University of Minnesota



Observations finales du Comit
é pour l'élimination de la discrimination raciale, Bangladesh, U.N. Doc. A/47/18,paras.115-127 (1992).





COMITE POUR L'ELIMINATION DE
LA DISCRIMINATION RACIALE

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES
CONFORMEMENT A L'ARTICLE 9 DE LA CONVENTION


Conclusions du Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

Bangladesh


115. Les cinquième et sixième rapports périodiques du Bangladesh (CERD/C/192/Add.3) ont été examinés par le Comité à ses 942e, 943e et 951e séances, les 5 et 11 août 1992 (voir CERD/C/SR.942, 943 et 951).

116. Le rapport a été présenté par le représentant de l'Etat partie qui a déclaré qu'il n'existait pas de discrimination raciale au Bangladesh, dont la population était parfaitement homogène. Le Bangladesh condamnait le régime raciste d'Afrique du Sud avec lequel il n'avait pas de relations. Les populations tribales, divisées en 36 tribus, représentaient 0,5 % de l'ensemble de la population du Bangladesh. Il se posait quelques problèmes résiduels d'intégration sociopolitique, ainsi que des problèmes marginaux liés au terrorisme tribal. Le Bangladesh condamnait le racisme et la discrimination raciale auxquels il était résolument opposé, et son engagement à cet égard était total.

117. Les membres du Comité se sont félicités des progrès accomplis au Bangladesh sur la voie menant au rétablissement de la démocratie. Ils ont également noté avec satisfaction que le rapport présenté par le Bangladesh était en grande partie conforme aux directives du Comité. Ils ont reconnu que le Bangladesh était confronté à de nombreux problèmes en raison d'une situation socio-économique difficile et de conditions climatiques défavorables. Ils ont toutefois regretté que le rapport ne donne pas assez de renseignements sur les mesures concrètes prises dans le pays pour appliquer la Convention. Ils ont noté que l'affirmation contenue dans le rapport selon laquelle le "Bangladesh ne reconnaissait aucune forme de discrimination sociale" semblait être en contradiction avec ce qui était dit ailleurs des "citoyens les plus défavorisés de différentes régions et races". Ils ont exprimé le souhait de disposer de données démographiques concernant les diverses minorités ethniques, ainsi que de renseignements précis sur leur niveau de formation et sur la place qu'occupaient les membres de ces minorités dans l'administration et au Parlement. Relevant qu'il était dit dans le rapport que les dispositions de la Convention pouvaient toujours être invoquées devant les tribunaux, ils ont demandé pourquoi ces dispositions ne pouvaient pas être appliquées directement.

118. Les membres du Comité ont demandé à être informés plus précisément de la situation actuelle des différents groupes ethniques minoritaires au Bangladesh, en particulier de ceux qui habitent la région des Chittagong Hill Tracts, qui d'après des renseignements émanant de différentes organisations non gouvernementales seraient victimes d'un processus graduel d'encerclement et de dépossession. Selon ces sources, la politique de colonisation à grande échelle par des Bengalis venus des plaines aurait accentué encore l'appauvrissement et la marginalisation des populations autochtones et débouché sur un soulèvement armé. Le nombre des membres des forces de sécurité opérant dans les Chittagong Hill Tracts s'élèverait à 35 000 hommes ou plus et de nombreux cas de torture et autres violations des droits de l'homme - exécutions sommaires, assassinats d'enfants et viols de femmes, couvre-feu et autres restrictions au droit de circuler librement - auraient été signalés. Des maisons auraient également été détruites et des temples bouddhistes profanés. On a demandé des renseignements concernant la politique actuellement suivie par le Gouvernement en matière d'application du règlement 1900 relatif aux Chittagong Hill Tracts qui visait à protéger les populations tribales. Selon certaines sources, ce règlement, qui accorde une certaine protection aux populations tribales, ne serait pas véritablement appliqué. Des membres du Comité ont demandé s'il était vrai que la loi No 89 relative aux conseils de district, qui assurait une certaine représentativité aux groupes ethniques, n'avait pas de base constitutionnelle et qu'elle pourrait être abrogée. Ils ont également demandé quelle était la politique du Gouvernement en matière de transferts de population, si les populations des régions où les nouveaux venus devaient être réinstallés avaient été consultées et si elles recevaient une compensation en dédommagement de la détérioration que leur situation pourrait subir du fait de ces transferts.

119. En ce qui concerne l'article 2 de la Convention, les membres du Comité ont demandé quelles dispositions étaient prises pour punir ceux qui avaient profité des couches peu évoluées de la population.

120. Au sujet de l'application de l'article 3 de la Convention, les membres du Comité ont cherché à faire clarifier le sens de la déclaration figurant dans le rapport selon laquelle les dispositions de l'article en question n'étaient pas applicables. Ils croyaient comprendre, d'après certaines sources, qu'il existait un certain nombre de camps de regroupement dans les zones habitées par les populations autochtones, et que ceux qui vivaient dans ces camps étaient soumis à diverses restrictions et ne pouvaient se déplacer sans autorisation. Les membres ont demandé des éclaircissements sur ce point.

121. Concernant l'article 4 de la Convention, dont ils ont rappelé que les dispositions avaient un caractère obligatoire, les membres du Comité ont contesté le bien-fondé du point de vue du Gouvernement selon lequel des mesures d'ordre législatif, judiciaire, administratif ou autre n'étaient pas nécessaires. On a demandé si il y avait eu une quelconque pression publique en faveur de l'adoption de mesures tendant à l'application des dispositions de l'article 4.

122. S'agissant de l'application de l'article 5 de la Convention, les membres du Comité se sont employés à faire préciser le sens de l'article 29 de la Constitution et ont demandé si les dispositions de cet article pouvaient être interprétées comme signifiant que la discrimination pouvait éventuellement être admissible dans certaines conditions. Les membres du Comité ont également souhaité recevoir des éclaircissements sur les renseignements selon lesquels il se produirait des cas de détention arbitraire de très longue durée affectant des membres de minorités, et ont demandé si la règle d'habeas corpus était applicable aux personnes arrêtées. Des informations ont aussi été requises sur les incidents répétés au cours desquels l'armée se serait livrée à des tortures et voies de fait sur des civils appartenant à des minorités ethniques, et sur les mesures que le nouveau Gouvernement envisageait de prendre pour protéger les habitants des Chittagong Hill Tracts, faire respecter leurs lieux saints, leur patrimoine et leur culture. Des éclaircissements ont été demandés sur les conditions nécessaires pour obtenir la nationalité du pays et sur le droit à la propriété, pour lequel on avait relevé des cas présumés d'expropriation illégale sans dédommagement ni réinstallation des personnes lésées; les membres du Comité ont demandé quelle était la politique du nouveau Gouvernement à cet égard, notamment à propos du Vested and Non-Resident Property Act, loi de 1974 en vertu de laquelle des terres appartenant à des populations tribales et à des Hindous avaient été saisies.

123. En ce qui concerne la liberté de religion, des précisions ont été requises sur les diverses religions pratiquées au Bangladesh, les relations entre elles, l'existence ou non d'une religion d'Etat et l'attitude du Gouvernement envers les diverses religions. A cet égard, on a demandé si, comme le prétendaient certaines sources, la politique gouvernementale visait à convertir les membres de l'ethnie Jumma à la foi islamique. A propos de la liberté d'opinion et d'expression, on a demandé des éclaircissements sur l'assertion selon laquelle la diffusion d'un rapport officiel publié à la suite d'une mission d'enquête aux Chittagong Hill Tracts et faisant état de violations des droits de l'homme avait été interdite par les autorités. Au sujet de l'exercice des droits économiques, sociaux et culturels, on a demandé si le système de partage des récoltes en vertu duquel la moitié de celles-ci va au propriétaire de la terre allait être abrogé, et si une réforme agraire serait mise en oeuvre. On a également demandé quelle était la politique du Gouvernement en matière de travail des enfants, et combien de postes administratifs étaient occupés par des personnes originaires des Chittagong Hill Tracts.

124. Passant à l'article 6, les membres du Comité ont souhaité savoir comment les dispositions relatives aux voies de recours contre tous actes de discrimination raciale étaient appliquées dans la pratique. Ils se sont enquis des possibilités d'accès aux tribunaux offertes aux Adivasis lorsque ceux-ci tentaient d'engager des poursuites en cas de différends portant sur les terres et d'un projet quinquennal mené par Caritas Bangladesh et visant à apporter une assistance judiciaire aux Adivasis, qui aurait été arrêté par le Gouvernement. Si le Gouvernement ne permettait pas à une organisation caritative d'apporter une assistance judiciaire, peut-être devrait-il alors nommer un ombudsman.

125. S'agissant de l'article 7 de la Convention, les membres du Comité ont demandé des éclaircissements sur les divers partis, institutions et associations qui s'employaient à lutter contre les préjugés raciaux, ainsi que sur les mesures concrètes prises à cette fin par le Gouvernement.

Conclusions*


*
Le Comité a reçu par la suite une communication de la Mission permanente du Bangladesh dans laquelle diverses allégations formulées durant l'examen de son rapport étaient démenties.

126. Tout en reconnaissant les difficultés économiques du Bangladesh, le Comité a demandé de meilleures données démographiques pour comprendre la situation des minorités ethniques.

127. Le Comité s'est déclaré gravement préoccupé par les informations concernant les droits de l'homme des minorités ethniques des Chittagong Hill Tracts, et notamment les transferts forcés de population. Etant donné que le représentant de l'Etat partie n'était pas en mesure de répondre aux questions, le Comité a souhaité recevoir un complément d'informations.



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