COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE
Soixante-deuxième session
3-21 mars 2003
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION
Conclusions du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale*
Arabie saoudite
1. Le Comité a examiné le rapport initial et le deuxième rapport périodique,
soumis en un seul document (CERD/C/370/Add.1), ainsi que le troisième rapport
périodique de l'Arabie saoudite (CERD/C/439/Add.1), à ses 1558e et 1559e séances,
tenues les 5 et 6 mars 2003 (CERD/C/SR.1558 et 1559). À sa 1580e séance, tenue
le 21 mars 2003 (CERD/C/SR.1580), il a adopté les conclusions qui suivent.
A. Introduction
2. Le Comité se félicite des rapports soumis par l'État partie, ainsi que
des renseignements supplémentaires présentés par écrit, et se déclare encouragé
par le fait que l'État partie se soit fait représenter par une délégation
de rang élevé. Il se félicite du dialogue engagé à cette occasion.
3. Le Comité constate, cependant, que les rapports soumis ne sont pas entièrement
conformes à ses directives. Il note qu'alors que des renseignements ont
été présentés sur la législation et la réglementation pertinentes, ainsi
que sur l'appareil judiciaire, ni lesdits rapports ni le document de base
ne contiennent de données relatives à la structure politique du pays et
aux caractéristiques démographiques de la population. En outre, la façon
dont les dispositions de la Convention sont mises en pratique et les facteurs
et difficultés en entravant l'application intégrale sont insuffisamment
présentés.
B. Aspects positifs
4. Le Comité prend note des réformes entreprises par l'État partie dans le
domaine des droits de l'homme, en particulier l'adoption des nouveaux codes
concernant la procédure judiciaire; la procédure pénale et la profession judiciaire,
la création d'un comité permanent chargé d'enquêter sur les plaintes de torture;
et le programme national récemment adopté en vue d'éliminer la pauvreté. Il
note également que l'État partie s'apprête à autoriser la création de la première
organisation non gouvernementale (ONG) de protection des droits de l'homme
en Arabie saoudite et espère recevoir des informations sur cette mesure encourageante
dans le prochain rapport.
5. Le Comité se félicite du dialogue et de la coopération de l'État partie
avec les mécanismes de protection des droits de l'homme de l'Organisation
des Nations Unies, y compris le Rapporteur spécial sur l'indépendance des
juges et des avocats, ainsi qu'avec des ONG internationales de protection
des droits de l'homme.
6. Le Comité se félicite de la récente mesure visant à admettre les étrangers
au bénéfice d'un régime d'assurance-santé. De même, il a pris note avec
satisfaction que des mesures ont été prises pour mettre fin à la pratique
des employeurs consistant à retenir le passeport de leurs employés étrangers,
en particulier leur personnel domestique. Il prend note aussi du nombre
élevé des écoles qui ont été autorisées à assurer, à l'intention des enfants
de travailleurs migrants, des programmes d'enseignement conçus dans le pays
d'origine des intéressés.
7. Le Comité constate avec satisfaction que l'État partie a ratifié le
28 février 2003 les amendements au paragraphe 6 de l'article 8 de la Convention,
adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à
la Convention.
8. Le Comité se félicite d'apprendre que l'État partie adhérera prochainement
au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et au Pacte
international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
C. Sujets de préoccupation et recommandations
9. L'État partie a formulé une réserve générale dont le caractère large et
imprécis suscite des préoccupations quant à sa compatibilité avec l'objet
et le but de la Convention. Le Comité encourage l'État partie à réexaminer
sa réserve en vue de la retirer officiellement.
10. Le Comité note que la Loi fondamentale et les dispositions des décrets
royaux, des textes réglementaires et des codes, ainsi que la charia islamique,
garantissent l'égalité, mais il estime qu'il ne suffit pas d'affirmer le
principe général de la non-discrimination dans ces textes pour s'acquitter
des obligations prévues dans la Convention. Il recommande à l'État partie
d'adopter des textes qui satisfassent aux exigences des articles 2, 3 et
4 de la Convention. À ce propos, il appelle son attention sur ses recommandations
générales I, II, VII et XV et souligne le rôle préventif d'une législation
interdisant expressément la discrimination raciale et la propagande raciste.
11. Par ailleurs, le Comité souligne que les assurances de non-discrimination
énoncées dans la loi, sans que des mécanismes aient été créés pour en suivre
l'application, ne suffisent pas en soi à garantir la non-discrimination.
Il prie l'État partie de communiquer dans ses prochains rapports des renseignements
sur l'application et le suivi concrets des articles 4, 5 et 6 de la Convention,
y compris sur les mécanismes habilités à recevoir les plaintes, conduire
des enquêtes et des poursuites et appliquer les décisions en résultant.
12. Le Comité constate l'insuffisance des renseignements concernant les
efforts engagés pour promouvoir la tolérance raciale dans l'État partie,
dans le cadre notamment des programmes scolaires et des campagnes d'information
du public. Il recommande à l'État partie de fournir ce type d'information
dans son prochain rapport.
13. Le Comité recommande à l'État partie de mettre en place des programmes
de formation sur les droits de l'homme et la compréhension entre les groupes
ethniques, à l'intention des fonctionnaires chargés de l'application des
lois, y compris le personnel de la police, des forces armées et des établissements
pénitentiaires, et des membres de l'appareil judiciaire.
14. Le Comité prend note des informations communiquées au sujet de l'acquisition
de la nationalité conformément au Règlement sur la nationalité, mais constate
avec préoccupation qu'une Saoudienne ne peut pas transmettre sa nationalité
à son enfant si elle est mariée à un étranger et que la manière dont un
étranger peut acquérir la nationalité saoudienne est différente selon qu'il
s'agit d'un homme ou d'une femme. Le Comité prie l'État partie d'envisager
de modifier ces dispositions en vue de satisfaire aux exigences de l'article
5 c iii de la Convention.
15. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les personnes
de certaines origines raciales ou ethniques ne peuvent pas exprimer leurs
convictions religieuses dans l'État partie. Il souhaite recevoir de plus
amples renseignements sur cette question.
16. Constatant que la loi garantit un statut égal à tous les travailleurs,
Saoudiens et étrangers, le Comité voudrait recevoir de plus amples renseignements
sur l'application concrète de ce principe, eu égard en particulier à la
proportion élevée de travailleurs migrants en Arabie saoudite (où 60 % de
la main-d'œuvre est étrangère).
17. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les travailleurs
migrants feraient l'objet de graves préjugés, notamment quand ils sont originaires
d'Asie et d'Afrique. Il invite l'État partie à faire le point sur la situation,
en particulier, des employées de maison et appelle son attention sur sa
recommandation générale XXV concernant la dimension sexiste de la discrimination
raciale.
18. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles un nombre
disproportionné d'étrangers encoure la peine de mort. Il encourage l'État
partie à coopérer pleinement avec le Rapporteur spécial sur les exécutions
extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, lequel a demandé des informations
sur plusieurs cas de travailleurs migrants qui n'ont pas bénéficié d'une
assistance juridique et ont été condamnés à la peine capitale.
19. Le Comité souhaiterait recevoir de plus amples renseignements sur le
plan annoncé de «saoudisation», en ce qui concerne en particulier son impact
sur les travailleurs migrants.
20. Le Comité prie l'État partie d'inclure dans son prochain rapport périodique
des statistiques, ventilées par origine nationale des migrants, qui permettraient
de mieux comprendre la situation économique et sociale des étrangers en
Arabie saoudite.
21. Le Comité est préoccupé par la situation des Iraquiens qui vivent dans
le camp de réfugiés de Rafha depuis plus de 12 ans dans des conditions très
difficiles. Il espère que l'État partie trouvera une solution à ce problème
dans un proche avenir.
22. Le Comité prie l'État partie de communiquer dans son prochain rapport
périodique des données sur les progrès accomplis dans la mise en place d'un
mécanisme national de protection des droits de l'homme, ainsi que des renseignements
sur la composition, le mandat et le statut envisagés pour ce mécanisme.
À ce propos, il appelle son attention sur les Principes de Paris figurant
dans l'annexe à la résolution 48/134 de l'Assemblée générale.
23. L'État partie est invité à communiquer dans son prochain rapport périodique
des renseignements précis sur sa structure politique et la composition de
sa population, y compris les caractéristiques ethniques et démographiques
de cette dernière.
24. Le Comité recommande à l'État partie de tenir compte, lorsqu'il incorpore
dans l'ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier
celles des articles 2 à 7, des passages pertinents de la Déclaration et
du Programme d'action de Durban et de communiquer dans son prochain rapport
périodique des renseignements sur les plans d'action et autres mesures adoptées
pour appliquer au niveau national la Déclaration et le Programme d'action
de Durban.
25. Le Comité constate que l'État partie n'a pas fait la déclaration prévue
à l'article 14 de la Convention et l'invite instamment à envisager cette
possibilité.
26. Le Comité recommande à l'État partie de mettre à la disposition du
grand public ses rapports périodiques dès leur présentation, et de faire
connaître de la même manière les conclusions correspondantes du Comité.
27. Le Comité recommande à l'État partie de soumettre son quatrième rapport
périodique en même temps que son cinquième, attendu le 22 octobre 2006,
en un seul rapport qui constituerait une mise à jour et traiterait des questions
soulevées dans les présentes conclusions.
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* La cote CERD/C/no de session/CO/… remplace désormais la
cote CERD/C/304/Add… .