University of Minnesota



Conclusions du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Namibie, U.N. Doc. CERD/C/304/Add.16 (1996).




COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE
Quarante-neuvième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Conclusions du Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

Namibie


1. Le Comité a examiné les quatrième, cinquième, sixième et septième rapports périodiques de la Namibie, présentés dans un document unique (CERD/C/275/Add.1), à ses 1169ème et 1170ème séances (CERD/C/SR.1169 et 1170), les 13 et 14 août 1996. Il a adopté, à sa 1180ème séance, le 21 août 1996, les conclusions suivantes.


A. Introduction

2. Le Comité se félicite tout particulièrement de l'occasion qui lui est offerte d'engager un dialogue franc et constructif avec le Gouvernement namibien et se réjouit de la présence d'un représentant du Ministère de la justice. S'il est vrai que plusieurs rapports ont été présentés dans le passé au nom de la Namibie par le Conseil pour la Namibie, l'examen du présent rapport - qui peut être considéré comme un rapport initial - est la première possibilité pour le Comité de juger de l'application de la Convention en Namibie depuis son indépendance.

3. Le Comité félicite l'Etat partie pour la franchise de son rapport et note avec satisfaction qu'il se conforme dans l'ensemble aux directives concernant l'établissement des rapports des Etats parties. Bien qu'assez succinct, le rapport contient des informations utiles sur les mesures juridiques et administratives prises pour donner effet à la Convention, ainsi que sur certaines difficultés rencontrées lors de sa mise en application. Ces difficultés, toutefois, sont décrites de manière générale sans exposé détaillé des mesures concrètes envisagées pour les surmonter. En outre, le rapport manque d'indicateurs économiques, sociaux et démographiques qui auraient permis au Comité de se faire une meilleure idée de la situation.

4. Le Comité se déclare satisfait des renseignements complémentaires fournis par le représentant de l'Etat partie en réponse aux questions et observations des membres du Comité dans le cours du débat. A cet égard, il a été pris note avec satisfaction de la déclaration du représentant de l'Etat partie indiquant que le document de base contenant les renseignements dont il est question dans les directives concernant la première partie des rapports des Etats parties serait présenté prochainement.

5. Certains membres du Comité recommandent à l'Etat partie d'envisager la possibilité de faire la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention.


B. Facteurs et difficultés entravant l'application de la Convention

6. Il est reconnu que beaucoup reste encore à faire pour éliminer les vestiges d'une longue période de soumission au colonialisme et à l'apartheid. Les efforts de l'Etat partie vers une application intégrale des principes et des dispositions de la Convention ont été sérieusement entravés par l'existence de plusieurs lois discriminatoires anachroniques - mais toujours en vigueur - de l'ancien gouvernement. Il est également noté que certains comportements sociaux discriminatoires, qui continuent à prévaloir et sont généralement tolérés par certaines parties de la population, ne facilitent pas la promotion de l'application de la Convention.


C. Aspects positifs

7. Il est agréable de constater que, en dépit de graves difficultés économiques et sociales, des mesures importantes ont été prises par le gouvernement depuis l'indépendance pour mettre fin à la discrimination raciale sous toutes ses formes, en particulier dans le cadre d'une politique de réconciliation nationale en tous points louable.

8. Il est noté avec satisfaction que la Constitution namibienne contient une charte des droits qui peut être invoquée devant les tribunaux. En outre, la loi portant modification de la loi sur l'interdiction de la discrimination raciale a été adoptée en décembre 1991; elle a été renforcée par la suite par des mesures législatives ayant trait notamment à la redistribution des terres et à la réforme agricole. Grâce à ces dispositions constitutionnelles et législatives, certains actes de discrimination et certaines pratiques de l'apartheid sont devenues passibles de sanctions pénales.

9. Il est également noté avec satisfaction que le Maître de la Haute Cour, la Commission pour la réforme et le développement de la législation et le Ministère de la justice font de sérieux efforts pour amender ou abroger des dispositions juridiques discriminatoires anachroniques. Il est pris note de la mise en place, dans le cadre de la Constitution, du bureau du Médiateur qui a pour tâche de promouvoir et de protéger les droits de l'homme.

10. On ne peut que se féliciter de la politique en faveur des groupes défavorisés mise en oeuvre dans des domaines comme ceux de l'enseignement, de la formation et de l'emploi.


D. Principaux sujets de préoccupation

11. L'existence d'un corps de lois discriminatoires et anachroniques et la persistance de pratiques héritées du régime de l'apartheid sont un sujet d'inquiétude.

12. Il est noté avec préoccupation que, en dépit de mesures positives destinées à éliminer les disparités sociales et économiques, les Noirs et les Métis, qui représentent 95 % de la population, sont toujours victimes d'une discrimination grave qui s'exerce dans de nombreux domaines comme celui de l'accès à la propriété, de l'éducation, de l'emploi, de la santé ou du logement.

13. Il est alarmant de constater la persistance d'un système juridique à deux vitesses qui régit d'importants aspects de la situation des personnes, comme le mariage et la succession. A cet égard, les inégalités flagrantes que fait apparaître le système applicable aux Blancs, aux Métis et aux Noirs en vertu de la loi sur l'administration des biens sont sources de préoccupation.

14. Un autre sujet de préoccupation est la persistance de comportements discriminatoires chez certaines parties de la population et dans le secteur privé, ainsi que le manque d'efficacité des mesures prises pour surmonter ces difficultés. Il semble également que des cas de discrimination fondée sur l'identité ethnique aient été relevés dans le secteur public.

15. Le manque d'informations dans le rapport sur l'application dans la législation et dans la pratique des dispositions de l'article 5 de la Convention ainsi que sur la situation des groupes vulnérables, en particulier les Sans ou Bochimans, est regrettable.

16. On a noté avec préoccupation les retards dont souffre le processus de déségrégation dans le domaine de l'enseignement et la persistance des graves difficultés que rencontrent les enfants noirs pour accéder à l'enseignement public et privé, notamment au niveau du secondaire et du supérieur.


E. Suggestions et recommandations

17. Le Comité invite le gouvernement à inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les points dont il est question dans les présentes conclusions ainsi que sur les questions posées et les observations faites par des membres du Comité dans le cours du débat.

18. Le Comité recommande de prendre d'urgence des mesures pour éliminer toutes les lois et pratiques discriminatoires encore en vigueur. Il encourage l'Etat partie à renforcer les mesures prises pour promouvoir une culture qui protège efficacement les droits de l'homme en diffusant aussi largement que possible des informations sur les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme auxquels il est partie et sur les résultats de l'examen du présent rapport, auprès des responsables de l'application des dispositions de la Convention et du public en général.

19. Le Comité recommande de prendre des mesures supplémentaires pour combattre la discrimination raciale dans les domaines de la propriété, de la répartition des terres, de l'éducation, du logement, de l'emploi, des soins de santé et d'une répartition équitables des ressources. Des mesures correctives devraient être adoptées pour éliminer les vestiges du passé qui empêchent toujours les Noirs, notamment les plus vulnérables d'entre eux, d'avoir accès à l'enseignement secondaire et supérieur et de jouir de conditions de travail justes et favorables dans le secteur privé. De même, des mesures complémentaires devraient être prises en ce qui concerne la redistribution des terres.

20. Le Comité encourage les efforts déployés actuellement par le Maître de la Haute Cour et la Commission pour la réforme et le développement de la législation en vue de réviser le système à deux vitesses qui régit le mariage et la succession. D'une manière plus générale, il faudrait entreprendre une étude systématique de la législation nationale afin de vérifier si elle est en pleine harmonie avec les dispositions de la Convention.

21. Le Comité recommande à l'Etat partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur le nombre de plaintes déposées et de jugements prononcés pour des actes de racisme ou de discrimination raciale.

22. Le Comité suggère d'assurer une publicité au septième rapport périodique de l'Etat partie et aux présentes conclusions.

23. Le Comité recommande à l'Etat partie de ratifier dès que possible, les amendements au paragraphe 6 de l'article 8 de la Convention adoptés à la quatorzième réunion des Etats parties.

24. Le Comité recommande que le prochain rapport périodique de l'Etat partie comprenne une mise à jour du présent rapport et porte sur tous les points soulevés dans les présentes conclusions.



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