University of Minnesota



Observations finales du Comité sur l
'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Zambie, U.N. Doc. A/49/38,paras.318-368 (1994).



Comité sur l'élimination de la
discrimination à l'égard des femmes



Zambie

318. Le Comité a examiné le rapport périodique initial et deuxième rapport périodique de la Zambie, présenté en un seul document (CEDAW/C/ZAM/1-2) à ses 241e et 246e séances, les 24 et 26 janvier 1994 (voir CEDAW/C/SR.241 et 246).

319. En présentant le rapport, la représentante de la Zambie a souligné que son pays subissait de vastes et profondes transformations dans les domaines politique et économique. Après 18 ans de démocratie à parti unique, la Zambie était retournée au multipartisme en 1991. Alors qu'auparavant, la Ligue des femmes relevant du parti au pouvoir avait été la seule protectrice des intérêts des femmes, chaque parti avait maintenant son programme en faveur des femmes. Le Gouvernement avait pris sur lui d'assurer la promotion de la femme en créant dans tous les ministères un service chargé des problèmes des femmes et un service de la femme et du développement au Département de la planification et de la coopération pour le développement.

320. La Zambie était passée d'une économie socialiste planifiée à une économie de marché. Elle s'était dans les deux dernières années vigoureusement efforcée de transformer l'économie du pays. Des programmes d'ajustement structurel, initialement lancés en 1987 et renforcés en 1991 avaient eu de notables conséquences. Les rapports rendaient compte des répercussions que ces mesures avaient eues sur les femmes et sur les programmes liés à la participation des femmes au développement. Les programmes d'ajustement structurel avaient conduit à négliger le développement social et s'étaient accompagnés d'une réduction des possibilités offertes aux femmes. Les réductions proposées de personnel dans la fonction publique, secteur qui employait le plus de femmes, frapperaient ces dernières et réduiraient encore leurs possibilités d'emploi déjà limitées. La mortalité infantile et la malnutrition augmentaient parce que les femmes ne pouvaient plus fournir le maïs, produit de base essentiel, par suite de la suspension des subventions et de l'augmentation des prix.

321. La représentante a expliqué de quelle manière les facteurs historiques et culturels avaient nui à la promotion de la femme. La Zambie était une société dominée sous tous ses aspects par l'homme, depuis le secteur de l'emploi structuré jusqu'à la cellule familiale de base. L'éducation stéréotypée et l'absence d'investissement dans l'éducation des filles étaient l'une des raisons principales qui expliquaient la domination masculine persistante. En 1994, les familles n'étaient toujours pas prêtes à investir dans l'éducation de leurs filles comme elles étaient disposées à le faire dans le cas de leurs fils. Au début de l'époque coloniale, la préférence avait été donnée à l'éducation des garçons, l'éducation des filles s'arrêtant dans les classes inférieures de l'école secondaire. Cette situation ne se modifiait que très lentement.

322. La Zambie avait souscrit aux objectifs de l'égalité, du développement et de la paix fixés par la Décennie des Nations Unies pour la femme et multiplié les activités pour modifier la situation au niveau communautaire. La Convention avait été ratifiée sans réserve en février 1985. Les organisations non gouvernementales s'étaient mobilisées et étaient actives dans divers groupes de pression, en particulier parmi les femmes des professions libérales et au sein de la communauté chrétienne, où elles s'occupaient des femmes désavantagées.

323. Le Gouvernement avait introduit depuis 1991 une série d'amendements constitutionnels et juridiques. L'article 23 de la nouvelle Constitution redéfinissait la discrimination aussi largement que possible et visait pour la première fois la discrimination fondée sur le sexe. La Constitution précédente de 1964 n'interdisait pas ce genre de discrimination et avait été largement acceptée puisqu'on s'accordait à penser que les femmes avaient besoin d'être protégées.

324. En ce qui concernait les mesures spéciales temporaires contenues à l'article 4 de la Convention, la représentante a parlé de l'action qu'avait entreprise le Gouvernement pour accélérer l'égalité des femmes et des hommes. Les filles étaient encouragées à opter pour des sujets techniques tels que les sciences et les mathématiques. Pour améliorer le niveau d'éducation des filles, les moyennes requises dans le cas des filles pour le passage à l'enseignement secondaire avaient été abaissées et un quota de 20 % avait été introduit pour les filles dans les "collèges" scientifiques. Les travailleuses avaient désormais plus facilement accès aux prêts puisque le consentement du mari n'était plus nécessaire.

325. Le nouveau Gouvernement s'acheminait vers une unification de la coutume et de la loi, ce qui aurait d'heureuses répercussions sur la condition de la femme. Jusqu'à présent, le droit coutumier réglementait en grande partie la question des enfants issus du mariage et l'héritage.

326. À propos de l'article 7 de la Convention, la représentante a confirmé que les femmes zambiennes avaient toujours joué un rôle actif dans la politique. Elles constituaient la majorité des électeurs mais leur représentation dans le Gouvernement était faible. On ne comptait que neuf femmes sur les 160 membres du Parlement et deux femmes au cabinet; il y avait en outre peu d'ambassadrices. Étant donné que le système d'éducation avait été discriminatoire à l'égard des femmes, celles-ci ne pouvaient battre en brèche le système par la seule participation politique. Le réexamen actuel du système d'enseignement aurait d'énormes répercussions sur les femmes.

327. Il était difficile de se concentrer sur les problèmes des femmes à un moment où la survie du pays tout entier était en jeu. Le Gouvernement s'était attaché à examiner la situation des femmes en institutionnalisant les services de promotion de la femme, mais au cours des cinq années à venir, la question ne retiendrait pas toute l'attention voulue, en grande partie parce que les efforts devaient porter sur la reconstruction de l'économie.

Observations générales

328. Les membres du Comité ont remercié la représentante de la Zambie pour sa présentation claire et franche du rapport et les efforts déployés pour établir ce document, et plus particulièrement l'additif, qui avait été élaboré conformément aux procédures et directives suggérées pour l'établissement des rapports. Les membres ont rappelé qu'ils avaient lors de sessions précédentes lancé un appel aux États parties pour qu'ils envoient des représentants ayant pris part à l'établissement du rapport présenté au Comité. Le Comité a regretté que la présentation du rapport ait été retardée, de sorte que la représentante de la Zambie n'a pas même eu la possibilité de le lire d'un bout à l'autre. Il a jugé que cet état de choses était assez regrettable. Il importait que les États parties prêtent la plus grande attention aux dispositions de la Convention concernant l'établissement et la présentation des rapports. Les représentants des États parties auxquels on a confié le soin de présenter le rapport des États parties devaient être bien au courant du contenu de ce rapport. Les membres ont loué le Gouvernement zambien de sa volonté manifeste d'assurer la promotion de la femme et l'ont félicité d'avoir, dès 1985, ratifié la Convention sans réserve. Ils ont pris note des difficultés auxquelles le Gouvernement s'était heurté en essayant de concrétiser cette volonté par des mesures pratiques.

329. Les membres ont exprimé leur inquiétude devant les effets dévastateurs des programmes d'ajustement structurel sur les femmes et le fait que les questions relatives aux femmes avaient été, comme en Zambie, reléguées à l'arrière plan. Il s'agissait là d'un phénomène mondial; il a donc été recommandé que le Comité appelle l'attention de la communauté internationale sur la question. Le Comité devait souligner la contradiction qui existait entre l'article 13 de la Convention, traitant de l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes dans la vie économique et sociale et l'incidence négative des programmes d'ajustement structurel sur les femmes. La Zambie s'était vue forcée de manquer aux obligations qui lui incombaient en vertu de l'article 13 et dans une moindre mesure de l'article 11 de la Convention à cause des mesures économiques imposées. Toutefois, le développement d'un pays dépendait de l'intégration des femmes au développement puisque les femmes représentaient la moitié de la population. Invoquer la nécessité de réduire en temps de crise les programmes en faveur des femmes paraissait une excuse facile de la part d'un système patriarcal. En période de réforme radicale, il était essentiel que les femmes participent à la vie publique et à la prise de décisions sur les questions importantes telles que les finances et les mesures économiques.

330. Les membres ont demandé de plus amples renseignements sur les recommandations Nos 14 et 19 du Comité. La représentante a répondu qu'il n'y avait, nulle part dans le pays, de tradition d'excision. Il existait seulement des coutumes liées à l'hygiène personnelle des filles au moment de la puberté. La violence contre les femmes était largement répandue et même acceptée traditionnellement comme moyen de discipliner l'épouse. En vertu du Code pénal zambien, la violence contre les femmes était un crime et considérée comme sévices. Le Gouvernement avait encouragé la poursuite des délinquants. Étant donné que la plupart des femmes dépendaient économiquement de leur mari et qu'elles avaient peur de perdre leur foyer, elles étaient très réticentes à poursuivre leurs agresseurs en justice. Certaines femmes n'admettaient pas qu'elles avaient été brutalisées et considéraient les coups comme un signe d'affection de l'homme.

331. Le Comité a demandé davantage d'informations sur le fait que la loi zambienne reconnaissait l'égalité des hommes et des femmes du point de vue de leur capacité juridique. La représentante a déclaré que les hommes et les femmes jouissaient, en vertu de la loi, du même statut juridique en tant que personne. La seule législation en vigueur ayant un caractère discriminatoire concernait la citoyenneté du conjoint étranger d'une femme zambienne. Cette disposition de la loi visait à prévenir les "mariages de convenance" mais elle était en cours de réexamen.

332. Les membres se sont félicités que des services chargés des problèmes des femmes avaient été créés dans tous les ministères, ce qui constituait un bon exemple d'intégration générale de la question féminine, et ils ont demandé si le Service de la femme et du développement avait réellement atteint son objectif. La représentante a répondu que ce service, qui relevait du Département de la planification et de la coopération pour le développement (l'ancienne Commission nationale de la planification et du développement), coordonnait les questions relatives à l'action en faveur des femmes et à leurs droits. Il rassemblait des informations et des documents et contribuait à l'élaboration des plans de développement et des dispositifs budgétaires.

333. Les membres ont pris note des travaux accomplis par la Ligue des femmes qui avaient été liés au régime précédent. Se référant à la création d'organisations non gouvernementales et à leur rôle important dans la société, ils ont demandé quels effets elles exerçaient sur la Ligue des femmes et le Service des femmes et du développement. La représentante a déclaré qu'au temps de la démocratie participative à parti unique, les organisations non gouvernementales opéraient parallèlement à la Ligue des femmes, qui était l'aile politique du parti alors au pouvoir. Les questions relatives aux femmes étaient traitées de manière différente par les organisations non gouvernementales, qui jouaient un rôle complémentaire à celui du Département étant donné qu'elles avaient un domaine d'influence plus large.

334. En ce qui concerne le rôle joué par les organisations non gouvernementales en vue de modifier les stéréotypes dans le domaine de l'éducation et de la communication, la représentante a répondu que leurs activités éducatives et politiques, à la télévision comme à la radio, étaient très importantes. Les organisations non gouvernementales collaboraient également avec le département du Ministère de l'éducation chargé de mettre au point le programme d'enseignement national pour ce qui était de réviser le programme et le matériel pédagogique.

335. Rappelant que beaucoup de temps s'était écoulé entre l'indépendance de la Zambie et sa ratification de la Convention, les membres se sont inquiétés de la lenteur de l'amélioration de la condition de la femme. Ils ont demandé si les obstacles aux progrès étaient dus à l'insuffisance des mesures prises dans le cadre de la réforme de l'enseignement et de l'appareil juridique ou au poids des coutumes et à l'impact des réformes économiques. La représentante a estimé que la raison principale était une combinaison de divers facteurs. Bien que certaines croyances et pratiques coutumières aient empêché les femmes de progresser, l'éducation exerçait un effet positif sur la confiance qu'elles avaient en elles-mêmes et sur les familles qui reconnaissaient les avantages procurés par la scolarisation des filles. L'adoption de programmes d'ajustement structurel avait ralenti temporairement le rythme des progrès, mais le terrain juridique propice à l'égalité des femmes avait été préparé.

336. Les membres ont demandé s'il existait des facteurs sociaux traditionnels qui empêchaient intrinsèquement les femmes de jouir pleinement de leurs droits, en particulier dans le domaine de l'emploi. La représentante a expliqué que l'acquisition d'une éducation de base et d'un certain niveau d'aptitude professionnelle était la première condition nécessaire pour obtenir un travail rémunéré en Zambie. La plupart des femmes occupaient un emploi avant de se marier, mais l'abandonnaient ensuite pour se consacrer à leurs enfants et à leur ménage. Il n'existait pas de système d'aide sociale et le partage des tâches ménagères était un concept inconnu. Les garderies étaient de création récente dans les zones urbaines et coûtaient cher. Par conséquent, les femmes n'avaient pas le choix et devaient sacrifier leur carrière.

337. Les membres ont regretté le manque de données statistiques, auquel il devrait être remédié dans les rapports ultérieurs. La représentante a déclaré qu'un effort serait fait pour fournir, dans le troisième rapport périodique, davantage de données et de renseignements détaillés sur les conditions de vie des femmes en Zambie.

Questions relatives à des articles particuliers

Article 2

338. Les membres ont demandé d'autres informations sur la réforme de la Constitution de 1991, notamment pour savoir si ce texte contenait toujours des dispositions qui permettaient d'exercer une discrimination à l'égard des femmes. Ils se sont enquis en particulier de la Commission constitutionnelle que le Président avait créée afin d'harmoniser la Constitution. La représentante a déclaré que, dans la loi de 1991 sur la Constitution zambienne, le seul problème en matière de discrimination concernait la disposition relative à la citoyenneté des étrangers ayant épousé des Zambiennes, qui était en cours de révision. Cette loi traitait des questions relatives à la discrimination contre les femmes depuis qu'un article offensant (art. 23) de la précédente Constitution avait été modifié et comportait une définition plus large. La Commission constitutionnelle passait actuellement en revue le texte de la Constitution modifiée en vue d'obtenir son approbation définitive. Répondant à des questions posées quant aux mesures prises pour éliminer toutes les lois coutumières, la représentante a déclaré que la Constitution interdisait la pratique et l'application du droit coutumier qui étaient incompatibles avec la justice naturelle. Toutefois, le droit coutumier faisait partie du mode de vie zambien et il n'y avait aucune raison de supprimer cette tradition qui n'était pas nuisible. Répondant à une question sur la situation des veuves et de leurs enfants, la représentante a déclaré que la garde ne posait pas de problème dans son pays étant donné que c'était généralement la veuve qui s'occupait de ses enfants. La famille élargie ne s'en chargeait que si la veuve était malade ou avait des difficultés économiques. Si une femme perdait la garde de ses enfants, elle pouvait adresser une pétition en justice. Les veuves avaient toujours été traditionnellement protégées, mais elles subissaient le contrecoup de l'avènement de l'économie monétaire et de l'état d'esprit matérialiste, en particulier dans les zones urbaines.

Article 3

339. Les membres ont déclaré que le rapport ne présentait pas toutes les mesures appropriées visant à garantir le plein épanouissement des femmes et l'amélioration de leur condition, comme il était requis au titre de l'article. Ils ont exprimé l'espoir que le rapport suivant contiendrait les informations voulues dans ce domaine. Il était nécessaire d'avoir davantage de détails sur le budget et la structure du mécanisme national. Les membres ont demandé une description de la condition objective des femmes, en particulier des coutumes et traditions qui continuaient à exercer sur elles des effets négatifs. La représentante a dit que le prochain rapport fournirait des informations à cet égard.

Article 4

340. Les membres se sont félicités qu'un chapitre sur les femmes et le développement ait été inclus dans le quatrième plan national de développement (1989-1993) et se sont enquis notamment des résultats obtenus quant à la coordination des activités des femmes dans les divers domaines.

341. Ils ont demandé davantage de renseignements sur les mesures temporaires spéciales, y compris l'abaissement du niveau minimum exigé des jeunes filles pour entrer dans l'enseignement secondaire et l'application d'un système de quotas pour les jeunes filles dans les écoles scientifiques. Ils ont demandé quelles étaient les raisons de l'abaissement de la notation et si la société acceptait cette mesure. La représentante a répondu que les filles et les garçons avaient les mêmes programmes, les mêmes examens et les mêmes professeurs. Les écoles étaient mixtes à 90 %. Les mesures en faveur des jeunes filles visaient à leur permettre d'accéder en plus grand nombre à l'enseignement supérieur étant donné qu'elles étaient en minorité dès le premier jour de classe et davantage encore à la fin du cycle de sept ans, un grand nombre d'entre elles ayant abandonné leurs études. Cela ne signifiait pas que les jeunes filles obtenaient de mauvais résultats. La mesure avait été généralement bien acceptée bien que certains aient estimé que les femmes devraient entrer en concurrence avec les hommes sur un pied d'égalité.

Article 5

342. Les membres ont demandé quelles mesures avaient été prises afin de changer la pratique de la dot et du "prix de la fiancée" et si des progrès avaient été accomplis à cet égard dans les zones rurales. La représentante a déclaré que le "prix de la fiancée", qui avait toujours été symbolique, était une pratique généralisée et tout à fait acceptée. Aucun changement appréciable n'avait été signalé à cet égard dans les zones rurales.

343. Répondant à la question de savoir si les femmes pouvaient divorcer, la représentante a répondu que les procédures de divorce étaient différentes pour les mariages conclus conformément à la loi sur le mariage, dont la dissolution devait être prononcée devant la Haute Cour de Zambie, et les mariages coutumiers qui pouvaient être dissous dans les tribunaux locaux. Répondant à une question concernant les activités du Service de la femme et du développement et des organisations non gouvernementales en vue de lutter contre la violence à l'égard des femmes, la représentante a déclaré qu'il s'agissait là d'une question très médiatisée qui était traitée dans des séminaires, à la télévision et à la radio de même que dans des pièces de théâtre.

Article 6

344. Concernant la prostitution, qui était une activité illégale, les membres ont considéré que le fait que seules les femmes soient arrêtées, alors que leurs clients n'étaient pas poursuivis, constituait une discrimination. À leur avis, considérer la prostitution comme illégale et appréhender les prostituées, au lieu de résoudre le problème, ne faisait que l'aggraver. La question a été posée de savoir si les femmes appréhendées dans la rue avaient l'occasion de prouver leur innocence. La représentante de la Zambie a fait observer que le trafic des femmes ne constituait pas un problème en Zambie, mais que la prostitution y existait. Les femmes arrêtées pour prostitution devaient être inculpées et poursuivies devant un tribunal, où l'occasion leur était donnée de prouver leur innocence ou de signer des aveux.

Article 10

345. Les membres du Comité ont estimé que le taux d'analphabétisme chez les femmes était préoccupant. La représentante a indiqué que son pays menait l'un des meilleurs programmes d'alphabétisation fonctionnelle qui était fondé sur les collectivités dans les zones rurales et urbaines. Ce programme faisait appel à plusieurs activités féminines et visait à leur apprendre à unir leurs efforts. Interrogée sur les raisons du taux élevé d'abandon scolaire des jeunes filles après le niveau primaire, la représentante a indiqué qu'à cause de la taille des familles, il était difficile aux parents, pour des raisons économiques, d'envoyer tous leurs enfants à l'école. La préférence était accordée aux garçons, dont on attendait qu'ils assurent la subsistance de la famille élargie. On faisait peu de cas de l'éducation des filles, qui étaient traditionnellement préparées à leur futur rôle d'épouse et de mère.

Article 11

346. Les membres du Comité ont constaté que la forte participation des femmes au secteur non structuré était une caractéristique fondamentale des pays en développement. Ces femmes subissaient souvent des tracasseries policières; le secteur non structuré présentait des connotations d'illégalité, même si les femmes de ce secteur contribuaient à l'économie du pays et payaient des impôts. Ces femmes devaient commencer à s'organiser et engager des négociations avec le Ministère du travail. La communauté internationale devait prendre en considération les activités des femmes dans le secteur non structuré. Étant donné l'importance capitale de l'emploi et du secteur économique pour le statut de la femme, les membres du Comité ont demandé si le Gouvernement zambien prenait des mesures pour créer des emplois féminins. La représentante de la Zambie s'est référée à la Constitution du pays, qui reconnaissait le droit au travail, le libre choix de l'emploi, le droit à des conditions de travail justes et favorables et le droit à la protection contre le chômage. Le Gouvernement s'efforçait de fournir des emplois aux femmes, mais le programme d'ajustement structurel avait entraîné une contraction du marché du travail, qui ne devait être que provisoire. À la question de savoir si une orientation professionnelle était prévue pour les femmes se trouvant sur le marché du travail, il a été répondu que les femmes n'étaient pas orientées vers telle ou telle profession ou tel ou tel domaine, et qu'elles étaient libres de s'engager dans la carrière de leur choix, en fonction de leurs qualifications.

Article 12

347. Des renseignements complémentaires ont été demandés au sujet des droits des femmes en matière de procréation et de l'usage de la contraception. Il a été répondu que, traditionnellement, les femmes n'avaient pas voix au chapitre concernant leurs droits en matière de procréation et ne pouvaient refuser d'avoir des enfants. L'objet des mariages traditionnels était d'avoir des enfants. L'usage des contraceptifs était généralisé. À la question de savoir si l'avortement était autorisé, la représentante a indiqué que, en vertu de la loi sur l'interruption de grossesse, l'avortement n'était autorisé que pour des raisons médicales en cas de risque pour la vie de la mère ou du foetus et devait être recommandé par trois médecins. À propos de l'application éventuelle d'une politique démographique visant à faire abaisser le taux de natalité, elle a déclaré que le Gouvernement intervenait dans ce sens en fournissant des services de planification familiale et en distribuant gratuitement des contraceptifs. Selon les tendances démographiques, la population zambienne pouvait doubler au cours des 20 prochaines années si le taux de croissance annuel de 3,2 % se maintenait. Concernant les raisons du déséquilibre de la population, 60 % de celle-ci étant composée de femmes, la représentante a indiqué qu'il n'y avait pas de véritable explication, mais que ce déséquilibre était dû à un taux de natalité féminine élevé et un taux de mortalité masculine élevé. L'espérance de vie des femmes était de 55 ans, contre 53 pour les hommes. Il n'y avait pas d'émigration des hommes à l'étranger, laissant les femmes seules. L'exode rural avait touché les groupes les plus productifs, essentiellement les jeunes, les éléments mieux éduqués et entreprenants, et avait eu des conséquences négatives tant sur les zones rurales que sur les zones urbaines.

348. Les maladies mortelles frappant les femmes étaient le paludisme, les troubles liés à la grossesse, les complications à l'accouchement, les infections du système génito-urinaire, les affections des voies respiratoires, les complications liées au sida, auxquelles s'ajoutaient les lésions et blessures.

349. À propos du congé de maternité et des allocations familiales, la représentante de la Zambie a expliqué que les femmes avaient droit à trois mois de congé de maternité après deux années de service et à des intervalles de deux ans, en vertu de la législation du travail, ce qui était considéré comme une bonne politique de planification familiale, car cela permettait l'espacement des naissances.

Article 14

350. Selon les membres du Comité, la situation des femmes rurales était particulièrement critique et devait faire l'objet de renseignements complémentaires, de même que leur emploi du temps et le succès ou l'échec des programmes de développement.

Article 15

351. Les membres du Comité ont demandé des renseignements complémentaires au sujet du financement, des effectifs et des attributions du Sous-Comité chargé des problèmes des femmes.

Article 16

352. Des informations supplémentaires ont été demandées au sujet du nombre de femmes chefs de ménage, de leur situation économique, de leur nombre relatif dans les zones rurales ou urbaines et de leur stratégie de survie. La représentante de la Zambie n'était pas en mesure de répondre aux questions aux articles 14, 15 et 16, mais les réponses seraient fournies dans le troisième rapport périodique.

Conclusion

353. Dans sa conclusion, la représentante de la Zambie a souligné que les femmes de son pays n'avaient pas bénéficié autant que les hommes des services et opportunités offerts par le pays, bien que toute discrimination à l'égard des femmes soit absente des textes de loi. L'égalité des chances signifiait aussi l'égalité des responsabilités entre hommes et femmes, tant au foyer qu'à l'extérieur, mais le volume de travail des femmes au foyer était disproportionné. C'étaient surtout les femmes qui avaient pâti des mesures d'ajustement structurel. Toutefois, grâce à la restructuration en cours et au nouvel environnement libéral, des mesures étaient prises pour permettre aux femmes d'atteindre une qualité de vie égale à celle des hommes.

354. Les membres du Comité ont salué le Gouvernement zambien pour ses efforts tendant à éliminer la discrimination de jure tout en harmonisant la Constitution et en institutionnalisant le mécanisme national en faveur de la promotion de la femme. Les membres du Comité ont remercié la représentante de la Zambie de son exposé éclairé et de la compétence avec laquelle elle avait répondu aux questions. Elles attendaient avec intérêt les renseignements complémentaires devant figurer dans le troisième rapport périodique. Le Comité a par ailleurs encouragé la représentante à appliquer les directives pertinentes lors de l'élaboration du prochain rapport.

355. À propos du droit coutumier, les membres du Comité ont indiqué que les pratiques traditionnelles et le droit coutumier avaient des sens différents selon les cultures mais devaient être examinés sous l'angle de leurs effets sur les femmes. S'ils avaient un effet négatif sur le statut de la femme — mariage forcé ou excision — il fallait les éliminer. Il n'était toutefois pas question de rejeter en bloc toutes les coutumes et pratiques traditionnelles. Certains pays traversaient une période de transition au cours de laquelle il leur fallait décider des pratiques à conserver ou à éliminer; il importait qu'ils aient le choix. Le Comité a encouragé le Gouvernement à déterminer, au titre de chaque article de la Convention, les pratiques culturelles remontant à l'époque précoloniale, afin d'aider le pays et le Comité à mieux comprendre les effets des pratiques traditionnelles sur les femmes. Les membres du Comité ont aussi invité la représentante à examiner la manière dont les autres pays de la région avaient abordé les pratiques traditionnelles et le droit coutumier.

Conclusions du Comité

Introduction

356. Le Comité a noté avec satisfaction que la Zambie n'avait exprimé aucune réserve. L'amendement concernant le rapport initial respectait de plus près les procédures d'établissement des rapports que ne le faisait le rapport initial, encore qu'on n'y trouvait pas d'informations distinctes sur les articles 1 à 3 de la Convention.

357. L'un et l'autre document fournissaient des informations claires sur les lois et les mesures de politique générale ayant trait à l'application de la Convention, mais il serait souhaitable de faire figurer dans le rapport suivant des données plus concrètes concernant la situation réelle des femmes ainsi que sur les difficultés qui entravaient l'application de la Convention.

358. Le Comité a noté que le Gouvernement zambien se heurtait actuellement à des difficultés dans l'application de la Convention en raison des incidences des programmes d'ajustement structurel. Le Comité a noté avec une vive préoccupation que de tels ajustements avaient un effet négatif sur de nombreux aspects de la vie des femmes.

Aspects positifs

359. Le Comité a noté avec une grande satisfaction qu'un certain nombre de mesures légales avaient été instituées afin d'éliminer la discrimination à l'égard des femmes. Il était également conscient du fait qu'après l'instauration de la Constitution de 1991, un comité d'examen de la Constitution auquel ont participé des organisations non gouvernementales féminines avait été mis en place pour examiner de façon plus approfondie toutes les lois et pratiques discriminatoires.

360. Le Comité s'est félicité de la création de bureaux de femmes auprès de tous les ministères, des nombreux efforts en faveur des femmes consentis dans le domaine de l'éducation ainsi que de l'apparition de nouvelles organisations féminines.

Principaux sujets de préoccupation

361. Le Comité était très inquiet de la persistance des rôles sexuels traditionnels qui étaient profondément enracinés dans la vie culturelle des Zambiens et qui, de manière générale, semblaient faire obstacle à l'égalité. Il était également fortement préoccupé par la violation des droits des femmes en général et, tout particulièrement, des droits des femmes qui étaient assujetties au droit coutumier en matière de mariage.

362. Le Comité a noté également avec préoccupation le fait que les femmes n'avaient guère accès aux emplois du secteur structuré ainsi que les difficultés auxquelles elles se heurtaient dans le secteur non structuré de manière générale et de la part des représentants des administrations.

363. Le Comité était également préoccupé par les actes de violence commis contre les femmes dans leur vie privée. Il a noté par ailleurs le taux élevé de fécondité et se demandait si ce phénomène avait des incidences négatives sur la condition de la femme, en plus des difficultés causées par les programmes d'ajustement en cours d'exécution.

Suggestions et recommandations

364. Le Comité a suggéré que le Gouvernement zambien étudie la possibilité de codifier le droit coutumier de manière que les lois qui s'avéreraient transgresser la Convention puissent être réformées ou supprimées. Il a recommandé que le droit coutumier régissant le mariage soit modifié de manière que les mariages coutumiers soient enregistrés afin de conférer aux femmes mariées relevant de ce régime des droits et avantages égaux à ceux des hommes.

365. Le Comité a recommandé également que dans les futurs rapports, on fasse figurer une description beaucoup plus détaillée des coutumes et traditions qui influaient sur les droits des femmes, dans un sens positif ou négatif, dans tous les domaines entrant dans le champ d'application de la Convention. Il proposait de procéder à un examen plus approfondi de la législation existante et il comptait être informé dans le prochain rapport des résultats pratiques découlant des travaux de ce comité d'examen de la Constitution et de leur mise en application.

366. Tout en étant conscient du fait que les plans d'ajustement structurel posaient effectivement des difficultés aux États parties, le Comité a recommandé de faire en sorte que les questions intéressant les femmes demeurent au coeur du débat même lorsque la situation économique était désastreuse. Le Comité recommandait en conséquence que les femmes aient accès à la prise de décisions budgétaires et politiques de manière à atténuer certains des effets négatifs qu'avaient sur la vie des femmes les mesures d'ajustement structurel.

367. Le Comité a demandé instamment à l'État partie, aux organisations non gouvernementales féminines et à tous les intéressés de participer au niveau national à une campagne de sensibilisation visant à modifier les attitudes des hommes et des femmes de manière à réaliser une égalité de fait dans tous les domaines. Le Comité souhaitait également être informé dans les rapports ultérieurs de la situation des femmes dans les ménages qui avaient une femme pour chef de famille.

368. Le Comité a exprimé le voeu que le prochain rapport de la Zambie contienne toutes les informations voulues, assorties des statistiques nécessaires ventilées selon le sexe, conformément aux articles de la Convention et en étroite application des directives régissant la présentation des rapports au présent Comité.



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