. Ils ont souhaité savoir si des problèmes de discrimination raciale s'étaient posés pour les employés de maison étrangers travaillant à Hong-kong. Notant qu'à Hong-kong la procédure devant les tribunaux supérieurs se déroulait en anglais seulement, les membres ont demandé si les autorités avaient l'intention d'introduire aussi l'utilisation du chinois devant ces tribunaux. En ce qui concerne le territoire des Bermudes, les membres du Comité ont demandé si les recommandations de l'Inspecteur principal des prisons pour l'Angleterre et le pays de Galles concernant le taux de criminalité disproportionné observé chez des jeunes Noirs, qui serait lié aux modalités d'application par la police de certaines réglementations, étaient acceptées. A propos de l'île de Sainte-Hélène, des précisions ont été demandées sur les "belongers" résidant dans l'île et sur la possibilité, dans la pratique, pour toutes les races de fréquenter les écoles publiques ou privées.

398. Répondant aux questions et observations des membres du Comité, le représentant de l'Etat partie a souligné que l'on constatait beaucoup moins de cas flagrants de discrimination raciale aujourd'hui qu'il y a une dizaine d'années au Royaume-Uni; que l'on recourait de plus en plus aux juridictions prud'homales mises en place par la loi de 1976; et que la situation des communautés ethniques au Royaume-Uni s'était améliorée en matière de logement, d'éducation, voire d'emploi, au fil des ans.

399. Selon les résultats du recensement de 1991, 94,5 % de la population du Royaume-Uni appartenait au groupe ethnique blanc. Il y avait environ 520 000 habitants de souche indienne, 490 000 de souche pakistano-bangladeshi, et 490 000 de souche afro-antillaise. Les minorités ethniques avaient tendance à vivre dans les zones métropolitaines, notamment dans le sud-est de l'Angleterre. En outre, il existait d'importantes disparités régionales quant à la répartition des différents groupes ethniques. Les organisations représentant les minorités avaient été consultées pour la mise au point de la question sur les groupes ethniques en vue du recensement de 1991 et, selon les statisticiens, les réponses données étaient satisfaisantes. Le questionnaire relatif au recensement effectué en Irlande du Nord ne comportait aucune question sur les groupes ethniques car il était apparu, lors des consultations préalables, que cette information n'était guère requise. En revanche, le questionnaire comportait une question sur la religion.

400. Concernant la question relative à la législation sur la discrimination raciale, le représentant de l'Etat partie a signalé que la Commission pour l'égalité raciale avait adressé, en septembre 1991, des recommandations au Ministère de l'intérieur en vue notamment de renforcer la législation sur la discrimination raciale, de prévoir le délit d'incitation à la haine religieuse, d'interdire toute discrimination fondée sur la religion et d'accroître l'efficacité de l'appareil judiciaire. Le Gouvernement avait défini les domaines nécessitant un examen plus approfondi et créé à cet effet un groupe de travail au sein de la Commission pour l'égalité raciale.

401. A propos des questions relatives à la situation des minorités ethniques en Irlande du Nord, le représentant de l'Etat partie a souligné que le Gouvernement acceptait le principe d'une protection de ceux qui étaient victimes de discrimination en raison de leur race en Irlande du Nord. Le Gouvernement reconnaissait l'importance de la question des nomades (gens du voyage) irlandais, et le document consultatif publié par le Ministère chargé de l'Irlande du Nord indiquait qu'il avait été proposé de considérer ces personnes comme appartenant à un groupe ethnique et de les prendre en compte dans tout projet de loi sur la discrimination raciale en Irlande du Nord.

402. Répondant aux questions ayant trait aux attentats racistes, le représentant a précisé que le Gouvernement reconnaissait la nécessité de disposer de chiffres plus précis. La question des infractions d'origine raciste était complexe et nécessitait plus de recherches et des techniques d'analyse plus perfectionnées. Le Sous-Comité des affaires intérieures de la Chambre des communes étudiait actuellement le problème. Le Groupe des attentats racistes (Racial Attacks Group) était chargé de formuler des recommandations et de contrôler leur application; il avait formulé, dans son rapport de 1991, des recommandations à l'intention des forces de police et des autorités locales. Tous les officiers de police recevaient une formation sur les relations communautaires et raciales pendant leur stage, puis une formation plus poussée à l'école de police. Le Ministère de l'intérieur avait créé, en 1989, un service chargé de former du personnel d'enseignement dans le domaine des relations communautaires et raciales. Les articles 8 et 9 du code de discipline de la police concernaient le comportement discriminatoire des officiers de police. La peine maximale prévue au titre de ces deux articles était le licenciement. D'autre part, les inspecteurs de la police veillaient à ce que les corps de police appliquent les directives du Ministère de l'intérieur sur l'égalité des chances au niveau du recrutement et des possibilités de carrière des minorités dans les forces de police, ainsi que les recommandations du Groupe des attentats racistes.

403. Concernant l'éventualité d'un nouveau cadre juridique pour les actes de violence d'origine raciste et l'incitation à la haine raciale, le représentant de l'Etat partie a précisé que la Commission pour l'égalité raciale avait proposé d'inclure dans la législation le délit d'agression raciste. Cette proposition, qui faisait l'objet de certaines réserves, serait examinée par les autorités avec beaucoup d'attention. Répondant à la question concernant la coopération internationale dans le domaine de la discrimination raciale, le représentant a rappelé que le Conseil de l'Europe avait adopté une déclaration condamnant le racisme et la xénophobie à l'élaboration de laquelle le Royaume-Uni avait activement participé.

404. En ce qui concerne l'article 3 de la Convention, le représentant a rappelé la position maintes fois réitérée par le Royaume-Uni, à savoir le rejet de l'apartheid sous toutes ses formes. Il a également rappelé que l'article 18 de la loi sur les relations raciales de 1976 ne pouvait être invoqué que lorsque les autorités locales chargées de l'enseignement commettaient un acte de discrimination dans le cadre de leurs fonctions.

405. Au sujet de l'article 4 de la Convention, le représentant de l'Etat partie a rappelé la position du Royaume-Uni selon laquelle la législation existante, et notamment la loi relative à l'ordre public de 1986, prohibait et punissait les activités telles que l'incitation à la haine raciale et autres menées analogues d'une manière conforme aux exigences de l'article 4, sans pour autant porter atteinte aux principes de la liberté d'expression et d'association.

406. Concernant la suggestion selon laquelle le Royaume-Uni pourrait invoquer l'article 11 en cas de violations par d'autres Etats parties des droits protégés par la Convention, le représentant a déclaré que son pays continuerait d'avoir présents à l'esprit les droits que lui conférait l'article 11; quant à la déclaration relative à l'article 14 de la Convention, le Gouvernement du Royaume-Uni n'envisageait pas de la faire, compte tenu du fait que les éventuels pétitionnaires disposaient d'autres voies de recours.

407. S'agissant des réserves formulées par le Royaume-Uni lors de la signature et de la ratification de la Convention, notamment au sujet de Fidji et de la Rhodésie (aujourd'hui Zimbabwe), le représentant a indiqué qu'il n'était pas nécessaire de les retirer officiellement puisqu'elles étaient devenues caduques. En effet, à partir du moment où ils étaient devenus indépendants, le Royaume-Uni avait cessé d'avoir des droits ou des obligations vis-à-vis de ces territoires au titre de la Convention ou de tout autre instrument international relatif aux droits de l'homme.

408. A propos des territoires dépendants, le représentant a indiqué que certaines des questions posées nécessiteraient un examen plus approfondi, et qu'il y serait répondu le plus rapidement possible.

Conclusions

409. A sa 1009e séance, tenue le 18 août 1993, le Comité a adopté les conclusions ci-après.

a) Introduction

410. Le Comité a exprimé sa satisfaction devant l'abondance de renseignements présentés dans le rapport et ses annexes ainsi que devant les informations complémentaires présentées oralement. Il a noté avec satisfaction le sérieux avec lequel le Gouvernement envisageait ses obligations en ce qui concernait la présentation de rapports. Le Comité a remercié les représentants de l'Etat partie qui s'étaient attachés à répondre aux nombreuses questions posées, permettant ainsi au Comité d'avoir une idée plus claire de la situation générale en ce qui concernait le respect par l'Etat partie de ses obligations au regard de la Convention. Le Comité a déploré, cependant, que le rapport n'ait pas été préparé de façon entièrement conforme aux directives du Comité pour la présentation des rapports des Etats parties et, en particulier, qu'il ne donne aucun renseignement sur la mise en oeuvre des articles 3 et 4 de la Convention.

b) Aspects positifs

411. Le Comité s'est félicité des efforts entrepris par le Gouvernement du Royaume-Uni pour améliorer la protection garantie à ses minorités ethniques et pour pallier les problèmes qui faisaient encore obstacle à la mise en oeuvre de la Convention. Il a pris note des mesures décidées pour renforcer et compléter la loi sur les relations raciales de 1976 et pour accroître l'efficacité de la Commission pour l'égalité raciale, ainsi que des différentes initiatives visant à promouvoir des relations raciales harmonieuses et à renforcer la sécurité dans les zones urbaines, à recruter davantage de personnes appartenant aux minorités ethniques dans les forces de police et à améliorer la situation économique et sociale des groupes minoritaires, au moyen de mesures diverses dans les domaines de l'emploi et de la formation, du logement, des services sociaux, de la santé et de l'éducation. Le Comité espérait que ces initiatives se concrétiseraient dans un avenir proche et entendait avoir des informations à ce sujet dans le prochain rapport périodique.

c) Facteurs et difficultés entravant l'application de la Convention

412. Le Comité a relevé une multiplication des manifestations de racisme et des attentats racistes visant les membres des minorités ethniques sur le territoire de l'Etat partie.

d) Principaux sujets de préoccupation

413. Le Comité partageait l'inquiétude de l'Etat partie devant la montée des attentats racistes. Il a estimé, cependant, qu'il n'avait pas été enquêté suffisamment à fond sur les causes de ce phénomène et sur les manifestations d'idées racistes.

414. Le Comité a regretté que les renseignements communiqués au sujet de l'application de la Convention en Irlande du Nord soient insuffisants. Il a constaté également avec préoccupation qu'il n'existait pas en Irlande du Nord de législation interdisant la discrimination raciale et que de ce fait des minorités ethniques, en particulier les gens du voyage et les personnes d'origine chinoise, n'étaient pas protégées comme il conviendrait.

415. Le Comité a noté encore avec regret que l'Etat partie n'avait toujours pas fourni de renseignements sur l'application de l'article 3 de la Convention.

416. Le Comité a déploré que l'Etat partie ne s'acquitte pas de ses obligations au regard de l'article 4 de la Convention, qui prévoyait l'adoption d'une législation pénale spécifique. En n'interdisant pas le Parti national britannique et d'autres groupes ou organisations de nature raciste et en les autorisant à poursuivre leurs activités, l'Etat partie n'agissait pas conformément à l'article 4, qui prévoyait la condamnation de toutes les organisations prétendant justifier ou encourager la haine et la discrimination raciales. Le Comité considérait en outre que face à la montée des idéologies racistes et à la multiplication des attentats racistes, l'interprétation restrictive de l'article 4 était incompatible avec les buts et objectifs de la Convention et avec la Recommandation générale XV du Comité.

417. Le Comité a noté avec préoccupation qu'en dépit des mesures prises par les autorités, le taux de chômage parmi les minorités ethniques restait très élevé et que la notion de première intention pour le mariage figurant dans la réglementation en matière d'immigration pouvait entraîner, dans les faits, une discrimination en fonction de l'origine ethnique.

418. En ce qui concernait les territoires dépendants, le Comité a constaté avec préoccupation que la Convention n'avait pas été incorporée à la législation interne de ces territoires et ne pouvait être invoquée devant les tribunaux. Dans le cas de Hong-kong, en particulier, le Comité déplorait le caractère discriminatoire des dispositions de la loi sur la nationalité britannique (Hong-kong) de 1990, aux termes desquelles les autorités ne pouvaient immatriculer comme citoyens britanniques que 50 000 personnes "jouant un rôle important".

e) Suggestions et recommandations

419. Le Comité a recommandé que conformément aux propositions de la Commission pour l'égalité raciale, l'Etat partie prenne les mesures qui s'imposaient, sur le plan législatif et autre, pour mieux donner effet aux dispositions de la Convention. L'Etat partie devrait envisager, en particulier, de réviser la loi sur les relations raciales de 1976. Le Comité a recommandé encore à l'Etat partie soit d'adopter une législation concernant la protection contre la discrimination raciale en Irlande du Nord, soit d'étendre la portée de la loi sur les relations raciales à l'Irlande du Nord.

420. Le Comité a recommandé en outre à l'Etat partie d'inclure, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur l'application des articles 3 et 4 de la Convention.

421. Le Comité a suggéré également à l'Etat partie de prendre d'autres mesures concrètes, sur le plan législatif et autre, pour prévenir les actes d'incitation à la haine raciale et les attentats racistes; d'analyser en particulier plus à fond les causes de ces attentats; de renforcer les efforts actuellement engagés pour recruter davantage de membres des minorités ethniques dans les forces de police; d'interdire les activités des organisations racistes et de déclarer punissable par la loi la propagation d'idées fondées sur la haine raciale.

422. Le Comité a encouragé l'Etat partie à réexaminer ses déclarations interprétatives et ses réserves, notamment en ce qui concernait les articles 4 et 6 de la Convention, en vue de les retirer.

423. S'agissant des territoires dépendants, le Comité a recommandé que la Convention soit incorporée à la législation interne de ces territoires.

424. Le Comité a estimé que la situation au Royaume-Uni devait être suivie attentivement et il comptait que dans le treizième rapport périodique de ce pays, il serait rendu compte de l'application des recommandations formulées dans les paragraphes 419 à 422.

425. Enfin, le Comité a recommandé à l'Etat partie d'envisager de faire la déclaration prévue au paragraphe 1 de l'article 14 de la Convention.



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