University of Minnesota



Observations finales du Comité sur l
'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Saint-Vincent-et-les Grenadines, U.N. Doc. A/52/38/Rev.1,paras.123-150 (1997).




Comité sur l'élimination de la
discrimination à l'égard des femmes

Saint-Vincent-et-les Grenadines

123. Le Comité a examiné le rapport initial et les deuxième et troisième rapports périodiques combinés de Saint-Vincent-et-les Grenadines (CEDAW/C/STV/1 à 3 et Add.1) à ses 316e, 317e et 322e séances, les 16 et 21 janvier 1997 (voir CEDAW/C/SR.316, 317 et 322).

124. Présentant le rapport, la représentante de Saint-Vincent-et-les Grenadines s'est excusée du fait que le document soumis au Comité en 1992 (CEDAW/C/STV/1 à 3) avait été communiqué par erreur administrative. Elle a demandé que le rapport soumis au Comité en 1994 (CEDAW/C/STV/1 à 3/Add.1) soit considéré comme rapport principal, ajoutant qu'elle était prête à préciser les informations contenues dans le document du Comité d'action internationale pour la promotion de la femme, en date du 4 novembre 1991.

125. La représentante a indiqué qu'un certain nombre de réformes législatives, dont la loi sur la violence familiale et la loi sur l'égalité de rémunération, avaient été mises en oeuvre depuis la présentation du rapport en 1994. Un tribunal des affaires familiales et un système d'assistance judiciaire avaient également été établis pendant cette période. La représentante a indiqué que l'application des traités n'était pas automatique à Saint-Vincent-et-les Grenadines et que, bien qu'il n'existe pas de loi spécifique contre la discrimination, une femme victime de discrimination pouvait demander réparation auprès de l'instance compétente, conformément à l'article 16 de la Constitution. La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes était considérée comme marquant une étape importante dans l'élaboration de principes juridiquement contraignants et internationalement acceptés, visant à obtenir l'égalité des droits pour les femmes. Le Gouvernement avait en conséquence déposé des projets de loi conformes aux articles de la Convention.

126. La représentante a informé le Comité des mesures administratives qui avaient été prises afin de promouvoir la condition des femmes, notamment de la création d'un bureau des questions féminines en 1984-1985, qui avait par la suite été reclassé en Département des affaires féminines. Cet organe, comme le Conseil national des femmes, avait principalement pour fonctions d'établir l'égalité des sexes, de proposer des textes législatifs répondant aux attentes de la société et d'appliquer des mesures en faveur des femmes.

127. Le Gouvernement de Saint-Vincent-et-les Grenadines s'est déclaré préoccupé par plusieurs problèmes socio-économiques graves, dont le chômage des jeunes, le taux élevé de migration féminine, la baisse des recettes d'exportation dans le secteur agricole, le taux de grossesse élevé chez les adolescentes et préadolescentes, les comportements socioculturels traditionnels reflétant une conception stéréotypée du rôle dévolu à chaque sexe et la prévalence de la violence familiale.

128. La représentante a dit que, si tous les citoyens jouissaient d'un droit égal à l'éducation, à l'emploi, à la participation à la vie politique et à la représentation, les femmes continuaient de se heurter à des obstacles dans l'enseignement supérieur et il existait une ségrégation professionnelle sur le marché du travail. Un préjugé persistait également contre les femmes dans les emplois du secteur public, notamment au niveau de la prise de décisions, et dans la vie politique. Elles avaient un accès limité au crédit et à la propriété foncière, notamment dans les zones rurales, bien qu'elles représentent un pourcentage élevé de la main-d'oeuvre agricole.

129. Concluant sa présentation, la représentante de Saint-Vincent-et-les Grenadines a dit qu'elle serait heureuse de répondre aux questions que pourraient poser les experts sur la promotion de la condition de la femme, et s'est engagée à prendre les mesures appropriées au nom des femmes de Saint-Vincent-et-les Grenadines, compte tenu de leurs besoins.

Conclusions du Comité

Introduction

130. Le Comité a exprimé sa satisfaction de la présentation franche des premier, deuxième et troisième rapports combinés. L'exposé oral complétait les rapports écrits détaillés. Le Gouvernement de Saint-Vincent-et-les Grenadines a été félicité pour avoir été l'un des premiers pays à ratifier la Convention et ce, sans émettre de réserves. Toutefois, le Comité s'est déclaré satisfait par les rapports clairement structurés dont la présentation était conforme aux directives. La formulation adoptée — le texte des articles reproduit intégralement, et suivi des observations pertinentes — convenait parfaitement et faisait du rapport un document éducatif tout à fait précieux, assorti de données d'excellente qualité. Le Comité a déploré le manque de précision sur la manière dont la condition des femmes s'était améliorée depuis la ratification, en 1981. Il a également regretté le retard intervenu dans la présentation du rapport initial. Ce dernier ne contenait aucune référence au suivi de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes de Beijing et aux engagements pris à cette occasion, ni aucune information sur l'application des recommandations générales du Comité.

Facteurs et difficultés affectant l'application de la Convention

131. Selon le système juridique actuel de Saint-Vincent-et-les Grenadines, la Constitution n'était pas directement applicable et il fallait promulguer des lois pour que ses articles prennent véritablement effet. La promotion des femmes était entravée par la persistance générale de valeurs socio-culturelles traditionnelles, de même que par des types de comportements communément admis.

Aspects positifs

132. Le Comité appréciait les efforts déployés par le Gouvernement afin de se conformer aux dispositions de la Convention, en introduisant plusieurs réformes d'ordre juridique, ainsi que le fait que le Gouvernement et les organisations non gouvernementales collaborent à l'application de la Convention.

Principaux sujets de préoccupation

133. Les mesures d'ordre juridique qui avaient été prises ne répondaient pas à tous les aspects de la Convention. Certaines lois internes contrevenaient même à ses dispositions. Le Comité a déploré que la Constitution ne mentionne pas expressément l'égalité des femmes et que la Convention n'ait jamais été citée dans une procédure judiciaire.

134. Le Comité a noté avec préoccupation que le Gouvernement n'avait pris aucune mesure particulière afin de promouvoir l'égalité des femmes, notamment dans le domaine de l'emploi et dans la fonction publique.

135. Le Comité était préoccupé par le fait qu'il n'existait pas de centres d'hébergement pouvant également fournir aux victimes des services de conseils. Il était également très préoccupé par la persistance de rôles et de comportements traditionnels stéréotypés à l'égard des femmes et des filles, ainsi que par la violence familiale rampante.

136. Le Comité a noté avec préoccupation qu'aucune étude n'avait été faite sur la situation réelle en matière de prostitution et de traite des femmes.

137. La faible participation des femmes aux activités des partis politiques et en tant que candidates aux élections préoccupait vivement le Comité.

138. Bien que la Convention relative aux droits de l'enfant et les droits de l'homme en général fassent partie des programmes scolaires, le Comité était préoccupé par le fait que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes n'y figurait pas. Il était très préoccupé par les taux de grossesse extrêmement élevés chez les préadolescentes et adolescentes, les mères étant même parfois des enfants, avec les conséquences très graves et négatives que cela entraînait pour leur avenir, en particulier du fait qu'elles étaient contraintes d'abandonner leurs études.

139. Le Comité était préoccupé par le taux de chômage très élevé des femmes, ce qui aggravait leur vulnérabilité à la violence familiale. Il a noté avec préoccupation que le Gouvernement n'avait pris aucune mesure particulière pour remédier à ce problème. Le Comité a également exprimé sa préoccupation au sujet de la féminisation du phénomène de migration.

140. Le Comité était préoccupé par le fait que les femmes devaient obtenir l'accord de leur conjoint pour la ligature des trompes. Une telle condition contrevenait à la fois à l'article 12 et à l'article 15 de la Convention. Le Comité s'inquiétait du fait que la loi excluait l'avortement sans risques et empêchait les femmes de contrôler leur santé en matière de reproduction.

141. Le Comité était préoccupé par le taux élevé de migration féminine à l'étranger et les conséquences que cela pouvait avoir pour la société.

Suggestions et recommandations

142. Un réexamen de toutes les lois internes s'imposait afin de déterminer celles qui devaient être modifiées et quelles nouvelles lois devaient être promulguées pour que les femmes puissent jouir pleinement de tous les droits prévus par la Convention.

143. Les rapports suivants devront contenir des renseignements sur l'application des recommandations générales et des conclusions du Comité et sur les programmes de suivi mis en oeuvre en vue de l'application des résultats de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes.

144. Le Comité souhaitait également connaître les programmes de suivi de la Conférence et les engagements pris par le Gouvernement de Saint-Vincent-et-les Grenadines en application de la Convention.

145. Le prochain rapport devrait indiquer les mesures spéciales prises par le Gouvernement et les partis politiques afin d'éliminer l'écart entre égalité de jure et égalité de facto, notamment dans les domaines de la prise de décisions politiques et de l'emploi.

146. Le prochain rapport devrait également contenir des informations plus détaillées sur la prostitution et la traite des femmes.

147. Le Gouvernement, en collaboration avec les organisations non gouvernementales, les églises et toutes les personnalités et autorités compétentes, devrait créer des services d'éducation, d'information et de conseils tenant compte des sexospécificités dans les domaines de la sexualité et de la santé en matière de reproduction afin de réduire le nombre très élevé de grossesses chez les préadolescentes et les adolescentes, et intégrer dans les soins de santé primaires les services de santé sexuelle et en matière de reproduction, notamment la planification familiale.

148. Il faudrait réviser la loi sur l'avortement, afin d'éliminer ses dispositions pénales et de garantir l'avortement et la maternité sans risques.

149. Le Gouvernement et le secteur privé devaient s'efforcer de créer des possibilités d'emploi pour contribuer à maintenir à Saint-Vincent-et-les Grenadines les femmes qui pouvaient occuper un emploi, de sorte qu'elles puissent mieux s'occuper de leurs enfants et de parents âgés, et contribuer activement au développement de leur pays.

150. Le Comité a demandé instamment que les présentes conclusions soient largement diffusées à Saint-Vincent-et-les Grenadines afin qu'hommes et femmes soient informés des mesures prises pour assurer l'égalité de fait des femmes et des autres dispositions qui restaient à prendre à cet égard. Le Comité a demandé en outre que le prochain rapport décrive les mesures suivies par le Gouvernement en application de la Déclaration et du Programme d'action de Beijing.



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