University of Minnesota



Observations finales du Comité sur l
'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Bolivie, U.N. Doc. A/50/38,paras.42-104 (1995).




Comité sur l'élimination de la
discrimination à l'égard des femmes



Bolivie

42. Le Comité a examiné le premier rapport de la Bolivie (CEDAW/C/BOL/1 et Add.1) à ses 262e, 263e et 267e séances, tenues les 17 et 20 janvier 1995 (voir CEDAW/C/SR.262, 263, 267).

43. La représentante de la Bolivie a rappelé en présentant le rapport qu'entre le moment où ce document avait été remis au Comité, en 1991, et son examen à cette session de 1995, la Bolivie avait changé de gouvernement, après de nombreuses années de dictature, et avait par conséquent opéré des réorientations majeures dans sa politique concernant les femmes et leurs droits. La démocratie bolivienne allait bientôt avoir 10 ans. Mais le pays traversait une crise économique générale et était en pleine refonte structurelle. La stabilisation macro-économique étant prioritaire, un certain nombre de problèmes sociaux devraient attendre encore quelque temps que le pays soit en mesure de s'y attaquer. Les organisations féminines boliviennes étaient largement actives depuis longtemps déjà. Elles avaient joué un rôle important dans le rétablissement de la démocratie nationale et avaient posé les fondements d'une action gouvernementale en faveur des femmes, préparant le terrain à des mesures sociales visant à établir l'égalité entre les sexes et à atténuer la pauvreté.

44. Les trois principales réformes avaient consisté à décentraliser les pouvoirs de l'exécutif, à créer au Ministère du développement humain un sous-secrétariat aux affaires féminines et à réviser dans le sens de l'économie de marché la constitution et la législation, lesquelles posaient que la Bolivie est un pays multiethnique et multiculturel. Si le rapport donnait l'impression que l'égalité des sexes était pleinement acquise sur le plan juridique et que les seuls obstacles étaient les difficultés pratiques d'application de la loi, néanmoins, il existait encore maintenant, des dispositions légales et des usages qui allaient à l'encontre du principe de l'égalité des sexes. La politique sociale relevait précédemment de diverses divisions administratives, qui l'appliquaient par secteur; mais le programme pour les femmes, établi en 1992, dans le cadre de l'Organisation nationale pour l'enfance, la femme et la famille, et le Secrétariat national aux questions concernant les communautés ethniques, les femmes, les jeunes et les personnes âgées, créé en 1993, avaient proposé des politiques sectorielles concernant la population féminine pour garantir une prise en compte généralisée du principe de l'égalité des sexes.

45. L'initiative la plus importante avait été la loi sur la participation, qui décentralisait les pouvoirs de l'État et ses ressources financières, conférait un statut juridique aux organisations populaires et leur permettait de bénéficier de financements publics, respectait les traditions et usages des différentes communautés, intégrait la notion d'égalité des sexes, posait le principe de l'égalité des chances et habilitait l'administration à tous les niveaux à lancer des programmes en faveur des femmes. Une autre mesure importante avait consisté à adopter une loi portant réforme de l'enseignement, qui, conformément aux principes de l'égalité des chances et de l'égalité des sexes, établissait que les enfants devaient tous pouvoir accéder librement et gratuitement à l'instruction, rendue obligatoire. Contrairement à "l'hispanisation" que l'on avait essayé d'imposer quelques années plus tôt, on pouvait maintenant prévoir la généralisation d'un enseignement bilingue et multiculturel qui profiterait en particulier aux filles et aux femmes. Par ailleurs, le Gouvernement, conscient que l'un des obstacles au développement résidait dans le non-respect des droits fondamentaux de la personne, avait adopté un plan national contre la violence; ce plan d'action corrective et préventive, à l'exécution duquel veillait une équipe interministérielle, prouvait que le Gouvernement se préoccupait tout particulièrement des droits des femmes, puisqu'il permettait à celles-ci d'obtenir gratuitement des services juridiques et des services de santé lorsqu'elles étaient victimes de violences, notamment au foyer.

46. La représentante de la Bolivie a reconnu qu'encore maintenant, c'étaient les femmes qui subissaient le plus les effets de la pauvreté, mais la planification participative favoriserait les changements. Indiquant les principales réformes qui venaient d'être opérées et qui étaient exposées dans l'additif au rapport (CEDAW/C/BOL/1/Add.1), elle a souligné que la Bolivie avait officiellement adopté des orientations tenant compte de la spécificité des femmes et que c'était là l'essentiel.

Observations générales

47. Le Comité a jugé que le rapport de la Bolivie respectait les directives générales et était bien structuré, et que cet exposé honnête avait aussi été commenté objectivement et avec franchise par la représentante du pays. Ce rapport prouvait que le pays avait la volonté d'améliorer la condition de la femme bolivienne et il situait à bon escient cet effort dans le contexte national, indiquant les obstacles qui restaient à surmonter. Les récentes réformes législatives et administratives confirmaient nettement que le Gouvernement avait adopté une approche intégrée pour essayer de résoudre les problèmes qui se posaient. La Bolivie, il convenait de l'en féliciter, avait ratifié la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes sans émettre aucune réserve et allait établir des plans pour traduire encore mieux cet instrument dans les faits, en particulier pour améliorer la condition des femmes des ethnies autochtones et des régions rurales. Le Comité a pris acte avec satisfaction de la réforme de l'exécutif et de la création du Secrétariat national aux questions concernant les communautés ethniques, les femmes, les jeunes et les personnes âgées. Il s'est félicité que le Gouvernement ait entrepris, en créant une équipe interministérielle et diverses commissions et en décidant d'un certain nombre de mesures, de faire disparaître la violence contre les femmes, en particulier la violence exercée au foyer par le conjoint ou d'autres proches. Il a également accueilli favorablement les dispositions prises en vue de l'élaboration d'un code de la santé et a applaudi aux efforts faits par la Bolivie pour être considérée comme une société multiculturelle et multiethnique.

48. Le Comité ayant demandé si la Bolivie avait entrepris d'intégrer dans le droit interne, en particulier dans la Constitution, les dispositions de la Convention et si celle-ci pouvait actuellement être invoquée devant les tribunaux, la représentante de ce pays a indiqué que la Convention faisait partie intégrante de la législation nationale depuis le 15 septembre 1989 et avait force de loi pour les tribunaux. À l'époque où avait été établi le premier rapport, les juges et autres autorités publiques connaissaient encore très mal la teneur de cette convention, mais maintenant les hommes de loi étaient de plus en plus nombreux à invoquer cet instrument.

49. Recommandant que le Gouvernement bolivien s'attache en priorité à recenser les dispositions de loi qui restaient discriminatoires à l'égard des femmes, afin de redresser la situation, des membres du Comité ont demandé si les autorités étaient déterminées à aligner la législation nationale sur les dispositions de la Convention et si elles le faisaient systématiquement ou seulement lorsque le cas se présentait. La représentante de la Bolivie a répondu que le Secrétariat national comportait un service chargé précisément de modifier la législation bolivienne dans le sens requis par la Convention. C'est ainsi que l'on était en train de réviser plusieurs lois, par exemple la loi relative au personnel domestique (en ce qui concerne les horaires de travail de ce personnel), la loi générale du travail (pour remédier au protectionnisme excessif à l'égard des femmes), la loi contre les violences domestiques (qui abrogerait l'article 276 du Code pénal) et le Code de la famille (dans ses dispositions concernant l'âge du mariage, le libre choix d'un métier et les motifs de divorce). On était aussi en train de réviser les dispositions relatives à la violence dirigée contre une femme en tant que telle, afin que la violence au foyer soit automatiquement considérée comme une infraction, et on revoyait de même le Code de la santé, la loi régissant la propriété, qui permettrait aux femmes de posséder des biens, et la loi relative aux partis politiques. Enfin, on modifiait divers décrets afin de les rendre plus favorables aux femmes.

50. Certains membres du Comité ont estimé qu'il était extrêmement important que le Gouvernement se préoccupe d'accroître le nombre de femmes occupant des fonctions de haute responsabilité, où elles étaient encore en très faible proportion. À la question de savoir si les femmes pouvaient espérer être plus largement représentées dans des fonctions de cette nature et dans les partis politiques et s'il existait des rouages facilitant une évolution en ce sens, la représentante de la Bolivie a répondu que bien que la loi sur la participation donne aux femmes des chances égales à celles des hommes, le législateur n'avait pas prévu de quotas précis. Mais le Sous-Secrétariat aux affaires féminines envisageait en attendant d'autres mesures de prendre des dispositions pour remédier à la situation.

51. Il fallait espérer, ont dit des membres du Comité, que le Gouvernement prendrait des mesures contre la discrimination qu'exerçaient souvent les employeurs dans la pratique. Le Gouvernement paraissait vraiment décidé à agir, mais comme d'autre part les indicateurs du développement national s'établissaient à un niveau assez inquiétant, il faudrait que dans le rapport suivant, qui devrait être présenté à temps, il expose plus en détail les programmes entrepris.

52. Des membres du Comité, constatant que la Bolivie est considérée comme l'une des économies les plus dynamiques d'Amérique latine, ont demandé si la croissance de ces dernières années avait eu des effets positifs sur la condition féminine. La représentante de ce pays a expliqué que le Gouvernement avait entrepris de mieux répartir le revenu et que, sans négliger les impératifs locaux, il tenait tout particulièrement compte pour cela des besoins des femmes. On était aussi en train d'établir des statistiques par sexe et on avait lancé un système d'enquête et d'information pour étudier les répercussions de la pauvreté sur les femmes boliviennes.

53. Des membres du Comité ayant recommandé d'encourager les femmes à s'informer de leurs droits juridiques, car souvent elles ne pouvaient pas améliorer leur situation faute de conseils dans ce domaine, la représentante de la Bolivie a dit que les facteurs qui faisaient obstacle à l'application de la Convention étaient d'abord la résistance au changement, les préjugés et le fait que les juges ne connaissaient pas bien les dispositions de cet instrument, à quoi s'ajoutait le mauvais fonctionnement de la justice nationale elle-même. La Bolivie s'appuierait sur toutes les observations des membres lorsqu'elle examinerait ses futures politiques concernant les femmes. Afin de remédier à ces difficultés, le Secrétariat national avait organisé un programme de sensibilisation et de formation à l'intention des autorités judiciaires.

54. Le Comité a félicité la représentante de la Bolivie d'avoir répondu sans détours aux questions qui lui avaient été posées. Il souhaitait que le prochain rapport indique tous les obstacles et tous les échecs rencontrés par le Secrétariat national dans l'application de sa politique féminine et qu'il fournisse d'abondantes statistiques. La représentante de la Bolivie a déclaré pour sa part que les questions que lui avait posées le Comité serviraient de repère au Gouvernement lors de l'élaboration des schémas d'orientation et le guideraient dans l'établissement des rapports périodiques.

Questions se rapportant à des articles précis

Article 2

55. Des questions ont été posées au sujet de la nature des rouages sur lesquels le Secrétariat national s'appuyait pour introduire sa politique dans les divers secteurs, des pouvoirs dont cet organisme était investi, des ressources dont il disposait et des filières de coopération qu'il avait établies avec d'autres organismes publics. La représentante de la Bolivie a indiqué que le Secrétariat national faisait appel aux organes-relais mis en place pour promouvoir le développement rural, l'enseignement et la participation, à quelques commissions chargées de questions précises et à divers autres interlocuteurs, boliviens et internationaux, et qu'il avait des antennes dans sept des neuf provinces du pays. Cet organisme pouvait adopter des décisions impératives et ordonner des mesures d'exécution obligatoire. Il coordonnait son action avec la Commission des femmes députées et tous les partis politiques représentés au Parlement. Il avait suffisamment de fonds à sa disposition, 25 % de ce financement étant assuré par l'État et 75 % provenant de l'aide internationale. D'autres organismes avaient réalisé divers programmes de santé et d'éducation mais il était difficile de quantifier les bienfaits qu'en avaient retiré les femmes.

56. Des membres du Comité, constatant que la société bolivienne était encore dominée par les hommes, ont demandé de quelle manière procédait le Secrétariat national pour obtenir que la loi sur la participation assure effectivement aux femmes l'égalité des chances au niveau le plus ordinaire. La représentante de la Bolivie a évoqué à cet égard un plan qu'avait conçu le Secrétariat national, avec le concours du Secrétariat national à la participation populaire, pour renforcer l'action des organisations non gouvernementales à l'échelon local et entretenir le dialogue avec les collectivités locales afin de les amener à prendre les préoccupations des femmes en considération. Il prévoyait qu'un transfert de ressources obéissant à des critères démographiques permettrait d'appuyer les programmes locaux et les programmes en faveur des femmes.

Article 3

57. Lorsque les membres ont voulu connaître les effets positifs qu'avait la réforme de l'enseignement sur les filles dans les zones rurales, la représentante a signalé l'exemple frappant de l'enseignement bilingue dans la zone des Guaranis, qui avait eu un effet positif sur les problèmes d'abandons scolaires, de redoublement et d'analphabétisme fonctionnel.

58. Les membres ont noté avec satisfaction que la politique de l'égalité avait reçu un caractère officiel dans le pays, en particulier à une époque de changements fréquents des dirigeants politiques et ils ont souligné combien il était important de placer les questions des différences entre les sexes au centre du développement.

Article 4

59. Les membres ont voulu entendre des exemples plus concrets de mesures temporaires spéciales et savoir s'il était prévu de prendre de telles mesures pour remédier au taux d'analphabétisme élevé et au faible taux d'emploi et de participation à la prise de décisions politiques des femmes ou pour protéger des femmes autochtones et rurales. La représentante a dit que si aucune mesure temporaire spéciale n'avait été prise à ce jour, il était envisagé d'en adopter en vue d'améliorer le taux de fréquentation scolaire des fillettes.

Article 5

60. Interrogée sur les mesures prises pour surmonter dans l'enseignement, la famille et les médias les stéréotypes des hommes et des femmes et sur les études dans l'enseignement, la famille et les médias, qui auraient été faites en la matière, la représentante a dit que, dans le cadre de la réforme de l'enseignement, le Gouvernement était en train de modifier simultanément les programmes et les manuels scolaires et la formation des enseignants.

61. En ce qui concerne le rôle joué par les organisations non gouvernementales dans le cadre du Plan pour la prévention et l'élimination de la violence à l'égard des femmes, la représentante a dit que les femmes avaient été consultées dans l'élaboration de ce plan et dans la rédaction de la loi sur la violence au sein des ménages.

62. Quant aux mesures prises pour modifier l'attitude des fonctionnaires qui, dans les tribunaux, entendent des plaintes de violence à l'égard des femmes, la représentante a dit qu'il y avait, au Secrétariat national, un département chargé de la formation dans les divers secteurs du judiciaire.

63. À propos de la contradiction qui existerait entre les paragraphes 84 et 85 du rapport en ce qui concerne la discrimination à l'égard des femmes exerçant certaines fonctions, la représentante a expliqué que des études ont clairement fait apparaître une discrimination juridique, sociale et culturelle à l'égard des femmes sur le lieu du travail et une absence de mécanisme efficace pour y remédier puisque la loi ne prévoyait pas de sanctions. Il apparaissait qu'à diplômes universitaires égaux, les femmes gagnaient de 30 à 50 % moins que les hommes exerçant des professions similaires.

Article 6

64. Puisque la prostitution existait dans presque tous les pays du monde, des membres estimaient que la Bolivie ne devait pas craindre qu'elle soit "indirectement approuvée" (voir par. 86 du rapport) et que les examens médicaux périodiques des prostituées constituaient une pratique louable. Ils ont demandé un complément d'information sur le nombre de prostituées, les couches sociales dont elles venaient, leurs conditions de travail et sur les mesures prises pour leur réintégration sociale.

65. Quant à la possibilité de protéger les femmes contre le virus de l'immunodéficience humaine/syndrome d'immunodéficience acquise (VIH/sida), la représentante a dit que, si le programme national concernant le sida prévoyait des mesures de prévention pour les prostituées, aucune loi n'avait encore été passée.

66. Les membres ont recommandé au Gouvernement d'analyser les divers aspects de la prostitution, qui était considérée comme une violation sérieuse des droits de l'homme et une forme particulièrement grave d'esclavage. La représentante a expliqué qu'il y avait en Bolivie une contradiction entre le Code pénal et les règlements de police en ce sens qu'il y avait des lois abolitionnistes interdisant le proxénétisme mais que, si les prostituées étaient pénalisées, les hommes ne l'étaient pas.

67. Répondant à une question sur le sens des "délits contre la moralité sexuelle", la représentante a dit que ces délits devraient être éliminés du Code pénal car ils étaient discriminatoires à l'égard des femmes.

68. Puisque il n'y avait pas, selon le rapport, de traite des femmes, des membres ont demandé s'il y avait des mesures interdisant spécifiquement la migration des femmes aux fins de prostitution. Ils ont jugé contradictoires les paragraphes 88 et 99 du rapport puisque des études avaient montré qu'il y avait un lien étroit entre la traite des femmes et la prostitution.

Article 7

69. Interrogée au sujet des mesures prises en faveur des organisations non gouvernementales de femmes par le Gouvernement ou le Secrétariat national aux questions concernant les communautés ethniques, les femmes, les jeunes et les personnes âgées, la représentante a dit que le Gouvernement était conscient du rôle d'agent du développement joué par ces organisations. Il respectait entièrement leur autonomie et ne leur apportait aucun soutien financier. Elles ont participé notamment à l'élaboration du Plan pour la prévention et l'élimination de la violence à l'égard des femmes, mais il était important qu'elles modifient leur attitude à l'égard de l'État et reconnaissent qu'il joue un rôle différent du leur.

70. Les membres ont voulu savoir ce qui était fait pour accroître la participation des femmes à la vie politique et leur représentation au sein des partis et ils ont demandé si les femmes membres de partis politiques recevraient une aide financière pour leur campagne. La représentante a expliqué que le Secrétariat national travaillait à une réforme de la loi sur les partis politiques, qui devrait favoriser la participation des femmes. Le Gouvernement n'accordait aucun appui aux partis politiques ou aux femmes pour leur participation.

71. Les membres ont demandé si la loi sur la participation populaire était appliquée, si les différentes formes d'organisation juridique parmi les femmes autochtones étaient respectées et si les autochtones, hommes et femmes, recevaient une formation juridique. La représentante a expliqué que la loi, en vertu de laquelle les municipalités étaient tenues de prendre en considération les demandes formulées par les femmes dans l'élaboration de leurs plans, prévoyait une formation en matière juridique ainsi que la mise en place de réseaux d'information et de communication, dans les communes et au niveau local. Elle a mentionné que l'objectif poursuivi était que 10 % au moins des structures municipales comprennent des femmes sous trois ans.

72. Puisqu'il n'y avait pas de système de quota, les membres ont demandé s'il y avait un programme en cours faisant appel aux organisations de base pour élaborer des programmes d'éducation civique destinés à développer l'esprit civique des femmes, et leur faire comprendre la nécessité de voter et de participer à la vie politique et donc d'avoir une carte d'identité pour pouvoir s'inscrire dans les bureaux de vote. La représentante a dit que 46 % de la population âgée de plus de 10 ans n'avait pas de cartes d'identité. Avec une aide extérieure, le Gouvernement travaillait à un programme d'enregistrement et on pouvait espérer que tous les citoyens auraient des cartes d'identité d'ici à 1997. L'âge minimum pour voter était 18 ans.

73. Les membres ont voulu connaître le nombre de femmes ministres et le statut des femmes dans la police. Ils ont demandé si les femmes avaient les mêmes possibilités de promotion que les hommes.

74. Les membres ont demandé si la formation aux carrières militaires avait repris pour les femmes et si les femmes pouvaient choisir des carrières militaires. La représentante a dit qu'il n'y avait pas actuellement de débat national sur cette question et qu'il était plus urgent d'investir dans des domaines comme l'enseignement et la santé.

Article 8

75. Les membres ont demandé quelles étaient les conditions à remplir pour travailler dans les représentations de la Bolivie à l'étranger et si elles étaient différentes pour les hommes et les femmes. Ils voulaient savoir également si les maris étaient hostiles à ce que leurs femmes travaillent à l'étranger ou s'ils n'étaient pas autorisés à y suivre leurs femmes.

Article 9

76. En réponse aux questions sur la transmission de la nationalité, la représentante a dit qu'une Bolivienne mariée à un étranger pouvait transmettre sa nationalité à son mari et à ses enfants.

Article 10

77. Les membres ont demandé quelles étaient les raisons de l'écart considérable entre les taux d'analphabétisme chez les hommes et les femmes et si le Gouvernement intervenait pour encourager l'éducation des adultes parmi les femmes. On a également posé des questions sur le pourcentage d'élèves dans les écoles publiques et privées et sur des plans éventuels de privatisation de l'enseignement.

78. Puisque l'enseignement bilingue n'existait que pendant les cinq premières années de scolarité, on a voulu savoir comment les groupes non hispaniques pouvaient participer pleinement à l'ensemble de l'enseignement. Les membres ont estimé qu'il pouvait y avoir une contradiction entre la politique en matière d'enseignement, qui cherchait à respecter les différentes cultures, et la politique de lutte contre les stéréotypes sexuels. Ils ont demandé si des cours sur les questions intéressant les femmes ou le rôle social des deux sexes étaient prévus dans le programme de troisième année. La représentante du Gouvernement a été invitée à formuler des observations sur cette question. Les membres ont également demandé si l'information sur la planification familiale et la prévention du VIH/sida faisait partie de l'éducation sanitaire.

Article 11

79. Des membres du Comité présumaient que le plan en matière d'emploi comportait des mesures visant à combler l'écart entre les femmes et les hommes. En matière de rémunération, cependant, les femmes autochtones étaient le groupe le plus défavorisé. Des membres ont demandé si des initiatives concrètes avaient été prises pour introduire une approche différenciée dans le domaine de la formation professionnelle, s'il y avait un salaire minimum garanti et, dans l'affirmative, s'il était différent selon les sexes.

80. À propos du taux élevé de croissance du commerce secondaire, qui était exercé majoritairement par les femmes, on a demandé si ce secteur d'activité économique urbaine tertiaire était inclus dans les statistiques officielles du pays. Des membres ont demandé s'il existait une loi sur le harcèlement sexuel au travail, si des mesures étaient prises pour assurer le bien-être et la protection des employées de maison et quels étaient les programmes conçus pour répondre aux besoins économiques des femmes migrantes. La représentante a répondu qu'un projet de loi sur les conditions de travail des domestiques était en cours d'examen par le Parlement.

81. Compte tenu de l'absence de crèches, on a demandé si l'obligation de veiller sur leurs frères et soeurs, outre celle de participer aux travaux du ménage, incombait aux fillettes et les empêchait, de ce fait, de fréquenter l'école.

Article 12

82. En ce qui concernait l'avortement, la représentante a expliqué que la loi ne l'autorisait qu'en cas de viol et de danger pour la vie de la mère. Elle n'a pas indiqué quel était le taux d'avortement, mais elle a précisé que l'avortement était répandu et pratiqué dans de mauvaises conditions de sécurité et que 30 % de la mortalité maternelle lui était imputable. Le Gouvernement n'envisageait pas de légaliser l'avortement. À une question concernant l'élaboration de programmes de sensibilisation à la planification familiale, elle a dit que le Gouvernement appuyait pleinement la déclaration adoptée à la Conférence mondiale sur la population et le développement tenue au Caire en 1994 en ce qui concerne les droits en matière de procréation et l'importance que revêtait l'éducation sexuelle des adolescents du point de vue de la santé de la famille.

83. On a demandé si le taux élevé de fécondité des femmes pouvait s'expliquer par des considérations d'ordre constitutionnel ou légal ou s'il fallait l'attribuer à des facteurs de caractère sociétal ou culturel. Des observations ont été faites à propos de la malnutrition chronique dont souffraient les femmes. On a demandé quel était le pourcentage des femmes, en général, ayant accès à la maternité sûre, comment la situation se présentait dans les zones rurales et quelles mesures le Gouvernement avait prises pour réduire le taux élevé de grossesses d'adolescentes et de mortalité maternelle.

84. Des membres ont demandé si les victimes de viols pouvaient dénoncer ceux-ci au ministère public, et, dans l'affirmative, si des mesures étaient prises pour supprimer de la législation tout préjugé défavorable à l'égard des victimes de viol. Des membres ont encore demandé si des centres de crise s'occupaient des victimes de viol ou d'autres mauvais traitements sexuels, comment la police et les tribunaux traitaient les cas de violence à l'encontre des femmes et s'ils recevaient une formation en la matière.

Article 14

85. Les femmes rurales semblant être les plus défavorisées, des membres ont estimé qu'elles devraient retenir davantage l'attention, et ils ont demandé que le prochain rapport mette davantage en évidence les problèmes qu'elles rencontraient.

86. On a demandé dans quelle partie de la population il fallait ranger les autochtones, s'ils se confondaient avec la population des zones rurales et si la population non autochtone bénéficiait de meilleures conditions de vie. Des membres ont encore demandé quel était le montant des ressources que les municipalités consacraient aux femmes autochtones, comment celles-ci participaient aux programmes généraux et si des programmes spéciaux leur étaient consacrés. Des membres se sont enquis du type d'investissements nationaux et internationaux réalisés dans le domaine du développement rural et du point de savoir si les femmes rurales en avaient bénéficié. Ils ont demandé si ces investissements avaient accru leur productivité, si elles avaient accès à la technique et dans quelle mesure celle-ci était respectueuse de l'environnement. Des membres ont demandé si des initiatives étaient prises en vue de créer des centres préscolaires dans les zones rurales et si des organisations non gouvernementales de femmes ou des femmes travaillant au niveau de la communauté avaient offert des programmes visant à améliorer le sort des fillettes dans les zones rurales.

Article 16

87. Des membres se sont félicités de ce que le Gouvernement ait adopté un nouveau code de la famille, quoiqu'il y manque encore un certain nombre de dispositions concernant notamment le mariage, le divorce et l'aide à la famille. À la question de savoir si la loi permettait au mari d'interdire à sa femme l'exercice de certaines activités au motif qu'elles empiétaient sur les travaux ménagers, la représentante a répondu que cette restriction avait été révisée. On a demandé des précisions à propos d'un projet de loi tendant à modifier la loi qui interdisait à la femme de porter plainte contre son conjoint violent et on a demandé si des mesures avaient été prises pour sensibiliser les juges à la condition des femmes et des mineures.

88. Des membres ont estimé que les dispositions relatives à la garde des enfants étaient en contradiction flagrante avec les dispositions de la Convention. En ce qui concernait le statut des mères célibataires en matière d'adoption, il a été précisé qu'une mère célibataire pouvait adopter un enfant et lui transmettre également sa propre nationalité.

89. Des membres ont demandé quel était le pourcentage d'enfants abandonnés et si des mesures étaient envisagées pour éviter l'abandon d'enfants. Ils ont aussi demandé des informations sur les mères de substitution et l'adoption d'enfants boliviens par des femmes résidant hors du pays. Des membres ont demandé si des mesures étaient prises pour protéger les femmes étrangères épousant des Boliviens et si le mari bolivien pouvait interdire à sa femme d'origine étrangère et aux enfants de celle-ci de quitter le pays.

90. Des membres ont demandé si l'égalité devant la loi et les responsabilités communes telles qu'elles étaient énoncées au paragraphe 376 du rapport n'aboutissaient pas à créer des inégalités sociales.

91. Des membres ont invité instamment le Gouvernement à revoir la disposition visée au paragraphe 326 du rapport, selon laquelle la femme ne peut contracter un nouveau mariage avant l'expiration d'un délai de 300 jours. Ils ont demandé des précisions à propos des dispositions relatives au nom d'une personne, telles qu'elles figurent aux paragraphes 309 et 310 du rapport et ont demandé s'il était exact que, nonobstant le droit reconnu à la mère de transmettre son nom à ses enfants, c'était toujours le mari qui décidait de tout dans la famille.

Conclusions du Comité

Introduction

92. Le Comité félicite la Bolivie d'avoir présenté son rapport dans les délais prévus et d'avoir suivi les directives générales. L'exposé oral de présentation a complété le rapport remis en 1991; il a porté sur les années 1992 à 1995, durant lesquelles le pays a pris des mesures très importantes pour orienter son action dans un sens qui améliore la situation des femmes, à la différence de la politique neutre suivie précédemment qui ne distinguait pas entre les sexes et favorisait la persistance de stéréotypes quant au rôle des deux sexes. Le Comité a loué les efforts des organisations non gouvernementales et ceux du gouvernement actuel.

Éléments positifs

93. Le Comité a constaté que la Bolivie avait beaucoup fait pour lancer puis institutionnaliser une action publique axée sur les problèmes concernant les femmes. C'est ainsi qu'il a créé un organisme public chargé des questions de la femme, le Secrétariat national aux questions concernant les communautés ethniques, les femmes, les jeunes et les personnes âgées. Le Comité a noté que le Secrétariat était responsable des orientations et programmes à appliquer dans ce domaine, selon une perspective intersectorielle et région par région.

94. Le Comité a estimé que la récente loi sur la participation était très importante, car elle décentralisait le pouvoir et les ressources qui relevaient désormais des autorités municipales, en reconnaissant aux organisations populaires, et en particulier aux organisations féminines, un statut juridique et la possibilité d'accéder aux ressources. La loi visait donc à assurer des chances égales aux organisations populaires en chargeant les municipalités d'élaborer leurs politiques en tenant compte de la nécessité d'améliorer la situation des femmes.

95. Le Comité s'est félicité des réformes établissant l'enseignement bilingue, ce qui favorisait l'éducation des filles, et de la mise en place dans la société d'un multiculturalisme qui transcende les distinctions de sexe.

Principaux sujets de préoccupation

96. Le Comité a noté avec préoccupation que le mécanisme national bolivien en faveur des femmes n'était qu'en partie financé par le budget national et son financement était fortement tributaire de subventions internationales.

97. Le Comité s'est inquiété des répercussions des programmes d'ajustement structurel sur les femmes et la féminisation de la pauvreté.

98. Le Comité a noté avec préoccupation les désavantages particuliers dont souffraient les femmes rurales.

Suggestions et recommandations

99. Le Comité recommande au Gouvernement bolivien d'envisager tout particulièrement de modifier l'article 276 du Code pénal, afin de supprimer la disposition qui empêche d'apporter une juste solution au problème de la violence au foyer.

100. Le Comité recommande au Gouvernement, afin que les femmes puissent être véritablement représentées dans la vie politique nationale d'établir des quotas pour assurer une représentation élevée des femmes dans l'administration publique et appelle à cet égard l'attention des partis politiques.

101. Le Comité souhaite que le prochain rapport présente des statistiques renseignant sur les résultats d'initiatives comme le Plan de participation populaire, le Plan national d'action corrective et préventive contre la violence et la réforme de l'enseignement.

102. Le Comité suggère au Gouvernement d'étudier les divers aspects de la prostitution qui est considérée comme un grave cas de violation des droits de l'homme et l'une des formes les plus odieuses d'esclavage.

103. Le Comité demande qu'on s'appesantisse davantage dans le prochain rapport sur le sort des femmes rurales et sur les mesures visant à l'améliorer.

104. Le Comité recommande qu'on dresse une liste des lois défavorables aux femmes afin de les modifier.



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