University of Minnesota



Observations finales du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Algérie, U.N. Doc. CEDAW/C/DZA/CO/3-4 (2012).




CEDAW/C/DZA/CO/3-4

Convention sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes

Distr. générale

23 mars 2012

Français

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Cinquante et unième session

13 février-2 mars 2012

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination à l’égard des femmes

Algérie

1.Le Comité a examiné les troisième et quatrième rapports périodiques de l’Algérie, soumis en un seul document (CEDAW/C/DZA/3-4), à ses 1031e et 1032e séances, le 22 février 2012 (CEDAW/C/SR.1031 et 1032). La liste des points et questions correspondantes a été publiée sous la cote CEDAW/C/DZA/Q/4, et les réponses du Gouvernement algérien sous la cote CEDAW/C/DZA/Q/3-4/Add.1.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite des troisième et quatrième rapports périodiques soumis en un seul document par l’État partie, qui sont détaillés et, dans l’ensemble, conformes aux directives du Comité sur la présentation des rapports, bien qu’ils ne contiennent pas de données spécifiques ventilées par sexe.

3.Le Comité note que l’élaboration du rapport, qui a été coordonnée par le Groupe de travail interministériel, en collaboration avec divers ministères compétents et associations locales et nationales actives dans le domaine des droits de l’homme, a donné lieu à un processus participatif. Toutefois, il n’est pas indiqué si le projet de rapport a été soumis au Parlement ou si des organisations non gouvernementales ont fourni des contributions malgré les recommandations formulées à cet égard par le Comité dans ses précédentes observations finales (A/60/38, partie I, par. 162 et 167).

4.Le Comité remercie l’État partie pour l’exposé oral présenté par le chef de la délégation, Idriss Jazaïry, Ambassadeur et Représentant permanent de l’Algérie auprès de l’Organisation des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, et pour les réponses écrites à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travail de présession du Comité, ainsi que pour les réponses écrites supplémentaires fournies à la suite de l’examen du rapport. Il félicite l’État partie pour son importante délégation, qui comprenait des représentants de plusieurs ministères. Le Comité apprécie le dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation.

5.Le Comité prend note de la détermination de l’État partie à continuer d’améliorer sa législation et ses politiques pour appliquer pleinement les dispositions de la Convention, ce qui signifie notamment que le Code de la famille de 1984 doit être réexaminé et modifié à la lumière des obligations qui incombent à l’État partie en vertu de la Convention, et que l’État partie doit lever ses réserves à l’article 2, au paragraphe 4 de l’article 15 et à l’article 16 de la Convention.

B.Aspects positifs

6.Le Comité se félicite de la ratification par l’État partie, depuis l’examen de son deuxième rapport périodique par le Comité en janvier 2005, des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ci-après:

a)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, en 2005;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2006;

c)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en 2009;

d)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2009.

7.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a retiré sa réserve au paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention, à la suite de la modification du Code de la nationalité de 2005 donnant aux Algériennes le droit de transmettre leur nationalité à leurs enfants nés d’un père étranger.

8.Le Comité se félicite de l’adoption, depuis 2005, des mesures législatives ci-après visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes, notamment:

a)La modification de la Constitution en 2008, avec l’ajout d’un article 31 bis dans lequel l’État réaffirme sa détermination à œuvrer «à la promotion des droits politiques de la femme en augmentant ses chances d’accès à la représentation dans les assemblées élues»;

b)Les modifications apportées au Code de la nationalité en 2005, autorisant les enfants à prendre la nationalité de leur mère, conformément au principe de l’égalité entre la femme et l’homme (art. 6 du Code) et rendant possible l’acquisition de la nationalité algérienne par le fait du mariage avec une Algérienne (art. 9 bis du Code);

c)Les modifications apportées au Code de la famille en vertu de l’ordonnance no 05-02 du 27 février 2005, interdisant au wali, qu’il soit le père ou une autre personne de sa parenté, de contraindre au mariage la personne mineure placée sous sa tutelle;

d)Les modifications apportées au Code pénal, en particulier l’article 341 bis, qui érige en infraction le harcèlement sexuel;

e)L’adoption de la loi no 09-01 du 25 février 2009, qui modifie et complète le Code pénal en introduisant des articles pour incriminer la traite des personnes.

9.Le Comité note aussi avec satisfaction l’adoption par l’État partie de diverses mesures institutionnelles et politiques, en particulier:

a)La création de mécanismes institutionnels chargés de promouvoir la condition de la femme, en particulier l’établissement du Conseil national de la famille et de la femme en vertu du décret exécutif no 06-421 du 22 novembre 2006, et de ses deux commissions internes sur la femme et sur la famille, qui est composé d’une cinquantaine de représentants d’institutions nationales opérant aux niveaux local et national;

b)L’adoption de la Stratégie nationale de promotion et d’intégration en 2008, y compris la création du comité interministériel et l’élaboration ultérieure du plan national d’action pour la mise en œuvre de la Stratégie en 2010-2014, qui vise à établir une base de données ventilées par sexe et à renforcer les capacités de promotion de l’égalité des sexes et d’autonomisation de la femme;

c)Le programme de renforcement du leadership féminin et de consolidation de la participation des femmes à la vie politique et publique, qui vise à entreprendre des travaux de recherche, à favoriser le dialogue et à inciter les principaux acteurs intéressés à prendre part aux initiatives destinées à renforcer la participation des femmes à la prise de décisions dans la sphère politique;

d)Le programme commun pour l’égalité des sexes et l’autonomisation de la femme, qui a pour principal objet d’élargir l’accès des femmes à l’emploi par le biais d’un appui ciblé fourni par des mécanismes de création d’emplois.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

10. Le Comité rappelle l’obligation qui incombe à l’État partie d’appliquer, de manière systématique et constante, toutes les dispositions de la Convention et estime que les préoccupations et recommandations énoncées dans les présentes observations finales doivent faire l’objet d’une attention prioritaire de la part de l’État partie dès maintenant et jusqu’à la présentation du prochain rapport périodique. Il lui demande donc de privilégier les domaines considérés dans le cadre de ses activités de mise en œuvre et de rendre compte, dans son prochain rapport périodique, des mesures qu’il aura prises et des résultats qu’il aura obtenus. Le Comité lui demande aussi de communiquer les présentes observations finales à tous les ministères compétents, au Parlement (Assemblée populaire nationale et Conseil de la nation) et aux instances judiciaires de façon à en assurer la pleine application.

11. Compte tenu de l’importance de disposer de données fiables sur la situation démographique, politique, économique et sociale en Algérie, le Comité demande à l’État partie de soumettre son document de base commun en se conformant aux critères définis dans les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I ). Le document de base commun devrait contenir notamment des renseignements actualisés sur la participation des femmes à la prise de décisions politiques et au marché du travail, de façon à permettre un suivi efficace de la pleine application de la Convention dans l’ État partie.

Parlement

12. Tout en réaffirmant que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef de respecter pleinement les obligations de l’État partie en vertu de la Convention ainsi que de rendre compte de leur mise en œuvre, le Comité souligne que la Convention s’impose à toutes les instances de l’appareil d’État. Il invite l’État partie à encourager le Parlement (Assemblée populaire nationale et Conseil de la nation), conformément à ses procédures, le cas échéant, à prendre les mesures nécessaires pour ce qui est de la mise en œuvre des présentes observations finales et de l’établissement des prochains rapports au titre de la Convention.

Réserves

13.Tout en se félicitant du retrait par l’État partie de sa réserve au paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention, et en prenant note de l’information fournie par l’État partie selon laquelle la réserve à l’article 15 ne sert plus un but valable, le Comité réaffirme sa préoccupation concernant le maintien par l’État partie de ses réserves à l’article 2, au paragraphe 4 de l’article 15 et à l’article 16 de la Convention. Appelant l’attention sur sa déclaration concernant les réserves (A/53/38/Rev.1, partie 2, par. 6) et sur sa Recommandation générale no 21 (1994) relative à l’égalité dans le mariage et les rapports familiaux, le Comité réaffirme que les réserves aux articles 2 et 16 de la Convention sont incompatibles avec l’objet et le but de la Convention et donc contraires au paragraphe 2 de l’article 28 de la Convention.

14. Le Comité demande instamment à l’État partie de garantir la pleine application de la Convention et, à cet effet, lui recommande:

a) De fournir, dans son prochain rapport, des renseignements complets sur l’incidence de ses réserves sur la mise en œuvre des dispositions de la Convention et sur la situation des femmes en Algérie;

b) D’accélérer les réformes législatives, en particulier celle du Code de la famille, afin de retirer les réserves à l’article 2, au paragraphe 4 de l’article 15 et à l’article 16 de la Convention selon un calendrier précis.

Visibilité de la Convention

15.Tout en observant que, conformément à l’article 132 de la Constitution, les instruments internationaux tels que la Convention priment le droit interne, le Comité se déclare à nouveau préoccupé par le manque de clarté quant à l’applicabilité directe de la Convention et sa primauté sur la législation nationale, dans la mesure où aucune affaire relative à l’application de la Convention n’a encore été portée devant les tribunaux nationaux, selon l’État partie. Le Comité constate aussi avec préoccupation que les différentes branches du Gouvernement, les instances judiciaires et l’opinion publique ont une connaissance insuffisante des droits que la Convention confère aux femmes, de la notion d’égalité effective entre les sexes qu’elle contient et des recommandations générales du Comité.

16. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De garantir la primauté de la Convention sur la législation nationale, ainsi que son applicabilité directe et son caractère exécutoire dans l’ordre juridique interne;

b) De faire connaître la Convention et les recommandations générales du Comité auprès de tous les secteurs de la société, et d’organiser des activités d’éducation juridique et de formation régulière à l’intention des fonctionnaires, des législateurs, des juges, des avocats, des magistrats, des procureurs, des policiers et d’autres organes chargés de l’application de la loi concernant la Convention et son applicabilité directe, afin qu’elle puisse servir de cadre pour toutes les lois, décisions judiciaires et politiques en matière d’égalité entre les sexes et de promotion de la condition de la femme;

c) De sensibiliser davantage les femmes aux droits que leur confère la Convention et aux moyens d’avoir accès à la justice aux niveaux local et national afin qu’elles puissent porter plainte en cas de violations de leurs droits en vertu de la Convention, et de veiller à mettre à la portée des femmes partout dans l’État partie des renseignements sur la Convention en recourant à des campagnes d’information et aux médias;

d) De transmettre en priorité les présentes observations finales du Comité au Parlement en vue de leur pleine application.

Définition de la discrimination à l’égard des femmes

17.Le Comité se dit à nouveau préoccupé par le fait que, malgré les dispositions des articles 29 et 31 de la Constitution, garantissant l’égalité devant la loi sans discrimination, notamment fondée sur le sexe, la législation de l’État partie ne comporte pas de dispositions civiles et pénales complètes définissant et interdisant la discrimination à l’égard des femmes, conformément à l’article premier de la Convention, ni de dispositions sur l’égalité des droits des femmes, dans l’optique de l’article 2 a) de la Convention, raison pour laquelle le principe constitutionnel d’égalité ne peut pas être pleinement appliqué.

18. Le Comité encourage l’État partie à adopter et à appliquer efficacement une législation complète sur l’égalité entre les sexes, comprenant une définition de la discrimination à l’égard des femmes conformément à l’article premier de la Convention ainsi que des dispositions sur l’égalité des droits des femmes dans l’optique de l’article 2 a) de la Convention, afin de protéger les femmes de la discrimination en favorisant l’accès à des recours.

Législation discriminatoire

19.Tout en se félicitant d’un certain nombre de modifications législatives visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes, comme indiqué plus haut, le Comité se dit préoccupé par le fait que de nombreuses dispositions contenues dans des lois telles que le Code de la famille et le Code pénal restent contraires aux obligations qui incombent à l’État partie en vertu de la Convention et d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. En outre, il prend note avec préoccupation des dispositions de la loi relative aux associations (no 12-06), adoptée en janvier 2012, qui prévoit une autorisation spécifique pour qu’une association puisse recevoir des subventions de donateurs internationaux, ce qui peut avoir une incidence néfaste sur les activités des associations qui militent en faveur de l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes dans le contexte du développement.

20. Le Comité exhorte l’État partie à réexaminer systématiquement ses lois et règlements, en tenant compte de la pratique suivie avec succès par d’autres pays de la région, en vue de modifier ou d’abroger les dispositions de sa législation qui constituent une discrimination fondée sur le sexe, en vue d’assurer le plein respect des dispositions de la Convent ion, conformément à son article 2. Le Comité recommande à l’État partie de permettre aux associations qui militent en faveur de l’égalité entre les sexes et l’autonomisation de la femme dans le contexte du développement, de recevoir des subventions de donateurs internationaux sans imposer des démarches administratives inutiles qui peuvent entraver leurs activités.

Mécanismes de plaintes en justice

21.Tout en prenant note avec satisfaction des données ventilées sur les infractions qui ont fait l’objet d’enquêtes et de poursuites devant les tribunaux, le Comité s’inquiète du manque d’informations claires concernant le nombre et l’issue des plaintes pour discrimination, y compris pour violence familiale, déposées par des femmes auprès des tribunaux.

22. Le Comité exhorte l’État partie à faciliter l’accès effectif à la justice et lui recommande:

a) D’aider les femmes victimes de discrimination à porter plainte, en particulier en leur fournissant l’assistance juridique nécessaire;

b) D’évaluer la fréquence de toutes les infractions commises contre des femmes, notamment les actes de violence familiale et sexuelle; de mettre au point une base de données comportant des informations sur le nombre de plaintes, les enquêtes, les poursuites, les condamnations et sur l es peines infligées aux auteurs; et de les communiquer au Comité.

Mécanisme national de promotion de la condition de la femme

23.Le Comité note avec satisfaction que le Gouvernement a mis en place, aux niveaux ministériel et gouvernemental, un certain nombre de mécanismes de coordination qui s’occupent de l’égalité des femmes, notamment le Conseil national de la famille et de la femme, créé en 2006, qui appuie les activités du Ministère de la solidarité nationale et de la famille et le Ministère chargé de la famille et de la condition de la femme. Toutefois, le Comité demeure préoccupé par le manque d’informations claires concernant les effets des activités du Conseil national sur l’égalité des sexes, dû en partie à l’absence d’indicateurs permettant de mesurer l’impact des mécanismes nationaux, la division des tâches et des responsabilités entre les deux Ministères et les ressources humaines et financières allouées aux différents mécanismes. En outre, le Comité est préoccupé par l’absence d’organe central chargé de superviser le mécanisme national visant à favoriser l’émancipation des femmes.

24. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’indiquer clairement, dans son prochain rapport périodique, les effets des activités menées par les différentes composantes du mécanisme national sur l’égalité des sexes, notamment en recourant à des indicateurs, et de préciser leur mandat et les ressources humaines et financières allouées à chaque mécanisme;

b) De créer un organe central pour diriger le mécanisme national visant à promouvoir l’émancipation des femmes, notamment en renforçant la participation des femmes à tous les niveaux de la prise de décisions et en dotant ce mécanisme d’un mandat clair et de ressources humaines et financières appropriées;

c) D’adopter un vaste plan national d’action pour garantir l’égalité des sexes qui intégrerait les stratégies sectorielles en cours, en tenant dûment compte des dispositions de la Convention et des observations finales adressées à l’Algérie.

Mesures temporaires spéciales

25.Rappelant ses Recommandations générales no 23 (1997) sur les femmes et la vie politique, et no 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité est préoccupé par le faible nombre de mesures temporaires spéciales adoptées par l’État partie pour s’occuper de la question de l’égalité entre les sexes. Il prend note de la déclaration de la délégation selon laquelle si des quotas ont été établis pour garantir une représentation minimale des femmes sur les listes électorales pour les élections à l’Assemblée nationale populaire et aux assemblées régionales et municipales, conformément à la loi organique no 12-03 du 12 janvier 2012, il n’existe pas de représentation ni de quotas fixes quant à la représentation des femmes dans ces organes élus ou concernant l’emploi des femmes dans le secteur privé ou à des postes à responsabilité dans l’administration.

26. Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures pour garantir l’égalité effective entre les hommes et les femmes, notamment en adoptant des mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la Recommandation générale n o 25 du Comité. Il lui recommande en particulier d’envisager d’adopter des mesures spéciales, telles que des quotas ou des mesures de traitement préférentiel pour accélérer la participation des femmes à la vie publique et politique, y compris des mesures leur permettant d’occuper un mandat public et d’exercer toutes sortes de fonctions à tous les niveaux du Gouvernement, notamment dans les secteurs diplomatique et international, ainsi que dans le secteur privé.

Stéréotypes

27.Le Comité prend note des efforts déployés par l’État partie pour éliminer les stéréotypes à l’égard des femmes, notamment en adaptant les programmes de l’enseignement secondaire et en mettant en place des programmes de formation et de qualification visant à promouvoir l’égalité des chances et l’égalité de traitement des femmes en matière d’emploi et de travail. Le Comité note toutefois avec préoccupation que, malgré les efforts déployés par l’État partie pour sensibiliser l’opinion publique à l’égalité des sexes, les valeurs patriarcales et les attitudes stéréotypées marquées persistent dans l’État partie en ce qui concerne les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la société et dans la famille, mettant exagérément l’accent sur le rôle d’épouse et de mère dévolu aux femmes. En outre, le Comité note avec préoccupation que les programmes préscolaires perpétuent également les rôles stéréotypés des femmes et des hommes et regrette l’absence d’informations sur le rôle joué par les médias, les dirigeants religieux et communautaires et les organisations non gouvernementales (ONG) dans la lutte contre les stéréotypes et les comportements sociaux négatifs à l’égard des femmes et des filles. Le Comité prend également note des effets limités des programmes de sensibilisation destinés aux membres de l’appareil judiciaire sur les moyens de garantir l’application de l’article 5 de la Convention.

28. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De réexaminer et de revoir ses programmes et études de sensibilisation afin de promouvoir effectivement l’égalité des sexes et éliminer les attitudes patriarcales et les stéréotypes discriminatoires profondément ancrés concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, et d’informer le Comité de l’efficacité de ces mesures dans son prochain rapport périodique;

b) De prendre d’urgence des mesures volontaristes pour faire évoluer la façon dont sont perçus certains types d’emploi et de travail traditionnellement exercés par des hommes ou des femmes, afin de promouvoir l’égalité des chances et l’égalité de traitement à l’égard des femmes en ce qui concerne l’emploi et le travail;

c) De modifier les programmes préscolaires pour éviter de transmettre des images stéréotypées sur les rôles des femmes et des hommes;

d) De prendre des mesures systématiques pour faire participer les médias, les responsables communautaires et religieux et les ONG à la lutte contre les stéréotypes et les comportements sociaux négatifs;

e) De mettre en place un programme complet de sensibilisation à l’intention des membres de l’appareil judiciaire afin de garantir l’application de l’article 5 de la Convention et d’éliminer ainsi les stéréotypes sur les rôles des femmes et des hommes.

Violence à l’égard des femmes

29.Le Comité reste préoccupé par le fait que l’État partie n’est toujours pas doté d’une loi spécifique sur la violence à l’égard des femmes, notamment la violence dans la famille, malgré la recommandation qu’il avait formulée en ce sens dans ses précédentes observations finales (A/60/38, partie I, par. 150). L’État partie explique certes que, dans sa jurisprudence, le viol est traité comme une infraction impliquant des violences physiques ou psychiques à l’égard d’une femme, mais le Comité s’inquiète néanmoins de l’absence dans le Code pénal d’une définition du viol, y compris du viol conjugal et des autres délits à caractère sexuel, lesquels doivent s’entendre des infractions sexuelles commises en l’absence de consentement de la personne concernée. En outre, le Comité se dit préoccupé par l’absence de données sur le nombre de cas signalés de violence familiale et sexuelle contre des femmes, les enquêtes, les poursuites et les sanctions auxquelles ils ont donné lieu, ainsi que les réparations, y compris l’indemnisation, offertes aux victimes depuis 2005. Le Comité rappelle par ailleurs la nécessité de garantir les droits fondamentaux de toutes les femmes victimes de violence et de celles qui sont en situation de vulnérabilité, notamment le droit d’être représentées par un avocat et de bénéficier d’une prise en charge médicale et psychologique, ainsi que d’avoir accès à un hébergement, dans la perspective de leur réinsertion sociale et économique.

30. Le Comité prie instamment l ’ État partie:

a) D ’ élaborer et d ’ adopter à titre prioritaire une législation sur la violence à l ’ égard des femmes, y compris la violence dans la famille, en tenant compte de la Recommandation générale n o 19 (1992) du Comité;

b) D ’ inscrire dans son Code pénal la définition du viol, y compris du viol conjugal et des autres délits à caractère sexuel, lesquels doivent s ’ entendre des infractions sexuelles commises en l ’ absence de consentement de la personne concernée ;

c) De recueillir des données fiables sur le nombre de cas de violence familiale et sexuelle à l ’ égard des femmes, les enquêtes, les poursuites, les condamnations et les sanctions auxquelles ils ont donné lieu, ainsi que sur les réparations, y compris l ’ indemnisation, offertes aux victimes depuis 2005;

d) D ’ aider les femmes à signaler à la police les actes de violence familiale et sexuelle qu ’ elles ont subis; et notamment de fournir aux victimes une assistance juridique, médicale et psychologique et des services de réadaptation, et de faire en sorte que toutes les femmes victimes de violence aient accès à des structures d ’ hébergement de qualité, sans restrictions liées à l ’ â ge ou la situation matrimoniale;

e) De dispenser une formation continue aux membres de la police, aux magistrats du parquet et aux juges sur les méthodes à suivre pour enquêter sur les actes de violence à l ’ égard des femmes, notamment la violence familiale et sexuelle, engager des poursuites contre leurs auteurs et réprimer ces actes, et aux personnels soignants et aux travailleurs sociaux sur la fourniture d ’ une assistance médicale et psychosociale appropriée, ainsi que d ’ informer le grand public de la nature criminelle de tels actes.

Traite et exploitation sexuelle

31.Tout en se félicitant des modifications apportées au Code pénal par la loi no 09-01 du 25 février 2009 aux fins de criminaliser la traite des personnes, ainsi que de l’établissement de statistiques sur les délits de prostitution et de proxénétisme, le Comité prend note avec inquiétude des informations fournies par l’État partie, indiquant qu’aucun cas avéré de traite de personnes n’a été signalé et qu’il n’y a eu ni condamnation pénale ni poursuites pour de tels délits. Le Comité déplore en outre l’absence d’informations sur le mécanisme destiné à coordonner entre les organismes nationaux compétents les initiatives en matière de lutte contre la traite des personnes et de protection et d’aide aux victimes, de même que sur les stratégies visant à identifier systématiquement les victimes de la traite parmi les populations vulnérables, telles que les réfugiés et les demandeurs d’asile. En outre, le Comité constate avec inquiétude l’absence de mesures propres à garantir la protection des réfugiés, des demandeurs d’asile et des autres catégories de personnes relevant du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), en particulier les femmes et les filles, contre la traite ou le trafic de migrants.

32. Le Comité encourage l ’ État partie à :

a) É tablir un mécanisme national centralisé pour coordonner les initiatives visant à prévenir et combattre la traite des personnes et à protéger les victimes, et à adopter un plan d ’ action national en la matière;

b) D ispenser une formation continue aux responsables de l ’ application des lois, notamment aux agents de la police aux frontières, aux magistrats du parquet et aux juges, ainsi qu ’ aux membres des représentations diplomatiques, aux personnels soignants et aux travailleurs sociaux, concernant les méthodes efficaces d ’ identification et de prise en charge des victimes, notamment la fourniture de soins médicaux et l ’ accompagnement psychologique, ainsi que le travail d ’ enquête, l ’ engagement de poursuites contre les auteurs d ’ infractions et les sanct ions à leur encontre; ainsi qu’à informer le grand public de la nature criminelle de tels actes;

c) A ider les femmes victimes à signaler à la police les actes de traite qu ’ elles ont subis et leur fournir une assistance juridique, médicale et psychologique et des services de réadaptation, ainsi qu ’ un hébergement approprié;

d) C réer un mécanisme permettant d ’ identifier rapidement les victimes de traite et d ’ orienter celles qui pourraient avoir besoin d ’ une protection internationale vers les services compétents en matière de procédures d ’ asile.

Participation à la vie politique et publique

33.Tout en se félicitant de la modification apportée à l’article 31 de la Constitution, qui prévoit une représentation politique accrue des femmes, le Comité constate avec inquiétude que les femmes sont encore nettement sous-représentées dans les deux chambres du Parlement − l’Assemblée populaire nationale et le Conseil de la nation, respectivement − tout comme au Gouvernement, et que le nombre de femmes candidates aux élections reste faible à tous les niveaux. Le Comité prend acte de la promulgation de la loi organique no 12-03 du 12 janvier 2012, adoptée par le Parlement en novembre 2011, qui impose des quotas de femmes sur les listes électorales établies en vue des élections à l’Assemblée populaire nationale, aux assemblées régionales et aux assemblées communales. Tout en constatant qu’un barème de quotas allant de 20 à 50 % a été établi, le Comité relève avec préoccupation que le quota minimum est inférieur au taux de 33 % envisagé à l’origine et qu’il n’est pas institué de quota pour les élections au Conseil de la nation. Le Comité observe aussi avec inquiétude que les femmes sont encore peu nombreuses au sein de l’appareil judiciaire, dans l’administration publique ainsi que dans le corps diplomatique, notamment à la tête de missions diplomatiques à l’étranger. Il s’inquiète particulièrement du peu de mesures spécifiques, notamment des mesures temporaires spéciales, mises en œuvre pour promouvoir la représentation des femmes dans la vie publique et politique, notamment aux postes de directeurs centraux et de chefs d’entreprises publiques.

34. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De relever au moins à 30 % le quota minimum de représentation des femmes sur les listes électorales à tous les niveaux, y compris les élections au Conseil de la nation, et de prendre des mesures en vue d ’ instaurer une parité effective dans les organes électifs ;

b) De faciliter la nomination future de femmes aux postes de procureurs, de juges et de magistrats, ainsi qu’aux plus hauts échelons de l’administration publique et du corps diplomatique, y compris à la tête des missions diplomatiques à l’étranger;

c) De mettre en place de nouvelles mesures spécifiques, notamment des mesures temporaires spéciales, pour accroître la participation des femmes à la vie publique et politique, y compris leur représentation aux postes de directeurs centraux et de chefs d ’ entreprises publiques;

d) De continuer à mettre en œuvre des programmes de formation aux postes de direction et à mener des campagnes de sensibilisation destinées à souligner l ’ importance de la participation des femmes à la vie publique et politique, ainsi que d ’ évaluer l ’ impact de telles mesures.

Éducation

35.Tout en prenant acte de l’augmentation du nombre de jeunes filles et de femmes inscrites dans l’enseignement supérieur, en particulier dans les filières de la médecine et des sciences de l’ingénieur, le Comité est préoccupé par l’absence d’informations au sujet des initiatives visant à réduire les taux élevés d’abandon des filles enregistrés dans l’enseignement intermédiaire et secondaire. Il est également préoccupé par l’absence d’indicateurs permettant de mesurer l’impact de la stratégie nationale d’alphabétisation 2007-2016.

36. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De prendre d ’ urgence des mesures en vue de réduire les taux élevés d ’ abandon des filles enregistrés dans l ’ enseignement intermédiaire et secondaire;

b) D ’ établir des indicateurs permettant de mesurer l ’ impact de la stratégie nationale d ’ alphabétisation 2007-2016 et de fournir des renseignements à ce sujet dans le prochain rapport périodique au Comité.

Emploi

37.Rappelant qu’il est important de disposer de données concernant la rémunération des hommes et des femmes selon les postes occupés, dans toutes les catégories d’emploi, le Comité relève avec préoccupation que le rapport de l’État partie ne contient pas de renseignements concernant les niveaux de rémunération ventilés par sexe. Sachant que l’article 84 de la loi no 90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail consacre le principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, le Comité s’inquiète aussi de l’absence d’informations sur le nombre et la nature des manquements à ce principe, notamment dans la fonction publique, sur les mesures prises par l’inspection du travail pour détecter les infractions, et sur le nombre, la nature et l’issue des affaires liées à l’égalité de rémunération traitées par les autorités judiciaires.

38.En ce qui concerne le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, le Comité a noté que l’article 341 bis du Code pénal ne visait que le harcèlement sexuel lié à l’emploi. Il est préoccupé par le fait que la législation du travail n’interdit pas la création d’un environnement de travail hostile. Il s’inquiète également de la faible participation des femmes à l’emploi et constate que les intentions de l’État partie quant à la ratification de la Convention no 189 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques ne sont pas claires. Le Comité est aussi préoccupé par les restrictions trop protectrices concernant le travail nocturne et d’autres types de travail jugés dangereux pour les femmes, et par le fait que les femmes et les filles n’ont pas suffisamment accès à des possibilités de formation professionnelle plus diversifiées, notamment aux formations conduisant à des emplois traditionnellement masculins, ce qui augmenterait leurs chances d’entrer sur le marché du travail.

39. Le Comité invite l ’ État partie:

a) À rassembler des données concernant la rémunération des hommes et des femmes, selon les postes occupés, dans toutes les catégories d ’ emploi, tant au sein d ’ une même branche d ’ activité que dans les différentes branches, et à les fournir au Comité dans son prochain rapport périodique;

b) À veiller à ce que les inspecteurs du travail enquêtent sur tous les manquements au principe de l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, notamment dans la fonction publique, et à garantir aux victimes d ’ inégalités de salaire un accès à la justice, ainsi qu ’ à recueillir des données à ce sujet;

c) À modifier la législation du travail pour assurer une protection complète contre le harcèlement sexuel au travail et la création d ’ un environnement de travail hostile, ainsi qu ’ à fournir des informations sur les campagnes d ’ éducation et de sensibilisation qui seraient menées en la matière à l ’ intention des organisations d ’ employeurs comme des organisations de travailleurs;

d) À réexaminer sa législation pour supprimer les restrictions trop protectrices concernant le travail nocturne et d ’ autres types de travail jugés dangereux pour les femmes, et à prendre d ’ urgence des mesures volontaristes, notamment des mesures temporaires spéciales, pour mettre à jour sa politique nationale afin de promouvoir l ’ égalité des chances et l ’ égalité de traitement entre les hommes et les femmes dans l ’ emploi et la profession;

e) À envisager de ratifier la Convention n o 189 (2011) de l ’ OIT sur le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques.

Santé

40.Si le Comité se félicite de la priorité accordée par l’État partie à la santé génésique dans son système de soins de santé, et de l’intégration de la prévention de la violence et du traitement des victimes de violence dans les services de santé génésique et mentale, il se déclare préoccupé par l’absence de politique destinée au personnel médical en ce qui concerne le suivi et le signalement des cas de violence familiale à l’égard des femmes. Le Comité prend note de l’information fournie par l’État partie selon laquelle l’avortement à la suite d’un viol et d’un inceste n’est pas pénalisé. Toutefois, l’absence de décret légalisant l’avortement en cas de viol et d’inceste continue à poser des problèmes selon le Comité. En outre, le Comité est préoccupé par le manque d’informations claires concernant l’existence ou non d’une éducation sur les droits et sur la santé sexuelle et génésique dans les programmes scolaires de l’école publique.

41. Le Comité demande instamment à l ’ État partie:

a) D ’ organiser régulièrement des activités de formation et de sensibilisation du personnel médical afin de surveiller systématiquement tous les actes de violence familiale et de les signaler aux autorités chargées de l ’ application de la loi;

b) D ’ adopter des normes médicales et d ’ établir des mécanismes permettant de faire appliquer des règles selon lesquelles le viol et l ’ inceste sont des motifs d ’ avortement;

c) D ’ inclure des cours d ’ éducation plus complets sur les droits et sur la santé sexuelle et génésique dans les programmes scolaires de l ’ école publique.

Femmes des zones rurales

42.Tout en prenant note de l’adoption, en 2006, du programme de renouveau agricole et rural du Gouvernement qui vise notamment à répondre aux besoins des femmes des zones rurales, le Comité s’inquiète de ce que ces femmes soient particulièrement touchées par la pauvreté et les mariages précoces, et n’aient guère accès à l’éducation, aux services de santé, aux technologies de l’information et aux nouvelles technologies.

43. Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts pour:

a) Mettre en place des activités créatrices de revenus à l ’ intention des femmes des zones rurales et accroître la part du budget public consacrée au développement rural;

b) Offrir aux femmes et aux jeunes filles un accès suffisant à l’éducation, notamment en créant de nouvelles structures scolaires dans les zones rurales et en assurant des transports publics scolaires à l’intention des enfants des zones rurales;

c) Améliorer l’accès des femmes et des jeunes filles aux technologies de l’information en les faisant participer à des programmes d’apprentissage de l’informatique, et en garantissant leur accès aux nouvelles technologies;

d) Prévenir les mariages précoces, notamment au moyen de campagnes d’éducation et de sensibilisation pour combattre les comportements stéréotypés dans ce domaine;

e) Promouvoir la participation des femmes au développement durable, notamment en élargissant leur accès aux microcrédits et aux sources d’énergie renouvelables.

Femmes et jeunes filles réfugiées et demandeuses d’asile

44.Le Comité est préoccupé par les pratiques consistant à pénaliser les femmes et les jeunes filles réfugiées et demandeuses d’asile pour entrée et séjour illégaux dans le pays, en soumettant ces personnes à de longues périodes de détention et en les renvoyant vers leur pays d’origine en violation du principe de non-refoulement. Le Comité est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles des femmes et des jeunes filles réfugiées auraient été victimes d’actes de violence sexuelle et sexiste, et auraient des difficultés à avoir accès à des foyers, à une aide médicale et psychologique, ainsi qu’à la justice. Par ailleurs, le Comité note avec préoccupation que les enfants réfugiés et demandeurs d’asile ont un accès limité aux écoles publiques et à des services de santé vitaux pour eux, et que des enfants réfugiés et apatrides nés en Algérie restent sans certificat de naissance, ce qui limite leur accès aux services sociaux de base.

45. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De veiller à ce que les réfugiés et les demandeurs d’asile, en particulier les femmes et les jeunes filles, ne soient pas sanctionnés pour entrée et séjour illégaux dans le pays, que les demandeurs d’asile ne soient détenus qu’en dernier ressort, en l’absence d’autres solutions et pour une durée aussi brève que possible, et que les garanties en matière de non-refoulement soient pleinement respectées; et de mettre en place des mécanismes de coopération avec le HCR pour recenser les personnes ayant besoin d’une protection internationale;

b) De renforcer les mécanismes et les procédures permettant de veiller à ce que les femmes et les jeunes filles réfugiées ne soient pas victimes de violences sexuelles et sexistes, et que les victimes et les personnes ayant survécu à ces violences aient accès à des foyers, à des services d’aide médicale et psychologique, ainsi qu’au mécanisme chargé de l’application de la loi et à la justice;

c) De garantir l’accès de tous les enfants réfugiés et demandeurs d’asile à l’école publique;

d) De veiller à ce que les réfugiés et les demandeurs d’asile puissent avoir accès aux services de santé vitaux pour eux, notamment aux hôpitaux publics, sans discrimination ni crainte d’être conduits à la police;

e) De veiller à ce que des certificats de naissance soient délivrés à tous les enfants nés en Algérie, y compris aux enfants réfugiés et apatrides, afin de prévenir les cas d’apatridie et de permettre à tous les enfants d’avoir accès à des services sociaux;

f) D’envisager de ratifier la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

Mariage et rapports familiaux

46.Le Comité note avec préoccupation que les dispositions discriminatoires du Code de la famille continuent d’être appliquées, témoignant ainsi du statut juridique inférieur des femmes dans plusieurs domaines, notamment les suivants:

a)L’obligation pour les femmes qui souhaitent contracter mariage d’avoir un tuteur matrimonial (wali);

b)L’acceptation de la polygamie, accompagnée toutefois de certaines restrictions (art. 8 du Code);

c)Le nombre limité de motifs de divorce, souvent difficiles à prouver devant la justice, tels que défaillance financière, non-consommation du mariage ou problèmes sexuels, condamnation, absence prolongée ou grave atteinte aux bonnes mœurs (art. 53 du Code);

d)La possibilité limitée pour la femme de remplacer le père comme tuteur légal dans des situations d’urgence, par exemple lorsque le mari est absent ou incapable d’exercer sa fonction de tuteur, et le transfert de la tutelle à la femme uniquement dans le cas du décès du mari ou d’un divorce (art. 87);

e)Les droits successoraux, les enfants de sexe masculin ayant le droit d’hériter de deux parts, les filles n’ayant droit qu’à une seule part de l’héritage.

47. Le Comité recommande à l’État partie de réexaminer et de modifier les dispositions discriminatoires du Code de la famille et, en particulier:

a) De réexaminer les effets de l’obligation pour une femme ayant atteint l’âge de la majorité d’être accompagnée d’un wali (tuteur matrimonial) à son mariage;

b) De décourager et d’interdire les mariages polygames en droit et en pratique, conformément à la Recommandation générale n o 21 du Comité;

c) D’abroger les restrictions concernant le droit de la femme au divorce et d’introduire le droit pour chacune des deux parties de demander le divorce sans préciser le motif;

d) De faire en sorte que les pères et les mères puissent exercer leurs droits de tutelle et de garde sur leurs enfants mineurs dans les mêmes conditions et dans tous les domaines, conformément au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant consacré par la Convention relative aux droits de l’enfant, à laquelle l’Algérie est partie, et à l’article 16 de la Convention;

e) D’envisager d’adopter des dispositions légales pour faire en sorte qu’à la dissolution du mariage, les femmes puissent faire valoir les mêmes droits que les hommes aux biens acquis durant le mariage, conformément au paragraphe 1 h) de l’article 16 de la Convention et à la Recommandation générale n o 21 du Comité;

f) D’étudier le droit successoral, en tenant compte de l’expérience d’autres pays présentant des similarités du point de vue culturel et des pays qui ont revu leur système juridique afin que les femmes puissent hériter dans les mêmes conditions que les hommes.

Institution nationale des droits de l’homme

48.Tout en saluant la création d’une institution nationale des droits de l’homme indépendante, la Commission nationale des droits de l’homme, conformément au principe concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), le Comité constate le flou entourant les informations sur les mesures concrètes prises par l’État partie pour veiller à ce que le statut de la Commission nationale soit pleinement conforme aux Principes de Paris.

49. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures d’urgence pour faire en sorte que le statut de la Commission nationale des droits de l’homme soit pleinement conforme aux Principes de Paris.

Protocole facultatif

50. À la lumière des recommandations figurant dans ses précédentes observations finales, le Comité encourage l’État partie à accélérer la ratification du Protocole facultatif afin de favoriser le plein exercice des droits consacrés par la Convention.

Amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

51.Le Comité encourage l’État partie à accepter sans tarder l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention afin d’aider le Comité à s’acquitter au mieux de son mandat.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

52. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de s ’ appuyer pleinement, aux fins de l ’ exécution des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention, sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et le prie de fournir des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Diffusion

53. Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées dans l ’ État partie afin que la population et, en particulier, les agents de l ’ État, les responsables politiques, les parlementaires et les organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme soient informés des mesures prises en vue de garantir l ’ égalité de droit et de fait entre les sexes et des dispositions qui restent à prendre à cet égard. Le Comité recommande que ces observations soient également diffusées au niveau local. Il invite l ’ État partie à organiser une série de réunions pour débattre des progrès accomplis dans leur mise en œuvre. Il prie l ’ État partie de continuer à diffuser largement, en particulier auprès des organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme, le texte de ses propres recommandations générales et de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing et les textes issus de la vingt ‑ troisième session extraordinaire de l ’ Assemblée générale, intitulée «Les femmes en l ’ an 2000: égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e siècle».

Ratification d’autres instruments

54. Le Comité fait observer qu e l’adhésion de l’Algérie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribue rait à promouvoir l ’ exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc le Gouvernement algérien à envisag er de ratifier l ’ instrument auquel il n ’ est pas encore partie, à savoir la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Suivi des observations finales

55. Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des renseignements écrits sur les mesures qu ’ il aura prises pour donner suite aux recommandations figurant aux paragraphes 14 et 3 0 a), b) et c) ci-dessus.

Assistance technique

56. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de tirer parti de l ’ assistance technique mise à sa disposition pour l ’ élaboration et la mise en œuvre d ’ un programme complet devant permettre l ’ application des recommandations susmentionnées et de la Convention dans son ensemble. Il appelle en outre l ’ État partie à renforcer davantage sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes des Nations Unies, notamment l ’ Entité des Nations Unies pour l ’ égalité des sexes et l ’ autonomisation de la femme (ONU-Femmes), la Division de statistique du Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, le Programme des Nations Unies pour le développement, le Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance, le Fonds des Nations Unies pour la population, l ’ Organisation mondiale de la santé et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme.

Établissement du prochain rapport

57. Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à ce que tous les ministères et les organes de l ’ État participent largement à l ’ élaboration du prochain rapport périodique, et de consulter à cette occasion diverses organisations de femmes et de défense des droits de l ’ homme.

58. Le Comité demande à l ’ État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans son prochain rapport périodique en vertu de l ’ article 18 de la Convention. Il invite l ’ État partie à présenter ce rapport en février 201 6.

59. Le Comité invite l ’ État partie à suivre les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base commun et les documents spécifiques à chaque instrument, approuvées à la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, qui s ’ est tenue en juin 2006 (HRI/ GEN /2/ Rev.6, chap. I ). Les directives concernant l ’ élaboration d u rapport spécifique à la Convention, adoptées par le Comité à sa quarantième session en janvier 2008 (A/63/38, partie 1, annexe I), doivent être mises en œuvre parallèlement aux directives harmonisées concernant l ’ établissement du document de base commun. Ensemble, elles constituent les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre de la Convention sur l ’ élimination de tout es les formes de discrimination à l ’ égard des femmes. Le document propre à cet instrument ne devrait pas dépasser 40 pages et le document de base commun actualisé 80 pages.



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