Observations finales du Comité contre la Torture, Chine, U.N. Doc. A/55/44, paras. 106-145 (2000).
Convention Abbreviation: CAT
COMITÉ CONTRE LA TORTURE
Vingt-quartième session
1-19 mai 2000
EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES EN APPLICATION DE L'ARTICLE
19 DE LA CONVENTION
Observations finales du Comité contre la Torture
Chine
106. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de la Chine (CAT/C/39/Add.2)
à ses 414ème, 417ème et 421ème séances, les 4, 5 et 9 mai 2000 (CAT/C/SR.414,
417 et 421), et a adopté les conclusions et recommandations ci-après.
1. Introduction
107. Le troisième rapport périodique de la Chine comporte deux parties. La première
porte sur la Chine à l'exclusion de la Région administrative spéciale de Hong
Kong, tandis que la deuxième couvre uniquement la Région administrative spéciale
de Hong Kong.
108. Le Comité se félicite du troisième rapport périodique de la Chine, qui
est conforme aux directives générales concernant l'élaboration des rapports
d'État partie. Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements et réponses
supplémentaires apportés par l'État partie ainsi que la coopération continue
et constructive de la Chine avec le Comité.
Première partie - Chine, à l'exclusion de la Région administrative spéciale
de Hong Kong
2. Aspects positifs
109. Le Comité accueille avec satisfaction et encourage les efforts déployés
sans discontinuer par le Gouvernement chinois pour apporter à sa législation
et à ses pratiques les modifications voulues pour les mettre en conformité avec
les normes internationales relatives aux droits de l'homme et ancrer la légalité
dans la Constitution.
110. Le Comité se félicite des dispositions prises par le Gouvernement chinois
pour donner effet à un certain nombre des recommandations faites antérieurement
par le Comité, concernant en particulier l'accès rapide à un défenseur, la présomption
d'innocence, les amendements à apporter au Code pénal et à la procédure pénale
touchant la régularité de la procédure, et le durcissement des peines réprimant
les actes de torture.
111. Le Comité prend note de l'abolition effective de la procédure d'internement
aux fins d'enquête et de protection ainsi que de l'introduction de certains
éléments du principe de régularité de la procédure dans le domaine de la détention
administrative, y compris la rééducation par le travail.
112. Le Comité note que l'État partie a affirmé sa volonté de coopérer à l'échelon
international dans le domaine de la réadaptation des victimes de la torture.
113. Le Comité se félicite des assurances de l'État partie selon lesquelles
ses organes chargés de l'application des lois et son appareil judiciaire sont
liés par la Convention.
114. Le Comité accueille avec satisfaction la communication en date du 19 octobre
1999 que l'État partie a adressée au Secrétaire général de l'Organisation des
Nations Unies pour lui notifier l'extension de l'application de la Convention
à la Région administrative spéciale de Macao.
3. Facteurs et difficultés entravant l'application des dispositions de la
Convention
115. Les facteurs et difficultés entravant l'application de la Convention restent
les mêmes que ceux relevés par le Comité dans les conclusions qu'il a adoptées
à l'issue de l'examen du deuxième rapport périodique de la Chine.
4. Sujets de préoccupation
116. Le Comité est préoccupé par la persistance des allégations faisant état
d'affaires graves de torture, en particulier à l'encontre de Tibétains et de
membres d'autres minorités nationales.
117. Le Comité note avec préoccupation l'absence de données et statistiques
détaillées, ventilées par sexe concernant la torture et autres peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants.
118. Le Comité constate avec préoccupation que les réformes ne sont pas mises
en œuvre de manière uniforme et égale partout en Chine.
119. Les règles et pratiques suivies par certains parquets font que les poursuites
contre des individus suspectés de torture se limitent à certaines affaires graves,
ce qui constitue un sujet de préoccupation.
120. Le Comité est préoccupé par le système de peines administratives, qui autorise
des décisions extrajudiciaires de placement en détention d'individus n'ayant
pas violé la loi ou sans inculpation de ce chef.
121. L'absence de mécanisme uniforme et efficace d'examen des allégations de
torture est notée avec préoccupation.
122. Le Comité exprime sa préoccupation face aux renseignements selon lesquels
certains fonctionnaires locaux recourent à la coercition et à la violence pour
faire appliquer la politique de l'État partie en matière de population, ce en
contravention avec les dispositions pertinentes de la Convention.
5. Recommandations
123. Le Comité recommande à l'État partie d'incorporer dans sa législation une
définition de la torture qui soit pleinement conforme à celle qui figure dans
la Convention.
124. L'État partie est invité à envisager de faire, en ce qui concerne tant
sa partie continentale que la Région administrative spéciale de Hong Kong, les
déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention et de retirer sa
réserve à l'article 20, ainsi qu'à veiller à ce que l'article 20 reste applicable
à la Région administrative spéciale de Hong Kong.
125. Le Comité recommande à l'État partie de poursuivre le processus de réforme,
de veiller à la mise en œuvre uniforme et efficace des lois et pratiques nouvelles
et de prendre les autres mesures voulues à cette fin.
126. Le Comité recommande à l'État partie d'envisager l'abolition de la disposition
en vertu de laquelle un suspect ne peut durant sa garde à vue avoir accès à
un avocat qu'après en avoir demandé la permission, pour quelque raison que ce
soit.
127. Le Comité recommande à l'État partie d'envisager d'abolir, conformément
aux normes internationales pertinentes, toutes les formes de détention administrative.
128. Le Comité recommande à l'État partie de veiller à ce que toutes les allégations
de torture donnent lieu à une enquête rapide, approfondie, efficace et impartiale.
129. Le Comité encourage l'État partie à poursuivre et intensifier ses efforts
tendant à dispenser au personnel chargé de l'application des lois une formation
relative aux normes internationales en matière de droits de l'homme.
130. Le Comité recommande à l'État partie d'apporter, dans son prochain rapport
périodique, les réponses aux questions qu'il a été dans l'impossibilité de traiter
lors du présent examen et d'y faire figurer des statistiques détaillées, ventilées
notamment par sexe et par région.
Deuxième partie – Région administrative spéciale de Hong Kong
6. Facteurs et difficultés entravant l'application des dispositions de la
Convention
131. Le Comité note qu'il n'y a pas de facteurs ou de difficultés entravant
l'application de la Convention dus à la réintégration de la Région administrative
spéciale de Hong Kong à la Chine.
7. Aspects positifs
132. Le Comité exprime sa satisfaction au Gouvernement chinois pour les mesures
que celui-ci a prises afin que la Convention continue d'être appliquée dans
la Région administrative spéciale de Hong Kong, dont les autorités ont rédigé
certaines parties du rapport.
133. Le Comité se félicite que tous les réfugiés et migrants vietnamiens aient
été libérés, et que le centre de détention de Pillar Point ait été fermé.
134. Le Comité prend acte avec satisfaction de l'adoption de lois visant à faciliter
l'extradition des personnes soupçonnées d'avoir commis des actes de torture.
135. Le Comité relève comme un élément positif le renforcement de l'indépendance
du Conseil indépendant d'investigation des plaintes contre la police.
136. Le Comité se félicite que la peine maximale ait été relevée pour des crimes
sexuels comme l'inceste, et que le critère de corroboration ait été supprimé
en ce qui concerne les délits sexuels.
137. Le Comité prend note avec satisfaction de la mise en place de cours de
formation et autres mesures éducatives à l'intention du personnel chargé de
l'application des lois, et du fait que les interrogatoires des personnes arrêtées
sont enregistrés en vidéo.
8. Sujets de préoccupation
138. Le Comité note avec inquiétude que la possibilité pour une personne accusée
de torture d'invoquer pour sa défense "une autorisation, une justification
ou une excuse légitime", qui est prévue par la Crimes (Torture) Ordinance
(chap. 427), ainsi que la définition de l'agent public dans ce même texte, ne
sont pas pleinement conformes à l'article premier de la Convention.
139. Le Comité est préoccupé par le fait qu'il n'y a pas eu jusqu'ici de poursuites
en vertu de la Crimes (Torture) Ordinance, alors qu'ont été portées à son attention
des circonstances qui justifient de telles poursuites.
140. Il est jugé préoccupant que tous les cas de torture et d'autres peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ne tombent pas sous le coup de
la Crimes (Torture) Ordinance.
141. Il est noté avec préoccupation que les pratiques de la Région administrative
spéciale de Hong Kong concernant les réfugiés ne sont peut-être pas pleinement
conformes à l'article 3 de la Convention.
9. Recommandations
142. Le Comité recommande que les mesures nécessaires soient prises pour que
les auteurs de torture, telle qu'elle est définie à l'article premier de la
Convention, soient effectivement poursuivis et punis comme il convient, et que
des efforts soient faits pour prévenir les autres actes constitutifs de peine
ou de traitement cruel, inhumain ou dégradant, conformément aux dispositions
de la Convention.
143. Le Comité recommande de ne pas relâcher les efforts déployés pour que le
Conseil indépendant d'investigation des plaintes contre la police devienne un
organe statutaire, avec des pouvoirs élargis.
144. Le Comité recommande que soient poursuivies et intensifiées les mesures
préventives, y compris les programmes de formation des responsables de l'application
des lois.
145. Le Comité recommande que les lois et pratiques concernant les réfugiés
soient mises en pleine conformité avec l'article 3 de la Convention.