University of Minnesota



Conclusions du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Suisse, U.N. Doc. CERD/C/304/Add.44 (1998).




COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE
Cinquante-deuxième session


EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Conclusions du Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

Suisse

1. Le Comité a examiné le rapport initial de la Suisse (CERD/C/270/Add.1) à ses 1248ème et 1249ème séances, les 3 et 4 mars 1998 et il a adopté à sa 1268ème séance, le 17 mars 1998, les observations suivantes.

A. Introduction

2. Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial soumis par la Suisse ainsi que l'introduction détaillée faite par la délégation et la possibilité qui a été ainsi offerte d'engager un dialogue avec l'Etat partie. Il exprime à l'Etat partie sa satisfaction de la qualité du rapport, encore qu'il regrette qu'il n'ait pas été soumis dans les délais fixés.


B. Aspects positifs

3. Il est noté avec satisfaction que l'Etat partie a établi une Commission fédérale contre le racisme, qui a pour mandat de promouvoir une meilleure entente entre les personnes de race, de couleur et d'origine ethnique ou religieuse différente et de combattre toutes formes de discrimination raciale directe ou indirecte. Le Comité se félicite des initiatives prises par cette commission dans le domaine de l'éducation et de l'information.

4. L'adoption de l'article 261 bis du Code pénal, qui vise à donner effet aux articles 4 et 5 f) de la Convention, est accueillie avec satisfaction.


C. Principaux sujets de préoccupation

5. Tout en prenant note des projets de réforme de la Constitution fédérale, le Comité est préoccupé par l'absence de législation globale visant à lutter contre la discrimination tenant à la race, à la couleur, à l'ascendance ou à l'origine nationale ou ethnique. Une telle législation devrait prévoir des mesures visant à lutter contre la discrimination raciale dans le domaine du travail et du logement et, plus généralement, la discrimination raciale exercée par toute personne, groupe ou organisation, comme il est énoncé au paragraphe 1 d) de l'article 2 de la Convention.

6. Tout en notant que la politique actuelle de la Suisse en matière d'immigration peut faire l'objet d'une révision, le Comité exprime son inquiétude devant la politique actuelle qui est construite "sur la base de trois cercles", car elle classe les étrangers en fonction de leur origine nationale. Le Comité considère que la conception et les effets de cette politique sont dégradants et discriminatoires et, par conséquent, contraires à la lettre et à l'esprit de la Convention. D'autres domaines de préoccupation particulière sont le système étendu de contrôle de police exercé sur les étrangers ainsi que les politiques et les procédures en matière de naturalisation, jugées trop longues et sélectives. Les cas graves de brutalités policières à l'égard de personnes d'origine nationale ou ethnique étrangère sont aussi relevés avec préoccupation.

7. Les restrictions à la liberté de mouvements imposées à la population de souche "jenisch" et à la minorité sinti et rom, ainsi que les tendances à les discréditer qui sont constatées, sont préoccupantes.

8. Des cas de xénophobie, d'antisémitisme, de discrimination raciale et de violence raciale qui surviennent dans le pays ainsi que la propagation d'idées racistes et xénophobes suscitent également une inquiétude. De plus, l'article 4 b) de la Convention n'est pas pleinement appliqué, surtout en ce qui concerne la participation à une organisation illégale et interdite.


D. Suggestions et recommandations

9. Le Comité recommande que la réforme constitutionnelle envisagée dans l'Etat partie reflète plus pleinement les dispositions de la Convention. Cette réforme devrait marquer une condamnation claire de la discrimination raciale.

10. L'Etat partie devrait envisager sérieusement de promulguer une loi globale interdisant la discrimination fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique. D'autres mesures préventives, telles que des campagnes d'information, des programmes d'enseignement et des programmes de formation plus intensifs à l'intention des responsables de l'application de la loi, conformément à l'article 7 de la Convention et à la recommandation générale XIII du Comité, renforceront la mise en oeuvre de la Convention.

11. Le Comité engage instamment l'Etat partie à revoir les éléments de sa politique actuelle en matière d'immigration, selon laquelle les étrangers sont classés en fonction de leur origine nationale, et lui recommande de réexaminer la réserve qu'il a émise au sujet du paragraphe 1 a) de l'article 2 de la Convention.

12. A la lumière de l'article 3 de la Convention et de la Recommandation générale XIX, le Comité encourage l'Etat partie à surveiller toutes les tensions qui peuvent donner lieu à une ségrégation raciale et à oeuvrer à l'élimination de toutes les conséquences négatives qui en découlent.

13. Le Comité recommande à l'Etat partie de prendre les mesures voulues pour assurer l'application de l'article 4 b) de la Convention. Il lui recommande également de donner dans son prochain rapport des renseignements sur les plaintes pour discrimination, conformément à l'article 4 de la Convention, sur les mesures prises par les autorités chargées des poursuites et par les tribunaux compétents ainsi que, le cas échéant, sur la réparation accordée aux victimes.

14. Le Comité encourage l'Etat partie à apporter une contribution au Fonds d'affectation spéciale pour le Programme de la Décennie de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale. Il exprime en outre l'espoir que la Commission fédérale contre le racisme sera dotée des ressources suffisantes pour lui permettre de mener efficacement à bien sa mission et que d'autres organisations et institutions s'occupant des relations raciales recevront également l'appui nécessaire.

15. Il est noté que l'Etat partie n'a pas encore fait la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention et certains membres du Comité demandent à l'Etat partie d'envisager la possibilité de faire cette déclaration.

16. Le Comité suggère à l'Etat partie de faire largement distribuer le rapport et les présentes conclusions pour le faire connaître de l'opinion publique dans les différentes langues officielles de la Suisse. Il recommande à l'Etat partie de traiter dans son deuxième rapport périodique, qui doit être soumis avant le 29 décembre 1997 et qui peut avoir un caractère de mise à jour, de toutes les questions soulevées dans les présentes conclusions.



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