University of Minnesota



Observations finales du Comité sur l
'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Zimbabwe, U.N. Doc. A/53/38/Rev.1,paras.120-166 (1998).



Comité sur l'élimination de la
discrimination à l'égard des femmes


Zimbabwe

120. Le Comité a examiné le premier rapport du Zimbabwe (CEDAW/C/ZWE/1) à ses 366e, 367e et 372e séances (22 et 27 janvier 1998) (voir CEDAW/C/SR.366, 367, 372).

121. La représentante du Zimbabwe a indiqué que son gouvernement était déterminé à appliquer pleinement les dispositions de la Convention et à faire de l'égalité entre les sexes une réalité. Des progrès importants avaient été réalisés à cet égard, qui s'étaient notamment traduits par la mise en place d'un mécanisme national de promotion de la femme ainsi que d'un comité interministériel pour les droits de l'homme. Un programme d'action national et un projet intitulé Horizon 2020 avaient été formulés, des dispositions législatives adoptées et des responsables des questions relatives aux femmes désignés dans tous les ministères. En dépit de ces mesures, la persistance de préjugés à l'égard des femmes ainsi que de pratiques et de lois coutumières discri- minatoires expliquait notamment la lenteur des progrès réalisés sur le plan de l'amélioration de la condition de la femme.

122. Des organisations non gouvernementales et des instituts de recherche spécialisés dans les questions relatives à la place des hommes et des femmes dans le développement avaient été consultés dans le cadre de l'élaboration du rapport et s'employaient également à promouvoir l'égalité entre les sexes.

123. La représentante du Zimbabwe a fait observer que la Constitution de son pays avait été modifiée en 1997 et qu'elle contenait désormais des dispositions explicites interdisant toute discrimination fondée sur le sexe, à l'instar d'autres instruments législatifs, tels que la loi sur l'élimina- tion de la discrimination fondée sur le sexe.

124. Le Ministère chargé du développement communautaire et des questions relatives aux femmes était devenu en 1981 le mécanisme national de promotion de la femme. Bien que ce ministère ait été dissous depuis lors, le mécanisme en question continuait de fonctionner, et des responsables des questions relatives aux femmes avaient été désignés dans tous les ministères.

125. La représentante du Zimbabwe a indiqué qu'un comité interministériel pour les droits de l'homme avait été mis en place afin de tenir le Gouvernement informé des questions touchant les droits de l'homme, et qu'un médiateur était habilité à enquêter sur les violations des droits de l'homme, y compris lorsque celles-ci étaient liées à l'appartenance sexuelle.

126. Des procédures judiciaires avaient été adoptées pour aider les victimes; des dispositions avaient notamment été prises pour que leurs dépositions soient enregistrées dans une pièce distincte. Il n'en demeurait pas moins que la violence à l'égard des femmes restait un problème grave et c'est pourquoi il avait été décidé de donner aux officiers de police et de justice une formation appropriée dans ce do- maine.

127. Des mesures palliatives avaient été adoptées, en particulier dans les domaines de l'éducation, de l'emploi et de la participation des femmes à la vie politique et à la prise de décisions, mais les préjugés quant au r_le des hommes et des femmes continuaient d'influer sur les attitudes de nombreux Zimbabwéens. Le Gouvernement avait par conséquent lancé un programme visant à revoir les manuels scolaires, tandis qu'un cours consacré aux droits de l'homme, s'adressant aux élèves du primaire et du secon- daire, était en cours d'élaboration.

128. La représentante du Zimbabwe a indiqué que le VIH/sida représentait un grave problème au Zimbabwe et que cette pandémie contribuait à aggraver la situation des femmes. En règle générale, les femmes rurales restaient fortement désavantagées par rapport à celles qui vivaient en ville.

129. Avant de conclure, la représentante du Zimbabwe a fait observer que le mécanisme national de promotion de la femme avait permis de dresser une liste des lois qui n'étaient pas conformes aux dispositions de la Convention. Elle a ajouté que la Convention avait été traduite dans deux langues couramment utilisées au Zimbabwe et que le texte en avait été largement diffusé, sous une forme simplifiée.

Conclusions du Comité

Introduction

130. Le Comité a loué le Gouvernement zimbabwéen d'avoir ratifié la Convention sans émettre de réserves. Il a accueilli avec satisfaction le rapport initial, qui était détaillé et contenait une analyse objective des obstacles entravant l'application de la Convention. Le Comité s'est également félicité de constater que le rapport avait été élaboré en consultation avec des organisations non gouvernementales. Les informations complémentaires fournies lors de la présentation orale du rapport avaient également été appré- ciées. Le Comité a fait bon accueil à la délégation zimbab- wéenne de haut niveau, qui comptait parmi ses membres le Ministre des affaires nationales, de l'emploi et des coopérati- ves.

Éléments positifs

131. Le Comité s'est félicité de la détermination du Gouver-nement zimbabwéen à améliorer la condition de la femme et de la mise en place d'un mécanisme national de promotion de la femme au lendemain de l'indépendance, ainsi que de la désignation de responsables des questions relatives aux femmes au sein de chaque ministère.

132. Le Comité a noté avec satisfaction que la Constitution du Zimbabwe avait été modifiée de façon à interdire tout acte de discrimination fondé sur le sexe.

133. Le Comité a félicité le Gouvernement d'avoir fait traduire la Convention dans les langues locales afin d'en assurer une plus large diffusion.

134. Le Comité a félicité le Gouvernement d'avoir pris plusieurs initiatives, notamment d'avoir entrepris d'établir une politique nationale de l'égalité des sexes, pour appliquer le Programme d'action de Beijing.

135. Le Comité a pris acte avec satisfaction de la création d'un comité interministériel pour les droits de l'homme et du renforcement des services du médiateur, lequel pouvait maintenant ouvrir des enquêtes sur les actes de la police et des forces de sécurité. De telles mesures, a estimé le Comité, contribuent à faire prendre conscience des droits fondamen- taux et en favorisent l'exercice effectif par les femmes.

136. Le Comité a félicité le Gouvernement d'avoir établi pour mieux protéger les femmes des lignes d'action claires et judicieuses, conformes aux instruments internationaux pertinents et notamment à la Convention.

137. Le Comité s'est félicité de l'introduction de program-mes destinés à sensibiliser la police à la spécificité des femmes, ainsi que de l'établissement de tribunaux disposés à entendre les victimes sans préjugé défavorable à leur égard.

138. Le Comité a aussi constaté avec satisfaction que des mesures correctives systématiques avaient été prises en ce qui concerne l'enseignement, l'emploi et la participation politique, en particulier la participation aux conseils ruraux.

Facteurs entravant l'application de la Convention

139. Le Comité a noté avec une grande inquiétude que bien que la législation nationale garantisse aux femmes et aux hommes le même statut, le droit coutumier encore mainte- nant appliqué, perpétuait dans certains cas la discrimination à l'égard des femmes, en particulier au sein de la famille.

140. Le Comité a noté avec regret que les comportements traditionnels et socioculturels généralement adoptés à l'égard des femmes continuaient à donner de celles-ci une image négative qui compromet leur émancipation.

141. Le Comité a constaté avec préoccupation les répercus-sions des programmes d'ajustement structurel, en particulier dans les domaines de l'éducation, de la santé et de l'emploi.

Principaux sujets de préoccupation

142. Le Comité s'est déclaré préoccupé de constater que des pratiques traditionnelles telles que le lévirat, la polygamie ou la mutilation sexuelle des femmes étaient encore accep- tées. Bien que la Constitution criminalise toute discrimina- tion fondée sur le sexe et que, par ailleurs, le lévirat ait été déclaré illégal, la discrimination à l'égard des femmes se perpétuait du fait du poids de la tradition et du droit coutu- mier.

143. Le Comité a également noté avec inquiétude que la plupart des actes de violence subis par les femmes, notam- ment dans la société et dans le cadre familial, ne tombaient pas sous le coup de la loi. Or, la violence à l'égard des femmes constituait une violation grave de leurs droits fondamentaux. En outre, les victimes de ces actes de violence ne bénéficiaient guère de l'aide des pouvoirs publics, faute de programmes de réadaptation et de loge- ments provisoires.

144. Le Comité s'est déclaré préoccupé de constater que le Ministère des affaires nationales, de l'emploi et des coopéra- tives et le mécanisme national de promotion de la femme n'avaient ni le pouvoir ni la responsabilité de prendre et d'appliquer des mesures visant à éliminer la discrimination à l'égard des femmes.

145. Tout en reconnaissant l'intérêt de disposer dans chaque ministère d'un responsable des questions relatives aux femmes, le Comité a noté avec préoccupation l'absence d'organe central assurant la coordination et doté de son propre budget.

146. Le Comité s'est dit préoccupé de constater le faible nombre de femmes participant à la prise de décisions.

147. Le Comité a constaté avec regret que la loi criminali-sait les prostituées alors que leurs clients n'étaient pas inquiétés. Il a noté avec préoccupation que les femmes pauvres, les migrantes et les femmes appartenant aux groupes marginalisés, particulièrement vulnérables, en arrivent souvent à se prostituer pour pouvoir survivre. L'absence de données précises sur la prostitution et de programmes à l'intention des femmes qui la pratiquent l'amenait à conclure que le Gouvernement n'avait pas pris suffisamment de mesures dans le sens de l'article 6 de la Convention.

148. Le Comité s'est déclaré très inquiet devant les ravages de la pandémie de sida, en particulier parmi les femmes jeunes, qui constituent 84 % des personnes contaminées parmi les 15 à 19 ans, et 55 % parmi les 20 à 29 ans, situa- tion particulièrement préoccupante du fait des risques de transmission à l'enfant au moment de la naissance et durant l'allaitement.

149. Le Comité a noté avec préoccupation que certains agents de santé refusaient, dit-on, de dispenser les services de planning familial aux adolescents sexuellement actifs, alors que la loi n'impose aucune restriction à cet égard.

150. Le Comité a noté que les femmes des campagnes pâtissent souvent encore plus que les autres des us et coutu- mes discriminatoires et des notions désobligeantes qui ont cours à l'égard de la femme, et qu'elles font de plus longues journées de travail.

151. Le Comité s'est également dit inquiet du manque de structures d'appui permettant aux adolescentes enceintes de poursuivre leurs études. Il a regretté l'absence de statistiques détaillées sur la grossesse chez les adolescentes.

Suggestions et recommandations

152. Le Comité a exhorté le Gouvernement à agir plus résolument en prenant des mesures concrètes visant à éliminer toutes les coutumes et pratiques discriminatoires.

153. Le Comité a instamment prié le Gouvernement de revoir la mission du mécanisme national de promotion de la femme afin de lui donner les pouvoirs et les moyens finan- ciers lui permettant d'élaborer et d'appliquer des program- mes visant à éliminer la discrimination à l'égard des femmes. Ce mécanisme devrait également être chargé de coordonner les activités des responsables des questions relatives aux femmes désignés au sein de chaque ministère. Il lui faudrait en outre organiser, à l'intention des femmes comme des hommes, des campagnes de sensibilisation à l'égalité entre les sexes ainsi que, en collaboration avec les médias, une campagne visant à promouvoir une image positive de la femme. Le Comité a en outre recommandé que le Président et les ministres soient régulièrement informés des progrès réalisés dans l'application de la Convention et du Pro- gramme d'action de Beijing et qu'ils aient à répondre de la prise en compte des disparités entre les sexes dans les différents ministères.

154. Le Comité a suggéré d'assurer dans tous les secteurs, notamment à l'intention des agents de santé, une formation qui fasse ressortir la spécificité des femmes.

155. Le Comité a recommandé d'adopter à titre provisoire, des mesures en faveur des femmes afin de promouvoir la condition de la femme dans toutes les sphères de la société.

156. Le Comité a également préconisé que le Gouvernement élargisse la mission du médiateur pour que celui-ci puisse être saisi des affaires de discrimination fondées sur le sexe qui peuvent se produire dans la vie publique ou privée.

157. Le Comité a recommandé de codifier le droit de la famille et le droit coutumier, en ne retenant que les coutumes et les pratiques traditionnelles qui favorisent la démarginali- sation des femmes et l'égalité des sexes.

158. Le Comité a vivement engagé le Gouvernement à se conformer plus rigoureusement aux prescriptions de l'article 6 de la Convention, en mettant en place des pro- grammes socioéconomiques pour assister les femmes qui se prostituent pour vivre. Il a fortement recommandé à cette fin de recueillir systématiquement des informations sur l'étendue du phénomène de la prostitution.

159. Notant que l'avortement clandestin est, selon le Gouvernement, l'une des principales causes de mortalité parmi les Zimbabwéennes, le Comité a recommandé de réviser la loi sur l'avortement afin de la rendre plus libérale et de décriminaliser l'interruption volontaire de grossesse.

160. Le Comité a instamment demandé au Gouvernement d'intensifier le combat contre la pandémie de sida et de faire en sorte que toutes les femmes, en particulier les adolescen- tes, puissent bénéficier de l'information, de l'éducation et des services voulus en ce qui concerne les questions sexuel- les et la procréation.

161. Le Comité a suggéré que des cours d'éducation sexuelle soient dispensés aux jeunes comme aux adultes.

162. Le Comité a demandé que des données et des informa-tions plus complètes sur toutes les formes de violence à l'égard des femmes, la prostitution et la traite des femmes figurent dans le rapport suivant.

163. Le Comité a demandé que des renseignements suffi-samment précis, y compris des données détaillées sur les taux de maternité parmi les adolescentes et sur les possibili- tés qu'ont ces jeunes mères de poursuivre leurs études, figurent dans le rapport suivant.

164. Le Comité a encouragé le Gouvernement à poursuivre ses efforts pour appliquer le Programme d'action de Beijing. Il a également recommandé de créer un organe central de coordination, doté de son propre budget, pour que les mesures d'orientation et les programmes visant à instaurer l'égalité des sexes puissent être plus rapidement mis en oeuvre.

165. Le Gouvernement a été invité à s'inspirer des recom-mandations générales du Comité pour planifier des mesures visant à améliorer la situation des femmes zimbabwéennes et pour les appliquer plus efficacement.

166. Le Comité a demandé que les présentes conclusions soient largement diffusées dans le pays, afin que toute la population, en particulier les responsables de l'adminis- tration publique et les hommes politiques, sache quelles mesures ont été prises pour assurer une égalité de fait entre les deux sexes et quelles autres actions sont encore nécessai- res. Il a aussi prié le Gouvernement de continuer à faire connaître dans tout le pays, notamment auprès des organisa- tions féminines et des organisations de défense des droits de l'homme, les dispositions de la Convention (avec les recom- mandations générales du Comité lui-même) et la teneur de la Déclaration et du Programme d'action de Beijing.



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