University of Minnesota



Comité contre la torture, Observation générale No. 01, Observation générale du Comité contre la torture sur l'application de l'article 3 dans le contexte de l'article 22 de la Convention contre la torture, U.N. Doc. A/53/44, Annex IX (1997).



OBSERVATION GÉNÉRALE NO 1

Application de l'article 3 dans le contexte de l'article 22
de la Convention contre la torture
*


Compte tenu des dispositions du paragraphe 4 de l'article 22 de la Convention, qui dispose que "le Comité examine les communications reçues en vertu de l'article 22 en tenant compte de toutes les informations qui lui sont soumises par ou pour le compte du particulier et par l'État partie intéressé",

Compte tenu des implications des dispositions du paragraphe 3 de l'article 111 du Règlement intérieur (CAT/C/3/Rev.2), et

Compte tenu de la nécessité de disposer de directives précises pour l'application de l'article 3, dans le cadre de la procédure prévue à l'article 22,

À sa dix-neuvième session, le Comité contre la torture a adopté, à sa 317e séance, le 21 novembre 1997, l'Observation générale ci-après devant guider les États parties et les auteurs de communications :

1. L'article 3 s'applique uniquement dans les cas où il y a des motifs sérieux de croire que l'auteur d'une communication risque d'être soumis à la torture telle qu'elle est définie à l'article premier de la Convention.

2. Le Comité est d'avis qu'à l'article 3 l'expression "autre État" désigne l'État vers lequel la personne concernée va être expulsée, refoulée ou extradée aussi bien que tout État vers lequel l'auteur peut être expulsé, refoulé ou extradé ultérieurement.

3. En application de l'article premier de la Convention, le critère énoncé au paragraphe 2 de l'article 3, à savoir l'existence "d'un ensemble de violations systématiques des droits de l'homme, graves, flagrantes ou massives", vise uniquement les violations commises par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite.

Recevabilité

4. Le Comité est d'avis que c'est à l'auteur qu'il incombe d'établir qu'à première vue sa communication est recevable au titre de l'article 22 de la Convention, en remplissant chacune des conditions énoncées à l'article 107 du Règlement intérieur.

Examen au fond

5. Pour ce qui est de l'application de l'article 3 de la Convention à l'examen d'un cas quant au fond, c'est à l'auteur qu'il incombe de présenter des arguments défendables. En d'autres termes, sa position doit être étayée par des faits suffisamment solides pour qu'une réponse de l'État partie soit nécessaire.

6. Étant donné que l'État partie et le Comité sont tenus de déterminer s'il y a des motifs sérieux de croire que l'auteur risque d'être soumis à la torture s'il est expulsé, refoulé ou extradé, l'existence d'un tel risque doit être appréciée selon des éléments qui ne se limitent pas à de simples supputations ou soupçons. En tout état de cause, il n'est pas nécessaire de montrer que le risque couru est hautement probable.

7. L'auteur doit prouver qu'il risque d'être soumis à la torture et que les motifs de croire que ce risque existe sont aussi sérieux qu'il est décrit plus haut et que le risque est encouru personnellement et actuellement. Chacune des deux parties peut soumettre toute information pertinente à l'appui de ses affirmations.

8. Les éléments suivants, qui ne constituent pas une liste exhaustive d'indicateurs applicables, seront pris en compte :

a) Y a-t-il dans l'État intéressé des preuves de l'existence d'un ensemble de violations systématiques des droits de l'homme, graves, flagrantes ou massives (voir par. 2 de l'article 3) ?

b) L'auteur a-t-il été torturé ou maltraité dans le passé par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite ? Dans l'affirmative, s'agit-il d'un passé récent ?

c) Existe-t-il des éléments de preuve de nature médicale ou d'autres éléments de preuve de sources indépendantes à l'appui des allégations de l'auteur qui affirme avoir été torturé ou maltraité dans le passé ? La torture a-t-elle laissé des séquelles ?

d) La situation visée à l'alinéa a) ci-dessus a-t-elle changé ? La situation interne en ce qui concerne les droits de l'homme a-t-elle changé ?

e) L'auteur s'est-il livré, à l'intérieur ou à l'extérieur de l'État intéressé, à des activités politiques qui font qu'il court un risque particulier d'être soumis à la torture s'il est renvoyé, refoulé ou extradé dans l'État en question ?

f) Existe-t-il des preuves de la crédibilité de l'auteur ?

g) Existe-t-il des incohérences factuelles dans ce que l'auteur affirme ? Si tel est le cas, ont-elles une incidence sur le fond ?

9. Étant donné que le Comité contre la torture n'est pas un organe d'appel ni un organe juridictionnel ou administratif, mais qu'il est un organe de surveillance créé par les États parties à la Convention eux-mêmes, doté uniquement de pouvoirs déclaratoires :

a) Le Comité accordera un poids considérable, dans l'exercice de ses compétences, en application de l'article 3 de la Convention, aux constatations de faits des organes de l'État partie intéressé; toutefois,

b) Le Comité contre la torture n'est pas lié par de telles constatations et est, au contraire, habilité, en vertu du paragraphe 4 de l'article 22 de la Convention, à apprécier librement les faits en se fondant sur l'ensemble des circonstances de chaque affaire.

* Figurant dans le document A/53/44, annexe IX.



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