V.X.N. et H.N. (noms supprimés) c. Suède, Communications Nos. 130/1999 et 131/1999, U.N. Doc. CAT/C/24/130 & 131/1999 (2000).
Présentée par : V. X. N. et H. N. (noms supprimés)
[représentés par un conseil]
Au nom : Des auteurs
État partie : Suède
Date de la communication : 15
février 1999
Le Comité contre la torture ,
institué conformément à l'article 17 de la Convention contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,
Réuni le 15 mai 2000,
Ayant achevé l'examen des communications
Nos 130/1999 et 131/1999 pré sentées au Comité contre la torture en vertu de
l'article 22 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants,
Ayant tenu compte de toutes les
informations qui lui ont été communiquées par les auteurs de la communication,
leur conseil et l'État partie,
Adopte les constatations suivantes
au titre du paragraphe 7 de l'article 22 de la Convention.
1.1Les auteurs de la communication sont
M. V.X.N., né le 1er décembre 1959, et M. H.N., né le 10 novembre 1963, deux
ressortissants vietnamiens résidant actuellement en Suède, où ils ont obtenu
le statut de réfugié et un permis de séjour permanent, les 18 ;août 1992 et
23 août 1991, respectivement. Les auteurs affirment qu'ils risquent d'être torturés
s'ils sont renvoyés au Viet Nam et que les renvoyer contre leur gré dans ce
pays constituerait de la part de la Suède une violation de l'article 3 de la
Convention. Les auteurs sont représentés par un conseil.
1.2Vu les similarités que présentent
ces deux communications, le Comité a décidé de les examiner ensemble.
1.3Conformément au paragraphe 3 de l'article
22 de la Convention, le Comité a, le 29 avril 1999, porté les communications
Nos 130/1999 et 131/1999 à l'attention de l'État partie. En application du paragraphe
9 de l'article 108 du règlement intérieur du Comité, il a été demandé à l'État
partie de ne pas expulser les auteurs vers le Viet Nam tant que leurs communications
seraient en cours d'examen par le Comité. Dans une correspondance en date du
27 mai 1999, l'État partie a fait savoir au Comité que les auteurs ne seraient
pas expulsés vers leur pays d'origine tant que leurs communications seraient
à l'examen devant le Comité.
Rappel des faits présentés
par les auteurs
Le cas de M. V.X.N.
2.1L'auteur de la première communication
(No 130/1999), M. V.X.N., indique avoir été admis en Suède en 1992, au titre
d'un contingent de réfugiés. En 1995, l'auteur a été, en application de la loi
suédoise, condamné à cinq ans de prison et à l'expulsion de Suède après avoir
purgé cette peine. L'auteur a é té libéré le 16 janvier 1999 et se trouve à
présent en instance d'expulsion vers le Viet Nam.
2.2L'auteur affirme que les membres de
sa famille, en particulier son pè re, ont collaboré avec le précédent régime
vietnamien. Après l'instauration du régime communiste, en 1975, les biens de
sa famille ont été confisqués et ses membres réinstallés de force dans une zone
de jungle aux conditions de vie difficiles. L'auteur indique avoir été condamné
à 12 ans de prison au début de 1976. Il aurait été condamné, en tant que citoyen
sud-vietnamien, pour ne s'être pas conformé à une décision des autorités nord-vietnamiennes
lui enjoignant ainsi qu'à ses parents et frères et sœurs de demeurer dans la
zone à laquelle ils avaient été assignés. Sa famille s'é tait en effet établie
dans une ville de la zone dans laquelle elle avait été réinstallée. Lors d'une
opération menée par la police en faisant usage de la force pour renvoyer cette
famille dans la jungle, l'oncle de l'auteur avait été tué par balles et son
père soumis à des brutalités. L'auteur affirme avoir été arrêté pour s'être
opposé à la police en s'emparant de l'arme de l'un des policiers avec pour résultat
une fusillade au cours de laquelle deux policiers auraient été tués et quatre
autres blessés.
2.3L'auteur dit avoir été d'abord incarcéré
dans un centre de détention pour prisonniers politiques avant d'être transféré
au bout d'environ deux semaines à la prison 24 Nguyen Cong Chu de Nha Trang,
où il aurait été détenu pendant huit mois sans qu'aucune procédure judiciaire
ne soit engagée. L'auteur affirme avoir été durant les deux premiers mois de
sa détention soumis quotidiennement à de graves actes de torture, sous forme
de coups qui lui auraient été portés à la tête, au dos et à la poitrine à l'aide
d'armes et de matraques alors qu'il avait les mains liées dans le dos. L'auteur
affirme en outre que la police avait menacé de l'exécuter. Les six mois suivants,
l'auteur aurait été détenu à l'isolement et obligé de demeurer allongé dans
son urine et ses excréments. Dans le dossier soumis par l'auteur figure un certificat
médical en date du 24 mars 1999 é tabli par le Service des victimes de blessures
de guerre et de torture de Göteborg, dans lequel il est indiqué que le récit
de l'auteur montre clairement qu'il s'agit d'une expérience vécue personnellement
et qu'il souffre d'un état de stress post-traumatique.
2.4L'auteur affirme qu'en raison de son
jeune âge la peine de mort prononcée à son encontre a été commuée en 12 ans
de prison. Au bout de neuf années d'emprisonnement – dont quatre de travaux
forcés – à la prison Dong Rang, il est parvenu à s'évader et à fuir le Viet
Nam, en 1986, après s'être caché pendant deux ans sur une île déserte. L'auteur,
accompagné de plusieurs autres personnes, a volé un bateau qui a été intercepté
dans les eaux territoriales vietnamiennes par des militaires vietnamiens qui
ont essayé de les empêcher de quitter le pays. Au cours de la poursuite, les
fugitifs ont échangé des coups de feu avec les militaires et plusieurs fugitifs
ont été blessés. L'auteur pense que plusieurs militaires ont également été blessés
et même probablement tués.
2.5L'auteur et sa famille ont fini par
atteindre les Philippines où ils ont été placés dans un camp de réfugiés. Grâce
à l'assistance du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR)
l'auteur et sa famille ont é té admis en Suède au titre d'un contingent de ré
fugiés et ont reçu un permis de séjour permanent en 1992.
2.6En 1995, la cour d'appel de Suède
occidentale a condamné l'auteur à cinq ans de prison et à l'expulsion dé ;finitive
du territoire suédois une fois cette peine purgée. L'auteur a été libéré le
26 janvier 1999 et ce même jour le Ministère suédois de la justice a décidé,
à la demande du HCR, de surseoir à l'exécution de l'ordonnance d'expulsion afin
de permettre au HCR de se faire sa propre opinion quant à la compatibilité de
ladite expulsion avec le paragraphe 2 de l'article 33 de la Convention de 1951
relative au statut des réfugiés.
Le cas de M. H.N.
3.1L'auteur de la seconde communication
(No 131/1999), M. H.N., affirme avoir été admis en Suède en 1991 au titre d'un
contingent de réfugiés. En 1995, en application de la loi suédoise, l'auteur
a été condamné à cinq ans de prison et à l' expulsion du territoire suédois
après avoir purgé cette peine. L'auteur a été libéré le 12 octobre 1998 et se
trouve à présent en instance d'expulsion vers le Viet Nam.
3.2L'auteur indique que son père, officier
d' un rang élevé dans les forces armées sud vietnamiennes en lutte aux côtés
des ÉtatsUnis, avait été assassiné par les Vietcongs en 1970. Aprè s la prise
du pouvoir par les NordVietnamiens en 1975, l'auteur n 'aurait pas été autorisé
à poursuivre sa scolarité primaire parce que fils de militaire sudvietnamien.
Lorsqu'il avait une vingtaine d'années, l'auteur aurait cré é, avec un petit
groupe d'amis partageant ses opinions, un mouvement de résistance au régime
communiste, dont l'activité consistait principalement à réaliser et apposer,
de nuit, des affiches hostiles au régime.
3.3L'auteur affirme également avoir été
arrêté ; puis envoyé dans un camp de travail vietcong, où il aurait, avec de
nombreux autres enfants de militaires sudvietnamiens, é té affecté à des travaux
de déminage. Nombre de ses compagnons auraient été tués ou blessés. Au bout
d'un mois, il serait parvenu à s'évader et à reprendre ses activités de résistance
dans la clandestinité.
3.4En 1985, au bout d'une année de clandestinité,
l'auteur aurait de nouveau été arrêté par les Vietcongs. Durant son interrogatoire,
il aurait été soumis à la torture, sous forme notamment de coups portés à la
poitrine avec un fusil jusqu'à son évanouissement. L'auteur affirme en outre
que le canon d'un fusil lui aurait été introduit dans la bouche et qu'il aurait
été menacé de mort. Les actes de torture se seraient poursuivis plusieurs jours
durant, l'auteur finissant par être hospitalisé. Bien que ligoté sur son lit
d'hô pital, l'auteur aurait réussi à s'évader. Dans le dossier soumis par l'auteur
figure un certificat médical en date du 1er avril 1999 établi par le Service
des victimes de blessures de guerre et de torture de Göteborg, dans lequel il
est indiqué que le récit de l'auteur donne à penser qu'il a effectivement vé
cu les faits relatés et qu'il a très probablement é té soumis à des actes de
torture et d' autres traitements cruels et inhumains dans son pays d'origine.
De septembre 1985 à août 1988, l'auteur et sa femme se seraient cachés dans
la montagne.
3.5En août 1988, l'auteur, son épouse,
leurs enfants et plusieurs autres compatriotes sont parvenus à quitter le Viet
Nam par bateau. Alors qu'ils se trouvaient toujours dans les eaux territoriales
vietnamiennes, des Vietcongs auraient tenté de les empêcher d'en sortir, ce
qui aurait déclenché une fusillade au cours de laquelle de nombreux fugitifs
auraient été blessés. L'auteur pense que plusieurs militaires ont également
été blessés et même probablement tués.
3.6L'auteur et sa famille ont fini par
atteindre, le 25 août 1988, les Philippines où ils ont été placés dans un camp
de réfugiés. Avec l'assistance du HautCommissariat des Nations Unies pour les
réfugiés (HCR), l'auteur et sa famille ont été admis en Suède au titre d'un
contingent de réfugiés et ont obtenu un permis de séjour permanent en 1991.
3.7En 1995, la cour d'appel de Suède
occidentale a condamné l'auteur à cinq ans de prison et à l' expulsion définitive
du territoire suédois après avoir purgé cette peine. L'auteur a été libéré le
12 octobre 1998. Le 26 janvier 1999, à la demande du HCR, le Ministère suédois
de la justice a décidé de surseoir à l'exécution de l'ordonnance d'expulsion
afin de permettre au HCR de déterminer la compatibilité de cette expulsion avec
le paragraphe 2 de l'article 33 de la Convention de 1951 relative au statut
des ré ;fugiés.
3.8À l'appui de leurs communications
individuelles respectives, les auteurs ont évoqué la situation générale des
droits de l'homme au Viet Nam, signalant qu'Amnesty International n'était pas
autorisée à travailler au Viet Nam et qu'il était en conséquence difficile de
recueillir des éléments susceptibles d' établir de manière probante l'ampleur
de la pratique de la torture dans ce pays. Amnesty International estime cependant
que l'usage de la torture par la police à l'encontre de personnes en garde à
vue et dans les prisons est chose courante.
Teneur de la plainte
4.Les auteurs affirment qu'en cas de
renvoi au Viet Nam, ils seront arrê tés par les autorités puis soumis à la torture
et condamnés à mort et que leur rapatriement contre leur gré dans ce pays constituerait
donc une violation par la Suède de l'article 3 de la Convention.
Observations de l'État partie
sur la recevabilité et le fond
5.1Dans ses mémoires du 3 septembre 1999,
l'État partie renvoie au paragraphe 5 a) de l'article 22 de la Convention, aux
termes duquel le Comité ne peut examiner de communication émanant d'un particulier
avant de s'être assuré que la même question n'a pas été examinée ou n'est pas
en cours d'examen par une autre instance internationale d'enquête ou de règlement.
Sur ce point, l'État partie signale au Comité que le HCR a dé jà examiné les
cas des auteurs. Dans une lettre datée du 16 mars 1999, le représentant régional
du HCR pour les pays baltes et les pays nordiques a indiqué au Ministère suédois
de la justice que l'expulsion des auteurs ne constituerait pas un manquement
à l'article 33 de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.
5.2En outre, l'État partie fait valoir
que les communications en question devraient être jugées irrecevables conformément
au paragraphe 2 de l'article 22 de la Convention, parce qu'incompatibles avec
ses dispositions pour insuffisance des arguments avancés pour justifier la requête.
Quant au fond, l'État partie estime que les communications en question ne font
apparaître aucune violation de la Convention.
5.3Toujours au sujet du fond des communications,
l'État partie signale au Comité qu'aux termes de la loi suédoise de 1989 sur
les étrangers, un étranger reconnu coupable d' une infraction pénale ne peut
être expulsé de Suède qu'à certaines conditions. Premièrement, l'étranger doit
avoir été condamné du chef d' une infraction sanctionnée par une peine de prison.
Deuxièmement, l'étranger condamné à une peine plus grave qu'une amende n' est
expulsable que a) si on peut supposer qu'il poursuivra son activité criminelle
en Suède ou b) si l'infraction revêt une gravité telle que l'étranger ne saurait
être autorisé à demeurer en Suède.
5.4L'État partie fait en outre valoir
que des conditions spé ciales s'appliquent aux étrangers considérés comme des
réfugiés. De tels étrangers ne peuvent être expulsés que s'ils ont commis une
infraction pénale particulièrement grave et si l'ordre et la sécurité publics
risquent d'être gravement compromis au cas où on les autoriserait à demeurer
en Suède. Aux termes de la loi de 1989 sur les étrangers, on ne peut en aucun
cas expulser un é tranger vers un pays dans lequel des motifs sérieux donnent
à croire qu'il risque d'y subir la peine capitale et des châtiments corporels
ou d'y être soumis à la torture ou d'autres peines ou traitements inhumains
ou dégradants.
5.5L'État partie confirme que les auteurs
ont obtenu un permis de séjour permanent et le statut de réfugié en Suède au
titre d'un contingent de réfugiés, en 1992 et 1991, respectivement. Conformément
à la pratique prévalant à l'époque dans l'État partie, ils ont été admis au
titre d'un contingent de réfugiés sans examen dé taillé des raisons les ayant
amenés à fuir. Le Service suédois de l'immigration a décidé d'accorder l'asile
aux auteurs suite à un entretien de ces derniers avec les autorités locales
de police.
5.6L'État partie signale en outre qu'en
avril 1995, les deux auteurs ont été condamnés par le tribunal de district de
Halmstad à six ans de prison pour viol avec circonstances aggravantes, commis
avec deux autres ressortissants vietnamiens. Les auteurs avaient été antérieurement
reconnus coupables à plusieurs reprises d'actes de violence. Compte tenu du
statut de ré fugié des auteurs, le tribunal de district a rejeté la demande
d'expulsion de Suède formulée par le parquet. Les deux auteurs ainsi que le
parquet ont fait appel du jugement devant la cour d'appel de Suède occidentale.
5.7À l'issue d'une audience à laquelle
les auteurs ainsi qu'un membre du parquet étaient présents, la cour d' appel
a estimé réunies les conditions requises pour une expulsion. Dans son arrêt
du 15 juin 1995, la cour d'appel a ramené la peine à cinq ans de prison et ordonné
l' expulsion des auteurs du territoire suédois une fois purgée cette peine.
Les auteurs se sont pourvus devant la Cour suprême qui a refusé de se saisir
de leur pourvoi. M. V.X.N. a été reconnu coupable de coups et blessures, coups
et blessures graves et viol, devant purger une peine de cinq ans de prison.
M. H.N. a quant à lui été reconnu coupable de complicité de viol.
5.8En décembre 1998, l'ambassade du Viet
Nam à Stockholm a fait savoir au Ministère suédois des affaires é trangères
que le Ministère vietnamien de la sécurité ; publique avait accepté le rapatriement
des auteurs.
5.9Suite à une requête formée par le
HCR en janvier 1999, le Ministère de la justice a décidé de surseoir à l'exécution
de l'ordonnance d'expulsion, dans l'attente de l ' avis du représentant régional
du HCR pour les pays baltes et les pays nordiques quant à la compatibilité de
cette expulsion avec le paragraphe 2 de l'article 33 de la Convention de 1951
relative au statut des réfugiés, aux termes duquel la protection contre le refoulement
ne peut être invoquée "par un ré fugié qu'il y aura des raisons sérieuses de
considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui,
ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement
grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays". Le 16 mars 1999,
le HCR a indiqué au Ministère de la justice que la dé cision d'expulser les
auteurs ne constituait pas une violation de la Convention de 1951 relative au
statut des réfugiés.
5.10L'État partie a en outre fait savoir
au Comité que depuis janvier 1999, M. V.X.N. avait à trois reprises demandé
aux autorités d'annuler l'ordonnance d'expulsion, ou tout du moins de lui accorder
un permis de séjour temporaire. Au moment de l'é tablissement du mémoire de
l'État partie, deux de ces demandes avaient été rejetées, la troisième étant
en instance d'examen. Depuis janvier 1998, M. H.N. a adressé six demandes analogues
aux autorités. Au moment de l'établissement du mémoire de l'État partie, cinq
de ces demandes avaient é té rejetées, la sixième étant encore en instance d'examen.
5.11L'État partie souligne que, pour
déterminer si le rapatriement contre leur gré des auteurs au Viet Nam constituerait
un manquement à l'article 3 de la Convention, il faut tenir compte des éléments
suivants : a) la situation générale des droits de l'homme au Viet Nam et b)
le risque que les auteurs encourent à titre personnel d'être soumis à la torture
en cas de retour au Viet Nam.
5.12L'État partie fait valoir que la
cour d'appel a, dans son arrê t du 15 juin 1995 selon lequel il n'existait aucun
empêchement à l'expulsion des auteurs, tenu compte de l'avis du Service sué
dois de l'immigration estimant qu' il n'existait aucun empêchement d' ordre
général à l'expulsion de personnes ayant fui le Viet Nam. S'agissant des empêchements
d' ordre individuel, le Service suédois de l' immigration a estimé que les rares
éléments disponibles concernant la situation particulière des auteurs ne faisaient
apparaître aucun empêchement de ce type. De plus, les auteurs ont de nouveau
été interrogés par le Service suédois de l' immigration les 21 mai et 1er juin
1999, à la demande du Ministère de la justice, mais aucun empêchement à ; leur
expulsion n'a été mis en évidence à cette occasion.
5.13Pour ce qui est de la situation générale
des droits de l'homme au Viet Nam à l'heure actuelle, l'État partie fait valoir
que les renseignements émanant de diverses sources internationales et autres,
comme Amnesty International, le Dé partement d'État des ÉtatsUnis d'Amérique
et l'ambassade de Suède à Hanoi, faisaient apparaître que des améliorations
sensibles avaient été apportées dans certains domaines même si de sérieux problèmes
persistaient, concernant en particulier l'exercice de la liberté d' expression,
de réunion et d'association et de la liberté religieuse. Les arrestations et
détentions arbitraires demeurent chose assez fréquente et les conditions de
détention sont pénibles, mais il est rarement fait état d'actes de torture sur
la personne de détenus. Des brutalités policières sont parfois signalées, mais
aucun élément ne prouve que la torture constitue une pratique systématique et
que des prisonniers soient soumis à la torture.
5.14L'État partie signale en outre que
le fait d' être sorti illégalement du Viet Nam dans les anné es 80 n'est désormais
plus considéré comme une infraction. La plupart des personnes ayant quitté le
pays illégalement à cette époque y ont à présent été rapatriées avec l'assistance
du HCR. Un grand nombre de personnes de retour sont originaires de la même région
du Viet Nam que les auteurs. Plusieurs des personnes rapatriées contre leur
gré ont purgé des peines de prison pour des infractions commises dans des pays
de premier asile, mais selon le HCR aucun élément n'indique qu'elles fassent
l'objet de représailles ou de discrimination à leur retour. L'État partie souligne
par ailleurs que la majorité des quelque 500 rapatriés ayant fait l'objet de
poursuites à leur retour du chef d'infractions pénales commises avant leur départ
du Viet Nam ont é té condamnés pour des actes de violence et qu'aucun ne l'a
été pour des infractions politiques. Des membres du HCR ont pu se rendre auprès
de la totalité de ces personnes et s'entretenir en privé avec elles. Enfin,
l'État partie souligne que plusieurs enfants d'anciens dirigeants des forces
armées sud-vietnamiennes effectuent des déplacements entre la Suède et le Viet
Nam sans rencontrer de difficultés de la part des autorités vietnamiennes.
5.15Pour ce qui a trait aux risques encourus
personnellement par les auteurs d'être soumis à la torture, l'État partie rappelle
que, conformément à la jurisprudence du Comité, ce risque doit être prévisible,
réel et personnel, et fait valoir ce qui suit.
Le cas de M. V.X.N.
6.1L'État partie rappelle que l'auteur
a invoqué trois raisons différentes pour lesquelles il courait le risque d'être
soumis à la torture en cas d'expulsion vers son pays d'origine. Premièrement,
il affirme craindre d'être arrêté et torturé par les autorités pour s'être évadé
d ' une prison où il purgeait une peine de 12 ans pour avoir tué deux policiers
et blessé quatre autres. Deuxièmement, certains des soldats lancés à la poursuite
du bateau sur lequel l' auteur et d' autres personnes tentaient de fuir le Viet
Nam pourraient avoir é té blessés ou tués par balles lors d' un échange de coups
de feu avec les fugitifs. Troisièmement, l'auteur a indiqué avoir reçu des menaces
de mort du propriétaire du bateau qu'il avait volé pour s'enfuir. L'É tat partie
fait observer au Comité que l'auteur de la communication n'a appartenu à aucune
organisation politique et n'a mené aucune activité politique dans son pays d'origine.
6.2L'État partie fait valoir que durant
l'examen du dossier de l'auteur, des contradictions, incohérences et invraisemblances
concernant des points essentiels ont suscité des doutes sérieux quant à la crédibilité
des dires de l'auteur. Tout d'abord, l'auteur ne semble avoir soulevé la question
de la torture pour la premiè ;re fois que dans la communication adressée au
Comité au début de 1999. Lors de son entretien avec les autorités locales de
police en 1992, l'auteur n'a pas, selon l'État partie, indiqué avoir été victime
de mauvais traitements ou d'actes de torture ou craindre d'être torturé en cas
de rapatriement. Pareillement, il n'a été question de torture ni dans le cadre
des procédures devant le tribunal de district et la cour d'appel, ni dans la
demande d'autorisation de faire appel adressée à la Cour suprême, ni dans la
demande d' annulation de l'arrêt d'expulsion adressée au Gouvernement en ;janvier
1999.
6.3Tout en prenant acte du certificat
médical produit par l'auteur à l'appui de sa demande, l'État partie souligne
les incohé rences que présente le récit de l'auteur concernant la nature et
la gravité des actes de torture dont il aurait été victime. Lors de l'examen
médical de mars 1999, l'auteur a affirmé avoir été placé en détention provisoire
pendant huit mois et avoir été torturé quotidiennement au cours des deux premiers
mois de sa détention. Lors d ' un entretien avec des fonctionnaires du Service
suédois de l'immigration le 21 mai 1999, l'auteur a dit avoir été torturé ;
quotidiennement pendant un mois puis trois fois par semaine par la suite. Enfin,
lors de son dernier entretien avec le Service suédois de l' immigration, le
1er juin 1999, l'auteur a déclaré avoir été détenu à titre provisoire pendant
six mois et torturé presque tous les jours. De plus, la description par l'auteur
des actes de torture présumés s'est faite de plus en plus dramatique au fur
et à mesure de l' avancement de la procédure. À l'origine, l'auteur n'avait
mentionné que des coups, notamment des coups de pied, alors que dans son dernier
entretien il a pour la première fois signalé l'application de décharges électriques
et le fait d'avoir é ;té forcé à boire de l'eau additionnée de dé tergent.
6.4L'État partie fait observer au Comité
qu'au cours de l'entretien initial avec les autorités locales de police, en
1992, l'auteur n'a pas signalé avoir été condamné à ; 12 ans de prison et s'être
évadé. À cette époque, il a indiqué avoir tenté de fuir le Viet Nam en mars
1981 et avoir été condamné pour cette tentative à trois ans de prison, peine
qu'il avait purgée. Selon ses dires de 1992, l'auteur aurait une nouvelle fois
tenté de quitter le pays en octobre 1984 mais aurait été condamné à 2 ans et
10 jours de prison après avoir été intercepté. Dans la demande soumise au Gouvernement
en janvier 1999, il indique avoir été condamné à 12 ans de prison pour s'être
enfui du lieu de résidence assigné à sa famille en pleine jungle et avoir participé
à l'organisation d'un groupe ayant pour but d'aider à s'évader d'autres personnes
se trouvant encore dans la jungle. Il a affirmé avoir été ensuite capturé avec
quatre autres personnes, dont trois auraient été condamnées à mort et une à
; 17 ans de prison. L'État partie note en outre que l'auteur n'a apporté aucun
élément permettant d'établir la véracité de l'affirmation selon laquelle il
aurait é té condamné à 12 ans de prison.
6.5L'État partie mentionne d'autres invraisemblances
et incohé rences, constatant par exemple que si les dires les plus récents de
l'auteur sont véridiques, ses trois premiers enfants doivent avoir été conçus
en prison, et que trouver une île inhabitée dans la région où l'auteur prétend
s'être caché après son évasion est invraisemblable. L'État partie soutient que
ces incohérences constituent autant de raisons de mettre en doute la crédibilité
et la vé racité des actes de torture subis et de l' évasion allégués par l'
auteur dans sa première demande pour la motiver.
6.6À propos des incohérences susmentionnées,
l'État partie souligne que les trois entretiens avec l'auteur se sont dé roulés
en présence d'un interprète vietnamien et que l'auteur a affirmé avoir bien
compris cet interprète.
6.7Concernant les circonstances dans
lesquelles l'auteur aurait fui le Viet Nam, l'État partie fait observer au Comité
que c' est uniquement dans sa communication au Comité et dans la demande d'
annulation adressée au Gouvernement que l' auteur a signalé que des soldats
poursuivant le bateau de fugitifs avaient été blessés ou tués, et qu'aucune
information dans ce sens n'avait été fournie lors de l'entretien initial avec
la police, lors de la procédure judiciaire et lors de l'entretien avec le Service
suédois de l'immigration, en mai 1999. Pour l'État partie, cela signifie que
l'auteur n'attache pas une importance particulière à ces circonstances et ne
craint pas qu'elles aient des conséquences graves pour lui, d'autant plus qu'il
n 'a jamais été affirmé que l'auteur était personnellement responsable de la
fusillade, ou soupçonné de l'être. En outre, l'État partie souligne que les
récits signalant des échanges de coups de feu lors de tentatives de fuite du
Viet Nam dans les années 80 sont certes nombreux mais qu'en l'occurrence il
a été impossible de déterminer la véracité de l'affirmation en cause.
6.8S'agissant du risque encouru par l'auteur
de faire l'objet de mauvais traitements de la part d'un particulier, à savoir
le propriétaire du bateau que l'auteur aurait volé pour s'enfuir, l'État partie
rappelle la définition de la torture figurant dans l'article premier de la Convention,
ainsi que les constatations du Comité relatives à l'affaire G.R.B .
c. Suède (communication No 83/1997) adoptées le 15 mai 1998. L'É ;tat
partie estime que le risque de mauvais traitements par un particulier, sans
le consentement exprès ou tacite du Gouvernement du pays vers lequel l'expulsion
doit avoir lieu, est en dehors du champ d'application de l'article 3 de la Convention.
6.9L'État partie souligne que selon l'ambassade
de Suède à Hanoi, rien n'indique que les autorités vietnamiennes portent à l'heure
actuelle un intérêt particulier à l'auteur. L'auteur n'a produit aucun élément
de preuve à l'appui de l'affirmation selon laquelle il serait recherché par
la police suite à sa fuite du Viet Nam. Renouvelant ses doutes quant à la véracité
des affirmations de l'auteur, l'État partie estime que même à supposer que cette
information soit cré dible et que l'auteur soit effectivement susceptible d'être
arrê té et emprisonné à son retour, le risque d'arrestation et d'incarcération
ne suffirait pas en tant que tel à justifier la protection absolue prévue par
l'article 3 de la Convention. Dans ce contexte, l'État partie rappelle que peu
d'éléments probants attestent la pratique de la torture au Viet Nam.
6.10Enfin, l'État partie signale au Comité
qu'un des ressortissants vietnamiens condamnés pour viol collectif lors du mê
;me procès que l'auteur a été expulsé vers le Viet Nam en avril 1998 et que
les renseignements reçus par l'État partie au sujet de la situation actuelle
dudit individu, qui affirmait avoir quitté illégalement le pays et avoir commis
une infraction en liaison avec sa fuite, ne donnent pas à penser qu'il ait été
maltraité par les autorités vietnamiennes depuis son retour.
Le cas de M. H.N.
7.1L'État partie rappelle que l'auteur
a invoqué trois raisons différentes pour lesquelles il risquerait d'être torturé
en cas d'expulsion vers son pays d'origine. Selon ses dires, il sera arrê té
et torturé par les autorités pour s'être évadé d'un camp de travail où il avait
été affecté à des travaux de déminage. L'auteur affirme en outre avoir appartenu
à un mouvement de résistance et être soupçonné d'implication dans des activités
subversives, telles que l'apposition d'affiches. Enfin, l'auteur affirme craindre
de faire l'objet de représailles pour la mort de plusieurs policiers en liaison
avec sa fuite du Viet Nam. En effet, certains des soldats lancés à ; la poursuite
de l'auteur et d'autres personnes tentant de quitter le Viet Nam à bord d'un
bateau pourraient avoir été blessés ou tués lors d'une fusillade avec les fugitifs.
7.2L'État partie constate que l'auteur
a affirmé avoir é té arrêté et torturé en 1985. Selon le certificat médical
délivré par le psychiatre ayant examiné l'auteur en avril 1999, ce dernier a
très vraisemblablement été soumis à la torture et à d'autres traitements cruels
et inhumains dans son pays. L'État partie fait cependant observer au Comité
que ce certificat ne mentionne ni troubles liés à un état de stress post-traumatique
ni traces visibles de torture.
7.3L'État partie signale que lors de
l'examen de cette affaire un certain nombre de contradictions et d'incohérences
se rapportant à ; certains points essentiels ont suscité des doutes sérieux
quant à la crédibilité des affirmations de l'auteur. L'attention du Comité est
appelée sur le fait que, lors de son entretien avec la police en 1991, l'auteur
n'a pas signalé avoir é ;té arrêté et torturé au Viet Nam. Il n'a pas davantage
abordé la question de la torture ni devant le tribunal de district, ni devant
la cour d'appel, ni dans sa demande d'autorisation de se pourvoir devant la
Cour suprême. C'est uniquement dans sa requête au Gouvernement de janvier 1998
qu'il affirme avoir été torturé dans le passé et craindre d'être emprisonné
en cas d'expulsion.
7.4L'État partie relève en outre que
l'auteur a donné plusieurs versions différentes des faits en raison desquels
il avait été arrêté et torturé par la police en 1985 : a) dans sa requête au
Gouvernement de janvier 1998 il a déclaré avoir été découvert alors qu'il préparait
sa fuite du Viet Nam; b) selon le rapport médical d'avril 1999, il aurait été
torturé lors d'un interrogatoire pour lui arracher les noms de ses compagnons
de ré sistance; c) au cours de son entretien avec un fonctionnaire du Service
suédois de l'immigration en mai 1999, l'auteur avait affirmé avoir été arrêté
pour port d'arme et pour é vasion d'un camp de déminage; d) en juin 1999, il
avait dé claré au Service suédois de l'immigration avoir été soupçonné d'activités
subversives et de pose d'affiches; e) dans la communication adressée au Comité,
l'auteur dé clare avoir été torturé pour s'être é vadé d'un camp de déminage.
7.5L'État partie fait observer au Comité
que, lors d'un entretien avec la police en 1991, l'auteur a indiqué avoir été
astreint à des travaux pénibles dans un endroit où il y avait des mines sans
mentionner s'être évadé d'un camp de déminage. Lors de l'entretien de juin 1999,
l'auteur a dé claré risquer d'être torturé à son retour au Viet Nam pour avoir
abattu des policiers et appartenu à un groupe d'opposants au régime. Vu que
l'auteur n'a pas expressément avancé son évasion d'un camp de déminage comme
motif lui faisant craindre d'être torturé, l'État partie en conclut qu'il n'est
pas intimement convaincu que ce fait puisse avoir de graves consé quences pour
lui. L'État partie relève de surcroît que rien ne permet d'affirmer qu'un acte
de ce genre soit considéré comme un délit punissable au Viet Nam aujourd'hui,
et encore moins comme un délit emportant une peine d'emprisonnement.
7.6S'agissant des activités supposées
de l'auteur au sein d'un mouvement de résistance, l'État partie relève qu'au
cours de l'entretien initial, en 1991, l'auteur n'a pas mentionné sa participation
à des activités politiques. L'État partie constate en outre que les activités
politiques en question ne sont pas mentionnées expressément dans la communication
adressée par l'auteur au Comité et n'apparaissent que dans le certificat mé
;dical établi en avril 1999 à l'appui de sa requête. Le rapport médical précise
en outre que l'auteur affirme avoir été membre d'un mouvement organisé de résistance
et avoir été arrêté pour activités hostiles à l'État et placé dans un camp de
travail dont il s'était évadé. Après cette évasion il aurait rejoint ce mouvement
de résistance avant d'être à nouveau arrêté et torturé. L'État partie relève
à ce propos que lors d'un entretien avec le Service suédois de l'immigration,
en mai 1999, l'auteur a déclaré être le fondateur de ce mouvement de résistance,
qui aurait compté cinq membres.
7.7S'ajoutant aux incohérences exposées
plus haut, l'État partie signale que l'auteur a déclaré au Service de l'immigration
que les autorités vietnamiennes l'auraient exécuté si elles avaient été au courant
de l'existence de son mouvement de résistance, ce qui, selon l'État partie signifie
à l'évidence que ce mouvement était inconnu desdites autorité ;s. En outre,
l'État partie fait valoir que selon les informations dont dispose le HCR et
des organisations de défense des droits de l'homme sur la région de Nha Trang,
on n'aurait jamais entendu parler dans cette ville d'un mouvement de résistance
armée ou d'un groupe quelconque de résistants ayant posé des affiches dans la
rue. L'État partie souligne de plus que les autorités vietnamiennes n'auraient
à présent plus guère d'inté ;rêt à punir une personne pour avoir réalisé et
diffusé des affiches hostiles au régime voilà près d'une quinzaine d'années.
7.8Au sujet des circonstances dans lesquelles
l'auteur a fui le Viet Nam, l'État partie fait observer au Comité que lors de
son entretien initial avec la police, en 1991, l'auteur n'avait pas mentionné
avoir ouvert le feu sur des policiers lors de sa fuite. Ce n'est que dans la
requête adressée au Gouvernement en juillet 1998 et lors des entretiens ultérieurs
que l'auteur a déclaré avoir tué par balles un ou plusieurs policiers. L'État
partie pré ;cise que, selon l'auteur, un grand nombre de personnes se trouvaient
avec lui à bord du bateau sur lequel il s'était enfui depuis une grande ville
et qu'il y régnait une grande confusion. Dans de telles circonstances, il serait
étonnant, selon l'État partie, que la police soit capable d'identifier le ou
les auteurs des coups de feu. En outre, l'État partie signale au Comité que
l'auteur n'a pas dé claré être recherché par la police à la suite de ces homicides
supposés et que rien ne permet d'affirmer qu'un mandat d'arrêt ait été décerné
à son encontre.
7.9L'État partie soutient en outre que
l'auteur a fourni des informations incohérentes et contradictoires, notamment
au sujet de sa famille au Viet Nam et concernant la question de savoir si sa
femme était ou non à ses côtés alors qu'il se cachait pour échapper aux autorités
entre 1985 et 1988.
7.10Au sujet des incohérences susmentionnées,
l'État partie indique que les trois entretiens avec l'auteur se sont dé roulés
en présence d'un interprète vietnamien, tout en reconnaissant que lors du dernier
entretien avec le Service de l'immigration, en juin 1999, l'auteur avait signalé
que l'interprète s'exprimait dans un dialecte autre que le sien et ne pas avoir
compris le sens de certaines phrases, sans préciser lesquelles. L'État partie
souligne toutefois que l'interprète n'a é prouvé aucune difficulté à comprendre
l'auteur et qu'à sa connaissance les Vietnamiens s'exprimant dans des dialectes
différents parviennent à se comprendre sans grande difficulté.
7.11L'État partie indique que, selon
l'ambassade de Suède à ; Hanoi, rien ne permet de supposer que les autorités
vietnamiennes portent encore à l'auteur un intérêt quelconque aujourd'hui. L'auteur
n'a apporté aucune preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles il serait
recherché par la police suite à sa fuite du Viet Nam. Réaffirmant ses doutes
quant à la véracité des déclarations de l'auteur, l'État partie estime que même
si cette information était crédible, elle ne suffirait pas à justifier la protection
totale prévue à l'article 3 de la Convention (voir plus haut, par. 6.9).
7.12En conclusion, l'État partie évoque
le cas d'un autre ressortissant vietnamien reconnu coupable de viol collectif
lors du même procès que l'auteur et expulsé de Suède vers le Viet Nam en avril
1998 (voir plus haut, par. 6.10).
Observations supplémentaires
de l'État partie
8.1Dans ses mémoires complémentaires
en date des 5 et 19 octobre 1999, l'État partie appelle l'attention du Comité
sur une lettre adressée par le Ministère vietnamien de la sécurité publique
à l'ambassade de Suède à Hanoi, dans laquelle ce ministère signale qu'aucun
des auteurs ne possède de casier judiciaire au Viet Nam.
8.2L'État partie ajoute que le second
ressortissant vietnamien expulsé vers son pays d'origine, après avoir purgé
une peine de prison en Suède pour un crime commis en association avec les auteurs,
a adressé au Gouvernement suédois une demande de regroupement familial en Suède.
L'État partie précise à l'intention du Comité qu'avant son expulsion, cet individu
avait affirmé avoir été accusé du vol d'une vedette de la police et avoir tué
deux policiers lors de sa fuite du Viet Nam. Il avait de plus affirmé avoir
été emprisonné à trois reprises au Viet Nam et torturé. L'État partie signale
au Comité que dans sa nouvelle demande de regroupement adressée plus d'un an
après son rapatriement au Viet Nam, ledit individu ne dit pas avoir été inquiété
par les autorités vietnamiennes depuis son retour.
Commentaires du conseil
9.1Le conseil réfute la conclusion de
l'État partie selon laquelle les communications de l'auteur doivent être déclaré
;es irrecevables en vertu du paragraphe 5 a) de l'article 22 de la Convention,
en faisant valoir que la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés
ne prévoit aucune procédure HCR internationale d'enquête ou de règlement. En
outre, la question soulevée par le représentant régional du HCR pour les pays
baltes et les pays nordiques se rapportait à la compatibilité de l'arrêt d'expulsion
avec l'article 33 de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et
non pas au point dont est saisi le Comité, à savoir si l'auteur risque d'être
torturé à son retour au Viet Nam.
9.2Le conseil précise à l'intention du
Comité que le Ministère vietnamien de la sécurité publique avait bien accepté
le rapatriement des auteurs en décembre 1998, mais que le Viet Nam avait opposé
son refus à un tel rapatriement quelques mois auparavant. Selon un journal suédois,
ce refus tiendrait à ce que les auteurs étaient accusés d'avoir commis de graves
infractions au Viet Nam avant de fuir le pays.
9.3S'agissant des entretiens des auteurs
avec le Service suédois de l'immigration, en mai et juin 1999, le conseil fait
observer au Comité qu'ils se sont déroulés à un moment où ; les auteurs avaient
déjà adressé leurs communications respectives au Comité et où lui-même avait
soumis au Ministère de la justice une requête dans laquelle il indiquait notamment
que l'avis écrit rendu par le Service suédois de l'immigration ayant servi de
fondement à l'arrêt d'expulsion à l'encontre des auteurs prononcé par la cour
d'appel ne contenait que des constatations d'ordre général.
9.4Le conseil rappelle que lors de leur
entretien initial avec la police, en 1992 et 1991 respectivement, les deux auteurs
étaient déjà admis en Suède au titre d'un contingent de réfugiés et n'avaient
pas obtenu l'asile dans les mêmes circonstances que les demandeurs d'asile arrivant
habituellement en Suède. À cette occasion, on ne leur avait pas demandé s'ils
avaient subi des tortures et des mauvais traitements au Viet Nam ou s'ils risquaient
d'avoir des ennuis en cas de retour dans leur pays.
9.5Au sujet du premier auteur, M. V.X.N.,
le conseil indique que la question de savoir s'il avait été torturé ou risquait
de l'être en cas de retour n'avait à aucun moment été abordée ni par les magistrats
ni par l'avocat de la défense au cours de la procédure judiciaire et qu'en l'occurrence
l'auteur ne pensait pas ce point susceptible de présenter un quelconque inté
rêt. Dans le cas de M. H.N., en revanche, le conseil indique que ce point a
été porté à l'attention du tribunal de district par l'avocat de la défense.
Pour motiver sa décision de ne pas extrader les auteurs, le tribunal s'était
toutefois uniquement fondé sur le fait que malgré l'amélioration considé rable
de la situation observée depuis quelque temps au Viet Nam on ne pouvait affirmer
que les prévenus n'étaient plus des ré fugiés. Si l'avocat de la défense n'avait
pas invoqué devant la cour d'appel la crainte des auteurs d'être torturés à
leur retour au Viet Nam, c'est parce qu'il pensait, compte tenu de la décision
prise par le tribunal de district, que la cour d'appel ne statuerait pas dans
le sens de l'expulsion.
9.6Le conseil fait en outre observer
au Comité que si un interprè te vietnamien était effectivement présent à tous
les entretiens, les auteurs avaient signalé que des différences considérables
existaient entre les dialectes parlés dans le nord et dans le sud du Viet Nam.
Le Service suédois de l'immigration fait habituellement appel à des interprètes
originaires du nord du pays alors que les auteurs viennent du sud. Selon le
conseil, cette difficulté explique certaines des incohérences mentionnées par
l'État partie.
9.7En réponse à l'affirmation de l'État
partie selon laquelle il n'avait dans aucun cas été possible d'établir la véracité
des nombreux récits faisant état de fusillades entre personnes tentant de fuir
le Viet Nam et poursuivants dans les années 80, l'avocat estime qu'il ne saurait
en aller autrement vu que les ressortissants vietnamiens déjà rapatriés au Viet
;Nam n'avaient aucun intérêt à ce que ces rumeurs soient confirmées et qu'on
ne pouvait attendre du HCR qu'il enquête et recueille des preuves de la culpabilité
de personnes auxquelles il est censé venir en aide.
9.8Le conseil fait observer que l'allusion
faite par l'État partie dans ses observations initiales et ses observations
supplémentaires en date du 19 octobre 1999 au cas de deux autres ressortissants
vietnamiens dé jà rapatriés au Viet Nam ne devrait pas être prise en considération
par le Comité, toutes les demandes d'asile devant être examinées au cas par
cas.
9.9S'ajoutant à ces observations applicables
aux deux auteurs, le conseil fait valoir ce qui suit concernant les fonds respectifs
de ces deux communications.
Le cas de M. V.X.N.
10.1Le conseil estime que dans son appréciation
des risques encourus par l'auteur, l'État partie n'accorde pas suffisamment
d'importance aux résultats de l'examen médical. En effet, les souffrances physiques
que l'auteur affirme avoir endurées sont telles qu'elles peuvent expliquer les
incohérences que présente selon l'É tat partie le récit fait par l'auteur des
actes de torture dont il a été victime et sur lequel l'État partie se fonde
pour mettre en doute la crédibilité de l'auteur.
10.2Le conseil note que l'État partie
a fait valoir que l'auteur n'avait produit aucune pièce (copie du jugement)
prouvant qu'il avait effectivement été condamné à 12 ans de prison et a relevé
certaines invraisemblances concernant le séjour en prison de l'auteur et son
évasion. Le conseil indique que voilà 23 ans au Viet Nam le jugement n'avait
pas été communiqué directement à l'auteur mais remis à l'avocat chargé de sa
défense, dont il avait oublié le nom depuis. L'auteur avait cependant fourni
des détails concernant le procès proprement dit, à savoir qu'il avait eu lieu
dans la ville de Nha Trang et que l'enquête avait été effectuée par le canton
de Khanh Hoa.
10.3Pour ce qui est des "invraisemblances"
signalées par l'État partie, le conseil fait valoir qu'il n'y a aucune raison
de mettre en doute les affirmations de l'auteur selon lesquelles ses trois premiers
enfants ont été conçus pendant sa période de détention. Pour être autorisés
à partager quelques moments d'intimité avec leur épouse à l'occasion d'une visite,
malgré le règlement l'interdisant, les prisonniers avaient en effet la possibilité
de soudoyer les gardiens. S'agissant des doutes émis par l'État partie quant
à la possibilité pour l'auteur d'avoir trouvé dans la région considérée une
île inhabitée où se cacher après son évasion de prison, il est très facile de
confirmer l'existence, au large de Nha Trang, de l'île pratiquement inhabitée
de Vung Me sur laquelle l'auteur affirme s'être caché.
10.4Le conseil précise en outre que les
déclarations attribuées à l'auteur au cours du premier entretien, en 1992, concernant
sa condamnation à une peine d'emprisonnement résultent d'un malentendu tenant
à ce que suite à sa condamnation de 1976, l'auteur avait été incarcéré dans
trois é tablissements pénitentiaires différents pour y purger sa peine avant
de s'évader au bout de neuf ans. Le conseil affirme que toutes les autres incohérences
relevées dans les affirmations de l'auteur concernant les actes de torture à
son encontre, sa condamnation, son emprisonnement et son évasion sont sans incidence
quant au fond et qu'il convient de prendre en considération l'intervalle considérable
de temps s'étant écoulé depuis ces évé nements.
10.5Le conseil affirme en outre que la
protection prévue à l'article 3 de la Convention ne s'applique pas seulement
au risque d'être soumis à la torture par les autorités vietnamiennes, mais aussi
au cas où les autorités ne seraient pas en mesure de fournir à un individu une
protection suffisante contre des agissements criminels sur le territoire vietnamien.
Le conseil renvoie à ce propos à la jurisprudence de la Cour européenne des
droits de l'homme.
10.6Enfin, se référant aux observations
supplémentaires de l'État partie en date du 5 octobre 1999, le conseil affirme
que les renseignements fournis par les autorités vietnamiennes au sujet du casier
judiciaire de l'auteur sont inexacts et que l'auteur a bien été condamné en
1976 à 12 ans de prison par un tribunal de Nha Trang.
Le cas de M. H.N.
11.1Le conseil estime que les incohérences
relevées par l'É ;tat partie dans les informations fournies par l'auteur participent
davantage de l'exégèse que du fond puisqu'elles peuvent tout simplement s'expliquer
par le fait que l'on a fait appel à des interprètes différents à chaque entretien
avec l'auteur ou par la maniè ;re dont ses déclarations ont été consignées en
ces différentes occasions. Le conseil se réfère notamment à l'affirmation de
l'État partie selon laquelle la requête déposée par l'auteur auprès du Gouvernement
en janvier 1998, dans laquelle il affirme avoir été découvert alors qu'il préparait
en secret son départ du Viet Nam puis avoir été arrêté et torturé, amoindrirait
sa crédibilité. Le conseil fait valoir que ces déclarations ne sont nullement
contradictoires avec le fait que l'auteur était recherché par les autorités
pour s'être évadé d'un camp de déminage ou pour avoir été membre d'un mouvement
de résistance, voire pour ces deux motifs.
11.2S'agissant de l'engagement de l'auteur
dans la résistance, le conseil conteste l'affirmation de l'État partie selon
laquelle les membres de différentes organisations de défense des droits de l'homme
et les fonctionnaires du HCR devraient nécessairement être au courant des activités
menées voilà 14 ans par un petit groupe de résistants anticommunistes à Nha
Trang.
11.3Le conseil réfute en outre la dramatisation
progressive du ré cit fait par l'auteur de sa fuite et de la fusillade à laquelle
elle a donné lieu que fait valoir l'État partie. À son avis c'est plutôt dans
les interrogatoires intervenus lors des entretiens successifs que l'on dénote
une escalade dramatique et il rappelle que lors du premier entretien avec la
police en 1991, l'auteur n'a pas é té invité à raconter en détail sa fuite du
Viet Nam. Il conteste par ailleurs l'affirmation de l'État partie selon laquelle
rien ne permet de penser que la police a émis un mandat d'arrêt contre l'auteur,
rappelant au Comité que dans un premier temps les autorités vietnamiennes ont
refusé le rapatriement des auteurs au motif que ces derniers avaient commis
des crimes au Viet Nam avant leur fuite.
11.4Le conseil fait valoir que produire
des preuves autres qu'un certificat médical à l'appui de ses déclarations était
impossible à l'auteur vu les circonstances de sa fuite, ajoutant que l'on ne
pouvait à divers titres attendre de l'auteur qu'il s'adresse aux autorités vietnamiennes
pour obtenir des preuves écrites de ces événements et que la police, pour des
raisons évidentes, n'avait pas pour habitude de fournir des preuves écrites
des tortures pratiquées.
11.5Enfin, se référant aux observations
supplémentaires de l'État partie en date du 5 octobre 1999 dans lesquelles il
est indiqué que l'auteur ne possède pas de casier judiciaire au Viet Nam, le
conseil souligne que cette constatation n'est pas en contradiction avec les
dires de l'auteur, qui a indiqué ne pas avoir été traduit en justice au Viet
Nam pour un quelconque délit.
Observations complémentaires
de l'État partie
12.1Dans son mémoire complémentaire daté
du 8 février 2000, l'État partie précise que le Viet Nam n'a jamais opposé de
refus au rapatriement des auteurs, mais indique se heurter depuis de nombreuses
années à des difficultés pour le rapatriement de citoyens vietnamiens, l'obtention
de l'accord du Gouvernement vietnamien nécessitant de longues négociations entre
les deux pays dans un grand nombre de cas de rapatriement.
12.2L'État partie signale que l'ambassade
de Suède à Hanoi a confirmé que la langue vietnamienne comptait plusieurs dialectes
présentant des différences de prononciation et parfois de vocabulaire, mais
que ces différences étaient mineures. L'É ;tat partie rappelle en outre que
la langue écrite est la même dans tout le pays.
12.3Enfin, se référant à l'affirmation
de M. V.X.N. selon laquelle il risque d'être victime de mauvais traitements
de la part d'un particulier à son retour au Viet Nam, l'État partie tient à
souligner qu'aucun élément d'information ne permet d'affirmer que les autorités
vietnamiennes ne seraient pas en mesure d'assurer la protection de l'auteur
contre une telle éventualité. Il affirme que la jurisprudence mentionnée par
le conseil à ce sujet se rapporte uniquement à l'interprétation de la Convention
européenne des droits de l'homme et n'est pas applicable à la Convention contre
la torture.
Délibérations du Comité
13.1Avant d'examiner une plainte soumise
dans une communication, le Comité contre la torture doit décider si cette communication
est recevable au titre de l'article 22 de la Convention. Se réfé rant au paragraphe
5 a) de cet article, le Comité prend note de l'opinion de l'État partie selon
laquelle le HCR a déjà examiné les cas des auteurs afin de déterminer si une
dé cision d'expulsion serait compatible avec les obligations souscrites par
l'État partie au titre du paragraphe 2 de l'article 33 de la Convention de 1951
relative au statut des réfugiés. Il relève cependant que ni la Convention sur
les réfugiés ni le Statut du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés
ne prévoit la mise en place d'une procédure internationale d'enquête ou de règlement.
Le Comité estime qu'une opinion ou qu'un avis écrit rendu par une instance régionale
ou internationale sur un problème d'interprétation du droit international en
rapport avec une affaire particulière ne signifie pas que cette affaire a fait
l'objet d'une procédure internationale d'enquête ou de règlement.
13.2Le Comité estime en outre que tous
les recours internes ont é té épuisés et que rien ne s'oppose plus à ce qu'il
déclare la communication recevable. L'État partie et le conseil de l'auteur
ayant chacun formulé des observations sur le fond des communications, le Comité
passe sans plus attendre à l'examen de cellesci quant au fond.
13.3Le Comité doit décider, en application
du paragraphe 1 de l'article 3 de la Convention, s'il existe des motifs sérieux
de croire que les auteurs risqueraient d'être soumis à la torture s'ils étaient
renvoyés au Viet Nam. Pour se prononcer sur ce point, le Comité doit, selon
le paragraphe 2 de l'article 3, tenir compte de toutes les considérations pertinentes,
y compris l'existence d'un ensemble de violations systématiques des droits de
l'homme, graves, flagrantes ou massives. Le but de cette évaluation, cependant,
est de déterminer si l'intéressé risque personnellement d'être soumis à la torture
dans le pays où il serait renvoyé. Il s'ensuit que l'existence, dans un pays,
d'un ensemble de violations systématiques des droits de l'homme graves, flagrantes
ou massives ne constitue pas en soi une raison suffisante de conclure qu'une
personne donnée serait en danger d'être soumise à la torture à son retour dans
ce pays. Il doit exister des raisons particulières de penser que l'intéressé
serait personnellement en danger. Pareillement, l'absence d'un ensemble de violations
flagrantes et systématiques des droits de l'homme ne signifie pas forcément
qu'une personne ne court pas le risque d'être soumise à la torture dans la situation
particulière qui est la sienne.
13.4Le Comité rappelle le caractère absolu
de l'obligation qui découle pour les États parties du paragraphe 1 de l'article
3 de la Convention. À ce propos, il relève qu'en application de la loi sur les
étrangers adoptée par la Suède en 1989, il est strictement interdit d'expulser
un étranger vers un pays donné s'il existe des raisons suffisantes de penser
qu'il pourrait y encourir la peine capitale ou des châtiments corporels ou y
être soumis à ; la torture ou à d'autres traitements ou châtiments inhumains
ou dégradants.
13.5Le Comité note que l'arrêt d'expulsion
rendu par la cour d'appel à l'encontre des auteurs l'a été en se fondant sur
l'avis du Service suédois de l'immigration qualifiant d'insuffisantes les informations
relatives à leur situation. Il relève en outre que les entretiens complémentaires
avec les auteurs destinés à évaluer l'existence d'un risque n'ont eu lieu qu'après
que ces derniers eurent présenté des communications au Comité et à la suite
d'une demande adressée par leur conseil au Ministère de la justice.
13.6Compte tenu de ce qui précède, le
Comité considè ;re que les activités des auteurs au Viet Nam et leurs anté cédents
de détention et de torture doivent être pris en considération pour déterminer
s'ils risquent d'être torturés en cas de rapatriement. Il note à cet égard que
l'État partie a souligné les incohérences que pré sente le récit des événements
par les auteurs et a mis en doute la véracité de leurs dires. En l'espèce, le
Comité estime que certains doutes subsistent quant à la cré ;dibilité des auteurs
même si plusieurs divergences peuvent s'expliquer par des problèmes de compréhension
entre les auteurs et les interprètes, par le temps considérable s'étant écoulé
depuis la fuite des auteurs du Viet Nam ou par le déroulement de la procédure.
13.7Malgré ce qui précède, tout en ayant
connaissance de la situation des droits de l'homme au Viet Nam, le Comité, vu
notamment le temps écoulé depuis la fuite des auteurs et le fait que leur départ
illicite du Viet Nam vers le milieu des anné es 80 n'est plus considéré comme
un délit par les autorités vietnamiennes, estime infondées les affirmations
des auteurs selon lesquelles ils courraient personnellement le risque d'être
soumis à la torture s'ils rentraient maintenant au Viet Nam. À cet égard, le
Comité relève que le fait qu'ils risquent d'être emprisonnés à leur retour au
Viet Nam ne saurait justifier à lui seul l'octroi de la protection prévue à
l'article 3 de la Convention.
13.8Le Comité rappelle que, aux fins
de la Convention, l'une des conditions nécessaires pour que l'on puisse parler
d'actes de torture est qu'ils aient été infligés par un agent de la fonction
publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation
ou avec son consentement exprès ou tacite. Le Comité considère que la question
de savoir si l'État partie a l'obligation de ne pas expulser une personne qui
risque de se voir infliger une douleur ou des souffrances par un particulier,
sans le consentement exprès ou tacite des autorités, est en dehors du champ
d'application de l'article 3 de la Convention.
14.Le Comité contre la torture, agissant
en vertu du paragraphe 7 de l'article 22 de la Convention contre la torture
et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, estime que
les faits dont il est saisi ne font pas apparaître de violation de l'article
3 de la Convention.