Comité contre la Torture, Examen des rapports présentés par les États parties en application de l'article 19 de la Convention, Monaco, U.N. Doc. CAT/C/21/Add.1 (1994).
Rapports initiaux des Etats parties prévus en 1993
Additif
MONACO
[14 mars 1994]
1. La Constitution du 17 décembre 1962 affirme solennellement son
attachement aux valeurs défendues par la Convention et proclame notamment
:
- article 2, alinéa 2 : "La Principauté
est un Etat de droit attaché au respect des libertés et droits fondamentaux";
- article 19, alinéa 1 : "La
liberté et la sûreté individuelles sont garanties. Nul ne peut être poursuivi
que dans les cas prévus par la loi, devant les juges qu'elle désigne et
dans la forme qu'elle prescrit";
- article 20, alinéa 1 : "Nulle
peine ne peut être établie ni appliquée qu'en vertu des lois";
- article 20, alinéa 2 : "Les
lois pénales doivent assurer le respect de la personnalité et de la dignité
humaines. Nul ne peut être soumis à des traitements cruels, inhumains ou
dégradants".
Ces principes fondamentaux trouvent leur application dans le Code pénal
et le Code de procédure pénale monégasque.
2. La loi pénale interdit selon les définitions de la Convention (art.
premier et 16), à tout "agent
de la fonction publique ou à toute personne agissant à titre officiel
..." de pratiquer des actes de torture, c'est-à-dire ceux par lesquels "une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales sont intentionnellement
infligées à une personne aux fins notamment d'obtenir d'elle ... des
renseignements ou des preuves, de la punir d'un acte qu'elle ... a commis
ou est soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression
sur elle ..., ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination
quelle qu'elle soit", ou de se livrer à d'"autres actes constitutifs de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants".
3. Au chapitre II du Livre III du Code pénal, intitulé "Attentats
à la liberté" :
a) L'article 72 prévoit la dégradation civique d'un fonctionnaire public
ou agent du gouvernement ayant ordonné ou fait quelque acte arbitraire
et attentoire soit à la liberté individuelle, soit aux lois et institutions
de la Principauté;
b) L'article 74 sanctionne de la dégradation civique les fonctionnaires
publics chargés de la police administrative ou judiciaire qui auront
refusé ou négligé de déférer à une réclamation légale tendant à constater
les détentions arbitraires, et qui ne justifient pas les avoir dénoncées
à l'autorité supérieure.
4. Au paragraphe V du chapitre III du Code pénal, intitulé : "des
abus d'autorité" :
a) L'article 123 punit d'emprisonnement tout fonctionnaire de l'ordre administratif
ou judiciaire, tout officier de justice ou de police, tout commandant
ou agent de la force publique coupable d'une violation de domicile;
b) Les articles 126 et 137 aggravent les peines encourues pour crimes ou
délits commis par un fonctionnaire, un officier public, un exécuteur
de mandats de justice ou jugements, un commandant en chef ou en sous
ordre de la force publique ayant sans motif légitime, dans l'exercice
ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, usé ou fait user de violences
envers les personnes; les crimes et délits contre les personnes susceptibles
de dégénérer en actes de torture ou de constituer des traitements cruels,
sont : le meurtre, l'assassinat, l'empoisonnement, les menaces de mort
ou d'atteintes à l'intégrité physique, les diverses sortes de coups et
blessures volontaires (selon qu'il en est résulté une incapacité de travail
personnel, une mutilation, l'amputation, la cécité, une infirmité permanente
grave ou la mort), les attentats aux moeurs, les arrestations illégales
et séquestrations, celles-ci pouvant être accompagnées de menaces de
mort ou de tortures.
5. Outre les auteurs de ces infractions, sont également punissables, par
l'effet de la complicité (art. 41 et 42 du Code pénal), ceux qui par
dons, promesses, menaces, abus d'autorité ou de pouvoir auront provoqué
à ces actions ou donné des instructions pour les commettre, ceux qui
auront procuré les instruments servant à ces actions, et ceux qui auront
aidé ou assisté les auteurs dans la préparation ou la perpétration.
6. La procédure pénale monégasque instaure un strict respect des libertés
et droits fondamentaux, plus spécifiquement des droits de la défense.
Les crimes et délits ci-dessus énumérés, imputables à des agents de la
fonction publique, sont, le cas échéant sur la plainte et à l'initiative
de toute personne s'estimant victime, vérifiés par une enquête immédiate,
poursuivis selon les règles normales et jugés par les juridictions de
droit commun (tribunal criminel, tribunal correctionnel) dans un constant
souci d'impartialité et de contrôle de la qualité des preuves. Les peines
prononcées (essentiellement emprisonnement et amende) excluent les châtiments
corporels et tous traitements cruels, inhumains ou dégradants.
7. L'article 14 de la Convention édicte que tout Etat partie garantit à
la victime d'un acte de torture, le droit d'obtenir réparation et d'être
indemnisée équitablement. Le système juridique monégasque organise cette
réparation sous la forme de dommages-intérêts réclamés à l'auteur de
l'infraction.
8. L'article 8 de la Convention traite de l'extradition, en précisant que
les infractions liées à la torture sont de plein droit comprises dans
tout traité d'extradition conclu entre Etats parties ou bien, en l'absence
d'un traité, sont considérés comme cas d'extradition. Ces dispositions
sont identiques à celles contenues dans le Protocole de Genève du 25
mars 1972 portant amendement de la Convention unique sur les stupéfiants
du 30 mars 1961, auquel Monaco a adhéré.
9. En conclusion, il apparaît que l'actuelle législation monégasque, s'inspire
des mêmes idéaux de dignité de la personne humaine et du respect universel
et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales que ceux
énoncés par la Convention des Nations Unies contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
10. L'application en Principauté de ces principes ne soulève pas de difficultés
particulières.