Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Zambie, U.N. Doc. CAT/C/47/Add.2 (2001).
Rapports initiaux des États parties
devant être soumis en 1999
Additif
ZAMBIE
[1er décembre 2000]
Table des matières
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Paragraphes |
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Introduction ..............................................................................................................................................
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1-7 |
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I. |
Renseignements généraux ......................................................................................................................
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8-13 |
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II. |
Application de la Convention
dans la pratique ...................................................................................
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14-169 |
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Article 2 .....................................................................................................................................................
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21-45 |
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Article 3 .....................................................................................................................................................
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46-60 |
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Article 4 .....................................................................................................................................................
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61-62 |
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Article 5 .....................................................................................................................................................
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63-64 |
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Article 6 .....................................................................................................................................................
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65 |
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Article 7 .....................................................................................................................................................
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66-69 |
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Article 8 .....................................................................................................................................................
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70-71 |
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Article 9 .....................................................................................................................................................
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72-73 |
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Article 10 ...................................................................................................................................................
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74-79 |
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Article 11 ...................................................................................................................................................
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80-119 |
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Article 12 ...................................................................................................................................................
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120-132 |
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Article 13 ...................................................................................................................................................
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133-139 |
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Article 14 ...................................................................................................................................................
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140-145 |
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Article 15 ...................................................................................................................................................
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146-148 |
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Article 16 ...................................................................................................................................................
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149-169 |
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Liste des annexes ........................................................................................................................................................................
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Introduction
1. La République de Zambie a
adhéré à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants le 5 novembre 1998. L’instrument
d’adhésion a été déposé le 7 octobre 1998 et la Convention est entrée en
vigueur le 6 novembre 1998. Conformément à l’article 19, le rapport
initial de la Zambie devait être soumis au Comité contre la torture le
6 novembre 1999.
2. Le Gouvernement zambien a
constitué, par le biais du Ministère de la justice, un comité interministériel
pour l’établissement des rapports et a chargé ce dernier de préparer et de
produire le rapport initial de la Zambie. Les membres du Comité
interministériel provenaient de ministères d’exécution et de services
ministériels compétents, d’institutions paraétatiques, d’organisations non
gouvernementales (ONG) et de l’Université de Zambie.
3. La rédaction du présent
rapport a été possible grâce au don que le Gouvernement suédois a accordé au
Gouvernement zambien en vue de l’aider à s’acquitter des obligations
redditionnelles qui lui incombent en vertu de la Convention. La Zambie a
également bénéficié de l’assistance technique de l’Institut Raoul Wallenberg
des droits de l’homme et du droit humanitaire de l’Université de Lund (Suède),
qui a détaché l’un de ses représentants à l’atelier d’orientation et au
colloque national mentionnés ci-après.
4. Le processus d’établissement
du rapport a débuté par un atelier d’orientation de cinq jours tenu sous la
conduite de M. Bent Sorensen, membre fondateur du Comité contre la
torture. M. Sorensen a examiné avec les participants les directives
concernant la rédaction des rapports à présenter en application de la
Convention. À l’issue de l’atelier, les participants ont établi un projet de
plan qui a servi de base pour la suite des travaux de rédaction.
5. L’atelier d’orientation a
été suivi de quatre ateliers organisés au niveau provincial et coordonnés par
le Ministère de la justice. L’objectif était de recueillir des informations
dans les provinces sur la situation en matière de torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants. Chaque atelier a donné lieu à
l’établissement d’un document, puis les informations recueillies ont été
intégrées à un projet de rapport établi à l’issue d’une session de cinq jours.
Les parties prenantes se sont ensuite réunies dans le cadre d’un colloque
national d’une journée pour examiner ce projet de rapport. À cette occasion,
M. Sorensen a également fait part de ses observations (voir les dates des
ateliers à l’annexe 6).
6. Contrairement aux
dispositions des articles 21 et 22, la Zambie n’a pas fait de déclaration
reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des
communications présentées par des États ou des particuliers.
7. La rédaction du rapport a
amené les autorités zambiennes à faire le point sur les dispositions
législatives, administratives et judiciaires relatives à la torture. Ainsi, l’État
a pris conscience que s’il érigeait la torture, au sens de l’article premier de
la Convention, en infraction pénale dans la législation interne et prévoyait
des peines appropriées, il lui serait beaucoup plus facile de respecter presque
toutes les dispositions de la Convention. Il a donc pris des initiatives en ce
sens.
I. Renseignements
généraux
8. La Zambie ayant un régime
juridique dualiste, les instruments internationaux que le pays a ratifiés ou
auxquels il a adhéré ne s’appliquent pas automatiquement à l’échelle nationale
et une législation est nécessaire pour les rendre exécutoires. L’incorporation
des instruments internationaux auxquels la Zambie est partie se fait soit par
adoption de dispositions réglementaires dans le cadre de la législation
existante, soit par promulgation de lois entièrement nouvelles. La Convention
contre la torture n’a pas encore été incorporée au droit interne par l’une ou
l’autre de ces méthodes, sauf pour ce qui est des dispositions relatives à
l’interdiction de la torture figurant à l’article 15 de la Constitution
zambienne, qui prévoit que nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou
traitements inhumains ou dégradants. Cet article énonce un droit fondamental
reconnu par la Constitution zambienne et il ne peut y être dérogé en aucune
circonstance. En Zambie, les personnes victimes d’actes de torture peuvent, aux
termes de l’article 28 de la Constitution, adresser une requête à la Haute
Cour (High Court) pour demander un jugement déclaratif et des dommages-intérêts.
9. Contrairement aux
dispositions de l’article 4 de la Convention, la Zambie n’a pas érigé les
actes de torture, au sens de l’article premier de la Convention contre la
torture, en infraction dans le Code pénal.
10. Les lois ci-après comportent
des dispositions spécifiques pour éviter que les condamnés et suspects placés
en garde à vue ou en détention provisoire ne soient soumis à des peines ou
traitements cruels inhumains ou dégradants:
a) La loi portant modification de la loi sur la police
(n° 14, 1999) prévoit des mesures visant à protéger et à surveiller les
personnes placées en garde à vue. Elle rend les officiers de police judiciaire
directement responsables du bien-être des détenus;
b) La loi sur les prisons (chap. 97, 1966) régit la gestion et
le contrôle des établissements pénitentiaires ainsi que le traitement des
détenus afin que ceux-ci bénéficient de conditions de détention décentes. Elle
comporte des dispositions réglementaires qui protègent les détenus contre les
traitements cruels, inhumains et dégradants, notamment en ce qui concerne
l’hygiène, les installations sanitaires, le régime alimentaire, l’espace et les
soins médicaux;
c) La loi relative au contrôle des réfugiés (chap. 120)
protège les réfugiés contre les mesures de refoulement.
11. La Zambie a adhéré aux cinq
autres principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et
en a ratifié certains. Ces instruments, qui ont été négociés et adoptés sous
les auspices de l’ONU, sont les suivants: Pacte international relatif aux
droits civils et politiques (adhésion en avril 1984); Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (adhésion en
avril 1984); Convention internationale sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale (ratification en 1972); Convention sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes
(ratification en 1985); et Convention relative aux droits de l’enfant
(ratification en 1995). En outre, la Zambie est partie à la Charte africaine
des droits de l’homme et des peuples (ratification en 1986); à la
Convention de l’Organisation de l’unité africaine régissant les aspects propres
aux problèmes des réfugiés en Afrique (1969, ratification en 1973); à la
Convention de 1951 relative au statut des réfugiés; au Protocole de 1967
relatif au statut des réfugiés; aux quatre Conventions de Genève de 1949
(adhésion le 19 octobre 1966), et aux Protocoles de 1977 se
rapportant aux Conventions de Genève; ainsi qu’aux sept Conventions fondamentales
de l’Organisation internationale du travail.
Mesures judiciaires
12. Les autorités qui ont
compétence pour les questions visées par la Convention sont la Cour suprême
(Supreme Court) créée en vertu de l’article 92 de la Constitution de 1991
(telle que modifiée en 1996) (ci-après dénommée la Constitution) et régie par
la loi relative à la Cour suprême (chap. 25, 1973); la Haute Cour créée en
vertu de l’article 94 de la Constitution et régie par la loi relative à la
Haute Cour (chap. 27, 1960) et les tribunaux de première instance, prévus
par l’article 91-1 d) de la Constitution et régis par la loi relative
aux tribunaux de première instance (chap. 28, 1934).
Mesures administratives
13. Parmi les autorités
administratives qui ont compétence pour les questions visées par la Convention
figure notamment la Commission des droits de l’homme, créée en application de
l’article 125-1 de la Constitution zambienne et régie par la loi relative
à la Commission des droits de l’homme (n° 39, 1996). Les autres autorités
compétentes sont: la Commission d’enquête créée en application de la loi y
relative (chap. 39); la Commission de lutte contre le trafic de drogues
créée en application de la loi relative aux stupéfiants et aux substances
psychotropes (chap. 96); la Commission de lutte contre la corruption créée
en application de la loi y relative (n° 42, 1996); le Département de
l’immigration créé en application de la loi relative à l’immigration et à
l’expulsion (chap. 123) et l’Inspection générale des services de police (Police
Public Complaints Authority), créée en application de la loi portant
modification de la loi sur la police (n° 14, 1999).
II. Application
de la Convention dans la pratique
Éléments à prendre en compte et difficultés rencontrées
14. La Constitution zambienne,
bien qu’interdisant la torture dans son article 15, n’en donne pas de
définition, ce qui pose des problèmes d’interprétation. Certains actes de
torture peuvent ainsi être commis sans entrave. La torture n’étant pas définie
dans la Constitution et les actes de torture n’étant pas incriminés, il est
difficile d’inculper les auteurs de ces actes.
15. Il n’existe ni règles ni
consignes spécifiques interdisant aux agents des services de détection et de
répression de recourir à la torture dans l’exercice de leurs fonctions. Les
services de détection et de répression manquent de moyens humains et financiers
pour former leurs agents à la question de l’interdiction de la torture.
16. Faute de ressources
financières, les règles, méthodes et pratiques d’interrogatoire ne font pas non
plus l’objet d’une surveillance systématique. Les services de détection et de
répression ne disposent pas des moyens nécessaires pour procéder rapidement à
des enquêtes impartiales. Dans la plupart des cas, ils se trouvent dans des
zones reculées qui manquent de moyens de communication. Elles ne peuvent pas
non plus signaler à d’autres États les cas concernant leurs ressortissants. On
constate de façon générale une méconnaissance des droits de l’homme et des
dispositions de la Convention parmi les Zambiens. C’est pourquoi ils sont
vulnérables face aux abus des agents des services de détection et de répression
qui n’ont pas été formés à respecter les libertés et les droits fondamentaux.
17. La Zambie possède une loi sur
l’extradition mais celle-ci ne citant pas la torture comme infraction passible
d’extradition dans son annexe 1, il est difficile à l’État de poursuivre
l’auteur d’une infraction qui s’est enfui du pays, ou de coopérer efficacement
avec un autre État qui poursuit l’auteur d’une infraction, comme le stipule la
Convention contre la torture.
18. La loi relative à
l’immigration et à l’expulsion (chap. 123), qui constitue le principal
texte de loi en matière d’expulsion d’étrangers, n’interdit pas à l’État
d’expulser une personne vers un pays où elle risque d’être soumise à la
torture.
19. La loi relative au contrôle
des réfugiés (chap. 120) ne comporte aucune définition du terme “réfugié”. Dans
la pratique, on se réfère aux définitions qu’en donnent la Convention de 1951
relative au statut des réfugiés et dans la Convention de l’OUA régissant les
aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique (1969). Toutefois, il est
à noter que lesdites définitions n’indiquent pas expressément que le fait
d’avoir été torturé est un motif d’obtention du statut de réfugié.
20. Bien qu’il incombe à la
Commission des droits de l’homme, en vertu de la loi y relative, d’enquêter sur
des plaintes pour actes de torture, ses conclusions ne donnent lieu qu’à de
simples recommandations qui n’ont pas d’effet coercitif sur le plan juridique.
Cela étant, le Gouvernement et les agents de l’État sont supposés donner suite
à ces recommandations. De même, l’Inspection générale des services de police
est uniquement habilitée à faire des recommandations à l’intention du
Gouvernement.
Article 2
Mesures législatives
21. L’article 15 de la
Constitution, qui interdit la torture, est non susceptible de dérogation. Cet
article, qui énonce un droit fondamental, ne comporte aucune exception ou limite
et ne figure pas parmi ceux dont l’article 25 de la Constitution autorise
à limiter l’application en cas de guerre ou lorsque le Président proclame
l’état d’urgence en vertu de l’article 30 (voir par. 88 pour le
libellé de l’article 25 de la Constitution). La Zambie n’est ni en état de
guerre ni menacée de guerre et ne connaît pas d’instabilité politique
intérieure ni d’état d’exception.
22. La règle en Zambie est que
les officiers subalternes doivent obéir aux ordres de leur supérieur. Il est
difficile en pratique qu’un officier subalterne désobéisse à un ordre donné par
un supérieur car il ou elle encourrait des mesures disciplinaires.
23. Aux termes de
l’article 28 de la Constitution, une personne qui a été victime d’actes de
torture peut demander réparation auprès de la Haute Cour. L’article 28 est
libellé comme suit:
“... toute personne qui déclare que l’une quelconque
des dispositions des articles 11 à 26 inclus a été, est ou risque
d’être transgressée à ses dépens, peut, sans préjudice de toute autre action
légalement possible pour la même question, déposer une demande auprès de la
Haute Cour qui statuera sur cette demande...”
24. En outre, toute victime
d’actes de torture peut directement engager une action en réparation contre le
Procureur général (Attorney General), en sa qualité de conseiller juridique
principal du Gouvernement. La torture n’étant pas érigée en infraction dans le
Code pénal zambien (chap. 87), nul ne peut être poursuivi pour avoir
commis des actes de torture.
25. Compte tenu du régime
juridique dualiste adoptée par la Zambie pour l’application des traités et
conventions internationaux, les dispositions de la Convention ne peuvent être
invoquées devant les tribunaux nationaux à moins que cette dernière ne soit
incorporée au droit national.
Mesures judiciaires
26. L’article 91 de la
Constitution institue l’appareil judiciaire de la République de Zambie, qui
comprend notamment la Cour suprême, la Haute Cour, les tribunaux de première
instance et les tribunaux locaux.
27. Comme indiqué plus haut, les
cas de torture en Zambie sont traités par la Haute Cour par voie de requête en
vertu de l’article 28-1 de la Constitution tandis que les appels sont
interjetés devant la Cour suprême.
28. Bien que la Constitution ne
donne pas de définition de la torture, les tribunaux ont tenté de définir ce
qu’ils considèrent comme des actes de torture. L’affaire Maybin Phiri et consorts c. Ministère public est éloquente.
Dans cette affaire, le juge Chitengi définit la torture ainsi: “douleur
infligée avec cruauté, ... être fouetté, entièrement dénudé, mis sur une
balançoire avec les mains et les pieds menottés et les yeux bandés, et
électrocuté”.
29. Les tribunaux zambiens se
sont efforcés de prendre des mesures efficaces pour empêcher la torture. L’affaire
Dave Kataba Wanjeke c. Ministère public
(1999/HP/563) est également instructive. Le juge Chulu a notamment déclaré
ce qui suit:
“... La photographie du demandeur qui a été prise
est révélatrice de la façon dont il a été traité par les officiers de police.
Les traces des blessures et des coups qui lui ont été infligés sont visibles...
Je constate que le demandeur a été physiquement agressé par les fonctionnaires
de police ainsi qu’il l’a invoqué. De fait, étant donné qu’aucune loi
n’autorise les officiers de police à brutaliser d’une manière quelconque les
suspects placés en garde à vue, le tribunal prend de tels actes très au sérieux
car ils sont non seulement illégaux mais constituent en outre une violation de
l’article 15 de la Constitution.”
30. Toutefois, il est important
de noter que la Cour est saisie d’un nombre limité d’affaires concernant des
actes de torture puisque ces derniers n’ont pas été érigés en infraction dans
le Code pénal zambien. C’est pourquoi les tribunaux, lorsqu’ils statuent sur des
questions relevant de l’article 15 de la Constitution, donnent toujours
une portée plus large à la définition de la torture afin qu’un maximum
d’instances puisse être introduites à ce titre.
Mesures administratives
31. Sur le plan administratif, il
a été donné effet à la Convention par la création de la Commission des droits
de l’homme et de l’Inspection générale des services de police.
Commission des
droits de l’homme
32. La Constitution zambienne a
créé une Commission des droits de l’homme autonome en vertu de
l’article 125 qui dispose que:
“1. Il est
créé par les présentes une commission des droits de l’homme.
2. La
Commission des droits de l’homme est autonome”.
33. Les fonctions et pouvoirs de
la Commission des droits de l’homme sont décrits dans la loi relative aux
droits de l’homme (nº 39, 1996). Aux termes de la section 9, les
fonctions de la Commission sont les suivantes:
a) Enquêter sur les atteintes aux droits de l’homme;
b) Enquêter sur toute mauvaise administration de la justice;
c) Proposer des mesures efficaces pour prévenir les atteintes aux
droits de l’homme;
d) Se rendre dans les prisons et les lieux de détention ou les
installations connexes en vue d’évaluer et d’inspecter les conditions de
détention et de faire des recommandations pour remédier aux problèmes
existants;
e) Créer un programme continu de recherche, d’éducation,
d’information et de réadaptation des personnes dont les droits fondamentaux ont
été violés en vue de promouvoir le respect et la protection des droits de
l’homme; et
f) Faire tout ce qui peut contribuer directement ou
indirectement à l’exécution de ses fonctions.
34. Aux termes de la section 10,
la Commission a compétence pour enquêter sur les violations des droits de
l’homme soit de sa propre initiative, soit suite à une plainte formulée par:
a) Une personne lésée défendant ses propres intérêts;
b) Une association défendant l’intérêt de ses membres;
c) Une personne agissant au nom d’une personne lésée; ou
d) Une personne agissant au nom d’un groupe ou d’une catégorie de
personnes dont elle défend les intérêts.
35. La Commission des droits de
l’homme recommande aux autorités compétentes les mesures à prendre pour
remédier à la violation d’un droit. Ce mécanisme a été utilisé dans des cas de
torture.
36. Suite à des plaintes pour
torture émanant de suspects arrêtés à l’occasion du coup d’État manqué de 1997,
la Commission s’est rendue, conformément à son mandat, dans les lieux de
détention et a interrogé les détenus. Le 30 mars 1998, après avoir terminé son
enquête, la Commission a fait un certain nombre de recommandations dans son
rapport au Gouvernement au sujet du traitement des détenus et des moyens
éventuels d’améliorer le système d’administration de la justice.
37. Suite aux recommandations de
la Commission, le Président de la République de Zambie, s’appuyant sur les
dispositions de la loi sur les enquêtes (chap. 41), a nommé une commission
d’enquête par le biais du décret n° 94 de 1998 pour enquêter plus avant
sur les accusations de torture portées par des détenus contre des membres de la
police et d’autres services de détection et de répression. Cette Commission a,
depuis, communiqué les résultats de son enquête au Gouvernement.
38. Son budget de fonctionnement
étant limité, la Commission des droits de l’homme n’intervient qu’au niveau
national et non au niveau des provinces ou des districts.
Inspection générale
des services de police
39. À la suite de nombreuses
plaintes de citoyens contre certains officiers de police, l’État a modifié la
loi nationale sur la police (chap. 107) pour mettre en place une
inspection générale des services de police. Cet organe, créé en application de
la loi portant modification de la loi sur la police, s’est vu attribuer les
fonctions suivantes:
a) Recevoir toutes les plaintes relatives à des interventions de
la police;
b) Enquêter sur toutes les plaintes relatives aux interventions
de la police ayant entraîné la mort ou des blessures graves;
c) Présenter ses conclusions, recommandations et directives:
i) À l’Avocat général (Director of Public Prosecutions) pour
que des poursuites pénales soient éventuellement engagées;
ii) À l’Inspecteur général pour que des mesures disciplinaires ou
administratives soient prises; ou
iii) À la Commission de lutte contre la corruption ou à toute autre
instance ou autorité compétente.
40. L’Inspection générale des
services de police est habilitée à enquêter sur toutes les plaintes qui lui
sont adressées par:
a) Une personne directement lésée par l’intervention de la
police;
b) Une association agissant dans l’intérêt de ses membres; et
c) Une personne agissant au nom d’une autre personne, d’un groupe
ou d’une organisation lésés.
41. Conformément à la section
57 C de la loi susmentionnée portant modification de la loi sur la police,
l’Inspection générale se compose de cinq membres à temps partiel nommés par le
Ministre. Elle est présidée par une personne qui a exercé les fonctions de juge
de la Haute Cour ou qui est habilitée à exercer ces fonctions. Ses membres
exercent leur mandat pendant trois ans et peuvent être reconduits dans leurs
fonctions pour trois années supplémentaires.
42. Malgré les dispositions
prévues par la loi, l’Inspection générale des services de police n’a pas encore
été constituée. Le Gouvernement nommera ses membres prochainement.
Autres mesures
43. Le Code pénal
(chap. 87), qui est le principal texte législatif établissant les
infractions pénales, ne comporte pas de définition de la torture, ni de liste
de sanctions propres à dissuader les personnes qui pourraient se livrer à des
actes de torture. Cela crée des difficultés car, outre le recours qui peut être
exercé en vertu de l’article 28‑1 de la Constitution, seules les
dispositions suivantes du Code pénal permettent de demander réparation:
a) Section 229: “Quiconque cause illégalement un préjudice grave
à autrui est coupable de crime et encourt une peine de prison de sept ans”;
b) Section 230: “Quiconque place illégalement et avec l’intention
de nuire à autrui une substance explosive dans quelque lieu que ce soit est
coupable de crime et encourt une peine de prison de 14 ans”;
c) Section 231: “Quiconque enfreint la loi en administrant ou en
faisant prendre du poison ou toute autre substance toxique à une personne dans
l’intention de la léser ou de lui nuire et attente par là même à la vie de
cette personne, ou lui cause un préjudice grave, est coupable de crime et
encourt une peine de prison de 14 ans”;
d) Section 247: “Quiconque se rend coupable de voies de fait
commet un délit et encourt une peine de prison d’un an, à moins que le présent
Code ne prévoit de sanction plus sévère compte tenu des circonstances du
délit”;
e) Section 248: “Quiconque se rend coupable de coups et blessures
volontaires commet un délit et encourt une peine de prison de cinq ans”.
44. Dans les dispositions qui
précèdent, le terme “quiconque” peut désigner à la fois des particuliers et des
agents de l’État ou des personnes agissant dans l’exercice de fonctions
officielles.
Éléments à prendre en compte et difficultés rencontrées
45. La Commission des droits de
l’homme impartiale et autonome créée par le Gouvernement a pour objet de
protéger les citoyens, mais son action est entravée par les difficultés
suivantes:
a) La Commission n’a pas de capacités institutionnelles suffisantes
aux niveaux du pays, des provinces et des districts pour s’acquitter
efficacement de son mandat. Elle ne dispose notamment ni de bureaux ni de
personnel permanent aux niveaux des provinces et des districts, ni de soutien
logistique et ses effectifs ne sont pas suffisamment formés en matière de
droits de l’homme;
b) Les citoyens étant peu sensibilisés aux droits de l’homme, les
victimes d’actes de torture n’engagent généralement pas de poursuites;
c) Le manque de coopération entre les comités des droits de
l’homme, que la Commission a créés à l’échelle provinciale, et les services de
détection et de répression entrave la bonne exécution du mandat de la
Commission à la fois aux niveaux des provinces et des districts.
Article 3
Mesures
législatives
46. La Constitution de la Zambie ne reconnaît
pas le droit d’asile. La Constitution et les autres textes législatifs ne
reconnaissent pas non plus expressément le principe du non-refoulement. La
Zambie est toutefois partie à la Convention de 1951 relative au statut des
réfugiés et au Protocole de 1967, même si les dispositions de ces derniers
n’ont pas été incorporées à la législation nationale.
47. Le principe du non-refoulement est évoqué
dans la section 10 de la loi sur le contrôle des réfugiés (chap.120), qui
dispose que: “Aucun réfugié
résidant sans interruption depuis au moins trois mois sur le territoire zambien
ne sera expulsé hors du pays si le Ministre ou la Cour estime que celui-ci
risque d’être victime de violences physiques”.
48. La section 11 de ladite loi interdit aussi
implicitement le refoulement des demandeurs d’asile en disposant que: “Aucun fonctionnaire habilité ne
refusera sans motif de délivrer à un réfugié un permis de séjour en Zambie s’il
a des raisons de croire que celui-ci risque d’être jugé, détenu, soumis à des
restrictions ou puni sans jugement ou encore soumis à des violences physiques
sur le territoire où il risque d’être victime de violences physiques”.
49. Même si les dispositions qui précèdent ne
font référence qu’aux violences physiques, le Comité national qui examine la
recevabilité des demandes tient compte, dans la pratique, des actes de torture
mentale, notamment des interrogatoires musclés pouvant causer des souffrances
morales aux demandeurs d’asile.
50. La loi sur l’immigration et l’expulsion
(chap. 123) ne reconnaît pas le statut particulier des demandeurs d’asile
ou des réfugiés qui sont assimilés à des étrangers ordinaires et traités comme
tels. Elle ne comporte aucune disposition interdisant le refoulement.
51. Conformément à la loi sur l’extradition
(chap. 94), le Procureur général n’extradera pas les auteurs présumés
d’infractions politiques qui sont susceptibles d’être torturés une fois revenus
dans leurs pays respectifs. Cette loi ne comporte aucune disposition prévoyant
d’extrader les personnes qui ont commis un acte de torture.
52. La loi relative au contrôle des réfugiés
assortit le principe de non-refoulement de garanties limitées, mais la loi sur
l’immigration et l’exclusion ne semble pas aller dans le même sens. Cette
divergence illustre l’absence d’harmonisation des lois et le manque de
collaboration entre les fonctionnaires chargés d’examiner des questions
relatives aux demandeurs d’asile et aux réfugiés, qui risquent ainsi d’être refoulés.
Mesures
judiciaires
53. Aucune mesure judiciaire n’est à signaler
durant cette période.
Mesures
administratives
54. Le Gouvernement a créé un Comité national
chargé d’examiner la recevabilité des demandes d’asile. Ce comité est sous la
tutelle du Commissariat aux réfugiés qui relève du Ministère de l’intérieur.
55. Le Comité national chargé d’examiner la
recevabilité des demandes d’asile veille à ce que les demandeurs d’asile
puissent s’adresser au Comité chargé de la détermination du statut des
réfugiés, qui applique les critères énoncés dans la Convention de 1951 et dans
la Convention de l’OUA de 1969. Les demandeurs d’asile qui arrivent en nombre
peuvent s’adresser aux Comités provinciaux chargés des opérations groupées qui
doivent notamment déterminer le statut des réfugiés sur la base des critères
énoncés dans la Convention de l’OUA.
56. Les procédures d’examen de la recevabilité
des demandes d’asile limitent les risques de rejet arbitraire et de
refoulement. De plus, aucune demande ne peut être rejetée si la décision de
rejet a pour conséquence de renvoyer le demandeur dans un pays où il risque
d’être torturé.
57. En cas de rejet, le demandeur peut faire
appel de la décision, même si la loi relative au contrôle des réfugiés ne
comporte pas de dispositions juridiques en ce sens. Dans la pratique, les
demandeurs d’asile font appel des rejets. Pour le moment, aucun délai n’a été
fixé pour interjeter appel. Les demandeurs qui font appel peuvent donc rester
sur le territoire jusqu’à ce qu’une décision ait été rendue. Ils doivent
adresser leur appel au Commissariat aux réfugiés; celui-ci les renvoie au
Comité national chargé de la recevabilité des demandes d’asile qui réexamine
les décisions prises.
58. Les mesures législatives, judiciaires et
administratives prises par l’État
zambien concernant l’examen des demandes d’asile tiennent également compte, le
cas échéant, d’éléments pertinents comme l’existence de violations
systématiques des droits de l’homme, flagrantes ou massives.
Éléments
à prendre en compte et difficultés rencontrées
59. Les éléments à prendre en compte et les
difficultés rencontrées lors de l’application de l’article susmentionné sont
notamment les suivantes:
a) Les
membres du Comité national chargé d’examiner la recevabilité des demandes
d’asile ne bénéficient que d’une formation ponctuelle en administration
générale, qui est insuffisante. Celle-ci leur est dispensée par les pouvoirs
publics et par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).
Il n’existe pas de système permettant d’interjeter appel d’une décision du
Comité national chargé d’examiner la recevabilité des demandes d’asile auprès
d’un tribunal ou d’une instance judiciaire;
b) Il
est parfois difficile de reconnaître les personnes qui peuvent légitimement prétendre
au statut de réfugié, notamment lorsqu’elles viennent de pays qui n’ont pas de
frontière commune avec la Zambie et/ou lorsqu’elles entrent dans le pays en
passant la frontière clandestinement. Ces personnes peuvent être privées de
leur liberté ou placées en rétention. Les autorités ont moins de difficultés à
déterminer le statut des personnes qui fuient les pays voisins parce qu’elles
connaissent généralement bien la situation de ces pays pouvant justifier le
statut de réfugié. Les personnes qui peuvent légitimement prétendre au statut
de réfugié peuvent être tenues de se présenter aux autorités jusqu’à ce que ces
dernières aient statué sur son cas;
c) La
loi sur l’immigration et l’expulsion ne comporte pas le terme “réfugié” ou n’en
donne aucune définition. Les demandes d’asile sont donc toutes examinées au cas
par cas et les demandeurs d’asile sont parfois placés en rétention.
Autres
mesures
60. Il n’y a pas d’autres mesures à signaler.
Article 4
61. En Zambie, les “actes de
torture” ne sont pas spécifiquement désignés comme infraction au regard du Code
pénal. Il en est de même de la tentative de pratiquer la torture et des actes
qui constituent une complicité ou une participation à la torture.
62. Le Code pénal zambien ne prévoit aucune
peine pour sanctionner la torture, la tentative de pratiquer la torture et la
complicité ou la participation à la torture.
Article 5
63. Aucune législation particulière ne permet
à la Zambie d’établir sa compétence dans le cas d’actes ou de tentatives de torture
commis à bord d’un navire ou d’un aéronef immatriculés en Zambie.
64. Aucune question n’a fait l’objet d’une
décision judiciaire devant les tribunaux du pays. Toutefois, l’article 15 de la
Constitution interdit tout acte de torture. Par conséquent, si des actes de
torture sont commis sur le territoire relevant de la juridiction zambienne, la
Haute Cour a compétence, en vertu de l’article 28‑1 de la Constitution,
pour examiner une requête. Le système de réparation existant prend la forme
d’un jugement déclaratif et la cour peut, en outre, accorder des
dommages-intérêts.
Article 6
65. Comme indiqué plus haut, la torture ne
constitue pas en elle-même une infraction en Zambie. Il serait donc difficile
de placer une personne en détention ou d’engager des poursuites contre une
personne au motif qu’elle a commis des actes de torture. Toutefois, si l’acte
ou l’omission relèvent de la définition d’une ou de plusieurs infractions
figurant dans les sections 229, 230, 323, 247 et 248 du Code pénal, les autorités
concernées ont compétence pour enquêter sur les faits et peuvent procéder à
l’arrestation de l’auteur présumé de l’infraction pour qu’il soit
éventuellement poursuivi.
Article 7
66. La torture ne constituant pas une
infraction au regard du Code pénal zambien, les autorités zambiennes
compétentes ne sont pas habilitées à traiter les affaires visées par cet
article.
67. L’extradition est régie par la loi y
relative (chap. 94, 1968). En vertu de la section 2‑1 de cette loi,
une infraction passible d’extradition est:
“a) une
infraction au droit de tout pays étranger pour laquelle une demande
d’extradition peut être adressée à la République en vertu de tout traité
d’extradition ou autres accords de réciprocité; ou
b) une
infraction citée à l’annexe I et pour laquelle l’extradition peut être accordée
à un pays du Commonwealth, en application du titre III.”
68. La torture ne figure pas parmi la liste
des infractions citées à l’annexe I de la loi sur l’extradition. En outre, la
Zambie n’a pas conclu avec d’autres pays de traités sur l’extradition
concernant les auteurs d’actes de torture. Compte tenu de ce qui précède, nul
ne peut être poursuivi pour avoir commis l’infraction visée à l’article 4.
69. L’élaboration du présent rapport a révélé
les lacunes du droit concernant la torture et a montré clairement que le
Gouvernement zambien devait entreprendre des réformes législatives pour se
conformer aux dispositions de la Convention. Des initiatives sont prises dans
ce sens.
Article 8
70. La torture ne constituant pas une
infraction pénale en Zambie, elle ne peut être incluse de plein droit dans les
traités d’extradition existants.
71. En ce qui concerne les pays avec lesquels
la Zambie a signé des traités d’extradition conformément à la loi sur
l’extradition, seules les infractions citées à l’annexe I sont passibles
d’extradition. La torture ne figurant pas parmi ces infractions, elle ne peut
donner lieu à aucune mesure d’extradition puisque, compte tenu du régime
dualiste de la Zambie, la législation nationale l’emporte sur les conventions
internationales.
Article 9
72. Même si la torture ne constitue pas une
infraction en vertu du Code pénal zambien, le Gouvernement la tient pour
monstrueuse; en attestent la ratification de la Convention par la Zambie et
l’interdiction absolue qui frappe la torture en vertu de l’article 15 de la
Constitution. La vive réprobation des tribunaux est également manifeste; en
témoignent le rejet des aveux obtenus sous la torture et les importantes
indemnités accordées aux victimes.
73. À cet égard, le Gouvernement zambien est
prêt à fournir à tout État partie
qui le lui demanderait tous les éléments à sa disposition concernant les
poursuites pénales engagées contre les auteurs présumés d’actes de torture.
Article 10
74. Conformément aux dispositions de la
section 9 de la loi relative à la Commission des droits de l’homme
(n° 39 de 1996), cette dernière a notamment pour mandat de mettre en
place, en vue de promouvoir le respect et la protection des droits de l’homme,
un programme continu de recherche, d’éducation, d’information et de
réadaptation des personnes dont les droits fondamentaux ont été violés.
Mesures
administratives
75. Des mesures administratives ont été prises
pour que les établissements de formation aux techniques de détection et de
répression consacrent une partie de leur programme de formation aux droits de
l’homme. Les droits de l’homme ont ainsi été inscrits dans les programmes de
formation du personnel des services de police, des services pénitentiaires, des
services de renseignement et de sécurité, de la Commission de lutte contre la
corruption, de la Commission de lutte contre le trafic de drogues, des services
de l’immigration et de la magistrature.
76. Quelques ateliers de formation portant
plus particulièrement sur l’application des lois et les normes internationales
en matière de droits de l’homme ont été organisés à l’intention de hauts
fonctionnaires des services de détection et de répression déjà en fonctions.
Ces ateliers se sont tenus à l’Institut des hautes études de droit en Zambie et
à l’Institut Raoul Wallenberg des droits de l’homme et du droit humanitaire
(Université de Lund) en Suède. Le nombre de fonctionnaires déjà formés aux
droits de l’homme étant minime, il reste toutefois indispensable d’en former
davantage.
77. Malheureusement, les membres du corps
médical n’ont encore reçu aucune formation sur la Convention contre la torture.
Les membres des forces armées n’ont pas non plus reçu de formation en matière
de droits de l’homme. Le Gouvernement zambien a toutefois informé la Commission
des droits de l’homme des dispositions de l’article 10 de la Convention
concernant les personnels médical et militaire. Comme indiqué plus haut, la
Commission des droits de l’homme est responsable de l’enseignement des droits
de l’homme.
78. Le Gouvernement est également conscient
que la population doit être formée aux droits de l’homme pour savoir quand des
violations sont commises et comment demander réparation. Une population
vigilante et prête à engager des poursuites devrait dissuader les responsables
de la lutte contre la criminalité de pratiquer la torture.
Éléments à prendre en
compte et difficultés rencontrées
79. Dans la pratique, plusieurs éléments et
difficultés entravent l’application de l’article 10. Il s’agit notamment
du manque de matériel de formation et de personnel qualifié et, surtout, de
l’absence de politique nationale en matière d’enseignement et de diffusion
d’information aux personnes visées par ledit article. En outre, la formation dispensée
est générale et les dispositions de la Convention ne sont pas étudiées de façon
adéquate. Au cours de la période considérée, seul un petit nombre d’agents de
la fonction publique avaient pu bénéficier d’une formation en matière de droits
de l’homme.
Article 11
80. En Zambie, l’interrogatoire des suspects
ainsi que la détention et le traitement des personnes soumises à toutes formes
d’arrestation, de détention ou d’emprisonnement sont régis par des règles et
règlements; toutefois, ceux-ci n’ont pas fait l’objet d’un examen systématique
à ce jour.
Police
Mesures
législatives
81. Les services de police zambiens, créés en
vertu de l’article 103 de la Constitution, sont placés sous la tutelle du
Ministère de l’intérieur. Conformément à l’article 104, la police
zambienne a pour fonctions d’assurer la sécurité des biens et des personnes, de
faire respecter la loi et de maintenir l’ordre public, de détecter et de
prévenir les infractions et de coopérer avec les autorités civiles, avec les
autres services chargés d’assurer la sécurité et avec l’ensemble de la
population. Les services de police sont régis par la loi sur la police
zambienne (chap. 107) qui définit notamment les organes et structures de
la police zambienne, le recrutement des fonctionnaires, leurs conditions
d’emploi et la réglementation applicable d’une façon générale à la police
zambienne.
82. La Constitution et le Code de procédure
pénale garantissent plusieurs droits aux suspects, en vue de réduire le nombre
d’actes de torture. Conformément à l’article 13 de la Constitution, nul ne
peut être privé de sa liberté sauf dans les cas où la loi l’autorise. Cet
article dispose en outre, que toute personne arrêtée ou détenue sera informée
aussi rapidement que possible, dans une langue qu’elle comprend, des motifs de
son arrestation ou de sa détention. La police est tenue de déférer, sans retard
injustifié, la personne arrêtée ou détenue à un tribunal. Si la personne en
détention n’est pas jugée dans un délai acceptable, elle doit être libérée sans
condition ou sous des conditions assez raisonnables pour pouvoir se présenter à
une date ultérieure au procès ou à la procédure d’instruction. Toute personne
qui est arrêtée ou détenue illégalement a le droit d’intenter une action en
justice pour obtenir réparation.
83. Le Code de procédure pénale vient
renforcer ces dispositions constitutionnelles. Conformément à la
section 30, tout officier de police qui procède à une arrestation sans
mandat est tenu de présenter ou de faire comparaître, sans retard injustifié,
la personne arrêtée devant un juge compétent ou devant un officier commandant
un poste de police. De plus, la section 33-1 du Code de procédure pénale
stipule ce qui suit:
“Lorsqu’une personne est placée en garde à vue sans
mandat pour une infraction autre que celles passibles de la peine de mort,
l’officier commandant le poste de police devant qui elle aura été amenée,
peut – dans tous les cas – et doit – s’il semble impossible de
la déférer à un tribunal compétent dans les 24 heures après sa mise en
garde en vue – enquêter sur l’affaire et – à moins qu’il n’estime qu’il
s’agit d’une infraction grave – libérer cette personne, après versement d’une
caution d’un montant raisonnable assortie ou non de garanties, afin que
celle-ci puisse comparaître devant un tribunal compétent à la date et dans le
lieu indiqués dans l’attestation de versement. Cependant, chaque fois qu’une
personne est maintenue en garde à vue, elle devra être déférée à un tribunal
compétent aussi rapidement que possible. Sans préjudice du contenu de cette
section, tout officier commandant un poste de police peut libérer toute
personne soupçonnée d’avoir commis une infraction, quelle qu’elle soit, s’il
estime – à l’issue d’une enquête de police en bonne et due forme – que les
preuves réunies sont insuffisantes pour que le suspect soit traduit en justice.
84. Ainsi, toute personne arrêtée sans mandat
doit être présentée devant un juge dans les 24 heures qui suivent son
arrestation, à moins que cela ne soit impossible, par exemple, si elle est
arrêtée un vendredi soir ou un jour férié ou si le juge le plus proche se
trouve très loin du lieu de l’arrestation et que la police ne dispose d’aucun
moyen de transport.
85. La mise en liberté sous caution est régie
par les dispositions suivantes de la section 123 du Code de procédure pénale:
“1) Toute
personne arrêtée ou détenue, qui comparaît devant un tribunal de première
instance, la Haute Cour ou la Cour suprême ou y est déférée, peut – à tout
moment au cours de sa garde à vue ou de sa détention provisoire et à n’importe
quel stade de la procédure – présenter une demande de mise en liberté sous
caution, assortie d’une ou de plusieurs garanties jugées suffisantes par
l’officier de police ou le tribunal compétent, afin d’assurer sa comparution, ou
peut être libérée sur engagement à comparaître si cet officier ou ce tribunal
le jugent opportun:
Pour autant que toute personne accusée:
i) de
meurtre, de trahison ou de toute autre infraction passible – obligatoirement ou
non – de la peine capitale;
ii) de
non-dénonciation d’un acte de trahison ou de crime de trahison; ou
iii) de
vol qualifié;
n’obtienne pas de mise en liberté sous caution
auprès d’un tribunal de première instance, de la Haute Cour ou de la Cour
suprême ni ne soit libérée par aucun officier de police.
3) La
Haute Cour peut ordonner, à tout moment, à la demande de l’inculpé, – que
celui-ci ait été ou non mis en accusation –, qu’il soit libéré sous
caution ou sur engagement à comparaître; dans ce cas, si l’ordonnance le
prescrit, l’engagement peut être pris devant tout magistrat.
4) Nonobstant
toute disposition de la présente section, aucune personne accusée d’avoir
commis une infraction définie comme telle en vertu de la loi sur la sécurité de
l’État ne pourra demander de mise en
liberté sous caution, que ce soit dans l’attente de l’ouverture du procès ou
dans l’attente d’un jugement en appel, si l’Avocat général certifie que cela
porterait atteinte à la sécurité ou aux intérêts de la République.
5) Nonobstant
toute disposition contraire aux dispositions du présent Code ou de tout autre
texte législatif, il est déclaré pour lever tout doute que ni le tribunal de
première instance qui prononce la culpabilité d’une personne ou la condamne, ni
la Haute Cour ne sont habilités à accorder la mise en liberté sous caution
– assortie ou non de garanties – de cette personne avant que celle‑ci
n’ait introduit un recours contre la déclaration de culpabilité ou la
condamnation dont elle a fait l’objet.”
86. La section 126 du Code de
procédure pénale interdit de fixer des cautions d’un montant excessif.
87. Ces dispositions font
apparaître clairement que la Constitution aussi bien que le Code de procédure
pénale exigent que toute personne en garde à vue comparaisse devant un tribunal
indépendant et impartial dans le délai le plus court possible (24 heures
dans la majorité des cas). De surcroît, les personnes arrêtées et inculpées ont
le droit de bénéficier d’une mise en liberté provisoire ou sous caution sauf
dans le cas des infractions les plus graves.
88. Comme indiqué plus haut,
l’article 15 de la Constitution stipule que nul ne peut être soumis à la
torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Il ne souffre
aucune exception ni dérogation. Même la guerre ou l’état d’urgence ne peuvent justifier
de dérogation à cette interdiction absolue, comme l’indique l’article 25
de la Constitution, qui suspend dans certains cas l’exercice des droits et
libertés fondamentaux lorsque la nation est en guerre ou que l’état d’urgence
est en vigueur:
“Aucune disposition d’aucune loi ni aucun acte
accompli en vertu d’aucune loi n’est réputé être en violation des
articles 13, 16, 17, 19, 20, 21, 22, 23 ou 24 ou s’en écarter pour
autant qu’il soit démontré que la loi en question autorise la prise de mesures
– durant toute période où la République est en guerre ou qu’une disposition
proclamée en vertu de l’article 30 est en vigueur – visant à faire
face à toute situation existant ou survenant au cours de cette période; aucun
acte, quel qu’en soit l’auteur, accompli en vertu d’une telle loi n’est réputé
être en contradiction avec aucun des articles susmentionnés s’il est établi
que, compte dûment tenu des circonstances qui prévalaient alors, les mesures
prises étaient raisonnablement requises pour faire face à la situation.”
89. Il est à noter que l’exercice
du droit à la liberté garanti par l’article 13 peut être suspendu lorsque
la nation est en guerre ou que l’état d’urgence est proclamé. La détention
provisoire est autorisée par la loi sur les pouvoirs d’exception
(chap. 108, 1964), qui entre en vigueur lorsque le Président proclame
l’état d’urgence en vertu de l’article 30 de la Constitution. Le Président
est habilité, en vertu de la section 3 de cette loi, à prendre des
règlements pouvant même autoriser la détention sans jugement. Le pouvoir
réglementaire d’urgence du Président lui permet de faire arrêter, pour une
période indéfinie, les personnes qui constituent une menace pour la sécurité
publique alors que la durée maximale de garde à vue est de sept jours (Règlements
relatifs à l’état d’urgence, décret n° 126 de 1997, règlements 33‑1
et 33‑6 respectivement).
90. Cependant, les personnes
détenues en vertu des règlements relatifs à l’état d’urgence ont le droit
d’introduire une requête en habeas corpus
devant la Haute Cour. L’article 26 de la Constitution comporte des
garanties qui protègent les droits des personnes en détention provisoire:
“1) Lorsque
la liberté de mouvement d’une personne est restreinte ou lorsque cette personne
est détenue en vertu d’une des lois mentionnées aux articles 22 à 25, les
dispositions suivantes s’appliquent:
a) il lui
est fourni, dans la mesure où cela est raisonnablement possible et, en tout
état de cause, dans un délai de 14 jours au plus tard, un document indiquant
dans une langue qu’elle comprend les motifs de la privation ou de la
restriction de sa liberté;
b) la
privation ou la restriction de sa liberté est annoncée dans un délai de 14
jours au plus tard par un avis publié dans le Journal officiel précisant le
lieu de détention et la disposition législative en vertu de laquelle elle a été
placée en détention ou a vu sa liberté restreinte;
c) si elle
en fait la demande dans un délai d’au moins trois mois à compter de la
privation ou de la restriction de sa liberté ou après avoir déposé une demande
analogue, sa cause est entendue par un tribunal indépendant et impartial établi
par la loi et présidé par un juge de la Haute Cour nommé par le Président de la
Cour suprême, ou par une personne qualifiée pour siéger à la Haute Cour;
d) il lui
est accordé des facilités raisonnables pour consulter un avocat de son choix
qui sera autorisé à faire des représentations à l’autorité dont émane
l’ordonnance de privation ou de restriction de liberté ou à tout tribunal
établi pour connaître de son affaire;
e) lors de
l’audition de son affaire par un tel tribunal, elle est autorisée à comparaître
en personne ou à se faire représenter par un avocat de son choix.
2) Après
toute audience tenue en vertu des dispositions du présent article, le tribunal
donne son avis quant à la nécessité ou l’opportunité de maintenir la privation
ou la restriction de liberté à l’autorité qui l’a saisi de l’affaire et cette
dernière est tenue de se conformer à son avis.
3) Le
Président peut à tout moment saisir un tribunal de l’affaire de toute personne
ayant été ou étant détenue ou dont la liberté est ou a été restreinte en
application de toute ordonnance de privation ou de restriction de liberté.”
Poursuites des délinquants
91. L’Avocat général, qui relève
du Ministère de la justice et dont la fonction a été créée en vertu de
l’article 56 de la Constitution, est responsable de l’action publique dans
l’ensemble du pays. Il est nommé par le Président sous réserve de ratification
par l’Assemblée nationale. En vertu de l’article 56‑3 de la Constitution,
l’Avocat général est habilité, chaque fois qu’il le juge souhaitable, à:
“a) engager
des poursuites pénales contre toute personne devant un tribunal autre qu’une
cour martiale pour toute infraction que cette personne est accusée d’avoir
commise;
b) reprendre
toute poursuite pénale engagée par toute autre personne ou autorité;
c) mettre
fin, à tout moment avant que le jugement ne soit prononcé, à toute poursuite
pénale engagée par lui-même ou toute autre personne ou autorité.”
92. L’Avocat général peut exercer
ces fonctions en personne ou par l’intermédiaire des procureurs des tribunaux
(state advocates) ou de la police (police prosecutors). En fait, toutes les
actions en justice auprès des tribunaux de première instance sont intentées par
les procureurs de la police, qui relèvent sur le plan administratif du
Ministère de l’intérieur. Aussi est-il difficile d’engager des poursuites
contre les membres des forces de police accusés de torturer les suspects ou de
leur infliger des traitements inhumains ou dégradants. Les pouvoirs publics
manquant de juristes qualifiés, les procureurs des tribunaux, qui sont les
seuls à relever directement de l’Avocat général n’interviennent que pour
engager des poursuites devant la Haute Cour pour les infractions les plus
graves. Dans la mesure où les procureurs de la police ne dépendent pas de
l’Avocat général et n’ont donc pas à lui rendre compte de leurs activités, il
est sans nul doute difficile que celui-ci les supervise ou les contrôle.
Mesures administratives et
judiciaires
93. Le déroulement des
interrogatoires est régi par les règles du droit anglais relatives à
l’instruction (English Judges Rules) qui:
a) Autorisent un officier de police ou tout autre agent des
services de détection et de répression enquêtant sur une infraction à
interroger toute personne, suspecte ou non, qu’il juge susceptible de fournir
des informations utiles et ce, que cette personne soit détenue ou non, à
condition qu’elle n’ait pas été inculpée de cette infraction ni informée que
des poursuites pourraient être engagées contre elle pour ladite infraction;
b) Font obligation à tout officier de police et à tout autre
agent des services de détection et de répression d’informer de ses droits toute personne qu’il a des raisons de
soupçonner d’avoir commis une infraction, avant de lui poser des questions sur
l’infraction présumée. L’accusé(e) doit être informé(e) qu’il (elle) a le droit
de garder le silence et que tout ce qu’il (elle) dit peut être retenu contre lui
devant un tribunal;
c) Exigent que toute personne qui a été officiellement inculpée et placée en détention ou prévenue que
des poursuites pourraient être engagées contre elle soit à nouveau informée de
ses droits. Des questions ne peuvent être posées après ces deux étapes que dans
des circonstances exceptionnelles; et uniquement à condition que la personne
soit à nouveau être informée de ses droits;
d) Disposent que les dépositions ne peuvent être recueillies sous
la contrainte, précisent quelles notifications d’usage doivent être faites et
stipulent que les dépositions doivent être authentifiées;
e) Évoquent le cas où une personne est inculpée ou informée que
des poursuites pourraient être engagées contre elle et qu’un officier de police
ou tout autre agent des services de détection et de répression lui fait savoir qu’un coaccusé a fait une
déposition par écrit. Dans ce cas, l’agent des services de détection ou de
répression est tenu de remettre un exemplaire de cette déposition écrite à la
personne sans inviter ou inciter cette dernière à réagir. Si celle-ci choisit
de s’exprimer, elle doit être informée de ses droits conformément à la
Règle 3;
f) Imposent d’appliquer ces règles aux personnes qui ne sont pas
des officiers de police et qui sont chargées d’enquêter sur des infractions ou
d’inculper des délinquants.
94. Il est important de noter que
les règles relatives à l’instruction ne sont pas des règles de droit mais
d’usage. Ainsi, des aveux qui n’ont pas été obtenus conformément à ces règles
peuvent être retenus comme preuve pourvu qu’ils aient été faits volontairement.
Juges et magistrats ont cependant le pouvoir discrétionnaire de les rejeter.
95. Les magistrats zambiens
considèrent que les règles relatives à l’instruction n’ont qu’une valeur indicative
et non contraignante pour les agents des services de détection et de
répression. Toutefois, dans la pratique, les tribunaux sont très réticents à
juger toute personne arrêtée et à considérer comme recevable tout aveu obtenu
en cas de violation des règles relatives à l’instruction. En atteste l’affaire Charles C. Lukolongo, Christopher C. P.
Kambita et Isaac Lungu c. Ministère public (1986) ZR 115 (SC), qui fait
désormais jurisprudence.
96. La loi présente un vice de
fond. En effet, si des aveux obtenus sous la contrainte peuvent être jugés
irrecevables, tout élément d’information que ces aveux permettent de mettre à
jour peut néanmoins être recevable s’il revêt un intérêt pour les questions
dont le tribunal est saisi. Dans l’affaire Liswaniso
c. Ministère public (1976) ZR 297 (SC), dans laquelle des éléments de
preuve obtenus de façon illicite ont été retenus, la Cour suprême a considéré
que, bien que la loi doive tenter de concilier les intérêts des individus et
ceux de l’État, d’une part en empêchant les autorités de porter atteinte
illégalement aux libertés individuelles et, d’autre part, en faisant traduire
en justice les auteurs d’infractions, la solution ne consistait pas à rejeter
des éléments de preuve pertinents. La Cour suprême a notamment déclaré ce qui
suit:
“Au vu des précédents, après mûre réflexion, nous
estimons que (abstraction faite de la règle de droit relative aux aveux obtenus
sous la contrainte), s’ils sont pertinents, les éléments de preuve obtenus de
façon illicite – c’est-à-dire par suite de perquisitions ou de saisies
illégales, ou d’aveux recueillis sous la contrainte – sont recevables au
motif qu’ils correspondent à la réalité, que les méthodes employées pour les
obtenir aient été conformes ou non aux dispositions de la Constitution (ou de
toute autre loi). Nous tenons néanmoins à dire sans ambiguïté qu’aucune
immixtion illicite ne saurait être tolérée, ni de la part de la police ni de
celle de toute autre personne, et que quiconque s’en rendrait coupable
s’exposerait à des sanctions pénales ou civiles. Il nous semble justifié sur le
plan du droit que les aveux obtenus sous la contrainte soient en règle générale
rejetés car ils risquent d’être faux, mais que des éléments de preuve obtenus
par suite d’un acte illégal soient recevables lorsqu’ils sont pertinents et par
conséquent dignes de foi. Il serait difficile d’imaginer comment un tribunal
pourrait délibérément fermer les yeux sur un fait pertinent qui lui a été
présenté.”
97. En adoptant cette position,
la magistrature incite involontairement les agents des services de détection et
de répression à torturer les suspects car ceux-ci savent que toute preuve
tangible obtenue sous la torture sera recevable devant les tribunaux. En
n’incriminant pas la torture, le droit zambien tend à créer un sentiment
d’impunité parmi les agents des services de détection et de répression car
ceux-ci savent qu’ils ne seront pas poursuivis s’ils commettent des actes de
torture.
Pratique
administrative
98. La Zambie a mis en place des
pratiques administratives et des arrangements pour empêcher que toute personne
arrêtée, détenue ou emprisonnée ne soit soumise à la torture. Elle a notamment:
a) Découragé le recours aux aveux comme moyen d’obtenir des
informations des suspects;
b) Éliminé le recours aux méthodes d’intimidation employées pour
obtenir des informations auprès des suspects, le nombre d’agents pouvant faire
passer ensemble un entretien étant ramené à trois au plus;
c) Remplacé le terme “interrogatoire” qui a un caractère
stigmatisant par le terme “entretien”.
Éléments
à prendre en compte et difficultés rencontrées
99. Malgré les mesures indiquées
plus haut, la torture de suspects par les agents des services de détection et
de répression est malheureusement monnaie courante.
100. Les éléments à prendre en
compte et les difficultés rencontrées lors de l’application de
l’article 11 sont notamment les suivants:
a) Inadéquation de la formation aux techniques d’enquête et, par
voie de conséquence, du traitement des suspects;
b) Connaissance insuffisante des instruments relatifs aux droits
de l’homme parmi la plupart des agents des services de détection et de
répression;
c) Absence de laboratoire médico-légal national permettant
l’emploi de procédés douteux par des officiers trop zélés;
d) Manque de ressources financières et de soutien logistique
adéquat. La police ne dispose ni des moyens de transport ni des ressources
nécessaires pour pouvoir mener des enquêtes approfondies et est donc tributaire
des informations que lui fournissent les suspects;
e) Réticence des supérieurs hiérarchiques à sanctionner les
auteurs d’actes de torture.
Prisons
Mesures
législatives
101. L’administration pénitentiaire
zambienne est créée par l’article 106 de la Constitution et relève du Ministère
de l’intérieur. La loi sur les prisons (chap. 97, 1966) régit le
traitement des personnes détenues ou emprisonnées. Elle comporte en outre des
arrangements concernant la détention et le traitement des personnes qui visent
à décourager et prévenir les sévices et les actes de torture à l’encontre des
détenus et des suspects. Conformément à sa section 16‑1, des généralistes
peuvent être nommés médecins dans les prisons par le Ministre. La loi comporte
en outre les dispositions suivantes:
“Section 17‑1). Sous réserve des dispositions
de la présente loi, le médecin est responsable de la santé des prisonniers et
visite quotidiennement la prison si possible ou lorsque le responsable de la
prison l’y invite.”
2) Lorsqu’il
l’estime nécessaire pour des raisons médicales, le médecin attire l’attention
du fonctionnaire responsable sur tout fait concernant la prison ou le
traitement des détenus.”
“Section 18-1). Le médecin fait en sorte, si
possible, que chaque détenu subisse un examen médical à son admission en prison
et avant sa sortie de prison, il s’acquitte de toutes autres fonctions pouvant
lui être confiées et veille à ce que l’état de santé de chaque détenu soit
consigné dans un dossier.”
“Section 43 h).
Tout officier subalterne enfreint la discipline si l’usage qu’il fait des
pouvoirs dont il est investi est contraire à la loi ou abusif, c’est-à-dire
s’il a arbitrairement recours à la violence à l’encontre de tout détenu ou de
toute autre personne qu’il est amené à côtoyer dans l’exercice de ses
fonctions.”
“Section 58. Tout détenu est fouillé à son admission
en prison, puis à chaque fois que cela est jugé nécessaire, par un gardien de
prison du même sexe, en l’absence de personne du sexe opposé, et tous les
articles interdits lui sont retirés.”
Système
de contrôle et traitement des plaintes
102. En vertu de la loi portant
modification de la loi sur la police (nο 14 de 1999),
l’État a établi l’Inspection générale des services de police, dont les
fonctions sont décrites aux paragraphes 39 à 42 plus haut. En outre, il a
créé la Commission des droits de l’homme dont les fonctions et les pouvoirs
sont énoncés aux paragraphes 32 à 38 plus haut.
103. Le titre XIX de la loi sur les
prisons prévoit la visite et l’inspection des prisons par des juges, des
magistrats, le Ministre et le Vice-Ministre de l’intérieur ainsi que les
ministres des provinces, qui portent tous le titre de “juges inspecteurs”
(“visiting justices”). La section 126 stipule que tout juge inspecteur peut
visiter à tout moment une prison à laquelle il est affecté et qu’il peut:
“a) demander
à consulter tous les livres, documents et registres ayant trait à la gestion et
à la discipline dans la prison;
b) se
rendre dans tous les quartiers de la prison et voir tous les détenus;
c) contrôler
et tester sur le plan aussi bien quantitatif que qualitatif la nourriture des
détenus;
d) s’assurer,
dans la mesure du possible, que les règlements et règles sont observés;
e) enquêter
sur toute plainte ou toute demande formulée par un détenu;
f) s’acquitter
de toutes autres fonctions pouvant lui être confiées.”
104. En vertu de la
section 27, tout juge inspecteur doit consigner dans un registre tenu à
cet effet, toutes les remarques, suggestions ou recommandations dont il estime
que le Directeur de l’administration pénitentiaire doit être informé.
105. En vertu de la
section 128, le Ministre de l’intérieur est habilité à nommer un visiteur
officiel (“official visitor”) pour chaque prison. Les visiteurs officiels sont
tenus de visiter les prisons qui leur sont assignées au moins une fois tous les
deux mois. Leurs fonctions sont semblables à celles des juges inspecteurs (section 129).
Pratique
administrative
106. Les conditions qui prévalent
dans les prisons étant extrêmement mauvaises, on peut considérer que les
détenus sont soumis à des traitements inhumains ou dégradants. Comme il ressort
des tableaux de l’annexe I, la majorité des prisons sont surpeuplées. Dans
les centres urbains de détention provisoire, les cellules sont si surpeuplées
que les détenus doivent dormir assis ou à tour de rôle. Ils y sont enfermés de
4 heures de l’après-midi à 7 heures du matin.
107. Le transfert de détenus entre
établissements permettrait de réduire la surpopulation, mais s’avère difficile
dans la pratique en raison du manque de moyens de transport et aussi parce que
les personnes en attente de jugement et les immigrés clandestins placés en
détention ne peuvent pas être transférés.
108. Les cellules ne sont pas
conformes aux normes applicables en matière d’hygiène et l’alimentation est
inadéquate. Les repas sont essentiellement composés de haricots, de farine de
maïs et de légumes et comprennent rarement de la viande rouge ou du poulet.
Cette situation tient à l’insuffisance du financement (voir annexe 5).
109. Des maladies telles que la
tuberculose, la gale, l’anémie, la dysenterie, le paludisme et les infections
pulmonaires sont courantes en raison de la pauvreté des régimes en protéines,
de l’approvisionnement insuffisant en eau potable, de la grave surpopulation et
de la médiocrité de l’assainissement et des installations médicales. Au mieux,
les détenus n’ont que peu d’équipements récréatifs et aucune salle aménagée
pour la lecture (voir annexe 3).
110. En vue de réduire la
surpopulation carcérale, l’État a ouvert des prisons en plein air en divers
endroits du pays.
111. Comme le montre l’annexe 4, le
nombre de gardiens par détenu est très faible; partant, les autorités
pénitentiaires éprouvent des difficultés à répondre de façon adéquate aux
besoins des détenus et à empêcher les sévices entre détenus. De plus, le taux
de mortalité est élevé parmi les gardiens de prison, qui contractent des
maladies au contact des détenus. Ainsi, à la prison de haute sécurité de
Kamfinsa et à la prison centrale de Lusaka, un gardien de prison meurt tous les
cinq mois par suite de contact avec des détenus malades. La libération
anticipée des détenus malades en phase terminale est certes prévue, mais
s’avère difficile dans la pratique car les procédures sont longues et peu
commodes.
112. Faute de fonds et de
personnel, les mesures visant à mettre des médecins et des installations
médicales à la disposition des prévenus et des condamnés se sont révélées
difficiles à appliquer. Il n’y a pas de médecins dans les prisons, uniquement
quelques agents de soins détachés par le Ministère de la santé.
113. De surcroît, les dispensaires
des prisons manquent souvent de médicaments. Les prisons n’ayant pas les moyens
de payer les sommes que les hôpitaux et dispensaires publics facturent aux
usagers, les détenus malades ne peuvent parfois pas être hospitalisés.
114. Faute de personnel, la plupart
des détenus sont libérés sans passer d’examen médical.
115. Il y a lieu de signaler que la
surveillance des conditions de détention n’est pas aussi efficace qu’elle
devrait l’être. Les organisations non gouvernementales qui veulent se rendre
dans les prisons, par exemple, se heurtent à des problèmes. Elles doivent
obtenir une autorisation à cet effet auprès du Directeur de l’administration
pénitentiaire.
116. Sur le plan des mesures
administratives, les juges de la Haute Cour visitent effectivement les prisons
et les cellules de garde à vue pour enquêter sur les conditions de détention.
Ils effectuent généralement ce travail durant les sessions que la Haute Cour
tient dans diverses régions du pays. De même, des juges de juridictions
inférieures (“magistrates”) visitent également les prisons et les cellules de
garde à vue, mais leurs visites sont rares et, dans la plupart des cas, elles
ne donnent pas aux personnes incarcérées la possibilité d’engager un dialogue
avec eux.
117. À l’issue de ces visites, les
juges établissent des rapports qui comportent des recommandations visant à
prévenir les traitements cruels, inhumains ou dégradants. Faute de fonds, les
autorités pénitentiaires et la police appliquent rarement ces recommandations.
De ce fait, cette procédure ne permet pas d’améliorer la situation des détenus.
118. La loi sur les prisons prévoit
que les détenus qui enfreignent la réglementation soient soumis à des
châtiments corporels et à un régime alimentaire restreint. La confidentialité
des dossiers médicaux des détenus n’est pas non plus garantie. Bien que la
Haute Cour ait jugé les châtiments corporels contraires à la loi et à la
Constitution dans l’affaire John Banda c.
Ministère public (HPA/6/1998), qui est évoquée dans le présent rapport, la
loi sur les prisons n’a toujours pas été amendée pour abolir les châtiments
corporels.
119. Le Gouvernement est déterminé
à réformer la législation sur les prisons afin de la rendre compatible avec la
Constitution et avec les obligations que le pays a contractées au titre de la
Convention et d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de
l’homme. De ce point de vue, le processus de réforme administrative a été
engagé.
Article 12
Mesures
législatives
120. En vertu de l’article 28
de la Constitution, toute personne qui estime que les droits qui lui sont
reconnus par la Constitution ont été, sont ou risquent d’être violés peut
demander réparation à la Haute Cour, laquelle entend l’affaire et rend
l’ordonnance ou donne les directives qu’elle juge appropriées pour lui assurer
la jouissance des droits dont elle a été lésée.
121. Comme indiqué plus haut, les
fonctions et pouvoirs de la Commission des droits de l’homme créée par
l’article 125 de la Constitution sont définis dans la loi n° 39. En
outre, l’Inspection générale des services de police citée plus haut peut
enquêter sur les plaintes contre la police, y compris les plaintes pour
torture.
122. La loi sur les enquêtes
(chap. 41) habilite le Président à constituer une commission afin
d’enquêter sur toute question dont il estime que l’examen servirait l’intérêt
public.
Mesures
judiciaires
123. En Zambie, les tribunaux
peuvent ouvrir “un procès dans le procès”, c’est-à‑dire mener une
enquête, lorsque, durant l’audience, il apparaît que des aveux auraient pu été
extorqués sous la torture. Ce “procès dans le procès” vise à établir si les
aveux ont été faits volontairement et dans les formes. Si, à l’issue de cette
procédure, le tribunal établit que les aveux ont été extorqués sous la torture,
elle refuse qu’ils puissent être cités comme élément de preuve contre l’accusé.
124. Dans l’affaire Ministère public c. Stephen Lungu, Jack
Chiti et consorts, le Président du tribunal a été nommé à la tête d’une
commission afin qu’une enquête puisse être menée durant le procès, car le juge
suspendait l’audience chaque fois que des accusés lançaient des allégations de
torture.
125. À l’issue du “procès dans le
procès”, on suppose que le plaignant (le prévenu) intentera une action au
civil. Toutefois, il se heurte à deux difficultés majeures:
a) Le “procès dans le procès” fait partie des poursuites pénales,
or celles-ci ne peuvent être invoquées pour apporter des éléments de preuve
dans le cadre de poursuites civiles;
b) L’absence d’incrimination de la torture pourrait également
poser des problèmes dans une action civile.
Mesures
administratives
126. Tout acte de torture commis
par un agent des services de détection et de répression est considéré comme une
violation du code de conduite. Dans certains cas, il peut être assimilé à une
infraction – autre que la torture proprement dite – passible de
sanctions pénales. Lorsque des allégations d’actes de torture sont lancées
contre un agent des services de détection et de répression, le règlement
intérieur s’applique et les mesures disciplinaires peuvent aller jusqu’à la
suspension ou au licenciement.
127. Au cours de la période
considérée (18 mois), la police zambienne a comptabilisé au total
32 affaires dans lesquelles des fonctionnaires de police auraient commis
des actes de torture. Les autorités compétentes n’ont toujours pas achevé
l’examen de ces affaires.
128. Dans les cas où un acte de
torture justifie l’ouverture d’une enquête judiciaire, l’affaire est renvoyée à
la brigade criminelle. Un dossier est d’ordinaire ouvert et transmis au parquet
qui décide alors si l’acte commis équivaut à une infraction pénale.
129. Aux termes de la
sous-section 1 de la section 57 B de la loi portant modification
de la loi sur la police zambienne, l’Inspecteur général, la Commission de lutte
contre la corruption ou tout autorité ou organe pertinent sont tenus
d’appliquer les directives que leur donne l’Inspection générale des services de
police.
Éléments à prendre en compte et
difficultés rencontrées
130. Dans la mesure où les actes de
torture ne constituent pas une infraction dans le droit pénal zambien, il est
difficile d’en inculper les auteurs.
131. La Commission des droits de
l’homme n’est pas habilitée à prendre des décisions ayant force obligatoire
concernant les auteurs d’actes de torture. Elle peut uniquement recommander aux
autorités pertinentes de prendre des mesures.
132. Il est difficile d’enquêter
efficacement et rapidement sur les plaintes pour torture: les capacités
institutionnelles sont insuffisantes, le pays manque de personnel qualifié, les
agents des services de détection et de répression, qui disposent parfois
d’informations essentielles pour l’enquête, se montrent peu coopératifs et il
faudrait davantage de moyens logistiques, pour pouvoir prendre rapidement des
mesures efficaces dans les cas de violation des droits de l’homme, en
particulier dans les cas de torture.
Article 13
Mesures législatives
133. Comme mentionné plus haut, les
articles 15, 28 et 125 de la Constitution sont applicables.
Mesures judiciaires
134. En Zambie, une personne qui
dit avoir été victime d’actes de torture peut engager des poursuites contre
l’État par l’intermédiaire du Procureur général. La façon dont les tribunaux
zambiens statuent en cas de plaintes pour torture est illustrée par l’affaire
décrite ci-après.
135. Dans l’affaire David Kataba Mwenjeke c. Ministère public,
le demandeur a déposé un avis de requête visant à obtenir, entre autres
réparations, un jugement déclaratif établissant que les coups qui lui avaient
été infligés par des officiers de police et les actes de torture dont il avait
été victime au commissariat de Woodlands le 23 septembre 1997 étaient
contraires à la loi et constituaient une violation du droit fondamental qui lui
était garanti aux termes de l’article 15 de la Constitution.
136. Dans cette affaire, le juge
E. E. Chulu a estimé que le demandeur avait été soumis à un
traitement cruel et inhumain. Ce dernier avait été frappé à plusieurs reprises
sur le dos, avec un fouet en cuir, et sur les pieds, avec une matraque. En conséquence,
le demandeur avait des douleurs diffuses aux pieds et présentaient de multiples
lésions sur les membres et dans le dos. Le juge a estimé qu’il s’agissait là de
circonstances particulièrement aggravantes, dont il convenait de tenir compte
pour calculer des dommages-intérêts d’un montant équitable et raisonnable. En
conséquence, le tribunal a octroyé au demandeur une indemnité de
20 millions de kwacha (environ 6 451 dollars des
États-Unis), majorée d’intérêts au taux créditeur moyen à court terme à partir
de la date du jugement, jusqu’au versement intégral de la somme.
Mesures administratives
137. Conformément à la loi sur les
enquêtes, le Président peut constituer un comité administratif ou une
commission d’enquête pour enquêter sur toute affaire urgente. Ainsi,
en 1998, le Président de la République de Zambie a constitué une
commission d’enquête en vertu du décret nο 94 de 1998,
pour enquêter et faire rapport sur les allégations figurant dans le rapport du
30 mars 1998 de la Commission des droits de l’homme concernant des actes de
torture, atteintes ou violations des droits fondamentaux qui auraient été
perpétrés par les membres des forces de sécurité et de police à l’encontre de
personnes soupçonnées d’avoir participé à la tentative de coup d’État du 28 octobre 1997.
138. La commission d’enquête
spéciale mentionnée plus haut a reçu pour mandat:
a) D’identifier, le cas échéant, les officiers des services de
sécurité et de police, impliqués dans les actes de torture;
b) À la lumière des résultats de l’enquête, de recommander des
mesures administratives et disciplinaires pertinentes pour éviter que ne soient
à nouveau perpétrés des actes de torture, atteintes ou violations des droits de
l’homme au cours des enquêtes menées par les forces de sécurité et de police,
et recommander des mesures pour améliorer les méthodes d’investigation;
c) De formuler les recommandations qu’elle juge opportunes à la
lumière des résultats de ses enquêtes, notamment en vue que soit octroyée, le
cas échéant, une indemnité appropriée.
La Commission d’enquête a depuis lors remis son rapport au Gouvernement
Éléments à prendre en compte et
difficultés rencontrées
139. La plupart des personnes n’ont
pas les moyens d’engager une action en justice. Par ailleurs, la Commission des
droits de l’homme ne dispose pas de capacités institutionnelles suffisantes
pour instruire efficacement les plaintes déposées. Comme les citoyens
connaissent souvent mal les moyens de porter plainte, ils ne peuvent donc
obtenir réparation.
Article 14
Mesures législatives
140. Comme noté précédemment, les
articles 15 et 28 de la Constitution sont applicables. La Haute Cour peut,
selon qu’il conviendra, rendre une ordonnance, délivrer un mandat et donner des
directives pour faire appliquer l’article 15. Toute victime d’actes de
torture peut engager une action en réparation auprès du Procureur général.
Mesures judiciaires
141. Les tribunaux zambiens
veillent à ce que les victimes d’actes de torture obtiennent réparation et
aient le droit d’être indemnisées d’une façon juste et équitable. Les cas de
torture dont les tribunaux sont saisis en sont l’illustration.
142. Dans l’affaire Ministère public c. Musonda Samuel Mofya
(1995-97) ZR 49, la Cour suprême a rejeté un appel de l’État contre le
jugement que la Haute Cour avait rendu en faveur du répondant en lui accordant
une réparation pour actes de torture, intimidation, violation de domicile et
détention arbitraire. Le juge Gardner a déclaré:
“Comme le juge de première instance, nous estimons
qu’il faut dissuader les représentants de l’autorité de commettre des actes de
torture et nous espérons que les indemnités octroyées ne seront pas uniquement
assumées par les contribuables, mais aussi par les responsables de ces actes.
La torture doit être fermement condamnée, de sorte que le montant des
indemnités accordées pour coups et blessures volontaires et torture devrait
être près de quatre fois plus élevé que pour les infractions ordinaires.”
Mesures administratives
143. Le mécanisme de règlement à
l’amiable qui est en place laisse de toute évidence peu de chance à l’État de
l’emporter en cas de demande de réparation. Dans le passé, ce mécanisme a été
utilisé par des victimes d’actes de torture, qui ont négocié avec les pouvoirs
publics pour parvenir à un règlement à l’amiable. Bien qu’en vertu de la loi et
de la jurisprudence, l’État indemnise les victimes de violations des droits de
l’homme, une circulaire établit que des mesures disciplinaires seront prises
contre les agents des services de détection et de répression coupables d’actes
de torture pour que l’État puisse recouvrer les indemnités versées aux victimes
d’actes de torture. En cas de décès du demandeur ayant engagé une action en
réparation pour avoir subi des actes de torture, les tribunaux prévoient que
l’indemnité sera versée au conjoint, enfants ou personnes à charge survivants.
144. Conformément à la section 10
de la loi y relative, la Commission des droits de l’homme est habilitée à
recevoir les plaintes des victimes et peut, si nécessaire, recommander le
versement d’une indemnité aux personnes dont les droits fondamentaux ont été
violés, ou à leur famille.
145. En Zambie, il n’existe aucune
structure de réadaptation pour les victimes d’actes de torture.
Article 15
Mesures législatives
146. En Zambie, aucune disposition
législative n’empêche que des aveux obtenus sous la torture puissent être
invoqués comme éléments de preuve.
Mesures judiciaires
147. Conformément à la
jurisprudence, des aveux ne sont recevables que si l’État établit à la fois
que:
a) L’accusé a effectivement avoué; et
b) Il n’a pas avoué sous la contrainte.
Afin de vérifier si les aveux ont été spontanés ou non, les tribunaux
zambiens ont mis au point, au cours des années, une procédure éprouvée qu’ils
suivent scrupuleusement. L’objet de cette procédure, qui s’impose avant de
pouvoir poursuivre le procès, est expliqué plus haut.
148. Dans l’affaire Charles C. Lukolongo, Christopher C. P.
Kambita et Isaac Lungu c. Ministère public, un procès a été ouvert au
cours du procès pour déterminer si l’accusé était passé spontanément aux aveux.
En annulant la décision de la Haute Cour qui avait considéré les aveux comme
recevables, la Cour suprême a déclaré que lorsqu’un accusé avait été battu
violemment par la police et avait dû se faire soigner à l’hôpital, la seule
hypothèse raisonnable qu’un juge pouvait formuler devait être en faveur de cet
accusé, car force était de considérer que ce dernier avait avoué sous la
contrainte. Les tribunaux zambiens peuvent toutefois juger irrecevables des
aveux faits librement et dans les
formes dans les cas où ils considèrent
que, s’ils jugeaient ces aveux recevables, le procès serait inique pour
l’accusé. Le principal problème tient à ce que, bien que les aveux obtenus sous
la torture soient considérés comme irrecevables, rien sur le plan juridique
n’empêche que les preuves tangibles obtenues de cette façon soient jugées
recevables.
Article 16
Mesures législatives
149. Il existe en Zambie des
dispositions législatives visant à prévenir les actes assimilables à des peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
150. En vertu du Code pénal
zambien, certaines infractions graves sont cependant passibles de la peine
capitale. La loi prévoit que les condamnés soient exécutés par pendaison. Les
infractions suivantes sont automatiquement sanctionnées par la peine de mort:
a) Meurtre sans circonstances atténuantes;
b) Vol qualifié à main armée, sauf s’il est prouvé que le prévenu
ignorait que ses complices détenaient une arme à feu ou qu’il a renoncé à
commettre l’infraction après avoir constaté que ceux-ci étaient armés;
c) Trahison.
151. Huit prisonniers ont été
exécutés au cours des 10 dernières années (données de juillet 2000).
152. L’alinéa c) de
l’article 59 de la Constitution prévoit que le Président peut commuer la
sentence de mort prononcée à l’encontre d’une personne dûment condamnée.
153. La loi sur les prisons
(chap. 97) régit la gestion et le contrôle des établissements
pénitentiaires et des conditions de détention. Les dispositions suivantes de la
loi apportent des précisions à cet égard:
“Section 15
“1) Le
Ministre peut, s’il le juge nécessaire ou souhaitable, charger une commission
de deux membres ou plus, dont:
a) l’un
est directeur, directeur adjoint ou sous-directeur adjoint d’établissement
pénitentiaire;
b) l’autre
(les autres) fait (font) partie de la fonction publique;
d’enquêter sur le fonctionnement, la gestion ou
l’administration de tout établissement pénitentiaire ou toute question connexe
ou annexe et de lui en rendre compte.
2) Aux
fins desdites enquêtes, les membres de la Commission créée en vertu de la
sous-section 1 jouissent des pouvoirs, droits et privilèges conférés aux
Directeurs par la loi sur les enquêtes et (…) par la Commission créée en
application de cette section, ainsi qu’à toute personne invitée à comparaître
devant eux pour témoigner ou faisant une déposition devant eux”.
154. En vertu du titre IV de
la loi sur les prisons*, le Ministre chargé
des établissements pénitentiaires nomme les médecins et définit leurs
obligations. Les sections de ce titre traitent de la santé des détenus d’une
manière générale.
155. La section 28 de la loi
dispose que “aucun fonctionnaire subalterne ne doit punir un détenu s’il n’en a
reçu l’ordre légitime du Directeur ou d’un fonctionnaire responsable”.
156. En outre, aux termes de la
section 43 h) du titre VII, “tout fonctionnaire auxiliaire ou
subalterne enfreint la discipline s’il exerce son autorité de manière
illégitime ou injustifiée, en d’autres termes, s’il recourt arbitrairement à la
violence à l’encontre d’un détenu ou de toute autre personne qu’il est amené à
côtoyer dans l’exercice de ses fonctions”.
157. La section 58 du
titre VIII de la loi dispose que:
“Chaque détenu est fouillé au moment de son
admission, puis chaque fois qu’une telle mesure est prescrite, par un gardien
de prison du même sexe et jamais en présence d’une personne du sexe opposé.
Tout article prohibé lui est ôté”.
Cette disposition vise à éviter un traitement dégradant.
158. La section 60 du titre IX
de la loi sur les prisons prévoit que les détenus sont séparés par sexe afin
d’éviter, dans la mesure du possible, que des personnes de sexe opposé ne se
voient ou ne communiquent entre elles. La sous-section 2 définit en outre
pour chaque sexe les catégories suivantes de condamnés et de prévenus:
a) Mineurs;
b) Adultes;
c) Délinquants primaires;
d) Récidivistes;
e) Détenus souffrant d’aliénation mentale supposée ou avérée;
f) Autres catégories définies par le Directeur.
159. La section 71 habilite
tout fonctionnaire responsable à ordonner, sur avis médical, le transfèrement à
l’hôpital de tout détenu gravement malade. En cas d’urgence, le fonctionnaire
responsable n’est pas tenu d’attendre l’avis du médecin. Cette disposition
garantit donc une prise en charge rapide des détenus en cas de maladie grave.
Des mesures spéciales, motivées notamment par la gravité de l’infraction ayant
donné lieu à l’incarcération, peuvent être prises pour assurer la sécurité du
détenu pendant son traitement (voir le titre IX de la loi sur les
prisons).
160. Outre la loi sur les prisons,
un Règlement des prisons a été élaboré en vertu de la même loi afin d’éviter
que les personnes incarcérées ne subissent de peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants. Les dispositions pertinentes de ce Règlement sont les
suivantes:
“Règle 40‑1). Le médecin ou son subordonné:
a) examine,
si possible, chaque détenu avant que celui-ci n’exécute le travail qui lui a
été assigné;
b) examine
chaque détenu condamné à l’isolement ou à un régime alimentaire restreint pour
avoir enfreint le règlement pénitentiaire, et certifie par écrit s’il estime ou
non que le détenu peut subir ces sanctions sans préjudice grave pour sa santé;
2) Après
tout examen médical pratiqué en application de la section 18 de la loi, le
médecin note dans le dossier du détenu:
a) l’état
de santé du détenu,
b) si ce
dernier a été vacciné contre la variole ou a contracté la maladie par le passé,
c) toute
autre information qu’il juge nécessaire de consigner.
3) Après
avoir examiné un détenu, le médecin indique dans le dossier de l’intéressé s’il
est apte au travail ou s’il convient d’adapter le type de tâche qui peut lui
être assignée ou d’y apporter des restrictions”.
“Règle 43. Lorsqu’il estime devoir, pour des raisons
médicales, attirer l’attention du fonctionnaire responsable sur le cas d’un
détenu (ne relevant pas de la Règle 42), le médecin le lui notifie par écrit et
formule toute recommandation qu’il juge nécessaire en ce qui concerne la
discipline, le traitement réservé au détenu, l’augmentation de sa ration
alimentaire ou la modification de son régime alimentaire ou encore la
fourniture d’articles supplémentaires ou de substitution”.
“Règle 45. Lorsque le médecin estime:
a) que le
maintien en détention risque de mettre en péril la vie d’un détenu;
b) qu’un
détenu malade ne survivra pas à la peine qu’il doit purger;
c) qu’un
détenu est dans l’incapacité totale et permanente de supporter le régime
pénitentiaire;
d) il
soumet par écrit un avis motivé au fonctionnaire responsable, qui le fait tenir
au Directeur”.
“Règle 47. Au moins une fois par mois, le médecin:
a) inspecte
chaque quartier de l’établissement pénitentiaire en prêtant une attention
particulière à l’hygiène des locaux, à la santé des détenus ainsi qu’à la
quantité, la qualité et la préparation des aliments;
b) contrôle
le poids des détenus”.
“Règle 51-1. En cas d’apparition de maladies
infectieuses ou contagieuses dans un établissement pénitentiaire, le médecin
donne au fonctionnaire responsable des consignes écrites en vue:
a) d’isoler
les malades;
b) de
nettoyer et de désinfecter les pièces ou cellules des malades, de nettoyer, de
désinfecter ou de détruire, si nécessaire, les vêtements et la literie des
malades;
c) et le
fonctionnaire responsable applique ces mesures sur-le-champ.
2) Le
médecin signale immédiatement au fonctionnaire responsable toute épidémie ou
maladie extrêmement infectieuse ou contagieuse ou tout autre événement
affectant la santé des détenus et exigeant que soient prises des mesures
exceptionnelles”.
“Règle 59-1. Le surveillant chef visite et inspecte
l’ensemble de l’établissement et voit chaque détenu au moins deux fois par
jour, faute de quoi il indique, dans le registre prévu à cet effet, dans quelle
mesure et pour quelle(s) raison(s) il n’a pas observé cette règle.
2) Le
surveillant chef s’assure de la propreté de l’établissement, vérifie que tout y
est en ordre et que toutes les consignes de sécurité y sont respectées”.
“Règle 73. Le surveillant chef exécute toutes les
consignes relatives au régime alimentaire ou au traitement des détenus que le
médecin lui transmet par écrit”.
“Règle 76. Le surveillant chef informe le
fonctionnaire responsable:
a) de tout
événement dont il a connaissance et qui est susceptible de porter atteinte à la
sécurité ou à la santé des détenus, de perturber la discipline ou le travail
des surveillants;
b) de
toute autre question dont il a connaissance et sur laquelle il estime devoir
attirer l’attention du fonctionnaire responsable”.
“Règle 86-1. Aucun fonctionnaire subalterne ne doit
pénétrer la nuit dans la cellule d’un détenu sans être accompagné d’un autre
fonctionnaire, sauf nécessité impérieuse, auquel cas il en rend compte
immédiatement au fonctionnaire qui est responsable de l’établissement au moment
des faits.
2) Aucun
fonctionnaire de sexe masculin ne doit pénétrer dans la section des femmes sans
être accompagné d’un membre féminin du personnel”.
“Règle 88. Tout surveillant subalterne signale sans
retard au surveillant chef le nom des détenus qui souhaitent le voir ou
formuler une plainte ou une demande”.
“Règle 89. Chaque fonctionnaire subalterne est tenu
d’empêcher les détenus placés sous sa surveillance de s’enfuir et de nuire à
eux-mêmes ou à autrui. À cet effet, il compte ceux-ci au moins toutes les
demi-heures, notamment au moment où:
a) la
garde d’un groupe de détenus lui est confiée;
b) il est
relevé par un autre fonctionnaire;
c) il
quitte un bâtiment ou son poste alors que des détenus sont sous sa garde”.
“Règle 94. Chaque surveillant attire l’attention du
fonctionnaire responsable ou du surveillant chef sur tout détenu dont l’état de
santé physique ou mental lui semble exiger un avis et des soins particuliers”.
“Règle 103-1. Chaque détenu prend un bain lors de
son admission dans l’établissement pénitentiaire puis en fonction des
dispositions en vigueur.
2) Si
possible, le fonctionnaire responsable fait peser chaque détenu immédiatement
après son admission dans un établissement pénitentiaire puis tous les mois.
3) Le
poids d’un détenu, relevé chaque fois qu’il est pesé en application de
l’alinéa 2, est noté dans son dossier ainsi que dans les registres
prescrits par le Directeur.
4) Le
fonctionnaire responsable signale au médecin toute variation importante du
poids d’un détenu”.
“Règle 141‑1. Les plaintes ou les demandes
sont adressées à un juge inspecteur, à un visiteur officiel, au Directeur, au
fonctionnaire responsable ou au surveillant chef – à la surveillante chef
pour les femmes. Seuls les cas de maladie peuvent être signalés à des
fonctionnaires subalternes.
2) Le
fonctionnaire responsable prend les dispositions nécessaires pour que le
fonctionnaire à qui un détenu indique qu’il souhaite voir le Directeur, un
visiteur officiel ou un juge inspecteur enregistre cette demande et la lui
transmette sans retard. Il en informe le Directeur, le visiteur officiel ou le
juge inspecteur lorsqu’ils visitent l’établissement.
3) Toutes
les plaintes et demandes formulées par les détenus sont entendues ou traitées,
tous les jours sauf le dimanche et les jours fériés, par le fonctionnaire
responsable qui note dans le registre prévu à cet effet les mesures prises dans
chaque cas”.
“Règle 166. Un détenu en détention provisoire ou en
attente de jugement a le droit, s’il l’estime nécessaire à sa défense, de voir,
à une heure raisonnable, un médecin de son choix inscrit au registre, sous la
surveillance mais hors d’écoute du fonctionnaire responsable ou de tout gardien
que celui-ci aura désigné à cet effet”.
“Règle 170‑1. Tout détenu condamné à un régime
alimentaire restreint pour avoir enfreint le règlement pénitentiaire est
examiné par le médecin qui certifie, préalablement à l’exécution de la
sanction, que cette dernière est compatible avec l’état de santé du détenu.
2) Un
détenu ne doit pas être condamné à un régime alimentaire restreint dans les
vingt-quatre heures qui précèdent le jour de sa libération ni, si possible, la
veille de sa comparution devant un tribunal”.
“Règle 172. Lorsqu’un détenu est condamné à un
châtiment corporel, le médecin donne les instructions nécessaires pour éviter
que l’état de santé du détenu n’en pâtisse et le fonctionnaire responsable
applique ces instructions”.
Règle 173‑1. Aux fins de la
sous-section 5 de la section 102 de la loi:
a) les
verges utilisées pour infliger un châtiment corporel sont en rotin et:
i) n’excèdent pas 90 cm de long et
1 cm de diamètre si le détenu est âgé de moins de 19 ans;
ii) n’excèdent pas 1,20 m de long et
1,25 cm de diamètre au maximum si le détenu est âgé de 19 ans ou plus;
b) le
châtiment corporel est infligé comme suit:
i) une couverture ou autre protection
similaire est placée sur les reins du détenu, au-dessus des fesses;
ii) un morceau de tissu, plongé dans l’eau
puis essoré, est noué sur les fesses du détenu;
iii) les coups sont administrés de côté sur les
fesses du détenu et en aucun cas sur son dos.
2) Aucun
châtiment corporel ne doit être infligé à un détenu en présence d’un ou
plusieurs codétenus”.
“Règle 180‑1. Aucun moyen de contention ne
doit être utilisé à titre de sanction.
2) Aucun
détenu n’est entravé à moins qu’il ne faille le maîtriser ou l’empêcher de
s’évader. Seuls doivent être utilisés les types d’entraves approuvés par le
Directeur.
3) Le
fonctionnaire responsable peut ordonner que des détenus soient menottés pendant
leur transfèrement d’un lieu à un autre, étant entendu toutefois qu’il est
strictement interdit de leur faire porter des fers.
4) Le
fonctionnaire responsable peut autoriser l’usage de moyens de contention s’il
estime qu’un détenu peut être dangereux pour autrui ou pour lui-même ou est
susceptible de vouloir s’enfuir. Des informations circonstanciées sur chaque
cas sont portées dans le registre du fonctionnaire responsable et dans celui du
surveillant chef ainsi que dans le registre des moyens de contention. Le
médecin et le Directeur en sont immédiatement informés, étant entendu que la
durée d’utilisation de tout moyen de contention imposé en vertu du présent
alinéa ne peut excéder vingt-quatre heures, à moins que le Directeur n’ait
donné son assentiment et ne l’ait confirmé par écrit.
5) Lorsque
des moyens de contention sont utilisés pendant plus de vingt-quatre heures, le
médecin délivre au fonctionnaire responsable un certificat indiquant si l’état
de santé du détenu est compatible avec un tel traitement. L’assentiment écrit
mentionné à l’alinéa 4 et le certificat médical délivré en application du
présent alinéa sont conservés par le fonctionnaire responsable, qui décide s’il
convient d’entraver le détenu au-delà de vingt-quatre heures”.
“Règle 210‑1. Ni le fonctionnaire responsable
ni son subordonné immédiat n’accompagnent un juge inspecteur ou un visiteur
officiel dans sa tournée. En revanche, ils leur indiquent quels détenus ont
demandé à les voir, leur prêtent toute l’assistance requise pendant l’inspection
et chargent un surveillant de les accompagner.
2) Seuls
un surveillant ou un membre du personnel de l’établissement pénitentiaire sont
autorisés à accompagner un juge inspecteur ou un visiteur officiel pendant leur
tournée.
3) Une
copie des observations du juge inspecteur accompagnée des annotations
éventuelles du fonctionnaire responsable est transmise au magistrat résident de
la juridiction dont relève l’établissement pénitentiaire ainsi qu’au Directeur
immédiatement après l’inspection.
4) Une
copie des observations du visiteur officiel accompagnée des annotations
éventuelles du fonctionnaire responsable est transmise au Directeur
immédiatement après l’inspection.”
161. Le Code de procédure pénale contient
d’autres dispositions visant à prévenir les peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants (chap. 88). En vertu de la section 21, toute
personne arrêtée ne doit être menottée ou entravée que dans la mesure
nécessaire pour l’empêcher de fuir. La section 24 dispose que les femmes
ne peuvent être fouillées que par des femmes, dans le strict respect des normes
de la décence.
162. La section 18 a) 1 de la loi sur la police zambienne
(telle qu’amendée) contient également des dispositions visant à prévenir les
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le fonctionnaire
responsable d’un commissariat ou d’un poste de police ou tout autre agent
habilité par l’inspecteur général peut désigner un certain nombre d’officiers
de police judiciaire parmi les policiers des commissariats ou des postes de
police.
163. De janvier 1998 à mars 2000,
aucun détenu n’a subi de châtiment corporel pour avoir enfreint la discipline
ou avoir contrevenu au Règlement des prisons. Au total, neuf détenus ont été
soumis à un régime alimentaire restreint pour avoir enfreint la loi sur les
prisons.
164. Aux termes des dispositions de
la section 18 a) 2, le fonctionnaire responsable est tenu de s’assurer de
la présence d’au moins un officier de police judiciaire (homme ou femme) dans
les locaux du commissariat ou du poste de police. Cet officier est chargé de
veiller à ce que les conditions suivantes soient respectées:
“1. a) Toute personne placée en garde à vue
reçoit un traitement décent et humain;
b) Toute personne placée en garde à vue a
librement accès aux soins médicaux dont elle a besoin;
c) Les cellules ou autres locaux où sont
placées les personnes en garde à vue sont propres et salubres;
d) Les installations sanitaires et autres
dont les personnes en garde à vue sont amenées à se servir sont conformes aux
normes applicables en matière d’hygiène.
2. Toute
personne appréhendée est présentée à l’officier de police judiciaire avant
d’être placée en garde à vue.
3. Lorsqu’une
personne est présentée à l’officier de police judiciaire aux termes de l’alinéa
susmentionné:
a) celui-ci
note le nom de cette personne, l’infraction pour laquelle elle a été arrêtée,
ainsi que son état ou sa situation;
b) il
formule les recommandations nécessaires pour lui assurer des conditions de
détention décentes, y compris en ce qui concerne l’octroi de soins médicaux.”
Mesures administratives
165. Afin d’éviter que les
personnes placées en garde à vue ne subissent de peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants, un certain nombre de mesures administratives ont été
prises, notamment:
a) Pour lutter contre la surpopulation carcérale, des centres
sont actuellement mis en place en plein air;
b) Les autorités en matière d’immigration ont adopté pour
pratique de délivrer aux immigrés clandestins des permis temporaires qui leur
permettent de faire de courts séjours en Zambie. Le cas échéant, les familles
de ces immigrants peuvent mettre à leur disposition des moyens, notamment
financiers, pour les aider à obtenir leur remise en liberté. Le Service de
l’immigration fournit lui aussi un appui logistique à cet effet. Les transports
publics sont également employés pour reconduire les immigrés clandestins aux
frontières;
c) Pour pallier l’insuffisance des rations et la mauvaise qualité
de la nourriture, les autorités pénitentiaires autorisent les détenus à se
faire envoyer des vivres par des amis ou des proches. Par ailleurs, des terres
ont été mises en culture pour approvisionner les prisons;
d) Dans certains endroits, de nouveaux postes de police sont
actuellement construits avec l’aide des collectivités. Ces postes devraient
notamment être dotés de meilleurs installations sanitaires pour les détenus et
lieux de repos pour les officiers de police;
e) Des salles communes sont actuellement aménagées pour pouvoir
séparer les adultes et les mineurs malgré la surpopulation carcérale;
f) Lorsque l’établissement n’est pas équipé pour accueillir des
femmes, celles qui sont placées en détention provisoire sont libérées sous
caution.
Mesures judiciaires
166. Des magistrats zambiens ont
réagi contre certaines dispositions juridiques dont ils estiment qu’elles
donnent lieu à des peines inhumaines ou dégradantes. Dans l’affaire John Banda c. Ministère public, le
demandeur a plaidé coupable et a été reconnu coupable de dommage matériel
volontaire. Outre une peine de 13 mois de prison dont 12 mois avec
sursis, il a été condamné à recevoir dix coups de verge en vertu des
dispositions des sections 24 c) et 27 du Code pénal relatives aux
châtiments corporels. Le juge E. E. Chulu, estimant que ces dispositions
étaient contraires à la Constitution, a déclaré ce qui suit:
“Étant amené à statuer sur le texte de loi dont je
suis saisi, je tiens à préciser d’emblée que la Constitution de la République
zambienne – qui est une
Constitution écrite – est la loi suprême du pays. C’est par conséquent de ce
texte que tous les autres instruments tirent force de loi et ils lui sont tous
subordonnés. Dans ces conditions, on ne saurait contester qu’à moins que la
Constitution ne soit modifiée expressément à cette fin, toute loi dont les
dispositions contreviennent à la Constitution est nulle et non avenue.
L’article 15 dispose en
termes extrêmement clairs et sans aucune ambiguïté que nul ne sera soumis à la
torture, ni à des peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants. Il ne fait aucun doute que les dispositions
des sections 24 c) et 27 du Code pénal, qui autorisent le châtiment
corporel des délinquants, contreviennent en tous points avec les dispositions
susmentionnées de l’article 15 de la Constitution.”
167. Le juge
Chulu a en outre déclaré qu’il conviendrait de supprimer du Code pénal les
sections 24 c) et 27, dont les dispositions sont contraires à la
Constitution.
168. En
outre, pour réduire la surpopulation carcérale et, partant, remédier aux
conditions inhumaines qui règnent dans les prisons, les tribunaux zambiens
privilégient les travaux d’intérêt général, la mise en liberté conditionnelle
et les amendes plutôt que les peines privatives de liberté, en particulier pour
les infractions mineures.
Éléments à prendre en
compte et difficultés rencontrées
169. L’État a
pris des mesures législatives, administratives et judiciaires pour prévenir les
actes ou omissions constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants, mais plusieurs éléments rendent difficile l’application de ces
mesures, notamment:
a) Le jugement rendu dans l’affaire John Banda, cité plus haut, par lequel
les châtiments corporels ont été déclarés illégaux au motif qu’ils
contreviennent aux dispositions de l’article 15 de la Constitution, pose
des problèmes d’application car la décision rendue ne constitue pas encore un
principe juridique établi. Les sections 24 c) et 27 du Code pénal qui
autorisent le recours aux châtiments corporels n’ont pas encore été supprimés
et, comme indiqué plus haut, le Règlement des prisons prévoit toujours des
châtiments de ce type. En outre, les magistrats n’ont pas nécessairement
connaissance de la décision rendue, surtout dans les zones rurales, où
l’information judiciaire circule mal;
b) La surpopulation carcérale, due au manque
d’établissements pénitentiaires dans le pays, rend les conditions de détention
inhumaines. Il est donc difficile dans la pratique d’appliquer les dispositions
de la Règle 51.1 du Règlement des prisons citée plus haut (voir annexe 1);
c) La surpopulation carcérale, due au manque
d’établissements pénitentiaires dans le pays, rend les conditions de détention
inhumaines (voir annexes 1 et 2);
d) Faute de ressources, l’État n’a pu ni
construire davantage d’établissements pénitentiaires, ni améliorer la qualité
des infrastructures, ni assurer l’entretien des établissements existants. En
conséquence, la surpopulation carcérale contribue à la propagation des maladies
transmissibles comme la tuberculose. Les pouvoirs publics ne sont pas non plus
en mesure de mettre en place de centres de soins adéquats. La plupart des
dispensaires des établissements pénitentiaires ne disposent pas de réserves
suffisantes de médicaments et se trouvent parfois à des dizaines de kilomètres
du centre de soins le plus proche. Les repas et les uniformes ne répondent pas
aux normes et les sanitaires sont insuffisants dans la plupart des
établissements (voir annexe 3).
Liste des annexes *
ANNEXE 1: TAUX D’OCCUPATION
DES PRISONS
Table A: Province de la
Copperbelt
Table B: Province du centre
Table C: Province
nord-ouest
Table D: Province est
Table E: Province ouest
Table F: Province sud
Table G: Province de Lusaka
Table H: Province nord
Table I: Province de
Luapula
ANNEXE 2: CONDITIONS DANS LES POSTES DE POLICE
Table A: Province
nord-ouest
Table B: Province ouest
Table C: Province sud
Table D: Province nord
Table E: Province de
Luapula
ANNEXE
3: CONDITIONS SANITAIRES DANS LES
PRISONS
Table A: Province de la
Copperbelt
Table B: Province du centre
Table C: Province
nord-ouest
Table D: Province est
Table E: Province ouest
Table F: Province sud
Table G: Province de Lusaka
Table H: Province nord
Table I: Province de
Luapula
Liste des annexes (suite)
ANNEXE 4: TAUX D’ENCADREMENT DES DÉTENUS
Table A: Province
nord-ouest
Table B: Province est
Table C: Province sud
Table D: Province ouest
Table E: Province de Lusaka
Table F: Province nord
Table G: Province de
Luapula
ANNEXE
5: NIVEAUX DE FINANCEMENT
ANNEXE
6: DATES DE L’ATELIER DU COMITÉ
INTERMINISTÉRIEL
ANNEXE 7:
LOI Nº 14 DE 1999 PORTANT MODIFICATION DE LA LOI SUR LA POLICE ZAMBIENNE
ANNEXE
8: AFFAIRES