University of Minnesota



Observations finales du Comité sur l
'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Israël, U.N. Doc. A/52/38/Rev.1,paras.132-183 (1997).



Comité sur l'élimination de la
discrimination à l'égard des femmes

Israël

132. Le Comité a examiné le rapport initial et le deuxième rapport périodique combinés d'Israël (CEDAW/C/ISR/1 et 2) à ses 350e, 351e et 353e séances, les 17 et 21 juillet 1997 (voir CEDAW/C/SR.350, 351 et 353).

133. La représentante d'Israël a souligné que son pays considérait la signature et la ratification de la Convention comme une démarche importante et logique sur la voie de l'égalité entre les hommes et les femmes. Pour Israël, la présentation de rapports au Comité revêtait une importance toute particulière en tant qu'instrument de la promotion de la femme.

134. L'établissement de ce rapport avait donné l'occasion de faire le bilan des succès et des obstacles rencontrés sur la voie de la promotion de la femme en Israël; il avait en outre permis aux institutions de prendre conscience des préoccupations et des besoins sociaux des femmes. Par ailleurs, les organisations non gouvernementales (ONG) avaient eu la possibilité de faire part de leur réaction à ce rapport et d'instituer par là même une nouvelle forme de dialogue entre le gouvernement et la société civile.

135. La représentante a déclaré qu'Israël attachait une grande importance à la situation et à la condition de la femme dans la société, et a fait observer que la question de la condition de la femme dans la société avait constamment figuré parmi les préoccupations nationales. Après avoir mis en place une infrastructure constitutionnelle et normative, on s'employait à revoir les dispositions législatives concernant la condition de la femme et à en adopter de nouvelles. Des modalités d'application avaient été mises au point en fonction des besoins. Elle a souligné que ce processus s'était appliqué sur un pied d'égalité à toutes les femmes israéliennes, qu'elles soient juives ou arabes.

136. La représentante s'est étendue sur les deux paramètres permettant d'évaluer la condition de la femme. Le premier paramètre avait trait à la qualité de vie des femmes en général et le second permettait de mesurer le degré d'égalité entre les hommes et les femmes dans les domaines de la vie publique, de l'emploi, des salaires et de l'enseignement.

137. Elle a précisé que le système juridique israélien appliquait à la discrimination à l'égard des femmes une définition conforme à celle qui figurait à l'article premier de la Convention. Le principe de l'égalité était compris comme étant un principe de fond et non de pure forme qui tenait compte de la discrimination de facto, ainsi que de l'importance des mesures palliatives.

138. Les réformes législatives avaient largement contribué à l'amélioration de la condition de toutes les femmes en Israël et avaient permis de familiariser la jeune génération et le grand public avec les normes particulières adoptées en faveur des femmes. Le processus visant à inculquer les normes et les valeurs en matière d'égalité entre les sexes se poursuivait, et l'examen de plusieurs importants projets de loi dans ce domaine en était à divers stades d'avancement.

139. La représentante a décrit diverses initiatives que le Gouvernement avait prises pour favoriser la promotion de la femme. Au nombre de celles-ci figurait la nomination d'une conseillère du Premier Ministre chargée de la condition de la femme et la création de la Commission de la Knesset pour la promotion de la femme.

140. Elle a souligné que l'éducation jouait un rôle clef pour ce qui était de modifier véritablement et durablement les rôles sexospécifiques et la manière dont ils étaient perçus. La diminution de l'analphabétisme des femmes avait été encourageante, et le nombre de femmes inscrites à l'université était supérieur à celui des hommes. La santé des femmes dans tous les groupes de population n'avait cessé de s'améliorer. La participation des femmes à la vie active était liée à leur niveau d'éducation et à leur situation de famille, mais les femmes avaient davantage tendance à travailler à temps partiel.

141. Les avantages sociaux et ceux liés à l'emploi étaient au nombre des facteurs qui influaient le plus sur la condition économique des femmes en Israël. Les systèmes d'assurance pour les maternités et de paiement de pensions alimentaires avantageaient les femmes. En dépit de l'insuffisance de données sur la situation économique des familles monoparentales dont le chef était une femme, des lois avaient été promulguées pour assurer un appui généreux à ces familles.

142. La représentante a décrit la situation en Israël pour ce qui était du mariage, de l'âge du mariage, de la cohabitation, de la garde des enfants, de la répartition des biens, du choix du nom de famille et des nouvelles techniques en matière de reproduction. Elle a déclaré que d'importants progrès avaient été accomplis dans la lutte contre la violence sexiste en Israël. La législation avait évolué, et les travaux de plusieurs commissions d'enquête et de réforme avaient largement contribué à ces progrès, et la situation avait aussi évolué sur le plan pratique.

143. Les données et les informations concrètes concernant la prostitution et l'exploitation des femmes étaient insuffisantes, mais le système juridique israélien était partisan de l'abolition de la prostitution. La représentante a appelé l'attention du Comité sur la position de certains groupes de femmes au sein de la société israélienne, dont les Bédouines et les immigrantes en provenance de l'ex-Union soviétique et d'Éthiopie.

144. Elle a souligné que, dans toutes les sociétés, les attitudes sociales, les rôles sexospécifiques et les stéréotypes influaient sur la promotion de la femme. Elle a cité à titre d'exemple le rôle des femmes dans les médias et précisé que les médias israéliens n'avaient pas une position systématique à cet égard. Bien que l'emploi des femmes dans cette industrie ait augmenté et que les médias aient consacré davantage de reportages à certaines questions relatives aux femmes, il n'en restait pas moins que les stéréotypes consistant à faire des femmes des objets sexuels et des victimes persistaient dans une certaine mesure.

145. Au niveau politique national, les femmes n'avaient guère progressé; elles prenaient toutefois davantage part aux activités politiques locales. Par ailleurs, le nombre de femmes occupant des postes de rang élevé au gouvernement et dans la fonction publique avait progressivement augmenté. À la suite de la promulgation d'une législation en la matière, des mesures palliatives avaient été adoptées par les conseils d'administration de sociétés publiques ainsi que dans la fonction publique, ce qui avait contribué pour beaucoup à la promotion de la femme.

146. Pour conclure, la représentante a appelé l'attention du Comité sur l'emploi des femmes dans les forces de sécurité et de défense. Cette participation avait fait l'objet d'une attention considérable et suscité des débats en raison de l'important rôle social que jouait le service militaire en Israël. Le phénomène du "plafond de verre" était manifeste dans les forces de la défense, la promotion des femmes nécessitant en moyenne neuf mois de plus que celle des hommes.

Conclusions du Comité

Introduction

147. Le Comité a remercié l'État partie de son rapport très complet et franc dans lequel il examine tous les articles de la Convention, du point de vue tant juridique que sociologique. Il appréciait également le niveau élevé de sa délégation et a félicité sa représentante de son exposé très lucide.

148. Le Comité a pris note avec satisfaction du fait que le rapport avait été présenté dans les délais fixés et conformément aux directives du Comité.

149. Le Comité a noté avec satisfaction que les organisations non gouvernementales avaient eu la possibilité d'examiner le rapport et de présenter des rapports complémentaires.

150. Le Comité était préoccupé par le fait que, dans les réponses qu'il avait présentées par écrit, le Gouvernement n'avait pas répondu à toutes les questions que les membres avaient posées à la représentante d'Israël. Il était d'avis que s'il l'avait fait, les questions et problèmes qui se posaient auraient pu être clarifiés.

Aspects positifs

151. Le Comité a pris note avec satisfaction du fait qu'Israël avait élaboré une législation progressiste et mis au point des programmes complets en ce qui concerne la violence à l'égard des femmes et l'égalité en matière d'emploi.

152. Bien que l'égalité ne fasse pas partie de la loi fondamentale d'Israël, le Comité a noté avec satisfaction que la Cour suprême pouvait donner effet au principe de l'égalité dans ses arrêts.

153. Le Comité a noté avec satisfaction que la majorité des Israéliennes avaient un niveau d'éducation élevé, en particulier dans le troisième cycle.

154. Le Comité a noté avec satisfaction l'analyse très poussée des femmes dans les médias et les programmes visant à encourager la société à abandonner les images stéréotypées des femmes.

155. Le Comité a pris note avec satisfaction de la loi de 1995 sur l'assurance maladie obligatoire qui garantit à toutes les communautés un accès universel aux soins de santé.

Facteurs et difficultés affectant l'application de la Convention

156. Selon le Comité, le fait qu'aucune loi fondamentale ne consacrait le principe d'égalité ni n'interdisait la discrimination faisait obstacle à l'application de la Convention.

157. Le Comité a déploré qu'Israël ait maintenu les réserves qu'il avait formulées à l'égard des articles 7 b) et 16 de la Convention. Il a également déploré que les femmes ne puissent être juges des tribunaux religieux et que les lois religieuses qui réglementaient une grande partie des relations familiales soient discriminatoires à l'égard des femmes.

158. Le Comité a estimé que la persistance d'une situation de conflit et de violence faisait obstacle à l'application de la Convention. En outre, du fait de la persistance du conflit, les forces armées disposaient de beaucoup de pouvoir. Les femmes, qui n'étaient pas représentées aux échelons supérieurs des forces armées, faisaient l'objet de mesures de discrimination, leur point de vue sur le maintien de la paix n'était pas pris en compte et leurs capacités de négociation n'étaient pas utilisées.

Principaux sujets de préoccupation

159. Le Comité a noté avec préoccupation que le Gouvernement n'avait pas formulé de plan global ni de mesures visant à garantir l'application de la Convention et du Programme d'action de Beijing.

160. Le Comité était très préoccupé par le fait qu'il n'existait pas de mécanisme gouvernemental spécifiquement chargé de promouvoir et de coordonner les politiques en faveur des femmes.

161. Le Comité était préoccupé par le fait que les conditions de vie des femmes non juives étaient plus mauvaises que celles des juives. Elles avaient un niveau d'éducation moins élevé, étaient moins représentées dans la fonction publique et n'occupaient qu'un nombre limité de postes de décision.

162. Le Comité était également préoccupé par le fait que l'état de santé des femmes non juives étaient moins bon que celui des juives, d'où des taux de mortalité maternelle et de mortalité infantile très élevés. Les possibilités d'emploi qui s'offraient à elles étaient aussi moins nombreuses.

163. Le Comité était préoccupé par le fait qu'il existait encore des cas de polygamie, de mariage forcé, de mutilation génitale et de meurtre commis pour atteinte à l'honneur familial.

164. Le Comité a noté avec préoccupation que le pourcentage des femmes occupant des postes de décision politique était très faible et avait fort peu évolué au fil des ans.

165. Le Comité a noté avec préoccupation qu'il existait un écart considérable entre les salaires moyens des hommes et ceux des femmes dans de nombreux secteurs et que la proportion des femmes exerçant des emplois à temps partiel était très élevée.

166. Le Comité était préoccupé par le fait que beaucoup plus de femmes que d'hommes travaillaient dans le secteur informel et n'étaient pas rémunérées, ce qui risquait de limiter leur accès aux avantages associés au secteur structuré.

167. Le Comité a noté avec préoccupation que le système de santé publique consacrait des ressources considérables à la fécondation in vitro mais ne distribuait pas gratuitement des contraceptifs.

168. Le Comité était préoccupé par le fait que de nombreuses femmes étaient arrêtées pour prostitution. Il était également préoccupé par la publication dans les quotidiens de nombreuses annonces concernant des services sexuels, ce qui contribuait sensiblement à l'expansion de la prostitution.

169. Le Comité a noté avec préoccupation qu'en dépit de la législation existante, les cas de violence à l'égard des femmes demeuraient fréquents, en grande partie à cause des idées traditionnelles concernant le rôle des femmes et de l'attitude négative de la société vis à vis du problème de la violence à l'égard des femmes.

Suggestions et recommandations

170. Le Comité a recommandé que le Gouvernement israélien assure l'application de la Convention dans l'ensemble du territoire qui relève de sa juridiction.

171. Le Gouvernement ou le Parlement devrait adopter un plan global pour l'application de la Convention et du Programme d'action de Beijing, contenant des mesures concrètes et un échéancier précis.

172. Le Comité a recommandé que le droit à l'égalité et l'interdiction de toute discrimination directe ou indirecte à l'égard des femmes soient inscrits dans une loi fondamentale.

173. Le Comité a suggéré que, pour garantir aux hommes et aux femmes les mêmes droits dans le mariage et dans les relations familiales en Israël et assurer le respect intégral de la Convention, le Gouvernement achève le processus de sécularisation de la législation pertinente, la place sous la juridiction des tribunaux civils et retire ses réserves à l'égard de la Convention.

174. Le préambule de la Convention souligne que le bien-être du monde et la cause de la paix exigent la pleine participation des femmes à la vie de la société, sur un pied d'égalité avec les hommes, dans tous les domaines. Le Comité a donc recommandé que toutes les mesures nécessaires soient prises pour garantir la paix, avec la pleine participation de toutes les femmes, juives et chrétiennes, musulmanes et druses. Ceci était nécessaire pour créer un environnement où les femmes puissent exercer pleinement leurs droits de manière à garantir des possibilités égales de développement économique et social, en particulier pour les femmes rurales.

175. Le Comité espérait que le projet de loi portant création du mécanisme gouvernemental visant à améliorer la condition de la femme serait adopté et que ce mécanisme serait doté de ressources suffisantes pour pouvoir s'acquitter de sa tâche.

176. Le Comité a recommandé que les mesures visant à garantir aux femmes non juives, notamment celles qui vivent dans les zones rurales, l'exercice de leurs droits fondamentaux, en particulier en matière de santé, d'éducation et d'emploi, soient intensifiées. Des mesures spéciales devraient être prises pour combler l'écart qui existe entre écoles arabes et écoles juives et réduire les taux élevés d'abandon scolaire des filles arabes et bédouines. Des ressources adéquates devraient être prévues pour les installations scolaires et la fourniture de possibilités d'éducation, y compris les bourses. En outre, la représentation de femmes arabes dans la fonction publique et aux postes de décision devrait être renforcée.

177. Le Comité a recommandé au Gouvernement d'intensifier ses efforts et de multiplier les actions visant à éliminer la violence à l'égard des femmes, en particulier au sein de la famille, dans toutes les communautés.

178. Le Comité a vivement engagé le Gouvernement israélien à prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer des pratiques qu'aucun motif ne saurait justifier, comme les mariages forcés, les mutilations génitales, les meurtres commis pour atteinte à l'honneur familial et la polygamie.

179. Il faudrait inclure dans la comptabilité nationale, dans le cadre de comptes satellites, la valeur du travail non rémunéré.

180. Le Comité a recommandé qu'une partie des ressources allouées au traitement de la fécondité soit consacrée à l'étude des causes du problème ainsi qu'à sa prévention.

181. Le Comité a recommandé que les services de santé publique facilitent l'accès aux contraceptifs et les distribuent gratuitement.

182. En outre, le Comité a demandé au gouvernement israélien d'économiser les questions suivantes dans son prochain rapport : la situation des femmes handicapées; la lutte contre la discrimination indirecte dans l'emploi; les avantages auxquels ont droit les mères et les pères pour la naissance d'un enfant ou lorsqu'ils ont des enfants en bas âge, et l'utilisation effective qu'ils en font; l'impact des programmes visant à modifier les stéréotypes concernant le rôle des femmes et des hommes dans la société; les programmes pour sensibiliser les magistrats, les membres de la police et les professionnels de la santé aux problèmes propres aux femmes; l'appui financier fourni par le Gouvernement à toutes les organisations non gouvernementales dans le territoire d'Israël.

183. Le Comité a demandé que ces conclusions soient diffusées le plus largement possible en Israël afin que chacun(e) soit informé(e), d'une part, des mesures qui ont été prises pour assurer de facto l'égalité entre les sexes et, de l'autre, de celles qu'il reste à prendre dans ce domaine.



Page Principale || Traités || Recherche || Liens