University of Minnesota



Observations finales du Comité contre la torture, Koweït, U.N. Doc. CA T/C/KWT/CO/2 (2011).



 

CA T/C/KWT/CO/2

28 juin 2011

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Comité contre la torture

Quarante-sixième session

9 mai-3 juin 2011

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19 de la Convention

Observations finales du Comité contre la torture

Koweït

1. Le Comité contre la torture a examiné le deuxième rapport périodique du Koweït (CAT/C/KWT/2) à ses 986e et 989e séances (CAT/C/SR.986 et 989), les 11 et 12 mai 2011, et a adopté, à sa 1007e séance (CAT/C/SR.1007), les observations finales ci-après.

A. Introduction

2. Le Comité accueille avec satisfaction la soumission du deuxième rapport périodique du Koweït, qui a été soumis conformément à la nouvelle procédure facultative du Comité consistant pour l’État partie à répondre à une liste préalable de points à traiter transmise par le Comité (CAT/C/KWT/Q/2) aux fins d’un dialogue plus ciblé. Toutefois, il regrette que le rapport ne contienne pas de renseignements détaillés, notamment des statistiques, et qu’il ait été soumis avec neuf ans de retard. Ceci a empêché le Comité de suivre l’application de la Convention dans l’État partie d’une façon continue.

3. Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a envoyé une délégation de haut niveau à la quarante-sixième session et se félicite de pouvoir engager un dialogue constructif avec le Koweït sur divers sujets de préoccupation relevant de la Convention.

B. Aspects positifs

4. Le Comité note avec satisfaction que, depuis l’examen du rapport initial, l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants ou y a adhéré:

a) Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés;

b) Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

C.

5. Le Comité accueille avec satisfaction la création en 2008 de la Haute Commission des droits de l’homme qui est chargée de réexaminer les lois et la réglementation en vigueur et de proposer des modifications afin d’intégrer l’enseignement des principes fondamentaux relatifs aux droits de l’homme dans les programmes scolaires et universitaires.

6. Le Comité note avec satisfaction que, le 12 mai 2010, l’État partie a adressé une invitation à tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations Définition et incrimination de la torture

7. Le Comité prend note avec satisfaction de l’engagement pris par l’État partie, pendant le dialogue avec ses représentants, de promulguer une loi spécifique pour adopter une définition de la torture entièrement conforme à l’article premier de la Convention ainsi que de modifier sa législation de façon que la torture et les mauvais traitements emportent des peines suffisantes. Le Comité relève toutefois avec préoccupation que les dispositions en vigueur ne contiennent pas de définition de la torture et ne fixent pas de peines en rapport avec la gravité de ces actes, étant donné que la peine maximale pour une arrestation, un emprisonnement ou une détention non prévus par la loi est un emprisonnement de trois ans ou une amende de 225 dinars et un emprisonnement de sept ans seulement si ces actes s’accompagnent de tortures physiques ou de menaces de mort (art. 1er et 4).

Le Comité recommande une nouvelle fois à l’État partie (A/53/44, par. 230) d’introduire dans le droit pénal interne l’infraction de torture, telle qu’elle est définie à l’article premier de la Convention, en veillant à ce que tous les éléments de cette définition y soient énoncés.

L’État partie devrait revoir sa législation de façon que les actes de torture soient érigés en infraction pénale et emportent de lourdes peines qui tiennent compte de la gravité des actes en cause, comme l’exige le paragraphe 2 de l’article 4 de la Convention.

Garanties juridiques fondamentales

8. Le Comité note que le Code de procédure pénale (loi no 17 de 1960) et la loi no 26 de 1962 sur l’organisation des prisons contiennent des dispositions assurant aux détenus un certain nombre de garanties juridiques telles que le droit d’avoir accès à un avocat, d’avertir un proche, d’être informé des charges retenues contre soi et d’être présenté à un juge dans un délai conforme aux normes internationales, mais il relève avec préoccupation que ces dispositions sont peu respectées. En outre, bien que l’article 75 du Code de procédure pénale protège le droit de tout suspect d’engager un conseil pour assurer sa défense et assister aux interrogatoires, le Comité estime préoccupant que les avocats ne puissent prendre la parole qu’avec l’autorisation de l’enquêteur (art. 2).

L’État partie devrait prendre sans délai les mesures voulues pour que tous les détenus bénéficient, dans la pratique, de toutes les garanties juridiques fondamentales dès le début de la détention, notamment des droits de voir rapidement un avocat, d’être examinés par un médecin indépendant, d’aviser un proche, d’être informés de leurs droits au moment de leur arrestation, ainsi que des accusations portées contre eux, et d’être déférés devant un juge dans un délai conforme aux normes internationales.

Surveillance et inspection des lieux de privation de liberté

9. Le Comité note que dans ses réponses à la liste de points à traiter l’État partie indique que, conformément à la loi no 23 de 1990 sur l’organisation de la justice, à la loi no 26 de 1962 et à l’article 56 du décret-loi no 23 de 1990 relatif à l’organisation de la justice, plusieurs formes de contrôle et de supervision des établissements pénitentiaires sont garanties. Il est néanmoins préoccupé par l’absence de surveillance systématique et efficace de tous les lieux de détention, notamment de visites régulières et inopinées par des inspecteurs nationaux et internationaux (art. 2).

Le Comité engage l’État partie à mettre en place un système national pour assurer une surveillance et une inspection effectives de tous les lieux de détention et à veiller à ce qu’il soit donné suite aux résultats d’un tel processus. Le système en question devrait comporter des visites périodiques et inopinées visant à prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L’État partie est encouragé à accepter la surveillance des lieux de détention par des mécanismes internationaux compétents.

Plaintes et ouverture immédiate d’enquêtes approfondies et impartiales

10. Le Comité note que, d’après les renseignements donnés par la délégation koweïtienne au cours du dialogue, le Ministère de l’intérieur a créé un département spécial chargé d’enregistrer les plaintes et de donner suite aux griefs d’abus d’autorité imputés aux fonctionnaires du Ministère de l’intérieur, mais il regrette l’absence d’un mécanisme indépendant chargé de recevoir des plaintes et d’enquêter de manière rapide, impartiale et approfondie sur les actes de torture signalés aux autorités et qui veille à ce que ceux qui sont reconnus coupables soient dûment punis (art. 13).

L’État partie devrait mettre en place un mécanisme de plainte entièrement indépendant, faire en sorte que toutes les allégations de torture fassent l’objet sans délai d’enquêtes approfondies, que les auteurs présumés de ces actes soient poursuivis et que ceux qui ont été reconnus coupables soient punis.

11. Le Comité relève que, pendant la période 2001-2011, 632 procès pour des affaires de torture, de mauvais traitements et de châtiments corporels ont eu lieu et que, dans 248 affaires, les responsables ont été condamnés à une peine, mais il note que l’État partie n’a pas fourni de renseignements précis sur le type de peines prononcées contre les personnes reconnues coupables (art. 4, 12 et 13).
Le Comité demande à l’État partie d’apporter des informations, notamment des données statistiques, sur le nombre de plaintes pour torture et mauvais traitements déposées contre des agents de l’État, ainsi que des renseignements sur l’issue des procédures, tant pénales que disciplinaires en citant des exemples de jugements rendus.

12. Le Comité regrette profondément le décès de Mohamed Ghazi Al-Maymuni Al-Matiri, qui a été torturé en janvier 2011 par des agents de la force publique alors qu’il était en garde à vue. Il prend acte de l’inculpation de 19 individus, qui avaient participé aux actes de torture (art. 12).

Le Comité prie l’État partie de donner des informations détaillées sur l’évolution de cette affaire et sur tout fait nouveau au niveau judiciaire ainsi que sur l’indemnisation des proches de la victime.

13. Le Comité se dit préoccupé par le cas de huit personnes libérées de Guantanamo Bay et renvoyées au Koweït où elles auraient été arrêtées et seraient poursuivies.

Le Comité demande à l’État partie de fournir des informations sur les circonstances exactes de ce cas et sur tout fait nouveau sur le plan judiciaire.

14. Le Comité note que, dans une des observations finales faites par le Comité des droits de l’homme en 2000 (CCPR/CO/69/KWT, par. 11), il est fait référence à une liste de 62 personnes arrêtées en 1991 au lendemain de la guerre qui sont, depuis lors, portées disparues. Le Comité note que l’État partie n’a reconnu qu’un seul cas. Le Comité note avec préoccupation l’information récurrente relative à la disparition des personnes détenues au lendemain de la guerre de 1991 et que la question a été soulevée par une organisation non gouvernementale pendant l’Examen périodique universel du Koweït en mai 2010.

L’État partie devrait fournir des informations pour éclaircir les cas portés à son attention de personnes arrêtées et portées disparues à la suite de la guerre de 1991.

Non-refoulement

15. Le Comité regrette le manque d’informations sur le point 5 (CAT/C/KWT/2, par. 18) dans le rapport soumis en réponse à la liste des points à traiter (CAT/C/KWT/Q/2), demandant des données statistiques pour les cinq dernières années (2005-2010) relatives aux demandes d’asile, en particulier aux demandes présentées par des personnes qui avaient été torturées ou risquaient d’être torturées si elles étaient renvoyées dans leur pays d’origine (art. 3).

L’État partie ne devrait en aucun cas expulser, renvoyer ou extrader une personne vers un État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture ou à des mauvais traitements. Le Comité demande à l’État partie de donner des renseignements détaillés sur le nombre exact de demandes d’asile qu’il a reçues, le nombre de celles auxquelles il a été fait droit, le nombre de demandeurs d’asile dont la demande a été acceptée parce qu’ils avaient été torturés ou risquaient d’être soumis à la torture s’ils retournaient dans leur pays d’origine et le nombre d’expulsions, en indiquant a) le nombre d’expulsions de demandeurs d’asile déboutés et b) les pays de renvoi. Les données devraient être ventilées par âge, sexe et nationalité.

Réfugiés

16. Le Comité note que, en dépit de la coopération en cours avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l’État partie n’ait pas ratifié la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Protocole facultatif de 1967.
L’État partie est encouragé à songer à ratifier la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Protocole facultatif de 1967.
Imposition de la peine de mort

17. Le Comité note que la délégation a indiqué que la peine de mort n’avait pas été appliquée dans l’État partie depuis 2006 mais il est préoccupé par l’absence de renseignements sur le nombre de condamnés exécutés avant 2006. Il est également préoccupé par le grand nombre d’infractions qui emportent la peine de mort ainsi que par le manque d’informations sur le nombre de personnes actuellement incarcérées dans le quartier des condamnés à mort. Le Comité est en outre préoccupé par les dispositions de l’article 49 du Code de procédure pénale qui autorisent un usage excessif de la force à l’encontre des condamnés à mort (art. 2 et 16).

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort. En attendant, l’État partie devrait revoir sa politique afin de garantir que la peine capitale ne soit prononcée que pour les crimes les plus graves. Il devrait veiller à ce que tous les condamnés à mort bénéficient de la protection assurée par la Convention contre la torture et soient traités avec humanité et qu’ils ne fassent l’objet d’aucune mesure discriminatoire ni d’aucun mauvais traitement. Le Comité demande à l’État partie de donner des renseignements sur le nombre exact de personnes exécutées depuis l’examen du rapport précédent, en 1998, et pour quelles infractions elles avaient été condamnées. L’État partie devrait également indiquer le nombre de personnes actuellement dans le quartier des condamnés à mort, en ventilant les données par sexe, âge, origine ethnique et infraction.

Formation

18. Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a organisé plusieurs formations sur le thème des droits de l’homme à l’intention des agents des forces de l’ordre. Il est toutefois préoccupé par le fait que les agents des forces de l’ordre, les personnels de sécurité, les juges, les procureurs, les médecins légistes et les personnels médicaux qui sont en contact avec les détenus ne reçoivent pas une formation spécifique sur les dispositions de la Convention et sur les moyens de déceler les séquelles physiques de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et d’en établir la réalité. Le Comité regrette aussi le manque de formation au sujet de la traite des êtres humains, de la violence au foyer, des migrants, des minorités et d’autres groupes vulnérables ainsi que sur le suivi de l’un ou l’autre de ces programmes de formation et sur leur efficacité pour la réduction des cas de torture et de mauvais traitements (art. 10).

L’État partie devrait développer et renforcer les programmes de formation et des programmes visant à obtenir que tous les agents de l’État, y compris les agents des forces de l’ordre, les personnels de sécurité et les personnels pénitentiaires connaissent parfaitement les dispositions de la Convention et sachent que les violations de la Convention ne seront pas tolérées et feront l’objet d’une enquête rapide et approfondie et que leurs auteurs seront poursuivis. En outre, tout le personnel concerné, y compris le personnel médical, devrait recevoir une formation spécifique lui permettant de déceler les signes de torture et les mauvais traitements. À cette fin, le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul) devrait faire partie du matériel de formation. L’État partie devrait aussi élaborer pour l’ensemble de son personnel des cours de formation consacrés à la traite des êtres humains, à la violence au foyer, aux migrants, aux minorités et autres groupes vulnérables. En outre, l’État partie devrait évaluer l’efficacité de ces programmes de formation et d’éducation et leur incidence pour ce qui est de l’interdiction absolue de la torture.

Conditions de détention

19. Le Comité se félicite du projet de loi visant à modifier l’article 60 du Code de procédure pénale de 1960 de façon à ramener de quatre jours à quarante-huit heures le délai maximum de garde à vue sans autorisation écrite. Il est toutefois gravement préoccupé par les conditions générales dans tous les types de lieux de détention (art. 11 et 16).

Le Comité demande à l’État partie de fournir des informations détaillées sur les conditions générales de détention et, en particulier, sur le taux d’occupation dans tous les types de lieux de détention. L’État partie devrait prendre d’urgence des mesures pour mettre les conditions de détention dans tous les lieux où des personnes sont privées de liberté en conformité avec l’Ensemble de règles minima pour le traitement des prisonniers, en améliorant la qualité de la nourriture et des soins de santé fournis aux détenus et en renforçant le contrôle judiciaire et la surveillance indépendante des conditions de détention.

Conditions dans les hôpitaux psychiatriques

20. Le Comité prend acte de l’information fournie pendant le dialogue au sujet des personnes souffrant de maladies mentales. Il regrette toutefois que peu d’informations aient été fournies sur les conditions des personnes soumises à un traitement forcé dans un établissement psychiatrique et les garanties juridiques dont elles bénéficient (art. 16).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les personnes faisant l’objet d’un traitement forcé aient accès à des mécanismes de plainte. Il demande à l’État partie de lui fournir des informations sur les conditions des personnes placées dans des hôpitaux psychiatriques.

Réparation, y compris indemnisation et moyens de réadaptation

21. Le Comité note que la législation de l’État partie contient des dispositions qui prévoient sans doute pour les victimes de torture le droit d’obtenir une indemnisation de l’État, ainsi que la restitution de leurs droits, une réparation financière adéquate et équitable, des soins médicaux et des moyens de réadaptation, mais il est préoccupé par l’absence d’un programme spécifique permettant de donner effet au droit des victimes de torture et de mauvais traitements d’obtenir une réparation et une indemnisation adéquates. Le Comité est également préoccupé par l’absence de renseignements sur le nombre de victimes de torture et de mauvais traitements qui peuvent avoir été indemnisées et sur les montants des indemnités effectivement versées dans ces affaires, ainsi que par l’absence de renseignements sur d’autres formes d’assistance offertes aux victimes, notamment l’aide médicale ou les mesures de réadaptation psychosociale (art. 12 et 14).

L’État partie devrait faire en sorte que les victimes de tortures et de mauvais traitements jouissent d’un droit exécutoire à réparation, ycompris à une indemnisation équitable et adéquate ainsi que des moyens nécessaires à une réadaptation la plus complète possible. Il devrait en outre donner des renseignements sur les réparations et les indemnisations ordonnées par les tribunaux et effectivement octroyées aux victimes de torture. Dans ce contexte, il devrait préciser le nombre de demandes déposées, le nombre de celles auxquelles il a été fait droit et les montants ordonnés ainsi que les sommes effectivement versées dans chaque cas. De plus, l’État partie devrait donner des renseignements sur tout programme de réparation en cours, notamment sur le traitement des traumatismes et des autres formes de réadaptation offertes aux victimes d’actes de torture et de mauvais traitements, et indiquer si des ressources suffisantes ont été allouées pour assurer le fonctionnement de ces programmes.

Travailleurs domestiques migrants

22. Le Comité note avec préoccupation les informations selon lesquelles les travailleurs domestiques migrants et, en particulier, les femmes subissent fréquemment des sévices généralisés. Il semble que ce groupe vulnérable soit constamment victime de mauvais traitements dans une impunité totale et sans protection judiciaire. Il regrette le manque de statistiques sur le nombre et le type de plaintes déposées auprès des autorités s’occupant des employés domestiques et sur la manière dont ces plaintes sont réglées. Le Comité prend note de l’engagement de l’État partie, pris par ses représentants pendant l’Examen périodique universel du Koweït à la huitième session du Conseil des droits de l’homme en mai 2010, tendant à adopter des textes de loi contre la traite des êtres humains et le trafic des migrants conformément à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et au Protocole s’y rapportant (art. 1er, 2 et 16).

L’État partie devrait adopter d’urgence une législation du travail applicable à l’emploi domestique et assurant sur son territoire une protection aux travailleurs domestiques migrants, en particulier aux femmes, contre l’exploitation, les mauvais traitements et les sévices. L’État partie devrait fournir au Comité des statistiques, en particulier sur le nombre et le type de plaintes déposées auprès des autorités ainsi que les mesures prises pour régler les affaires à l’origine de cette plainte.

Violence contre les femmes

23. Le Comité note avec préoccupation les nombreuses allégations au sujet de la violence à l’égard des femmes et de la violence au foyer sur lesquelles l’État partie n’a pas fourni d’informations. Il est préoccupé par l’absence de texte législatif spécifique sur la violence au foyer ainsi que par l’absence de statistiques indiquant le nombre total de plaintes pour violence au foyer dont on a connaissance et le nombre d’enquêtes ouvertes et de condamnations et de peines prononcées (art. 2 et 16).

Le Comité:

a) Engage l’État partie à adopter d’urgence un texte de loi pour ériger en infraction, prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes, y compris au foyer;

b) Recommande à l’État partie de faire des études et de recueillir des données sur l’ampleur de la violence au foyer et fournir des statistiques sur les plaintes déposées, les poursuites engagées et les condamnations prononcées;

c) Encourage l’État partie à organiser la participation de ses agents à des programmes de réadaptation et d’assistance juridique et à mener à bien de vastes campagnes de sensibilisation à l’intention de personnels tels que les juges, les professionnels du droit, les agents des forces de l’ordre et les travailleurs sociaux qui sont en contact direct avec les victimes. La population en général devrait avoir connaissance de ces programmes.

Traite des êtres humains

24. Le Comité est préoccupé par l’absence de texte législatif spécifique visant à prévenir, combattre et incriminer pénalement la traite. Il est également préoccupé par l’absence d’informations sur la traite, notamment sur les textes législatifs existants, et de statistiques, en particulier sur le nombre de plaintes déposées, les enquêtes menées, les poursuites et les condamnations des responsables de traite, ainsi que par l’absence de renseignements concernant les mesures concrètes prises pour empêcher le phénomène et le combattre, y compris les mesures d’ordre médical, social et visant à assurer la réadaptation (art. 2, 4 et 16).

L’État partie devrait lutter contre la traite des êtres humains en adoptant et en mettant en œuvre des textes spécifiquement consacrés à la lutte contre la traite prévoyant l’incrimination pénale de la traite conformément aux normes internationales. Les infractions ainsi définies doivent emporter des peines appropriées. L’État partie devrait assurer la protection des victimes et leur garantir l’accès à des services médicaux, sociaux, à des moyens de réadaptation ainsi qu’à des conseils et une assistance juridiques.

Discrimination et violence contre les groupes vulnérables

25. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles des groupes vulnérables tels que les lesbiennes, les gays, les bisexuels et les transgenres sont victimes de discrimination et de mauvais traitements, notamment de violences sexuelles dans les contextes public et privé (art. 2 et 16).

L’État partie devrait enquêter sur les infractions relatives à la discrimination à l’encontre de tous les groupes vulnérables et trouver des moyens de prévenir et de réprimer les crimes motivés par la haine. L’État partie devrait également procéder rapidement à une enquête approfondie et impartiale sur tous les cas de discrimination et de mauvais traitements infligés à ces groupes vulnérables et punir ceux qui en sont responsables. Il devrait également lancer des campagnes de sensibilisation à l’intention de tous les fonctionnaires qui sont en contact direct avec les victimes d’une telle violence ainsi que pour l’ensemble de la population.
Situation des «Bidouns»

26. Le Comité se déclare préoccupé par la situation d’au moins 100 000 personnes non reconnues légalement par l’État partie, appelées «Bidouns» (sans nationalité) qui seraient victimes de différentes sortes de discrimination et de mauvais traitements (art. 16).

L’État partie devrait adopter un texte législatif spécifique pour assurer la protection des «Bidouns» et reconnaître leur statut juridique. Il devrait prendre toutes les mesures législatives et pratiques voulues pour simplifier et faciliter la régularisation de ces personnes et leur intégration. Il devrait également prendre les mesures nécessaires pour que ces personnes soient informées de leurs droits dans une langue qu’elles comprennent et qu’elles bénéficient des garanties juridiques fondamentales dès le moment où elles sont privées de liberté, sans aucune discrimination.

Institution nationale des droits de l’homme

27. Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas encore mis en place d’institution nationale pour promouvoir et protéger les droits de l’homme, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris, art. 2, résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe).

L’État partie devrait mettre en place une institution nationale indépendante des droits de l’homme, conformément aux Principes de Paris.
Collecte de données

28. Le Comité regrette l’absence de données complètes et ventilées sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations dans les affaires de torture et de mauvais traitements où sont impliqués des membres des organes chargés d’appliquer la loi, des forces de sécurité des services du renseignement et du personnel pénitentiaire ainsi que sur la traite, les mauvais traitements infligés aux travailleurs migrants et la violence au foyer et sexuelle.

L’État partie devrait recueillir des données statistiques utiles pour le suivi de l’application de la Convention au niveau national, notamment sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites et les condamnations dans les affaires de torture et de mauvais traitements, de traite, de mauvais traitements infligés aux travailleurs migrants et aux travailleurs domestiques et sur la violence sexuelle ainsi que les mesures d’indemnisation et de réadaptation prises en faveur des victimes.

29. Le Comité recommande à l’État partie de songer à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture.

30. Le Comité relève avec satisfaction que pendant le dialogue l’État partie s’est engagé à retirer la réserve qu’il avait émise au sujet de l’article 20 de la Convention.

31. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de faire les déclarations prévues à l’article 21 et à l’article 22 de la Convention.

32. Le Comité invite l’État partie à ratifier les principaux instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, notamment la Convention relative aux droits des personnes handicapées, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

33. Le Comité invite l’État partie à ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie.

34. Le Comité invite l’État partie à soumettre son prochain rapport périodique en suivant ses directives sur l’établissement des rapports et à respecter la limite de 40 pages fixée pour le document propre à la Convention. Il l’invite aussi à mettre à jour son document de base commun conformément aux instructions figurant dans les directives harmonisées pour l’établissement des rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN.2/Rev.6), approuvées par la réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, et de respecter la limite de 80 pages fixée pour le document de base commun. Le document propre à la Convention et le document de base commun constituent conjointement les documents que l’État partie est tenu de soumettre pour s’acquitter de son obligation de faire rapport au titre de la Convention.

35. L’État partie est encouragé à diffuser largement les rapports qu’il soumet au Comité ainsi que les présentes observations finales, dans les langues voulues, par le biais des sites Web officiels, des médias et des organisations non gouvernementales.

36. Le Comité demande à l’État partie de lui faire parvenir dans un délai d’un an des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 10, 11 et 17 et de fournir des informations sur la suite donnée à son engagement mentionné au paragraphe 6 des présentes observations finales.

37. L’État partie est invité à soumettre son prochain rapport périodique, qui sera le troisième, au plus tard le 3 juin 2015.

 



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