University of Minnesota



Conclusions du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Colombie, U.N. Doc. CERD/C/304/Add.1 (1996).




COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE
Quarante-huitième session


EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Conclusions du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale


Colombie

1. Le Comité a examiné les sixième et septième rapports périodiques de la Colombie (CERD/C/257/Add.1) à ses 1135ème et 1136ème séances (CERD/C/SR.1135 et 1136), le 29 février et le 1er mars 1996. Il a adopté, à sa 1149ème séance, le 11 mars 1996, les conclusions suivantes.

A. Introduction

2. Le Comité se félicite de l'occasion qui lui est offerte de poursuivre le dialogue avec l'Etat partie sur la base de ses sixième et septième rapports périodiques. Il regrette toutefois que le rapport présenté ne contienne pas de renseignements concrets sur l'application de la Convention dans la pratique et que par conséquent l'Etat partie ne se soit pas pleinement acquitté de ses obligations en vertu de l'article 9 de la Convention. Le Comité a noté également qu'un grand nombre des préoccupations exprimées et des recommandations formulées au cours de précédents dialogues avec l'Etat partie étaient restées sans réponse ou sans effet.

3. Il est pris note du fait que l'Etat partie n'a pas fait la déclaration prévue à l'article 14 de la Convention; certains membres du Comité ont demandé qu'il envisage la possibilité de faire cette déclaration.

B. Facteurs et difficultés entravant l'application de la Convention

4. Il est reconnu que le climat de violence généralisé associé à la guérilla, au trafic de stupéfiants et à l'existence de groupes armés paramilitaires entrave la pleine application de la Convention.

C. Aspects positifs

5. Les récentes mesures législatives et institutionnelles adoptées par le Gouvernement colombien pour assurer une plus grande conformité de la législation nationale avec la Convention et améliorer la protection des droits fondamentaux des communautés autochtones et afro-colombiennes sont accueillies avec satisfaction. A cet égard, il est pris note de l'adoption, en 1991, de la nouvelle constitution et en 1993 de la loi No 70 ainsi que de la création de la Direction des affaires des communautés noires au sein du Ministère de l'intérieur.

D. Principaux sujets de préoccupation

6. En raison du manque de données statistiques et qualitatives fiables sur la composition démographique de la population colombienne et sur la jouissance des droits politiques, économiques, sociaux et culturels par les communautés autochtones et afro-colombiennes, il est difficile d'évaluer les résultats des différentes mesures et politiques mises en oeuvre.

7. Il est noté également que le rapport ne contient pas de renseignements sur les indicateurs et autres mécanismes visant à évaluer les politiques appliquées par le gouvernement pour protéger les droits des communautés autochtones et afro-colombiennes, y compris les politiques relatives à l'utilisation des sols et à la propriété des terres.

8. Des préoccupations particulières sont exprimées quant à la non-application dans la pratique des politiques visant à garantir aux communautés autochtones et afro-colombiennes le contrôle de la qualité de leur environnement et l'exploitation de leurs territoires.

9. Il est noté à nouveau avec inquiétude que l'Etat partie n'a pas appliqué les dispositions de l'article 4 de la Convention, qui prévoit l'adoption d'une législation pénale spécifique. Il est souligné que l'Etat partie ne peut se dérober à l'obligation qu'il a souscrite en vertu de l'article 4 de la Convention et qu'il devrait s'en acquitter pleinement.

9.a) Il est noté en particulier avec inquiétude que selon certaines informations, les droits des autochtones ont été violés par des hommes en uniforme.

10. La non-application de l'article 5 de la Convention est jugée très préoccupante. Il est noté que selon diverses sources d'informations corroborantes, les attitudes discriminatoires structurelles à l'égard des communautés autochtones et afro-colombiennes persistent dans la société colombienne et se manifestent à divers niveaux dans la vie politique, économique et sociale du pays. Ces attitudes discriminatoires concernent entre autres le droit à la vie et à la sécurité des personnes, la participation politique, les possibilités d'accès à l'éducation et à l'emploi, l'accès aux services publics de base, le droit à la santé, le droit à un logement convenable, l'application de la loi, la propriété des terres et l'utilisation des sols.

11. En ce qui concerne l'application de l'article 6 de la Convention, on a constaté avec préoccupation que les informations insuffisantes fournies au sujet des cas dans lesquels des recours judiciaires ont été exercés par les victimes d'actes de discrimination raciale ne permettaient pas de l'évaluer de façon appropriée.

E. Suggestions et recommandations

12. Le Comité prie le Gouvernement colombien de donner dans son prochain rapport des renseignements détaillés et exacts qui répondent aux préoccupations exprimées par le Comité.

13. Le Comité recommande au gouvernement de créer immédiatement des mécanismes efficaces pour coordonner et évaluer les diverses politiques de protection des droits des communautés autochtones et afro-colombiennes, y compris dans leurs aspects institutionnels. Ces mécanismes devraient promouvoir la pleine jouissance par les membres de ces communautés de tous leurs droits de l'homme et garantir leur droit à la vie et à la sécurité, ainsi que la participation réelle et adéquate de leurs représentants à la vie publique.

14. Le Comité réaffirme que les prescriptions de l'article 4 sont impératives, comme il l'a indiqué dans sa recommandation générale VII (32). Il souligne que la Colombie devrait s'acquitter de toutes ses obligations en vertu des dispositions à caractère obligatoire de la Convention. Ce faisant, le gouvernement devrait également tenir compte de la Recommandation générale XI (42) du Comité.

15. Le Comité espère que l'Etat partie poursuivra et renforcera ses efforts pour améliorer l'efficacité des mesures et des programmes visant à garantir à tous les groupes de la population la jouissance intégrale de leurs droits politiques, économiques, sociaux et culturels. Le Comité recommande également à l'Etat partie d'accorder l'attention requise aux processus de migration, notamment en entreprenant de vastes programmes de sensibilisation aux droits de l'homme et à la tolérance, afin d'éviter la discrimination et les préjugés sociaux et raciaux.

16. Le Comité recommande qu'une attention particulière soit accordée au problème des ordres illégaux au sein de l'armée, de la police et des organismes responsables de l'application des lois. Des enquêtes devraient être effectuées sur les cas dans lesquels des ordres illégaux ont été donnés et exécutés et les personnes reconnues coupables d'avoir commis des actes délictueux devraient être punies. L'impunité devrait être éliminée. Ces questions devraient être également abordées dans les programmes de formation des organismes mentionnés plus haut.

17. Le Comité recommande au Gouvernement colombien de manifester plus énergiquement sa volonté de défendre les droits fondamentaux des communautés autochtones et afro-colombiennes en ce qui concerne l'utilisation et la propriété de leurs terres.

18. Le Comité recommande en outre que le prochain rapport périodique de la Colombie contienne des informations détaillées sur les cas dans lesquels des recours judiciaires ont été exercés par les victimes d'actes de discrimination raciale.

19. Le Comité suggère à l'Etat partie d'intensifier sa coopération avec les responsables du programme d'assistance technique du Centre des Nations Unies pour les droits de l'homme, notamment pour ce qui est de la formation de tous ceux qui exercent des activités liées aux droits de l'homme et de l'éducation des jeunes générations.

20. Le Comité recommande à l'Etat partie de ratifier les modifications du paragraphe 6 de l'article 8 de la Convention, qui ont été adoptées par la quatorzième Réunion des Etats parties.

21. Le Comité recommande que le prochain rapport périodique de l'Etat partie, attendu le 2 octobre 1996, consiste en une mise à jour du dernier rapport et porte sur tous les points soulevés dans les présentes conclusions.



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