University of Minnesota



Observations finales du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Maurice, U.N. Doc. CEDAW/C/MUS/CO/6-7 (2011).


 

CEDAW/C/MUS/CO/6-7

Convention sur l’éliminationde toutes les formesde discriminationà l’égarddes femmes

Distr. générale

8 novembre 2011

Français

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discriminationà l’égard des femmes

Cinquantième session

3-21 octobre 2011

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Maurice

1.Le Comité a examiné les sixième et septième rapports périodiques de Maurice, soumis en un seul document (CEDAW/C/MUS/6-7) à ses 1004e et 1005e séances, tenues le 7 octobre 2011 (voir CEDAW/C/SR.1004 et 1005). La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/MUS/Q/6-7 et les réponses du Gouvernement mauricien sont publiées sous la cote CEDAW/C/MUS/Q/6-7/Add.1.

A.Introduction

2.Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir présenté ses sixième et septième rapports périodiques, réunis en un seul document, qui sont détaillés et dans l’ensemble conformes aux directives du Comité relatives à l’établissement des rapports et qui tiennent compte des précédentes observations finales, même s’ils ne mentionnent pas les recommandations générales du Comité et ne contiennent pas de données ventilées par sexe sur la situation des femmes dans certains domaines visés par la Convention, en particulier s’agissant de l’absentéisme scolaire chez les filles et des femmes victimes de la traite. Le Comité félicite l’État partie pour ses réponses écrites à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travail présession et pour les précisions apportées en réponse à la plupart des questions posées oralement par le Comité.

3.Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau conduite par la Ministre de l’égalité des genres, du développement de l’enfant et du bien-être de la famille. Il remercie l’État partie pour la déclaration prononcée par la chef de la délégation, qui a donné un aperçu des progrès accomplis et des obstacles rencontrés récemment sur la voie de l’égalité des sexes dans l’État partie. Le Comité se félicite du dialogue constructif qui s’est tenu entre la délégation et les membres du Comité, tout en notant que certaines questions sont restées sans réponse.

B.Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification par l’État partie du Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le 31 octobre 2008, du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, le 12 février 2009 et du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le 14 juin 2011.

5.Le Comité se félicite de l’adoption de plusieurs lois visant à lutter contre la discrimination et la violence à l’égard des femmes, dont la loi sur la lutte contre la traite des personnes, adoptée par le Parlement en 2009, qui prévoit notamment le rapatriement vers et depuis Maurice des victimes de la traite ainsi que leur indemnisation, et la loi sur les droits en matière d’emploi, adoptée par le Parlement en 2008, qui introduit le versement d’allocations de maternité pour tout accouchement ainsi que cinq jours calendaires de congé de paternité pour tous les travailleurs mariés concernés.

6.Le Comité prend note avec satisfaction des différents politiques et plans adoptés par l’État partie en vue de promouvoir l’égalité des sexes et d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, en particulier toutes les formes de violence au foyer, notamment la politique générale pour l’égalité des sexes, adoptée en mars 2008, et le Plan national d’action pour la lutte contre la violence au foyer, élaboré par le Groupe du bien-être et de la protection de la famille en 2007.

7.Le Comité note que, depuis les élections générales de 2010, les femmes sont mieux représentées au Parlement. Il constate avec satisfaction que les femmes sont également mieux représentées dans le système judiciaire depuis l’examen du précédent rapport, 56 % des juges et des magistrats étant des femmes.

8.Le Comité se félicite des efforts entrepris par l’État partie pour améliorer l’accès des femmes et des filles aux services de santé et de l’adoption, en 2006, de la loi sur le VIH et le sida.

9.Le Comité note avec satisfaction l’adoption de diverses mesures tendant à améliorer les perspectives d’emploi pour les femmes, notamment l’organisation de cours de formation continue dispensés dans le cadre du projet de programme d’autonomisation des femmes, et la révision des barèmes menée en 2008 par le Conseil national des salaires pour réduire les écarts de salaire entre les femmes et les hommes travaillant dans l’agriculture, les vergers et l’élevage.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Le Comité rappelle que l’État partie est tenu de mettre en œuvre, de manière systématique et constante, toutes les dispositions de la Convention et qu’il doit accorder une attention prioritaire aux préoccupations et recommandations formulées dans les présentes observations finales à compter de maintenant et jusqu’à la présentation du prochain rapport périodique. Il prie donc instamment l’État partie de privilégier ces questions dans ses activités de mise en œuvre et de rendre compte, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises et des résultats qu’il aura obtenus. Il l’invite à communiquer les présentes observations finales à tous les ministères concernés, à l’Assemblée nationale et, au niveau régional, aux conseils municipaux et de village, et aux instances législatives et judiciaires, de manière à en assurer l’application intégrale.

Parlement

Tout en réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef de s’acquitter pleinement des obligations que la Convention met à la charge de l’État partie, le Comité souligne que la Convention a force obligatoire pour toutes les branches du pouvoir. Il invite l’État partie à encourager l’Assemblée nationale, conformément à ses procédures, le cas échéant, à prendre les mesures nécessaires pour ce qui est de la mise en œuvre des présentes observations finales et de l’établissement des prochains rapports au titre de la Convention.

Rayonnement de la Convention

12.En dépit des efforts déployés par l’État partie pour intégrer les principes de la Convention dans la législation nationale et de l’intention du Gouvernement d’entreprendre un réexamen de la Constitution, le Comité exprime de nouveau les préoccupations dont il avait fait part dans ses précédentes observations finales, à savoir que toutes les dispositions de la Convention n’ont pas été incorporées au droit national et plus particulièrement que, tant que cela n’aura pas été fait, les dispositions de la Convention ne seront pas exécutoires dans les tribunaux de l’État partie.

Le Comité demande instamment à l’État partie d’accélérer l’incorporation de la Convention selon un calendrier établi de manière à la rendre pleinement applicable dans le système juridique interne. Il invite l’État partie à veiller à ce que la Convention et la législation nationale connexe fassent partie intégrante de la formation des juges, des avocats et des procureurs, afin de leur permettre d’appliquer directement les dispositions de la Convention et d’interpréter les dispositions légales nationales à la lumière de la Convention, afin d’établir solidement une culture juridique propice à l’égalité des femmes et des hommes et à l’absence de discrimination fondée sur le sexe.

Définition de la discrimination à l’égard des femmes

14.Le Comité réaffirme la préoccupation exprimée dans ses précédentes observations finales en raison du maintien dans l’article 16, paragraphe 4 c), de la Constitution de la dérogation à l’interdiction de la discrimination pour ce qui concerne le statut personnel, notamment l’adoption, le mariage, le divorce, l’inhumation et l’héritage, ce qui constitue une violation des articles 2 et 16 de la Convention. Le Comité constate avec inquiétude que le réexamen de la Constitution visant à mettre ses dispositions en conformité avec la Convention ne progresse pas au rythme souhaité.

Le Comité invite l’État partie à abroger l’article 16, paragraphe 4 c), de la Constitution qui institue une discrimination à l’encontre des femmes, et à adopter toutes les mesures propres à mettre la Constitution en conformité avec les articles 2 et 16 de la Convention. Il recommande que ces mesures portent notamment sur la reprise d’un dialogue ciblé avec les communautés religieuses tout en assurant la participation des femmes des deux côtés, et sur l’engagement de campagnes d’éducation sur l’égalité et la non-discrimination en vue de modifier les mentalités patriarcales qui existent au sein des différents groupes de la société et chez leurs représentants respectifs. Le Comité demande à l’État partie d’accélérer le réexamen de la Constitution et de l’informer dans son prochain rapport des progrès réalisés, comme il est prévu dans le Programme gouvernemental 2010-2015.

Mesures temporaires spéciales

16.Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas entrepris d’accélérer l’instauration d’une égalité réelle entre les femmes et les hommes en recourant à des mesures temporaires spéciales. Il est en particulier préoccupé par le fait que la loi de 2008 sur l’égalité des chances qui, lorsqu’elle sera promulguée, remplacera la loi de 2002 contre la discrimination sexuelle, ne comporte aucune disposition prévoyant l’adoption de mesures temporaires spéciales.

Le Comité recommande à l’État partie:

a)D’adopter des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la Recommandation générale no25 (2004) du Comité dans les domaines visés par la Convention où les femmes sont sous-représentées ou défavorisées, ainsi qu’il était recommandé dans les précédentes observations finales;

b)De sensibiliser les parlementaires et les responsables gouvernementaux à la nécessité d’adopter des mesures temporaires spéciales;

c)De communiquer dans son prochain rapport périodique des renseignements complets sur le recours à de telles mesures par rapport aux différentes dispositions de la Convention, et sur leur incidence;

d)D’insérer une disposition particulière dans la loi de 2008 sur l’égalité des chances, avant sa promulgation, ainsi que dans tout autre texte législatif approprié, énonçant expressément que des mesures temporaires spéciales visant à instaurer une égalité réelle entre les femmes et les hommes ne sont pas considérées comme discriminatoires.

Stéréotypes et pratiques culturelles

18.Tout en prenant note avec satisfaction des mesures prises pour sensibiliser le public aux stéréotypes liés aux rôles sexuels traditionnels et de l’adoption en 2008 de la Politique-cadre nationale pour l’égalité des sexes, le Comité est vivement préoccupé par la persistance de normes culturelles, pratiques et mentalités patriarcales discriminatoires et de stéréotypes profondément ancrés quant aux rôles et aux responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, qui continuent à faire des hommes, en général, les principaux soutiens de famille et assignent aux femmes la charge principale de l’éducation des enfants et des tâches domestiques. Le Comité s’inquiète aussi de l’absence d’un mécanisme permettant de réexaminer et de suivre toutes les mesures prises par l’État partie pour réaliser ces objectifs afin d’évaluer leur efficacité. En outre, depuis l’examen de son dernier rapport, l’État partie n’a pas engagé d’action auprès des médias en vue d’accélérer les transformations structurelles propres à réaliser l’égalité des sexes.

Le Comité invite instamment l’État partie à:

a)Redoubler d’efforts pour modifier les perceptions traditionnelles des rôles des femmes et des hommes dans la famille et la société;

b)Mener des campagnes de sensibilisation du public visant à éliminer les stéréotypes sexistes;

c)Prendre les mesures nécessaires pour garantir l’application effective de la Politique-cadre nationale pour l’égalité des sexes et pour suivre attentivement la mise en œuvre de cette politique, y compris par la création de mécanismes de contrôle;

d)Informer le Comité, dans son prochain rapport périodique, des progrès accomplis dans la mise en œuvre de la politique, notamment par une description des mesures prises et une évaluation globale de l’incidence et des résultats de cette politique;

e)Établir des partenariats avec les médias afin d’accélérer la transformation des idées prévalant actuellement dans la société quant aux rôles des femmes et des hommes, en engageant en particulier des campagnes médiatiques et en attribuant régulièrement un temps minimum d’antenne aux questions concernant l’égalité des sexes;

f)Surveiller systématiquement l’efficacité des mesures prises afin d’assurer la réalisation d’objectifs déterminés et à rendre compte à ce sujet au Comité dans son prochain rapport périodique.

Violence à l’égard des femmes

20.Tout en tenant compte des mesures législatives et administratives prises par l’État partie pour lutter contre la violence au foyer, y compris les modifications de la loi sur la protection contre la violence au foyer en 2007 et 2011, le lancement du Plan national d’action pour la lutte contre la violence au foyer en novembre 2007 et la création du Comité national et des comités locaux de lutte contre la violence au foyer, le Comité est préoccupé par le fait que la violence contre les femmes reste un grave problème dans l’État partie. Il s’inquiète aussi du faible nombre de foyers d’hébergement et du fait que seulement un sur trois de ces foyers dans l’État partie relève d’un service ministériel.

Le Comité rappelle sa Recommandation générale no19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes, ses précédentes observations finales (CEDAW/C/MAR/CO/5, par. 18 et 19) ainsi que les recommandations du Comité contre la torture (CAT/C/MUS/CO/3, par. 16) et les recommandations faites par le Conseil des droits de l’homme dans le cadre de l’Examen périodique universel relatif à Maurice (A/HRC/11/28, par. 25 à 28) et invite instamment l’État partie à:

a)Accorder un rang de priorité élevé à l’exécution des obligations que lui impose la Convention de réduire et d’éliminer toutes les formes de violence infligées aux femmes et aux filles dans l’État partie;

b)Intensifier ses efforts en vue de la création de foyers d’hébergement supplémentaires; offrir aux femmes victimes de violence au foyer d’autres cadres de vie sûrs; et communiquer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les résultats de la décision du Gouvernement en 2011 de porter à neuf le nombre de foyers d’hébergement dans l’État partie;

c)Renforcer son appui aux ONG locales qui offrent une aide juridique et un abri aux femmes et aux filles victimes de violence au foyer et accroître la part du budget de l’État allouée à ces ONG;

d)Intensifier ses efforts visant à mettre en place des mécanismes efficaces de suivi et d’évaluation afin d’assurer l’efficacité des mesures prises dans le cadre du Plan d’action pour la lutte contre la violence au foyer et informer le Comité des progrès et des résultats obtenus dans son prochain rapport périodique.

22.Tout en prenant note avec satisfaction des efforts entrepris par l’État partie pour faire appliquer la loi en cas de violence au foyer, le Comité reste préoccupé par le faible nombre de cas de violence au foyer signalés à la police, dont on peut déduire que les victimes souffrent en silence et sont parfois contraintes, en raison de pressions familiales et sociétales, d’endosser la responsabilité des actes subis. Le Comité s’inquiète en outre du fait que les dispositions de la loi de 1997 sur la protection contre la violence au foyer telle que modifiée en 2007 et 2011 risquent en fait de ne pas offrir une protection suffisante aux femmes, et que de nombreuses femmes qui ont obtenu une ordonnance de protection continuent de subir des agressions de leur conjoint. Le Comité exprime de nouveau son profond regret de constater que l’État partie n’a pas érigé en infraction pénale la violence au foyer, notamment le viol conjugal, en dépit de ses précédentes observations finales.

Conformément à l’article 2 de la Convention, et compte tenu de ses Recommandations générales no28 (2010) concernant les obligations fondamentales des États parties découlant de l’article 2 et no19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes, ainsi que des observations finales du Comité contre la torture (CAT/C/MUS/CO/3, par. 16), le Comité engage l’État partie à:

a)Redoubler d’efforts en vue de combattre l’impunité des auteurs d’infractions liées à la violence au foyer en supprimant tous les obstacles empêchant les femmes qui en sont victimes de les signaler à la police, et en traduisant en justice tous les auteurs de tels actes et en accordant réparation aux femmes victimes de violence au foyer;

b)Poursuivre ses efforts de sensibilisation des femmes et des filles au caractère délictueux et aux effets dommageables sur leur santé de toutes les formes de violence, en éliminant les justifications culturelles qui sous-tendent ces violences et pratiques, et en encourageant les femmes et les filles à signaler les actes de violence aux autorités compétentes;

c)Assurer le maintien des enquêtes et des poursuites d’office dans les affaires de violence familiale afin de signifier à la communauté que la violence au foyer est un délit grave qui sera traité comme tel;

d)Adopter toutes les mesures législatives et administratives propres à offrir une protection efficace aux femmes qui dénoncent des cas de violence familiale à leur égard, notamment en prévoyant des mesures d’interdiction temporaire en vertu de la loi contre la violence au foyer dès qu’une plainte est déposée et dispenser aux juges et aux magistrats une formation supplémentaire sur la portée de la législation relative à la violence au foyer;

e)Collecter des données ventilées sur le nombre de plaintes, de poursuites, de condamnations et de peines imposées aux auteurs de violence sexuelle et au foyer, et communiquer ces données au Comité dans son prochain rapport périodique;

f)Prendre toutes les mesures législatives nécessaires pour ériger en délit la violence au foyer et redoubler d’efforts pour incriminer le viol conjugal et l’intégrer dans le projet de loi sur les délits sexuels.

Traite des femmes et exploitation de la prostitution

24.Le Comité prend note de la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et de l’adoption de la loi de 2009 sur la lutte contre la traite des personnes, mais constate avec inquiétude que l’État partie reste un pays d’origine, de destination et de transit pour la traite des personnes et que le tourisme sexuel prolifère dans le pays, provoquant essentiellement l’exploitation sexuelle des femmes et des filles et accentuant la vulnérabilité des travailleurs du sexe. Le Comité est également préoccupé par le manque d’informations sur l’ampleur réelle de la vente et de l’exploitation sexuelle des jeunes filles en raison du tabou lié à la sexualité, et par l’absence d’un système centralisé d’information. Il note aussi avec préoccupation l’absence de données ventilées par sexe concernant tant la traite que la prostitution ainsi que l’absence d’un plan national d’action pour lutter contre la traite et l’exploitation sexuelle dans l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie:

a)D’assurer la mise en œuvre effective de la loi récemment adoptée en mettant en place des mesures efficaces de prévention, et en poursuivant et punissant sans délai les auteurs de traite;

b)De poursuivre ses efforts de sensibilisation sur la traite des personnes, notamment par la diffusion d’informations et des actions de formation du personnel judiciaire et de la police sur la nouvelle loi afin d’assurer une stricte application des dispositions pénales pertinentes;

c)D’adopter un plan national d’action complet et de mettre en place un mécanisme de coordination pour lutter contre la traite et l’exploitation sexuelle et de veiller à l’attribution de ressources humaines et financières suffisantes pour la mise en œuvre effective du plan d’action;

d)De s’attaquer aux causes profondes de la traite et de l’exploitation des femmes en intensifiant ses efforts pour améliorer la situation économique des femmes et des filles, en particulier des travailleuses migrantes, les rendant ainsi moins vulnérables à l’égard de l’exploitation et des trafiquants;

e)De collecter des données ventilées par sexe sur le nombre de travailleurs du sexe et de victimes de la traite ainsi que sur le nombre de plaintes, d’enquêtes, de poursuites et de peines prononcées dans les affaires de traite et de prostitution et d’inclure ces données dans son prochain rapport périodique.

Participation à la vie politique

26.Tout en notant l’augmentation de la représentation des femmes au Parlement après les élections générales de 2010, le passage en 2010 de la thématique de la femme à celle de la problématique hommes-femmes, le lancement en 2011 de la plate-forme nationale en faveur des femmes dans la vie politique et l’intention du Gouvernement de présenter un projet de loi sur l’administration locale (2011) visant à assurer une représentation adéquate des femmes au sein des pouvoirs locaux, le Comité reste préoccupé au sujet de la participation des femmes à la vie politique et publique et s’inquiète du fait que les femmes continuent d’être sous-représentées aux postes élevés de l’administration et de la diplomatie. À cet égard, le Comité constate que le Gouvernement actuel ne compte que 2 femmes sur 22 ministres. Il note avec préoccupation que des obstacles systématiques continuent d’entraver la participation égale des femmes à la vie politique, comme les attitudes culturelles négatives, les doutes quant aux capacités de direction des femmes, l’absence de mesures temporaires spéciales sous la forme de quotas de femmes et le manque de moyens pour développer le potentiel des candidates éventuelles, la limitation des ressources financières et l’absence de soutien logistique pour les candidates.

Le Comité recommande à l’État partie:

a)De mener des politiques durables visant à promouvoir la pleine participation des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, à la prise de décisions dans tous les domaines de la vie publique, politique et professionnelle;

b)De tirer pleinement parti de sa Recommandation générale no 23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique et d’adopter des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à sa Recommandation générale no 25 (2004), afin d’accélérer la pleine participation des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, à la vie publique et politique;

c)D’intensifier ses efforts pour faire adopter le projet de loi sur l’administration locale engageant le Gouvernement à assurer la participation des femmes au processus électoral;

d)De mettre en œuvre des activités de sensibilisation sur l’importance pour la société dans son ensemble de la participation des femmes à la prise de décisions et d’élaborer des programmes ciblés de formation et de tutorat pour les femmes candidates et élues à des fonctions officielles;

e)D’offrir aux femmes parlementaires et employées dans la fonction publique l’assistance nécessaire, comme des services de garde d’enfants, pour leur permettre de participer pleinement et efficacement à la vie publique.

Éducation

28.Prenant note avec satisfaction de la poursuite des activités de réduction de l’analphabétisme, de sensibilisation et de promotion des activités favorisant l’estime de soi menées par le Conseil national des femmes, le Comité s’inquiète toutefois des niveaux d’analphabétisme chez les femmes et des disparités à cet égard entre citadines et rurales. Le Comité est également préoccupé par l’absence de données ventilées par sexe sur l’absentéisme chronique des enfants à l’école primaire et les incidences sur l’abandon scolaire aux niveaux du primaire et du secondaire, ainsi que par l’abandon scolaire des adolescentes enceintes. Le Comité s’inquiète aussi de la ségrégation persistante en ce qui concerne le choix des matières enseignées à l’école, les filles continuant d’opter pour des matières traditionnelles. Il est en outre préoccupé par le faible nombre de femmes et de filles inscrites à des cours de formation professionnelle et industrielle, et par les conséquences que cela entraîne sur les possibilités d’emploi des filles qui ne terminent pas leur scolarité formelle.

L’État partie est invité à soutenir toutes les mesures de sensibilisation à l’importance de l’éducation des femmes et des filles et à intensifier toutes les autres activités visant à remédier aux disparités régionales et à assurer l’égalité d’accès à l’éducation, et à encourager les adolescentes enceintes à poursuivre leurs études après l’accouchement. L’État partie devrait fournir dans son prochain rapport périodique des données ventilées par sexe sur l’absentéisme au niveau primaire et devrait en outre adopter et faire appliquer toutes les mesures propres à lutter contre ce phénomène tout en mettant en place des mécanismes de suivi permettant d’évaluer l’adéquation des mesures adoptées pour parvenir aux objectifs fixés et réduire les taux d’abandon scolaire aux niveaux primaire et secondaire. Le Comité engage l’État partie à adopter des politiques encourageant les femmes et les filles à choisir des domaines d’enseignement non traditionnels notamment la formation technique et professionnelle, par des mesures d’action positive comme des quotas d’étudiantes dans les filières professionnelles et techniques.

Emploi

30.Tout en prenant note de l’adoption de la loi de 2008 sur les droits au regard de l’emploi ainsi que des mesures administratives prises par l’État partie pour abroger les dispositions discriminatoires qui fixent le niveau de salaire en fonction du sexe pour les personnes travaillant dans l’agriculture, les vergers et l’élevage, le Comité réaffirme son inquiétude à propos de la persistance des écarts salariaux entre les femmes et les hommes dans les secteurs public et privé. Il note aussi avec préoccupation que la disposition relative à l’égalité de rémunération énoncée dans la loi sur les droits au regard de l’emploi ne correspond pas au principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale. Le Comité reste préoccupé par la ségrégation horizontale et verticale sur le marché du travail et la concentration de femmes dans des emplois peu qualifiés liés à de bas salaires et de mauvaises conditions de travail. Le Comité s’inquiète en outre de l’application insuffisante de la législation relative au travail.

Rappelant ses précédentes observations finales (CEDAW/C/MAR/CO/5, par. 27 à 29) et les recommandations faites par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/MUS/CO/4, par.17, 18 et 21), le Comité recommande à l’État partie:

a)D’adopter des politiques et des mesures législatives concrètes en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes en matière d’emploi et de s’attacher à garantir aux femmes une réelle égalité des chances à tous les niveaux sur le marché du travail;

b)De donner des renseignements sur toutes les mesures prises dans le cadre du plan d’action pour la politique d’égalité des sexes (2005-2015) et toute autre mesure adoptée pour parvenir aux objectifs fixés, et leur impact;

c)De veiller à la mise au point de systèmes d’évaluation des emplois axés sur des critères sexospécifiques en vue de combler les écarts salariaux entre hommes et femmes et de réaliser l’égalité (égalité de rémunération pour un travail de valeur égale), conformément à la Recommandation générale no 13 (1989) du Comité;

d)De modifier l’article 30 de la loi sur les droits au regard de l’emploi afin de subordonner le congé de maternité à douze mois de travail continu indépendamment du nombre d’employeurs précédents, vu les changements fréquents d’emploi des femmes, et de modifier l’article 20 de la loi pour le mettre en conformité avec l’article 11 de la Convention et avec la Convention (no 100) de l’OIT concernant l’égalité de rémunération entre la main-d’œuvre masculine et la main-d’œuvre féminine pour un travail de valeur égale, 1951;

e)De redoubler d’efforts pour adopter des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la Recommandation générale no 25 (2004) du Comité, en fixant des objectifs numériques assortis de délais ou de quotas en ce qui concerne l’accès des femmes au marché du travail, y compris à des emplois non traditionnels, et la promotion des femmes aux niveaux supérieurs dans les secteurs public et privé;

f)D’améliorer le respect du droit du travail, en particulier quant à l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale et aux dispositions relatives au harcèlement sexuel, et évaluer l’efficacité de l’article 38 de la loi sur les droits au regard de l’emploi pour lutter contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

Santé

32.Tout en se félicitant des efforts entrepris par l’État partie pour intégrer aux programmes d’enseignement primaire et secondaire les questions relatives à la santé en matière de sexualité et de procréation et aux droits connexes, de la promulgation de la loi de 2006 sur le VIH/sida, et du projet de loi portant modification du Code pénal qui tend à réviser la section 235 du Code pénal sur l’avortement, le Comité exprime de nouveau sa vive préoccupation face au grand nombre de grossesses chez les adolescentes et aux avortements non médicalisés qui en découlent. Le Comité s’inquiète aussi du maintien, en dépit de ses précédentes observations finales, de la disposition du Code pénal incriminant l’avortement et des sanctions encourues par les femmes et les filles en cas d’interruption volontaire de grossesse. Le Comité est vivement préoccupé par la pratique des avortements clandestins et par le taux élevé de complications sanitaires qui en résultent. Il est également préoccupé par les conditions de travail des travailleurs du sexe qui sont exposés à un risque élevé de contamination par le VIH/sida et les maladies sexuellement transmissibles et de transmission.

Conformément à ses précédentes observations finales(CEDAW/C/MAR/CO/5, par. 31) et à sa Recommandation générale no24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité invite l’État partie à:

a)Accélérer la promulgation du projet de Code pénal tendant à modifier l’article 235 du Code pénal sur l’avortement pour supprimer les sanctions imposées aux femmes qui avortent et dépénaliser l’avortement dans des cas précis, par exemple lorsque la grossesse met la santé ou la vie de la mère en danger et en cas de viol ou d’inceste; accélérer également le processus de consultation avec les parties prenantes concernées, en veillant à ce que les femmes y participent;

b)Redoubler d’efforts pour sensibiliser les adolescentes enceintes et leur famille aux graves risques que les avortements clandestins font peser sur la santé;

c)Garantir l’assistance de professionnels de santé qualifiés et l’accès à des centres de soins aux femmes et aux filles qui souffrent de complications médicales à la suite d’un avortement à risque;

d)Fournir des données ventilées par âge sur les complications médicales liées aux avortements à risque et aux grossesses précoces, ainsi que des données ventilées par sexe sur le VIH/sida;

e)Veiller à dispenser, à tous les niveaux de l’enseignement scolaire, une éducation à la santé et aux droits en matière de sexualité et de procréation qui soit efficace, adaptée à l’âge des élèves et intégrée aux programmes d’enseignement, pour lutter contre les grossesses précoces et informer les jeunes des risques importants associés aux rapports sexuels non protégés;

f)Faire en sorte que les travailleurs du sexe aient accès à des services de bilan médical et à des moyens contraceptifs, élaborer des programmes de conseil et dispenser des cours de formation professionnelle pour leur donner la possibilité de quitter le commerce du sexe;

g)Adopter toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuvre le plan national de lutte contre le VIH/sida et tenir le Comité informé des mesures adoptées et des résultats obtenus dans son prochain rapport périodique.

Groupes de femmes défavorisées

34.Le Comité constate que les lois relatives au travail s’appliquent aussi bien aux travailleurs locaux qu’aux travailleurs migrants, mais s’inquiète du fait que dans la pratique les conditions d’emploi des travailleuses migrantes sont discriminatoires. Il est préoccupé en particulier par les mauvaises conditions de travail, les salaires insuffisants et les entraves à la liberté de circulation des travailleurs migrants dont les passeports sont confisqués. Il est vivement préoccupé par le cas des travailleuses migrantes contraintes à la prostitution forcée par leurs employeurs. Il note avec préoccupation que le rapport périodique de l’État partie ne contient pas de données ni d’informations sur les travailleuses migrantes.

Le Comité prie instamment l’État partie de veiller à ce que le droit du travail s’applique aux travailleurs migrants sur un pied d’égalité avec les travailleurs locaux pour éviter toute exploitation par les employeurs locaux. À cet égard, il invite l’État partie à maintenir et renforcer les visites régulières effectuées par les fonctionnaires du Ministère du travail et du Ministère de la santé sur les lieux de travail et dans les centres d’hébergement des travailleurs migrants pour s’assurer que leurs droits sont protégés et à adopter toute autre mesure nécessaire, en procédant notamment à un examen minutieux de tous les contrats de travail pour en évaluer la conformité au droit du travail national. Le Comité recommande à l’État partie de fournir des données ventilées par sexe sur le nombre de travailleurs migrants, les emplois occupés, les plaintes déposées contre des employeurs et le résultat des enquêtes qui en découlent.

36.Le Comité note que le rapport de l’État partie ne contient pas d’informations ni de statistiques sur les groupes de femmes défavorisées, telles que les femmes rurales, les femmes âgées et les femmes handicapées, qui sont souvent victimes de multiples formes de discrimination.

Le Comité invite l’État partie à fournir, dans son prochain rapport, un bilan complet de la situation de facto des groupes de femmes défavorisées, y compris les femmes rurales, les femmes âgées et les femmes handicapées, dans tous les domaines visés par la Convention.

Diffusion

LeComité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées à Maurice pour que la population, les agents de l’État, les responsables politiques, les parlementaires et les organisations féminines et de défense des droits de l’homme soient informés des mesures prises pour garantir l’égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il recommande que cette diffusion se fasse aussi à l’échelle des collectivités locales. L’État partie est encouragé à organiser une série de réunions pour faire le point sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre des présentes observations finales. Le Comité prie l’État partie de continuer de diffuser largement, en particulier auprès des organisations féminines et de défense des droits de l’homme, les Recommandations générales du Comité, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing et les textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le thème «Les femmes en l’an 2000: égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXIesiècle».

Ratification d’autres instruments

Le Comité souligne que l’adhésion de l’État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribuerait à promouvoir l’exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc l’État partie à envisager de ratifier les instruments auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Suivi des observations finales

Le Comité invite l’État partie à fournir par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu’il aura prises pour donner suite aux recommandations figurant aux paragraphes 15 et 23 ci-dessus.

Élaboration du prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à assurer la participation de tous les ministères et organismes publics à l’élaboration de son prochain rapport, ainsi qu’à consulter un vaste éventail d’organisations féminines et de défense des droits de l’homme pendant cette phase.

Le Comité prie l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il présentera au titre de l’article 18 de la Convention. Il l’invite à soumettre son prochain rapport périodique en octobre 2015.

Le Comité invite l’État partie à suivre les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument, approuvées lors de la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en juin 2006 (HRI/MC/2006/3).Les directives sur l’établissement de rapports propres à un instrument international, que le Comité a adoptées à sa quarantième session en janvier 2008 (A/63/38, première partie, annexe I), doivent être appliquées concurremment avec les directives harmonisées relatives au document de base commun. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Le document propre à cet instrument ne devrait pas dépasser 40 pages et le document de base commun actualisé devrait comporter au maximum 80 pages.



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