University of Minnesota



Observations finales du Comité sur l
'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Canada, U.N. Doc. A/52/38/Rev.1,paras.306-343 (1997).




Comité sur l'élimination de la
discrimination à l'égard des femmes


Canada

306. Le Comité a examiné les troisième et quatrième rapports périodiques du Canada (CEDAW/C/CAN/3 et 4) à ses 329e et 330e séances, le 28 janvier 1997(voir CEDAW/C/SR.329 et 330).

307. Présentant le rapport, la représentante a placé l'application de la Convention et du Programme d'action adopté à la quatrième Conférence mondiale sur les femmes dans le cadre du système fédéral canadien. Elle a indiqué qu'au Canada, le Gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux se partageaient le pouvoir législatif. La responsabilité de domaines comme l'éducation, la santé et les services sociaux incombait principalement aux provinces et aux territoires. Le système national de promotion des femmes était bien établi au niveau fédéral et il existait des bureaux chargés des questions féminines au niveau des gouvernements provinciaux et territoriaux.

308. L'approche adoptée par le Canada concernant la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes se fondait sur la reconnaissance du fait que les critères de sexe influençaient les systèmes politique, économique et social. Toute politique sociale devait donc tenir compte de la différence d'impact des mesures prises sur les hommes et les femmes. Le mécanisme national en place effectuait des analyses par sexe et donnait des conseils aux entités gouvernementales, afin de faire en sorte que les critères de sexe soient pleinement intégrés dans la législation, les politiques et les programmes.

309. La représentante a souligné que son gouvernement attachait une grande importance au maintien d'une coopération étroite avec les ONG et la société civile, en tant qu'aspect crucial de la promotion des femmes. Diverses mesures ont été prises afin de refléter les vues de la société civile dans les processus décisionnels. De vastes réseaux de coopération avaient été établis avec les ONG et le Gouvernement subventionnait de nombreuses organisations féminines.

310. Indiquant que le Canada était confronté à de nouveaux défis socio-économiques sur les plans intérieur et mondial, la représentante a souligné que son pays avait pris des mesures décisives afin de fournir aux femmes un cadre juridique efficace contre la discrimination. La Charte canadienne des droits et libertés garantissait l'égalité devant la loi et conformément à la loi, et la protection égale de la loi pour les hommes et les femmes. Des particuliers ou des groupes pouvaient contester les lois et les pratiques du Gouvernement fédéral ou des gouvernements provinciaux et territoriaux, s'ils les considéraient comme étant discriminatoires. La Charte assurait une protection contre toute discrimination intentionnelle et systémique, et protégeait les femmes contre les lois et pratiques entraînant pour elles un traitement injuste. Un programme spécial fournissait un soutien financier aux groupes et personnes s'efforçant d'obtenir la protection de la Charte à des fins d'égalité. Un amendement récent à la loi sur les droits de la personne accordait une protection contre la discrimination fondée sur de l'orientation sexuelle.

311. La représentante a mentionné diverses mesures prises récemment par son gouvernement en vue de promouvoir l'égalité des femmes dans les domaines économique et social. Comme l'emploi des femmes et leur autonomie économique étaient considérés comme des éléments essentiels de leur égalité, des améliorations devaient être apportées en ce qui concerne leurs revenus et afin d'éliminer la ségrégation persistant au niveau professionnel. Un certain nombre de mesures législatives adoptées récemment visaient à remédier à ces problèmes. On s'efforçait également de calculer et d'évaluer le travail non rémunéré effectué par les femmes et les hommes au foyer et d'en tenir compte dans les politiques.

312. L'élimination de la violence contre les femmes et les enfants était une autre question prioritaire. Le Canada envisageait ce problème dans une optique globale, accordant une attention particulière aux causes profondes de cette violence. Outre les amendements récemment votés pour renforcer les articles du Code pénal relatifs à la violence, diverses initiatives étaient à l'étude dans le domaine législatif.

313. La représentante a indiqué qu'une assistance spéciale était fournie aux femmes désavantagées, troisième domaine dans lequel le Gouvernement avait récemment pris des mesures. Le Canada a reconnu que les femmes étaient désavantagées non seulement en raison de leur sexe mais également de leur ethnicité, de leurs incapacités ou de leur revenu. La situation des femmes autochtones exigeait une attention particulière et les recommandations contenues dans l'étude effectuée récemment par la Commission royale sur les populations autochtones devaient jouer un rôle important dans l'élaboration des politiques dans ce domaine.

314. Il fallait également assurer l'égalité d'accès des femmes aux soins de santé. Compte tenu de l'augmentation des dépenses de santé au Canada, il était prévu d'introduire des réformes importantes dans le système de protection de la santé au cours des 10 prochaines années. Le maintien de l'accès des femmes à des soins de santé de qualité dans des conditions d'égalité constituerait un élément essentiel dans ce processus.

315. En conclusion, la représentante a reconnu que, malgré les progrès réalisés dans de nombreux domaines, beaucoup restait à faire. Elle a assuré le Comité que son gouvernement était prêt à rechercher des solutions novatrices aux problèmes restants, en étroite collaboration avec tous les secteurs de la société canadienne.

Conclusions du Comité

Introduction

316. Le Comité a félicité le Gouvernement canadien de ses troisième et quatrième rapports périodiques et des réponses satisfaisantes et détaillées qu'il avait données aux nombreuses questions écrites des experts.

317. Le Comité a apprécié également que le Canada ait envoyé une délégation de haut niveau incluant des représentants des provinces.

318. Le Comité a jugé la présentation des rapports écrits par provinces difficile à analyser et à évaluer. De ce fait, les experts n'avaient pu apprécier pleinement les progrès réalisés et les obstacles rencontrés dans l'application de la Convention.

319. Le Comité a noté le rôle prépondérant joué par le Canada dans la promotion de l'égalité entre les sexes au niveau international par le biais de ses programmes de coopération pour le développement sur l'intégration des femmes et la violence dont elles étaient victimes.

320. Le Comité a également noté que, si le rapport examinait en détail la législation et la jurisprudence nouvelles en matière de droits de la personne affectant les femmes, les informations fournies n'expliquaient pas de manière satisfaisante l'impact sur les femmes en général ou sur des groupes particuliers de femmes.

Facteurs et difficultés affectant l'application de la Convention

321. La restructuration de l'économie, phénomène que connaissent le Canada et d'autres pays hautement industrialisés, semble avoir eu un impact considérable sur les femmes. Bien que le Gouvernement ait pris diverses mesures pour améliorer la condition de la femme, la restructuration menaçait de compromettre gravement les progrès importants faits par les femmes canadiennes. Compte tenu du rôle de premier plan joué par le Gouvernement pour ce qui était des questions relatives aux femmes à l'échelle mondiale, ces faits n'auraient pas seulement un impact sur les femmes canadiennes mais également sur les femmes d'autres pays.

Aspects positifs

322. Le Comité s'est félicité de voir l'importance que le Canada attachait à la promotion et à l'exercice des droits de l'homme, comme le soulignaient sa Charte des droits et libertés et le fait qu'il avait ratifié les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, et notamment la Convention.

323. Le Comité a noté que le Canada avait, en prenant la décision historique de faire de la violence fondée sur le sexe un motif d'octroi de l'asile aux femmes, montré une nouvelle fois la voie à suivre.

324. Le Comité a pris note avec satisfaction de la mise en place du Plan fédéral pour l'égalité entre les sexes, qui constituait pour le Canada le cadre de la mise en oeuvre du Programme d'action de Beijing.

325. Le Comité s'est félicité de l'accent mis par le Canada sur la contribution de la société civile à la promotion de l'égalité entre les sexes et à la mise en place de mécanismes de coopération et de dialogue, en particulier avec les ONG. La consultation annuelle sur la violence à l'égard des femmes, tenue par le Ministre de la justice, en coopération avec le Conseil sur la condition de la femme, était particulièrement louable.

326. Le Comité a noté également avec satisfaction que le Canada continuait de renforcer et de mieux centrer ses efforts d'intégration des femmes à tous les niveaux.

Principaux sujets de préoccupation

327. Bien qu'il existe de nombreuses mesures, notamment des lois, pour lutter contre la violence à l'égard des femmes, l'incidence de cette violence non seulement ne diminuait pas, mais elle avait même augmenté dans certains cas.

328. Le Comité était préoccupé de constater l'augmentation du taux de conception chez les adolescentes, son impact négatif sur la santé et l'éducation ainsi que l'accroissement de la pauvreté et de la dépendance des jeunes femmes qui en résultaient.

329. Le Comité s'est déclaré préoccupé par la tendance à la privatisation des programmes de soins de santé, susceptible d'affecter gravement l'accessibilité et la qualité des services mis à la disposition des femmes canadiennes, en particulier des plus vulnérables et des plus défavorisées.

330. Le Comité était préoccupé de constater que dans le cadre des changements économiques et structurels, notamment ceux qui découlaient des arrangements économiques régionaux et internationaux, on n'avait pas suffisamment tenu compte de l'impact que ces mutations pouvaient avoir sur les femmes en général et les femmes défavorisées en particulier.

331. Le Comité était préoccupé par la pauvreté croissante chez les femmes, notamment les mères célibataires, qu'aggravaient la suppression, la modification ou la réduction des programmes d'aide sociale.

332. Le Comité était préoccupé par le fait que, malgré les mesures prises pour mettre en oeuvre la loi relative à l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique, cette dernière était encore trop limitée pour avoir un impact réel sur la situation économique des femmes et n'était pas appliquée avec une rigueur suffisante.

333. Le Comité était préoccupé de constater que les programmes destinés aux femmes autochtones risquaient de se révéler discriminatoires.

334. Le Comité s'est également déclaré préoccupé par le fait que les compressions budgétaires actuelles affectaient la continuité des services fournis par les centres d'urgence destinés aux femmes.

Suggestions et recommandations

335. Le niveau de la violence à l'égard des femmes canadiennes en général et des femmes et fillettes faisant l'objet d'une exploitation sexuelle, des prostituées et victimes de la traite des femmes en particulier, exigeait que des mesures soient prises d'urgence. Les mesures visant à lutter contre la violence à l'égard des femmes devaient faire l'objet d'un suivi continu et leur impact sur les comportements et attitudes à long terme devait être évalué.

336. Le Comité a suggéré au Gouvernement de s'attaquer de toute urgence aux facteurs responsables de l'accroissement de la pauvreté des femmes, en particulier des mères célibataires, et d'élaborer des programmes et des politiques de lutte contre la pauvreté de ces groupes.

337. Les rapports ultérieurs devraient comporter des informations sur l'évaluation et la qualification du travail non rémunéré des femmes, notamment du travail ménager.

338. Le Comité a proposé que, dans son prochain rapport, le Gouvernement fournisse des informations de niveau fédéral et provincial article par article, et ce compte tenu des possibilités offertes par le cadre juridique national. Le Comité a également recommandé que le rapport contienne des détails précis sur l'impact des législations, des politiques et des programmes sur les femmes canadiennes en général et sur des groupes de femmes plus spécifiques.

339. Il conviendrait de mettre au point des méthodes permettant d'évaluer les progrès réalisés pour combler le fossé entre la rémunération des hommes et celle des femmes et faire en sorte que pour un travail de valeur égale elles perçoivent un salaire égal.

340. Le Plan fédéral pour l'égalité entre les sexes devrait prévoir des délais spécifiques, des repères et des objectifs quantifiables permettant d'en mesurer la mise en oeuvre et bénéficier des ressources nécessaires.

341. Il conviendrait de faire un bilan général de la situation des femmes autochtones, notamment leur niveau d'instruction, et de leur place au sein de la population active et de décrire et d'évaluer les programmes fédéraux et provinciaux antérieurs et actuels qui leur sont destinés. Les programmes s'adressant aux femmes autochtones devraient être contrôlés pour le cas où ils auraient des effets discriminatoires. Le sort des femmes autochtones détenues devait être examiné d'urgence.

342. Le Comité a recommandé de rétablir les programmes d'aide sociale destinés aux femmes à un niveau approprié.

343. Le Comité a demandé instamment la large diffusion des présentes conclusions au Canada afin que les Canadiens soient tenus informés des mesures appliquées pour assurer l'égalité de fait des femmes et des dispositions qui restaient à prendre à cet égard.



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